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sur 8092 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Le challenge de l'été: lire un grand classique de la littérature française et le résumer en textos à un ami pour qui littérature rime avec ennui (et ça rime même pas). L'histoire de Jean Valjean se prête agréablement au jeu. J'en arrive à croire que Victor Hugo fait partie de ces écrivains intemporels, capables de parler à tous, avec humour, avec talent, quelle que soit la génération. Je me suis passionnée pour une histoire que je connaissais par fragments. Je me suis retrouvée idiote face à des références absconses (les notes de bas de page, tantôt aident, tantôt obscurcissent un peu plus). J'ai adoré retrouver cette écriture méticuleuse, drôle, emplie de détails, typique du dix-neuvième siècle. Un pur bonheur, à (re)découvrir. Pour échapper (ou pour compléter) la fièvre de la rentrée littéraire.
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Je termine l'année 2023 avec un sacré mastodonte... C'était toujours un peu la honte pour moi qui me proclamais fana obsessionnel de Victor Hugo mais qui n'avais jamais lu ce roman, son oeuvre parmi toutes... C'est fait, et mon appréciation de son magnus opus est bel et bien là, même si je conserverai toujours une affection toute particulière pour ses romans moins connus, notamment Les Travailleurs de la mer. Je suis très heureux de l'avoir enfin terminé, et j'ai l'impression qu'aucune adaptation cinématographique ne parviendra, à moins d'un scrupule extrême, à rendre tout ce que j'ai lu (j'ai pourtant vu il y a un moment celle avec Ventura et Bouquet, considérée comme une référence). On traverse la France de haut en bas, on commence dans le coin de Digne et d'Embrun, dans les Hautes-Alpes, on passe par Toulon et son bagne, on remonte jusqu'à Montreuil-sur-Mer, Arras, on s'égare sur les champs de bataille napoléoniens dans une des meilleures digressions de l'oeuvre de Victor Hugo et enfin, on arrive à Paris et on se balade dans le Paris du XIXe, revivant nos propres voyages dans la capitale, le tout en vivant plus de quinze années d'actions et de vie des personnages... Particulièrement celle de Jean Valjean qui m'a tant ému, quand bien même c'est très connu. J'ai pensé tout au long du roman que l'on pourrait résumer le parcours de Valjean par la formule "Breaking Good", par opposition à la série "Breaking Bad". L'abnégation à devenir bon, vertueux, généreux, toujours meilleur, quoiqu'il en coûte, jusqu'aux sacrifices ultimes...

Tout commence bien sûr avec l'Évêque de Digne, Monseigneur Bienvenu Myriel, personnage clé du roman. Les premiers chapitres qui le décrivent, lui et sa philosophie, sont magnifiques, particulièrement "Ce qu'il croyait". On reconnaît bien derrière lui l'Hugo religieux (Hugo qui a plusieurs doubles dans le roman, comme souvent), et on le trouve plutôt inspiré par la grâce lors de ces passages. Est contée ensuite l'arrivée d'un mystérieux homme, paria, rebut, énième monstre de foire hugolien, Jean Valjean, ancien forçat, se faisant jeter de partout (même de la niche d'un chien !) et que la providence mène à l'évêque. Monseigneur va l'accueillir avec toute la charité et le sacrifice qu'il prône sans cesse pour autrui et, on le sait, Jean Valjean, après dix-neuf ans de galères, traité sans cesse comme un animal, devenu comme tel, ne pourra s'empêcher, dans une sorte de réflexe défensif totalement irréfléchi, de voler son argenterie et ses candélabres. C'est la magnanimité de Monseigneur Bienvenu, devant la police, qui provoquera la transformation absolue de Jean Valjean, son élévation du mal vers le bien, jusqu'au martyre, qu'il n'aura de cesse de mettre en pratique, expiant sempiternellement ses pêchés. On retient dans tout ce début le chapitre "L'Onde et L'Ombre", qui dépeint le tumulte dans l'esprit de Valjean couché dans le monastère sous la métaphore hugolienne de la tempête. le plus drôle étant que ce chapitre est un ajout de l'exil d'après mon édition, ils sont relativement nombreux, et je trouvais qu'à chaque fois, on pouvait le remarquer, car il s'agissait de parenthèses plus ou moins nécessaires et réussies qui stoppaient l'action. On reparlera des digressions d'Hugo, hétéroclites dans leur sujet comme dans leur réussite et intérêt ! Donc, dans ce début, il y a évidemment ensuite le chapitre "Petit-Gervais" où Jean Valjean, encore dans l'hallucination de la générosité du prêtre, vole un sou à un enfant, Petit-Gervais, action qui va achever de le mettre à genoux devant Dieu dans tous les sens du terme, dernier méfait qu'il va commettre parmi les vivants - si ce n'est ses évasions et dissimulations de la police -, et surtout, qui va l'inscrire comme récidiviste, le condamnant aux galères à perpétuité pour la suite.

