Comme beaucoup, je pense, j'avais un vague souvenir de cet épisode peu glorieux de l'histoire des Etats-Unis où une poignée d'étudiants noirs durent affronter une foule hostile pour rentrer dans une école « de blancs ».
Vague souvenir, vague idée.
Vague idée de ce que fut la brutalité des réactions de cette société blanche sudiste toute pénétrée de la supériorité de sa race et prête à verser dans l'hystérie et la violence pour « protéger » ses enfants.
Vague idée de ce que la haine raciale décomplexée autorisait encore en 1957, au point de devoir faire intervenir l'armée pour que des enfants noirs puissent étudier dans les mêmes écoles que des enfants blancs.
Vague idée de ce que durent endurer ces neufs jeunes sans jamais broncher sous peine de donner des arguments à ceux qui guettaient le moindre faux pas.
Ce qui est poignant lorsqu'on referme ce court roman, c'est de saisir ce qu'il a fallu de maîtrise, de volonté et de courage aux « neuf de Little Rock », pour affronter l'indicible. de saisir aussi que tout un pan d'une société est prête à se dresser de la plus immonde des façons contre un autre pan par peur de perdre ses privilèges.
Anne-Lise heurtier nous raconte cette année scolaire alternant le vécu de Molly, l'une des neuf victimes, et celui de Grace, petite blanche à la vie aisée, plus préoccupée par les garçons et par son allure que par les problèmes de ségrégation.
Oui, il s'agit d'un roman jeunesse, simple, romancé, accessible, mais il est de ceux qui me font dire que les livres sont parfois des veilleuses chassant l'obscurité en ouvrant des portes sur un ailleurs, en nous permettant d'accéder à l'autre.
Je suis triste d'achever ce livre juste en ce moment. Il y a un an encore, la présence de
Barack Obama à la maison Blanche nous autorisait à croire que la marche de l'histoire allait dans le bon sens. Aujourd'hui,
Sweet Sixteen a des résonnances particulières.
À faire lire à nos enfants, plus que jamais notre monde à besoin de veilleuses…