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sur 171 notes
Oh Marie, si tu savais…
(tous ces mâles, que l'on effraie).

Exemple type de la « connue-méconnue », Marie de France est généralement considérée comme la première écrivaine française, précurseure de toutes nos auteures. Et paradoxalement, c'est une Américaine qui s'y colle pour nous livrer sa bio.

Enfin bio… Dans Matrix - traduit par Carine Chichereau - Lauren Groff nous propose plutôt le récit romancé de la vie incroyable de Marie, bâtarde royale née au XIIe siècle et élevée dans la province du Maine. Chassée de chez elle puis de la cour d'Angleterre par la reine Aliénor, elle échoue dans une abbaye anglaise dont elle devient prieure puis abbesse.

D'abord meurtrie d'être délaissée par Aliénor dans un domaine où ne règne que la misère, la malefaim et la maltraitance, Marie accepte son sort et entreprend de redresser son abbaye : récupération des loyers impayés, mise au pas des fermiers récalcitrants, ambitieuses plantations et indépendance revendiquée.

Ni belle, ni laide, Marie en impose par son physique hors norme : « Elle était si grande que c'en était obscène. Trois têtes de plus qu'une femme normale, le sommet du crâne frôlant les poutres, tout en jambes comme un héron ».

Passant de vingt à une centaine de nonnes autant dévolues au travail de bâtisseuses qu'à la prière, l'abbaye de Marie va devenir un symbole de prospérité en Angleterre, suscitant la jalousie des hommes et la méfiance des hautes autorités ecclésiastiques.

« Car il m'avait été révélé que cette abbaye de saintes femmes est l'un des sept piliers du genre humain érigés pour garder les bêtes de l'Apocalypse, furieuses, violentes, grinçantes et barbues, loin des agneaux de dieu ».

Mais ce n'est pas la gloire que recherche Marie ; plutôt l'approche de l'esprit de la Règle de son ordre : autosuffisance et dévotion. Deux principes dont l'interprétation va la conduire à isoler sa gynécée monacale jusque dans la pratique religieuse, forgeant peu à peu la matrix qui protège et développera ses soeurs.

En proie à des visions régulières, Marie n'a de cesse que de les écrire, produisant des lais dont la renommée traversera les siècles. Mais davantage que sur l'auteure et ses écrits, c'est bien sur la femme que choisit de s'attarder Lauren Groff.

Centré sur Marie, Matrix est en effet un livre de femmes, sans hommes ou presque. Une ode à la sororité avant l'heure, qui absout le péché d'Eve pour mieux l'unir à la Vierge en un symbole de l'indispensable indépendance des femmes à travers les âges.

Tour à tour apaisante, violente, juste, punitive, saphique, aspirante à la sainteté ou sorceresse, dans le doute ou inspirée, Marie lutte contre l'époque qui veut que « les femmes sont le sexe le plus fragile et le plus entaché de péché. Faible et corrompu ».
Un livre ambitieux donc, mais qui m'aura laissé sur ma faim, trop souvent à cheval entre la restitution du contexte historique, le récit biographique et la mission autoproclamée de Marie, dans un équilibre qui ne se trouve pas et un manque de souffle épique que j'attendais plus soutenu.

Reste une lecture agréable et particulièrement instructive, ou même Rouen, « cité soupçonneuse, bossue, concupiscente », trouve sa place (rien n'a changé…). Et si ce premier rendez-vous avec Lauren Groff est un peu manqué, je vais bien entendu persister : Arcadia m'attend !
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Pensant découvrir un roman historique sur la vie de Marie de France , je me suis fourvoyée dans cette histoire très "féministe" où l'on parle peu de poésie, bien loin de mes maigres connaissances sur cette poétesse du XII eme siècle et qui célébrait l'Amour courtois .

Jeune fille de 17 ans, bâtarde au sang royal, Marie est exilée par Alienor d'Aquitaine comme prieure dans une abbaye en Angleterre .
Elle a passé son enfance dans le Maine, élevée par sa mère et ses soeurs, femmes puissantes, partant pour la croisade en emmenant l'enfant .

Loin de s'enfermer dans une vie de religieuse soumise, elle fait de l'abbaye une source de richesses entrainant la suspicion et le convoitise des hommes . Elle isole l'abbaye elle-même et mène au combat physique les soeurs contre les envieux , tout en transcrivant ses visions de la Vierge et composant des lais. Les hommes sont écartés de la vie de l'abbaye comme du récit , ses compagnes sont engagées malgré elles dans cette croisade .