Vient ensuite la partie "En l'année 1817" qui va commencer par un long portrait de l'époque où Hugo s'en prend à Louis XVIII pour expliquer le contexte social de ce qu'il va raconter. Est introduite la malheureuse Fantine et avec elle une des périodes les plus déchirantes du roman. Fantine descendra autant dans le malheur, la souffrance, l'horreur et l'infâmie que sa fille Cosette, bien plus tard, ne s'élèvera sans cesse vers la grâce et le bonheur. Leurs trajectoires inversées sont assez intéressantes, un peu comme celles de Cosette et Éponine. Bref, l'on vit la jeunesse un temps auréolée de Fantine avec ses amis, à Paris, dans le coin de la Sorbonne, avec un certain Félix Tholomyès qu'elle croit être l'homme de sa vie... Il y a de très beaux chapitres là aussi de la journée du groupe en promenade à la campagne, jour nimbé de lumière qui va s'achever de la plus cruelle des façons. Les jeunes filles sont abandonnées par leurs compagnons qui s'en rentrent chez leurs parents et leurs études d'avocats, alors que Fantine... est enceinte. Elle devra alors survivre avec sa fille Cosette et tombera de déchéance en déchéance. Elle pensera confier Cosette à un foyer aimant provisoirement, les Thénardier, alors qu'il s'agit de deux sadiques esclavagistes escrocs (partie nommée "Confier, c'est quelquefois livrer"), s'enfoncera dans la prostitution, l'opprobre, et ne reverra plus jamais Cosette...

