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EAN : 9782070769148
864 pages
Gallimard (26/09/2013)
4.56/5   18 notes
Résumé :
Thiers, Bainville, Lefebvre, Tulard. Napoléon ne manque pas de biographes. On s'en étonnerait à tort. Les hommes qui ont laissé une empreinte aussi profonde sur leur temps sont-ils si nombreux ? L'histoire de Napoléon, son souvenir, son mythe ont littéralement obsédé le XIXe siècle et une partie du XXe. Aujourd'hui, la légende a pâli, le monde a changé. L'épopée guerrière de l'Empire ne fait plus guère rêver nos contemporains, pour qui la guerre apparaît l'incarnati... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Un maître-ouvrage qui se suffirait amplement à lui-même si l'on ne se doutait qu'à ce Bonaparte, Patrice Gueniffey donnera une suite qui ne pourra que s'intituler : Napoléon.
Bien des questions défilent sous nos yeux, même l'allusion à la paternité de Marboeuf, à laquelle Gueniffey, apparemment, ne croit guère. Il y aussi l'attachement viscéral du jeune Bonaparte pour sa Corse natale, la question corse vue par ceux qui ont analysé le phénomène depuis la France en révolution, l'analyse de la rupture des Bonaparte avec Paoli, l'affaire de la prise de Toulon, l'étude bien conduite des rapports du jeune Napoléon avec les Robespierre et même un commentaire bien vu de ce qu'il pensait réellement de Maximilien Robespierre, un résumé de la mise aux arrêts-qui n'en fut visiblement pas une- de Bonaparte au moment de Thermidor, des multiples ébauches du plan de campagne d'Italie en deux ou trois phases (battre les Sardes puis les Autrichiens et enfin s'ouvrir les portes de Milan avant d'essayer de forcer le passage vers Vienne [un plan dont la genèse semble finalement bien ancienne]), une "relecture" de tous les événements qui conduisirent Bonaparte vers le pouvoir militaire, civil et politique malgré tous les obstacles dressés sur sa route, par les autres et par lui-même.
Après toutes les commémorations des bicentenaires célébrées les unes après les autres, de 1993 à 2020, et en attendant celle de 2021, qui nous rappellera la mort du grand homme, nous aurons vécu de grands moments, malgré la volonté de certains de mettre ce personnage dans l'ombre d'un passé maintenant révolu. Et la parution d'ouvrages importants : la Nouvelle Histoire de l'Empire menée à bien par Thierry Lentz, une publication plus scientifique et plus complète de la correspondance générale de Napoléon ou encore : Napoléon Dictionnaire historique" du même Thierry Lentz. Nous avons été comblés, et ce Bonaparte de Patrice Gueniffey est lui aussi du même niveau, même si l'on a l'impression qu'il ne dit pas tout et qu'il aurait pu en dire plus encore.

François Sarindar
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Nabulion, Napolione, Napulion… Quel drôle de prénom il a, ce petit officier corse que l'on peut voir arpentant les couloirs du Luxembourg et vociférant pour qu'on lui confie un commandement d'artillerie ! Et il ne paie pas de mine avec ça ! Mal habillé, maigre comme un clou, le regard brûlant et fiévreux, la voix sèche et un accent si épouvantable qu'il en est parfois incompréhensible. Si encore il savait garder profil bas… Mais non, il faut qu'il se fasse remarquer, qu'il critique haut et fort ce gouvernement calamiteux qui ne sait pas employer correctement ses talents, qu'il agite sous le nez de qui veut bien l'écouter son plan d'invasion de l'Italie. Il la veut, cette invasion ? Eh bien, il l'aura ! le voici à la tête de la très miteuse et bien mal entrainée armée d'Italie avec ordre de bouter hors des frontières une armée autrichienne supérieure en nombre et en armement.