Je n'ai pas aimé cette vision de l'histoire de cette femme, trop engagée dans le vent du wokisme actuel, il faut bien l'avouer et loin de l'esprit chevaleresque du Moyen Âge.
L'écriture ne m'a séduite non plus, mélange de modernité et de tournures archaïques ...
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Le sacré et le profane se mêlent ici dans un ballet mystique et lumineux. Lauren Groff fusionne religion, conte, histoire et féminisme, créant un écrin au personnage de Marie de France qu'elle écrit, qu'elle tisse à partir du mystère que cette poétesse représente. L'abbaye où la jeune femme est envoyée émerge de la brume, ainsi que les décors qu'invente l'autrice, le froid humide devenant bientôt une matrice réconfortante qui donne naissance à la foi de Marie et à sa force (plus de détails : https://pamolico.wordpress.com/2023/01/31/matrix-lauren-groff/)
Lien : https://pamolico.wordpress.c..
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En l'an 1158, la jeune Marie, dix-sept ans, bâtarde et demie-soeur d'Aliénor d'Aquitaine, est envoyée par cette dernière dans un couvent en Angleterre, un endroit déshérité où les soeurs meurent de faim et de maladies diverses. Grande et peu gracieuse, mais pleine de ressources mentales, la jeune fille ne voit pourtant pas moyen d'échapper à cette assignation à devenir religieuse. Elle va donc en tirer partie et devenir la prieure respectée de l'abbaye, reconnue pour ses visions de la Vierge, visions qui lui suggèrent des améliorations à apporter au fonctionnement fruste de l'établissement religieux. La jeune fille, devenue une femme, écrit aussi des lais et des fables qu'elle envoie à sa demie-soeur ou conserve dans sa cellule. Elle sera connue comme Marie de France, première femme poétesse à écrire en français.

Ce que je peux dire à propos de Lauren Groff, c'est qu'elle réussit toujours, qu'on aime ou pas ses livres, à déstabiliser et à proposer des atmosphères très différentes les unes des autres. J'ai beaucoup apprécié les nouvelles de Floride et, dans un format roman, Les furies, sur le thème du couple, mais abandonné Arcadia, autour d'une famille dans une communauté hippie des années 60. Qu'allait-il en être cette fois ?
Tout d'abord, il ne faut pas s'attendre à une biographie historiquement irréprochable de la femme de lettres, son histoire étant de toute manière peu ébruitée et sujette à diverses hypothèses. Lauren Groff a choisi un point de vue très personnel, que je qualifierais de féministe, qui montre davantage une sororité médiévale, avec ses difficultés et ses moments d'enthousiasme, que la découverte d'une poétesse illustre.
Ceci étant posé, le roman provoque une sorte de fascination qui m'a obligée à le continuer, même si le quotidien d'une abbaye au XIIème siècle n'aurait pas eu tendance à me passionner. Quoique l'autosuffisance à laquelle parvient Marie, avec l'aide de nonnes de plus en plus nombreuses, et les ressources des fermages, ne manque pas d'intérêt, et de résonances avec d'autres lectures…
L'un des atouts de ce roman est tout d'abord le caractère très fort, entier et, d'une certaine manière visionnaire, de Marie. C'est un personnage qui ne peut pas laisser indifférent. Ensuite, ce qui m'a plu, paradoxalement, c'est une sorte de décalage, pour ne pas dire d'anachronisme, entre la vie des soeurs une fois que Marie dirige l'abbaye à sa manière, et le monde extérieur, repoussé de plus en plus loin, non sans quelques résistance.
L'écriture, sensuelle, mêlée de quelques termes médiévaux, voire de mots créés de toutes pièces, comme les noms de métiers en -ix, au lieu de générer une cacophonie, lie le tout d'une manière que j'ai trouvée équilibrée. J'adresse un coup de chapeau à Carine Chichereau pour la traduction !
C'est donc pour moi plutôt un bon cru de l'autrice américaine, dont je continuerai à suivre les parutions.
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« Elle sort de la forêt seule sur son cheval. Âgée de 17 ans, dans la froide brune de mars, Marie, qui vient de France. »

Marie, la géante.
Marie, dépourvue de grâce.
Marie, la bâtarde.

Du sang royal coule dans ses veines. Elle est le résultat des errances du roi, demie-soeur d'Alienor d'Aquitaine.

Expulsée par cette dernière, elle est contrainte à l'exil dans une abbaye d'Angleterre, jusqu'à la fin de ses jours.