L'histoire revient alors à Jean Valjean devenu M.Madeleine, maire de Montreuil-sur-Mer (et je souligne encore à quel point j'ai pris plaisir à voyager à travers la France grâce au roman, j'ai découvert des coins où je ne suis jamais allé qui m'ont fait rêver !), personnage altruiste, bienfaiteur de toute une région, bâtissant l'industrie, le bien de tous... Jean Valjean/M.Madeleine est une sorte de super-héros, faisant constamment le bien, toujours dans le repentir et dans le soin de suivre le modèle de l'Évêque. Évêque dont on apprendra avec lui la disparition, vivra son deuil... Il y a aussi quelques détails financiers sur la fortune amassée par Jean Valjean/M.Madeleine, très importants pour la fin du roman. Dans son exercice constant du bien, Jean Valjean sauve un jour un nommé Fauchelevent, coincé sous sa charrette, devant le policier Javert, scène mythique qui va là aussi être un moment déclencheur. Javert est présenté par Victor Hugo comme une sorte (et je dis cela sans méchanceté) d'autiste de l'ordre, de la loi, du bien contre le mal, des honnêtes gens contre les criminels. Aucune zone grise, aucun entre-deux, pas de circonstances atténuantes dans son logiciel et son esprit. Il y a le camp du bien dont il est le fougueux défenseur, contre les limaces et les ombres qui accomplissent le mal, point. Javert connaît Jean Valjean du bagne, et le reconnaîtra dans sa force surhumaine caractéristique lorsqu'il soulèvera à mains nues la charrette de Fauchelevent (la comparaison avec le superhéros trouve aussi sens dans la force physique exceptionnelle de Jean Valjean, en plus de son altruisme). Dès lors, Javert harcèlera "M.Madeleine", étant sûr de l'avoir démasqué. Viendra alors un terrible dilemme : Un certain Champmathieu est arrêté, sosie de Jean Valjean, et pris pour lui. Javert présente un temps sa démission et se flagelle devant M.Madeleine, noble fonctionnaire qu'il a eu l'outrecuidance de prendre pour un forçat, statut de fonctionnaire si important pour Javert dont il ne se sent absolument plus digne, l'ayant souillé. L'on y voit avec Jean Valjean la délivrance de tous ses soucis : Se débarrasser définitivement des soupçons de Javert et des recherches de l'autorité à son encontre... Et bien non, à l'issue d'un chapitre magnifique nommé "Tempête sous un crâne", plébiscité à l'époque par Baudelaire, Jean Valjean/M.Madeleine va préférer se dénoncer et faire tomber son imposture, plutôt que de laisser condamner un innocent à sa place, quitte à détruire le personnage qu'il s'était crée et tout le bien qu'il avait apporté à la communauté pendant des années. La construction dramatique de tout ce passage est magistrale : Hugo lui avait fait rencontrer Fantine tombée au trente-sixième dessous, arrêtée après un combat de chiffonniers contre un notable qui lui a jeté de la neige alors qu'elle erre en haillons, devenue fille publique... Javert s'abat de façon implacable sur cette proie qui n'est pour lui que pêché et immondice, et Jean Valjean/Madeleine répond d'elle devant lui, accentuant encore leur antagonisme. Il était question que Jean Valjean aille chercher Cosette à Montfermeil chez les Thénardier pour la ramener à Fantine, mais le dilemme de l'affaire Champmathieu, qui nécessitera pour lui de se rendre à Arras pour se dénoncer, empêchera les retrouvailles mère/fille. Fantine en mourra, ainsi que de la révélation par Javert de l'imposture de Madeleine. Dès lors, la suite des aventures de Jean Valjean auprès de Cosette se placera d'autant plus sous le sceau de la rédemption, thématique obsessionnelle du roman et de la psyché de Jean Valjean, en mémoire de Fantine, même si l'évocation explicite de Fantine disparaît, pour ne plus réapparaître qu'à la toute fin...

Après une digression extraordinaire de Victor Hugo sur la bataille de Waterloo, servant à la fois à chanter Napoléon qu'il adore tant, et à introduire une nouvelle scène-clé, Thénardier dépouillant les cadavres sur le champ de bataille, sauvant la vie sans vraiment le vouloir au colonel Pontmercy, père de Marius, Hugo nous narre le tour de passe-passe de Jean Valjean, de retour aux galères à Toulon, pour s'acquitter de sa tâche vis-à-vis de la malheureuse Fantine. Jean Valjean simule sa mort par noyade et traverse la France ensuite jusqu'à Montfermeil où il rencontre Cosette, réduite à l'état d'esclave par les Thénardier. Leur rencontre est un vrai coup de foudre des plus attendrissants, à la fois dans la relation père/fille de substitution (on peut bien évidemment y lire un reflet d'Hugo et Léopoldine), et dans l'ambiguïté et la profondeur qu'y donnera Hugo jusqu'à la toute fin. Valjean voyant bien l'horreur qu'incarnent les Thénardier (qui au passage, s'avèrent être les véritables méchants du roman, plus que Javert qui n'est qu'un monomaniaque obsessionnel coincé sur des principes comme un mécanisme) l'extirpe de ce bouge et l'amène à Paris pour une nouvelle vie. Ils échouent dans une maison nommée la Masure Gorbeau, très importante pour la suite, où ils resteront très peu de temps, Javert ayant retrouvé Jean Valjean. le roman, souvent qualifié de roman noir, voit cette appellation totalement justifiée à certains passages, et même jusqu'à l'horreur, lorsque Valjean, se croyant à l'abri dans Paris, croit voir Javert en lieu et place d'un mendiant à qui il donne sans cesse de l'argent... S'ensuit la poursuite surréaliste à travers Paris, entre Javert et ses hommes d'une part, Jean Valjean et Cosette d'autre part, où l'on peine tout de même à croire que Valjean, que l'on pensait si bien caché, ait été retrouvé si aisément, mais l'univers cruel et calomniateur du roman parvient à crédibiliser tout cela. Jean Vajean, de nouveau à la croisée des chemins, physique comme mentale, réussira à s'abriter au couvent du Petit-Picpus, lieu au-dessus de tout soupçon, où Cosette sera éduquée pendant des années, et où il vivra à l'abri, ayant retrouvé Fauchelevent qu'il avait sauvé jadis, et qui acceptera de le faire passer pour son frère ! Naît alors "Ultime Fauchelevent" (j'ai beaucoup aimé ce nom que je ne connaissais pas !), identité factice qu'il conservera jusqu'au crépuscule du roman face à Marius... Pour nous faire comprendre l'excellence morale, la quiétude, la paix absolue, dans laquelle grandira et sera éduquée Cosette, Hugo se sent alors obligé de se livrer à une énorme digression sur le couvent du Petit-Picpus, qui est sans doute la pire digression de toute son oeuvre, un passage que l'on traverse vraiment en vivant un labeur de lecteur... Il aurait vraiment pu et dû s'en passer.