Et là, le miracle se produit. Les miracles plutôt car le petit corse ne se contente de remporter une ou deux batailles, il vole littéralement d'un champ de bataille à un autre, accumulant les victoires à une vitesse vertigineuse. Très rapidement, sa renommée fait le tour de la France, peu habituée à un tel étalage de succès, et le nom de Napolione Buenaparte semble beaucoup moins ridicule aux oreilles patriotes. D'autant plus qu'il l'a fait franciser et se nomme maintenant Napoléon Bonaparte. Dans les rues de Paris, dans celles de Lyon, de Toulouse, de Nantes, de Marseille, la foule scande le nom de Bonaparte, des pièces de théâtre sont écrites en son honneur, on parle déjà de lui élever des statues. Et dans les couloirs du Luxembourg, les membres du Directoire commencent à suer à grosses gouttes car tous le savent à présent, du plus petit commis au plus puissant ministre : ce petit corse ira loin, très loin, bien plus loin que quiconque – philosophe, politicien, général… – pourrait jamais le prédire.

Et une nouvelle biographie de Bonaparte, une ! « Encore ? » me direz-vous et vous n'aurez pas tout à fait tort, car aucune personnalité française n'a accumulé autant de biographies que le petit général corse. Abondance de biographies signifie bien sûr abondance de points de vue et le décryptage de la vie de Bonaparte a été l'occasion de multiples prises de bec entre historiens plus ou moins renommés. Napoléon, c'est simple : on l'aime ou on le déteste. Pas ou presque pas de juste milieu. Dur, dur chemin que celui de l'amateur d'Histoire à la recherche d'une oeuvre tant soit peu objective (et pas trop assommante non plus, si possible) et je ne remercierai jamais assez mon cher bibliothécaire personnel de m'avoir sorti de sa boite magique cette excellente biographie de Patrice Gueniffey.

Celle-ci débute très bien avec une fascinante réflexion sur le travail du biographe, sur ses limites et ses difficultés, surtout quand il s'applique à une personnalité aussi controversée que celle de Napoléon Bonaparte. Loin de mener son livre tambour battant – particularité qui semble nécessaire à certains historiens pour parler de Bonaparte – Gueniffey sait prendre son temps, s'attarder sur les périodes de doute, de passage à vide qui jalonnent la vie certes trépidante du général corse. Comme il le dit lui-même, un romancier peut se permettre d'adapter son rythme à celui de son sujet, alors que la biographie est un travail de haute précision qui demande de la concentration et le sens du détail. La force de Guennifey est d'allier ce sens du détail à une grande capacité de synthétisation et d'analyse. Pas à pas, chapitre après chapitre, il parvient à nous guider dans cet énorme et sublime foutoir que fut la France post-révolutionnaire.

L'aventure fut passionnante, mais un peu épuisante, car le nombre d'informations à enregistrer est colossal et il m'est arrivée de perdre parfois pied. J'en ressors fatigué mais ravie, avec le sentiment d'en savoir un peu plus sur ce curieux grand homme que fut Napoléon – car « grand » il le fut assurément, quelle que soit la façon dont on peint le personnage : grand politicien, grand propagandiste, grand général, grand escroc, grand stratège… le premier tome de cette biographie l'abandonne au faîte de sa gloire : Premier consul d'une France sur laquelle il règne en maître absolu, bien plus puissant que ne le furent jamais les Bourbons. Jamais il ne sera aussi brillant, jamais ses extraordinaires capacités ne seront aussi bien et sainement utilisées. A partir de ce moment, il ne pourra que déchoir et glisser lentement des fastes du mythe doré vers les profondeurs de la légende noire. Mais ceci est une autre histoire et attendra la sortie du deuxième opus de Guennifey qui devrait sortir… ben, à la Saint-Glinglin, vu le temps qu'il lui a fallu pour pondre ce premier tome !
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Après avoir en avoir appris l'histoire dès mon plus jeune âge sous la forme d'une énumération de dates et de jugements à l'emporte-pièce, comment pénétrer la psychologie d'un personnage comme Napoléon Bonaparte qui a tant fait, suscitant admiration sans bornes des uns et condamnation sans appel de beaucoup d'autres.
Le Napoléon de Jean Tulard n'ayant pas répondu à mon attente, je me suis attaqué au Bonaparte de Patrice Gueniffey.
J'y ai trouvé des vues pénétrantes sur le contexte historique ; mais aussi, un portrait convaincant qui rend bien compte des ombres comme des lumières de la personnalité de Napoléon Bonaparte. J'illustre ce point de vue par une douzaine de citations.
