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Citations sur Un balcon en forêt (84)

[...] on se sentait dans ce désert d'arbres haut juché au-dessus de la Meuse comme sur un toit dont on eût retiré l'échelle.
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Le silence du lieu devenait alors presque magique.Un sentiment bizarre l'envahissait chaque fois qu'il allumait sa cigarette dans ce sous-bois perdu; il entrait dans un monde racheté,lavé de l'homme,collé à son ciel d'étoiles de ce même soulèvement pâmé qu'ont les océans vides.《 il n'y a que moi au monde 》 ,se disait -il avec une allégresse qui l'emportait.( page 97) ....

....Une lune sauvage voguait très haut au-dessus des bois noirs;les fumées des feux de charbonnier que le froid de la nuit rabattait et alourdissait semaient le cirque plat des bois de larges flaques cendreuses qui tournaient lentement flottées sur la nuit ,et se soulevaient parfois sur leurs bords avec la molle ondulation circulaire des méduses. Grange regardait le front tiré par l'attention et par le sentiment d'un suspens étrange. Il y avait un charme puissant à se tenir là, si longtemps après que minuit avait sonné aux églises de la terre,sur cette gâtine sans lieu épaissement saucé de flaques de brume et de toute mouillée de la sueur confuse des rêves, à l'heure où les vapeurs sortaient des bois comme des esprits.
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Des blocs avait été attaqués au bord de la rivière. L'homme des Buttés affirmait que les avions piquaient droit sur l'objectif, pour poser leurs bombes, en déclenchant une espèce de sirène. La sirène surtout visiblement impressionnait les hommes. Elle les scandalisait. Cette attrape, cette mauvaise farce lugubre qui bernait la peur au moment de pulvériser, heurtait en eux un code d'honneur obscur. C'était le symbole d'un génie dépravé, la quintessence du coup bas, de la prise défendue.
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Il entendit le chien aboyer deux ou trois fois encore, puis le cri de la hulotte à la lisière toute proche des taillis, puis il n'entendit plus rien : la terre autour de lui était morte comme une plaine de neige. La vie retombait à ce silence douceâtre de prairie d'asphodèles, plein du léger froissement du sang contre l'oreille, comme au fond d'un coquillage le bruit de la mer qu'on n'atteindra jamais.
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Jamais Grange n’avait eu comme ce soir le sentiment d’habiter une forêt perdue: toute l’immensité de l’Ardenne respirait dans cette clairière de fantômes, comme le cœur d’une forêt magique palpite autour de sa fontaine.
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Quand il revenait de Chinon, s'attardant au long de la Vienne du côté bâti, mis en belle humeur par ses petits déjeuners capiteux de vin et de rillettes, il regardait les secrètes maisons de campagne à l'aise derrière leur grille fermée et leur parterre vieillot piqué des quenouilles défleuries des passe-roses -- maisons mariées plus que d'autres à l'heure qu'il est, épanouies calmement dans la douce lumière mousseuse, pareilles à une femme au jardin.

[Julien GRACQ, "Un balcon en forêt", 1958, librairie José Corti, pages 144-145]
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Ce fut vers la fin de décembre que la première neige tomba sur l’Ardenne. Quand Grange se réveilla, un jour blanc et sans âge qui suintait de la terre cotonnait sur le plafond l’ombre des croisées ; mais sa première impression fut moins celle de l’éclairage insolite que d’un suspens anormal du temps : il crut d’abord que son réveil s’était arrêté ; la chambre, la maison entière semblaient planer sur une longue glissade de silence – un silence douillet et sapide de cloître, qui ne s’arrêtait plus Il se leva, vit par la fenêtre la forêt blanche à perte de vue, et se recoucha dans la chambre quiète avec un contentement qui lui faisait cligner les yeux. Le silence respirait autour de lui plus subtil sous cette lumière luxueuse. Le temps faisait halte : pour les habitants du Toit, cette neige un peu fée qui allait fermer les routes ouvrait le temps des grandes vacance
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Avant de partir, il touchait seulement de ses doigts le creux de la main un peu moite que dans son sommeil elle tendait ouverte, la paume tournée vers le haut dans le noir, pour on ne savait quel consentement aveugle qui le laissait pacifié.
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On dormait là comme les passagers dans l'embellie des nuits chaudes, sur le pont tendu de ses plages de toile, qui font route vers les mers grises et tâchent d'oublier que le vent un jour fraîchira.

p.25-26.
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" Gardiens du bois,
Gardiens plutôt du sommeil :
Veillez du moins à l'aurore. "

Richard WAGNER : "Parsifal"

[En épigraphe de "Un balcon en forêt" de Julien GRACQ, page 7 de l'édition Corti, 1958]
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