L'on quitte un temps Jean Valjean et Cosette pour faire la connaissance de Marius, jeune premier du roman où l'on reconnaît assez vite un nouveau double de Victor Hugo sur le plan idéologique (avec le même parcours !), ayant, comme Hugo, un rapport de vénération à son père colonel sous Bonaparte. L'on découvre aussi le grand-père de Marius, M.Gillenormand, personnage secondaire injustement oublié du public, que j'ai beaucoup apprécié : Vieux libertin royaliste qui a connu le XVIIIe siècle et ses moeurs, il entrera en conflit idéologique avec Marius durant une grande partie du roman (alors même qu'il lui porte une affection immense qui permettra la fin heureuse relative du roman où la famille est réunifiée), la mémoire du père de Marius sans cesse insultée par le grand-père et les rapports père-fils empêchés n'arrangeant rien. Les parties et chapitres mémorables se succèdent, "Paris étudié dans son atome" qui est une véritable lettre d'amour à ce qu'est Paris, l'esprit parisien, l'esprit français... Qu'il fait tant plaisir de lire aujourd'hui, et où l'on fait connaissance avec Gavroche (déjà entraperçu chez les Thénardier !), "Les Amis de l'ABC", où l'on découvre toute la bande d'Enjolras et l'utopie attachante de ce groupe, "La Conjonction de deux étoiles", printemps merveilleux du roman (l'équivalent de "A Heart Full of Love" pour les fans de la comédie musicale anglo-saxonne !) qui va être la rencontre de Marius et Cosette au Jardin du Luxembourg et les promenades successives qui leur serviront de séduction - sous l'oeil aiguisé de Jean Valjean âgé qui finira par éloigner Cosette de ce lieu et de leur domicile d'alors - mon édition coupe en deux le roman et achève la première moitié avec "Patron-Minette", partie aussi sombre et glauque que la précédente était lumineuse, nous y présentant, dans les égouts de Paris, au sens propre comme au figuré, quatre criminels redoutables qui auront leur importance plus tard.