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critiques presse (4)
LaViedesIdees
06 février 2014
Dans le premier volume de sa biographie (jusqu’en 1802), Patrice Gueniffey montre que Bonaparte fut à la fois un « roi d’un genre nouveau », un despote éclairé, un révolutionnaire et un postrévolutionnaire, toujours mû par une volonté de fer.
Lire la critique sur le site : LaViedesIdees
Lexpress
30 septembre 2013
Ce Bonaparte appartient à la catégorie rare des opus que l'on commence avec curiosité et que l'on termine à regret. On y apprend beaucoup sans jamais cesser de se divertir.
Lire la critique sur le site : Lexpress
LeFigaro
26 septembre 2013
Dans sa biographie de Napoléon Bonaparte, Patrice Gueniffey éclaire de son point de vue l'histoire d'un homme en avance sur son temps.
Lire la critique sur le site : LeFigaro
Telerama
25 septembre 2013
L'épopée du self-made-man décortiquée jusqu'en 1802. Huit cents pages magistrales qui n'omettent pas les passages à vide du petit Corse conquérant
Lire la critique sur le site : Telerama
Citations et extraits (14) Voir plus Ajouter une citation
Le mythe s’épuise à mesure que les passions qui l’ont entretenu s’éteignent : celles de la gloire, de l’héroïsme et de la guerre, celle-ci ayant été longtemps appréhendée comme une éducation à la vertu. Toute cette magie guerrière est morte avec les hécatombes du XXe siècle. Cependant, quelque chose parle encore aux imaginations modernes : la croyance, qui était déjà celle du jeune Bonaparte, et qui est la nôtre, que notre sort ne résistera pas à notre volonté. Bonaparte, c’est en quelque sorte le rêve de chacun et c’est sans doute pourquoi les asiles étaient pleins de fous qui se prenaient pour Napoléon : l’homme qui, sans ancêtres et sans nom, s’est créé lui-même à force de volonté, de travail et de talent.
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En cela, Bonaparte est bien l'anti Robespierre. C'est précisément le soin avec lequel il veilla sur les intérêts de la France propriétaire et patriarcale qui avait à la fois gagné à la Révolution et souffert qui la lui attacha pour ainsi dire jusqu'à l'écroulement du régime .
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(...) si Bonaparte veillait si jalousement à s'assurer le monopole de la décision, ce n'était pas, ou pas seulement, parce que son tempérament l'incitait à vouloir tout faire et tout contrôler; c'est aussi que la monarchie avait, sinon péri, du moins terriblement souffert de l'anarchie qui régnait à son sommet. La monarchie absolue, qui n'avait en théorie qu'une tête, en avait en réalité plusieurs. Selon le tempérament du roi, enclin ou non à s'occuper lui-même des affaires, les ministres possédaient plus ou moins de pouvoir, et comme ils ne pouvaient être partout la réalité du pouvoir descendait, par degrés, jusque dans les mains de leurs premiers commis qui furent dans bien des cas, au XVIIIème siècle, les véritables chefs de l'État, tandis que le Conseil du roi retenait de son côté une partie de la puissance pour en faire un usage qui n'était soumis à aucun véritable contrôle.
(...)
C'est, du reste, la raison pour laquelle Bonaparte veillait à doubler l'action des ministres - donc celle de la bureaucratie - par le Conseil d'État''', et celui-ci par ses ministres et par les réunions des différents conseils qu'il convoquait. Il cherchait en définitive une voie moyenne entre une monarchie absolue en droit mais qui, en réalité, avait fini par abandonner la réalité du pouvoir à ses serviteurs, et la Révolution qui, plaçant la liberté au-dessus de l'efficacité, songeait davantage à entraver l'exercice du pouvoir qu'à lui faciliter la tâche.