Loin des hommes (absents de ce roman), elle accueille ses visions de la Vierge, dirige cette abbaye, encourage la sororité et se plonge dans sa passion pour les mots. Elle incarne l'émancipation féminine, qui si elle ne se laisse pas dominer par ses désirs, sait y succomber avec modération.

Je suis embêtée avec ce roman parce que sur le papier, c'est ma cam. Une histoire de femmes fortes. Et c'est le cas. Mais la magie n'a pas opéré. Est ce le huis-clos féminin? Je ne crois pas. le médiéval un peu fantasy ? Peut être. L'histoire de la construction de l abbaye? Sans doute.
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Une biographie imaginaire qui se donne pour ambition de plonger le lecteur dans une ambiance féministe médiévale : pourquoi pas ? J'avais beaucoup aimé La nuit des béguines, dans ce registre.
Mais Matrix ne m'aura pas embarquée, j'arrête après une centaine de pages. La préciosité du style, le flux un peu brumeux de la narration, les scènes érotiques lesbiennes, ce n'était pas pour moi.

J'étais peut être simplement contrariée par le fait que ce roman présente, la reine Aliénor qui m'a tant fait rêver enfant, comme une sacrée garce ! Je souffre apparemment du même syndrome que l'héroïne du roman...
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"Matrix" est une fascinante fiction historique qui raconte la possible vie de Marie de France, une poétesse d'expression française de la fin du XIIe siècle que je ne connaissais pas. Je me risquerais à ajouter que moins on connaît Marie de France et s'intéresse à ses écrits, moins on s'expose à être déçu par ce livre, car les références à son travail de poète sont rares et fugaces. Au lieu de cela, le roman suppose que Marie était aussi, comme le pensent certains historiens, abbesse et demi-soeur mystique du roi Henri II Plantagenêt et d'Aliénor d'Aquitaine. La Marie de Lauren Groff est une femme géante et disgracieuse, mais brillante. Considérant cette bâtarde de sang royal fruit d'un viol comme impossible à marier, Aliénor d'Aquitaine l'a envoyée loin de la cour pour être prieure dans une abbaye anglaise « sombre et misérable » où les soeurs subissent la « malemort ». Après avoir surmonté la douleur de son exil, Marie décide d'utiliser ses compétences pour redonner puissance et éclat à l'abbaye et en faire un lieu prospère. le roman se déroule sur une cinquantaine d'années au cours desquelles Marie devient abbesse, accumule de plus en plus de pouvoir et d'influence en Angleterre et utilise ce pouvoir pour tenter d'améliorer la vie des soeurs en les protégeant autant que possible de la violence des hommes.
"Matrix" est un roman étonnant dont l'un des aspects les plus curieux est justement l'absence d'hommes dans la narration. le livre parle du pouvoir des femmes et de la féminité, de l'amour qu'elles peuvent nourrir les unes pour les autres, de leur épanouissement une fois libérées des hommes et des attentes de la société. Ce récit est évidemment la vision d'une utopie féminine joyeusement homosexuelle, même si Marie utilise des méthodes de plus en plus viriles pour obtenir et garder le contrôle de son paradis visionnaire. Néanmoins, le récit offre l'occasion de réfléchir à la manière dont les femmes peuvent survivre et s'épanouir dans un monde de plus en plus violent et irrationnel.
Un autre élément du roman qui m'a plu et surpris est la façon dont la mission de Marie acquiert une sorte de sainteté qui lui revient sous forme de visions étonnantes. Arrivant à l'abbaye comme prieure, Marie semble dépourvue de vocation religieuse, mais gagne au fil du récit en ferveur et en dévotion. L'authenticité de ses apparitions de la Vierge reste ambiguë. Cherche-t-elle à contrôler ses soeurs ou est-elle réellement une mystique dont les visions sont inspirées par le Ciel ? Quoi qu'il en soit, sa détermination (ou son orgueil) à créer un sanctuaire pour les femmes, hors de portée des hommes, ne fait aucun doute. Son geste le plus provocateur consiste à créer autour de l'abbaye un vaste labyrinthe, une structure dont l'aura spirituelle camoufle presque sa fonction défensive.
J'ai apprécié également dans ce livre l'écriture sensuelle et énergique de Lauren Groff, la précision avec laquelle elle dépeint l'isolement monastique, les nombreuses maladies soudaines, le dénuement et la mort. Je tiens à souligner l'excellent travail de traduction de Carine Chichereau. Marie, l'héroïne, est féroce et formidable, redoutablement incarnée et le monde dans lequel elle vit avec ses odeurs, ses douleurs ou ses plaisirs finement décrit. Lauren Groff nous y sert de guide et sait parfaitement doser ce qu'il faut dire et ce qu'il faut taire. J'ai été étonné de constater le peu d'encre qu'elle verse par exemple pour brosser le contexte politique de l'époque. Les détails concernant la cour du roi Henri II sont omis. Ce que vous savez déjà d'Aliénor d'Aquitaine ou de la deuxième croisade (probablement peu de choses) ne sera guère amendé par la lecture de "Matrix". Mais le récit qui est le fruit d'une recherche historique approfondie m'a rappelé que je n'aurais probablement pas eu une grande espérance de vie à pareille époque.
À présent que nous sortons de périodes de quarantaine et de distanciation sociale, la lecture de ce nouveau roman de Lauren Groff sur la vie recluse d'une abbaye du XIIe siècle semble tout à fait opportune.
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An de grâce 1158. Alors que l'hiver se durcit, la Reine Aliénor chasse la jeune Marie de la cour de Westminster. C'est qu'elle y fait tâche, cette bâtarde au sang bleu, cette géante au physique ingrat venue de l'autre côté de la mer.