La deuxième moitié de mon édition s'ouvre avec "Le Mauvais Pauvre", partie dont je ne connaissais absolument pas l'existence, où la qualification de roman noir pour Les Misérables va vraiment prendre tout son sens : Marius, fâché avec son grand-père, vit désormais dans la fameuse Masure Gorbeau où se sont arrêtés jadis Jean Valjean et Cosette. Leurs voisins, coup de théâtre absolu, s'avèrent être les Thénardier, dont le mari passe son temps à écrire à divers notables sous des identités toutes plus bidons les unes que les autres (avec des fautes d'orthographe savoureuses qui démasquent à chaque fois son imposture), pour leur mendier de l'argent... Thénardier sous divers pseudos, Jondrette, Fabantou... Va être mis sur la route d'un vieux bonhomme généreux qui n'est autre que Jean Valjean, qu'il finira par reconnaître, et organisera alors un guet-apens contre lui dans l'appartement de la Masure, épié par Marius via un trou dans le mur, véritable voyeur de roman noir, qui avertira Javert, et le remettra donc un temps sur la trace de Valjean ! Ce passage est absolument incroyable, avec un suspense et une modernité fous, un vrai thriller, et je ne me souviens pas l'avoir vu (mais ma mémoire me fait certainement défaut) dans les quelques adaptations cinématographiques que j'ai vues... C'est un de mes passages préférés du roman, en tant qu'adorateur du roman noir...

Après ce moment si obscur dont Jean Valjean se sort avec maestria grâce à sa ruse et sa force légendaires, l'idylle Marius/Cosette démarrée au Luxembourg reprend Rue Plumet. Je ne peux pas ne pas mentionner le passage sur "La Cadène", procession de forçats spectacle, terrible pour Jean Valjean et Cosette, ainsi qu'Éponine, pauvre enfant des Thénardier amoureuse de Marius, qui aidera malgré tout celui-ci. Les enfants des Thénardier, parlons-en... Éponine, Azelma et Gavroche servent à leurs parents d'hommes de main de fortune, quand ils ne sont pas carrément abandonnés, livrés tout bonnement à la rue, jusqu'au reniement du sang (ce qui est le cas de Gavroche, ainsi que de deux autres enfants supplémentaires qu'il sauve plus tard, qu'Hugo révèle être ses frères, alors que chaque parti n'en a aucune connaissance, passage très émouvant). Jean Valjean cherchera encore à éloigner Cosette de Marius, en vain, déménageant ENCORE, cette fois Rue de L'Homme-Armé... Arrivent alors les émeutes de juin 1832, longuement présentées par Hugo. Il y a une digression passionnante sur Louis-Philippe où Hugo livre un éloge en réalité intéressé, pour mieux ensuite dépeindre Louis-Philippe comme un roi certes progressiste, mais dernier symbole d'une tradition à finir, et surtout, qui ne comprend pas le peuple (tiens, cela nous rappellerait-il quelqu'un ?). Paris bout comme une cocotte-minute. Il y a des descriptions hallucinantes des parisiens stockant des armes, fomentant une révolution armée qui, on le sait, tournera court... Lorsque Valjean et Cosette partent Rue de L'Homme-Armé, Marius, qui a perdu trace de sa dulcinée, fâché avec son grand-père, pauvre, à la rue, voudra mourir en se lançant à corps perdu dans les émeutes, avec Enjolras et sa bande. le destin, lettres interceptées, Gavroche... Feront venir Jean Valjean aux barricades, croit-on pour tuer celui qu'il voit comme un rival (et le sous-texte de la relation Valjean/Cosette n'en est que plus savoureux). Valjean finira évidemment par sauver Marius, comme il sauvera et épargnera Javert au passage. L'épopée des émeutes est très réussie, même si dans l'Hugo épique, j'ai préféré toute la dernière partie de Quatrevingt-treize qui m'avait totalement bluffé à l'époque... Valjean traverse les égouts de Paris avec Marius à moitié mort sur son dos, scène des plus mythiques à nouveau, et Hugo se livre à nouveau à des digressions mémorables sur l'histoire des égouts de Paris, parmi les meilleures parenthèses de ses oeuvres. La surprise de Thénardier comme passeur de la sortie des Enfers vers la surface est on ne peut plus symbolique... Javert, qui a subi la même magnanimité de la part de Valjean, que Valjean avait autrefois subi de la part de Myriel, préfère la chute à la transfiguration, et se jette dans la Seine en réalisant avoir fonctionné toute sa vie sur un manichéisme et des principes binaires erronés... le roman entame alors tout un schéma de fin heureuse de comédie avec réconciliation de Marius et son grand-père, bénédiction pour le mariage de son côté comme de la part d'Ultime Fauchelevent, tout semble rentrer dans l'ordre... Si ce n'est Jean Valjean qui pense avoir accompli sa tâche parmi les vivants, qui dépérit de perdre Cosette selon ce qu'il reconnaît tout de même comme l'ordre des choses (et là encore, l'ambiguïté de leur relation est plus que jamais pertinente), se dénoncera auprès de Marius comme ancien forçat, omettant tous ses faits de gloire, ses bienfaits innombrables en tant que M.Madeleine, son sauvetage de Marius, de Javert... Valjean dépérira jusqu'à ce qu'un concours de circonstances fasse découvrir à Marius toute la vérité, par le biais de Thénardier, ironie suprême d'Hugo ! le roman se conclur
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Après des années à trainer dans mes armoires, j'ai enfin décidé d'attaquer le roman qu'on considère comme le Chef-d'oeuvre parfait de la littérature française, ce roman culte et célèbre, célébré et admiré. Par l'auteur français le plus connu, au personnages célèbres ... Que demander de plus à ce livre, pourquoi même en faire une critique ? N'a-t-on pas déjà tout dit de cette tragédie romantique en quatre actes ?