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Un mot vient inévitablement à l'esprit quand on évoque les méthodes de travail de Bonaparte : celui de despotisme éclairé, et nombreux sont les historiens qui ont vu dans le régime fondé en 1800 l'ultime incarnation du système politique dont les philosophes s'étaient entichés au XVIIe siècle. Ne s'étaient-ils pas enthousiasmés pour Frédéric II, pour Catherine II (...) , voyant dans l'alliance de l'autorité politique et de la raison philosophique la formule la plus favorable au progrès et à l'accomplissement de réformes qui, pour être bonnes en elles-mêmes et nécessaires, ne recueillaient pas forcément l'assentiment de la majorité ? Plus encore que Pierre le Grand, plus que le Grand Frédéric, Bonaparte figure le despote éclairé, le « souverain qui s'instruit et s'informe sur toutes les parties de sa tâche, qui emploie et consulte des hommes compétents, qui enfin réfléchit avant de décider». En France en 1800 comme en Prusse vers 1740 ou dans l'Autriche de Joseph II, il s'agissait de libérer la volonté politique au service de réformes qui, au lieu d'être réalisées par le peuple, le seraient par en haut, avec des chances de succès plus certaines et à un moindre coût.
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(...) si la restauration de la monarchie était compromise, ce n'était pas seulement la faute de Bonaparte; la situation y contribuait elle aussi. Bonaparte, (...), était condamné à mener une politique de réparation, de conciliation et de pardon, s'il ne voulait pas retomber sous la coupe des Jacobins vaincus. La France y gagnerait un répit salutaire, et Bonaparte, un soutien si fort dans l'opinion qu'il pourrait bien asseoir son pouvoir sur des bases solides et durables. Sans doute, (...), le nouveau régime n'aurait rien de libéral ; mais la masse des Français n'était-elle pas prête à troquer une liberté dont elle n'avait jamais vraiment joui depuis 1789 contre les avantages d'une vraie sécurité et la garantie de l'égalité ? Le 18 Brumaire, concluait-il, allait bientôt apparaître comme le signal d'une « métamorphose politique » aussi complète que l'avait été celle du début de la Révolution : elle verrait la destruction de « tous les dogmes de 1789 » et l'ascension d'un pouvoir fort, sans doute investi d'« une plus grande puissance pour faire le mal », mais, du même coup, d'« une plus grande indépendance pour faire le bien ».
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Videos de Patrice Gueniffey (14) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Patrice Gueniffey
Storia Voce • 8 avr. 2021 1789 : l’instant où le peuple devient citoyen?
Notre invité: Patrice Gueniffey est directeur d’études à l’EHESS et membre du Centre d’études sociologiques et politiques Raymond-Aron, grand spécialiste de la Révolution et de l'Empire. Le nombre et la raison, la Révolution française et les élections est le titre de la thèse de Patrice Gueniffey, réédité au éditions du Cerf (novembre 2020,588 pages, 24,00€).
Peu d’historiens maintiennent encore aujourd’hui que la Révolution française fut un mouvement d’émancipation du peuple à l’égard d’un roi et d’une élite corrompue. En effet, une bonne partie du peuple reste absente des décisions politiques prises par une minorité. Force aussi est de constater que la Révolution française est en partie un phénomène particulièrement violent de l’histoire de France: 1793 est-il donc la continuité ou le débordement de 1789? Cette violence n'était-elle pas le prix nécessaire pour connaître la liberté, l'égalité et la fraternité ? Là où sous l’Ancien Régime ces principes renvoyaient plutôt à des vérités philosophiques ou des principes moraux hérités du christianisme, ils deviennent les fondements de la nouvelle forme de régime : la république et la démocratie. Le suffrage est-il donc le symbole et l’heureuse conciliation des trois principes qui fondent la république ? Qu’en est-il réellement de son application pendant la Révolution ? Le 29 décembre 1789, un décret convoque les assemblées primaires de toutes leurs communes pour élire leur municipalité. En dix ans, on verra dix régimes de suffrage se succéder. Comment cette méthode politique s’est-elle mise en place ? Comment a-t-elle permis au peuple de s’exprimer concrètement ? Pourquoi le suffrage est-il un objet d’histoire ? Quelques historiens y ont consacré des travaux. Hippolyte Taine, Augustin Cochin et plus récemment Patrice Gueniffey, reçu ici par Mari-Gwenn Carichon.
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