Envoyée contre son gré dans une abbaye abandonnée de Dieu, Marie, à peine 17 ans, est contrainte à embrasser une vie pieuse dont la devise "travail, silence et contemplation" la plonge dans un désespoir abominable.

Mais Marie, enfant du viol et rescapée des croisades, relève la tête. Son esprit court et virevolte. Fin stratège, elle dresse des plans, animée par une juste colère. Et dans l'écriture d'un premier lai, elle trouvera la matrice d'un nouvel élan.

Sous la plume détonante de Lauren Groff, Marie de France devient le porte-étendard d'une jeunesse révoltée, de femmes assoiffées de liberté, puisant dans la poésie et la sororité pour affronter leur époque si sombre et chaotique.

Une réussite.
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Bon, je vais être honnête, j'ai lu 80 pages et j'ai arrêté!
Le sujet m'intéressait,j'aime les romans historiques mais là ce n'est pas l'histoire qui m'a gêné mais le traitement littéraire.
Impossible d'accrocher ma lecture, fastidieuse au début puis confuse, cela m'a découragée.
Dés le début, j'ai eu du mal a saisir la mise en place du contexte, des ellipses dans le récit gênantes, des allers/retours passé présent mal agencés....bon j'arrête là, j'ai abandonné.
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Cinq ans après Les Furies, Lauren Groff nous entraîne au XIIe siècle, dans un couvent de nonnes en Angleterre, et réinvente la vie de la poétesse Marie de France.

Elle réussit à construire autour de cette figure fascinante une biographie pleine de problématiques d'aujourd'hui

Dans une abbaye plantée sur une île crasseuse d'Angleterre, Marie de France, « bâtarde de sang royal» est envoyée seule, à cheval et à 17 ans.


Sa colère profonde, son orgueil rebelle et la vingtaine de visions qu'elle reçoit guideront ses idéaux et ambitions radicales à travers un monde sale et violent, dont elle décide de tenir à l'écart ses filles et femmes.

"La pression de la hiérarchie sur les religieuses est quotidienne, écrasante. Marie apprend à reconnaître le pas de certains supérieurs du diocèse dans les couloirs, car ils sont chaussés de bottes, pas des sabots des femmes de l'abbaye, et dès qu'elle les entend, elle bondit et s'esquive en silence dans les coulisses, laissant Emme dans ses brumes, car après tout c'est encore elle, l'abbesse, qui doit se débrouiller avec les exigences, les règles, les pressions pour obtenir de l'argent, les requêtes sans fin pour que les moniales offrent leur temps, leurs prières, leurs efforts, toutes choses auxquelles Emme acquiesce avec affabilité, et dont elle oublie ensuite commodément d'informer Marie. "

Marie ne cessera dès lors d'aller de l'avant, pour transformer les choses, guidée par son instinct sûr.

Matrix est un un texte vivant intimiste et charnel porté par une écriture fiévreuse, mystique et sensuelle qui affranchit les femmes de leur soumission à l'ordre divin . Matrix est aussi et surtout un roman percutant sur la sororité, sur une femme qui fut sans doute l'une des premières féministes de l'histoire …Une histoire fascinante de sororité, sur le pouvoir et la foi et le désir et la frustration et la liberté.
Lien : http://www.baz-art.org/archi..
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