Et pourtant, j'aurais quelques petites choses à en dire. Déjà, que Victor Hugo reste fidèle à lui-même, et que je comprends totalement les personnes ne pouvant se résoudre à lire ce livre souvent descriptif, puissamment romantique et parfois chiant (faut dire les mots). Victor Hugo se fait plaisir à faire des chapitres entiers de description qui n'avancent pas l'histoire et servent de décor. D'autre part, il faut dire que l'histoire puisse dans un courant de pensée romantique qui se ressent parfois jusque dans le tréfonds des actions des personnages, toujours grandioses et dans l'exaltation des sentiments. Bref, ça pue le vieux style, et il faut bien le dire. C'est parfois très lourd, notamment se taper vingt pages d'un coup sur la bataille de Waterloo, qui n'ont strictement rien à voir avec l'histoire.

Mais cette histoire est aussi quelque chose de grandiose. Victor Hugo parle de la misère, cette misère profonde et réelle, qui affame les peuples et brise les esprits, laissant des milliers de déshérités sur le carreau. Victor Hugo nous parle aussi de destinées humaines, de faire le bien au détriment de ce que l'on a vécu auparavant. Il nous parle enfin, et surtout, de la société qui broie les humains sans aucune échappatoire, une société royaliste qui pressure les plus pauvres dans tout ses aspects.
Et dans cette histoire, quelque chose surnage l'ensemble et confère au sublime : les personnages. Il n'est pas possible, je pense, de rester insensible à Jean Valjean, personnage si bien dessinée par l'émotion et l'envie de rédemption. Il n'est pas possible de ne pas être ému du sort de Cosette, si souvent repris depuis. Mais combien oublient Fantine, dont la violence de la chute est magnifiquement cruelle. Quelle destinée horrible, quelle fin tragique pour une femme qui n'a eu qu'un malheur, trop aimer un homme qui était un connard. Combien de femmes comme elle ont existé ? Combien existent encore ?

Ce roman, premier du diptyque, est d'une rare puissance qui fait comprendre et ressentir ce que fut (et ce qu'est encore) la misère. La vraie, celle qui touche les plus démunis de notre monde. A travers les portraits magnifiquement touchants, Victor Hugo a réussi l'exploit de faire des portraits d'une humanité, universels. Ils touchent tout le monde, et presque 150 ans après, leurs noms sont devenus légendaires. Si j'ai toujours cette réserve sur la lenteur de la lecture et le côté daté de la prose et du style, je dois m'incliner devant l'histoire, ce qu'il raconte et les personnages qu'il a crée. Un véritable coup de maitre, qui prend un réel sens à la lecture, lorsqu'on se rends compte que Victor Hugo a bel et bien écrit l'un des chefs-d'oeuvre de la littérature française. Quelque chose qui dépasse les simples considérations personnelles.
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Que dire... Peut-on réellement faire en quelques lignes une bonne critique de ce grand classique de la littérature ? Non... D'autres bien plus spécialisés que moi l'ont déjà fait en long en large et en travers et bien mieux que moi...

Mais, comme j'ai redécouvert ce roman, grâce à une première expérience de livre audio, je me suis dit que j'allais tout de même poser ici une petite réflexion sur ce chef d'oeuvre que je n'aurais probablement jamais relu si je ne l'avais pas écouté (pendant 67h tout de même !).

Je me souvenais de manière assez précise de l'histoire de Jean Valjean, de Cosette, de Javert , de Marius, des Ténardier, de Gavroche, illustration parfaite du « drame romantique » mais je me suis aussi rendu compte qu'il y a vingt ans, je suis complètement passée à côté d'une autre facette de cette vaste fresque...

L'oeuvre de Victor Hugo fourmille de passages que d'aucuns appelleront très volontiers des « digressions » : l'auteur y traite de religion, d'histoire, de gouvernement, de langue française, de révolutions, parfois sur plusieurs chapitres. A première vue, ces passages n'apportent rien à l'intrigue, si ce n'est de la mettre en contexte ou d'ennuyer profondément le lecteur qui veut simplement continuer à suivre les péripéties des héros et qui est alors tenté de sauter ces chapitres (et j'en viens à me dire que c'est ce que j'ai dû probablement faire il y a vingt ans...).

Et pourtant, de digressions, il n'est point question... C'est toute la pensée de Victor Hugo qui se trouve condensée dans ces passages entrecoupant l'intrigue, mettant en lumière son amour profond du peuple, sa vision de la démocratie et de ce que l'histoire a à nous enseigner pour éviter les écueils du passé. Convaincu que la révolution, le progrès et l'instruction permettront à l'être humain de grandir et de sortir de sa condition misérable, il milite dans ces « digressions » et, plus d'une fois, je me suis surprise à penser que Victor Hugo doit se retourner bien profond dans sa tombe en voyant que, plus de 150 ans après avoir écrit son oeuvre, l'homme en est toujours au même point qu'à l'époque des Misérables... La démocratie recule un peu plus chaque jour (quoi qu'en dise les bien pensants), le fanatisme religieux (peu importe de quelle religion on parle) refait surface, on reproduit les erreurs du passé, le progrès sert à certains mais creuse plus d'inégalités qu'il n'en aplanit... Et qui ose encore croire que la révolution pourra nous aider ? D'ailleurs, qui ose encore se « révolter » ? Nous ne sommes pas mieux lotis que « Les Misérables » du 19e siècle et j'avoue que, plus d'une fois pendant la lecture je me suis surprise à penser : « pas d'espoir pour le genre humain ».

Le roman de Victor Hugo est une oeuvre magistrale, universelle et intemporelle. Malheureusement, il faut s'accrocher pour l'aborder dans son intégralité et il faut une bonne dose de connaissances historiques et culturelles pour comprendre certains passages. Elle n'est plus aussi abordable qu'elle l'était il y a un siècle et le message profond qu'elle contient risque de se perdre encore un peu plus...
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Ecriture tres developpée et recherchée. Un livre comme on les aime !

Génial !
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Que dire de plus sur une telle oeuvre d'un tel auteur ? Laisser parler quelques émotions de lecture. Comme Victor HUGO, cet ouvrage est une force qui va, qui chamboule tout sur son passage, les émotions, la narration, le langage, qui digresse, qui s'égare, qui dénonce et qui touche en profondeur. 25 ans après, je me souviens de l'endroit où j'étais lorsque j'ai terminé ma lecture, sur cette image très forte de pietà, Cosette et Marius au pied de Jean Valjean.
Au collège, on nous avait proposé la version filmée par Robert Hossein et je n'ai jamais pu me départir des visages de Lino Ventura et de Michel Bouquet durant toute ma lecture, pour donner vie à ces personnages entrés dans l'imaginaire collectif.
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Chef d'oeuvre donc la critique est difficile. Mais si les personnages sont tellement marquants (sauf Marius un peu trop blanc bec et Cosette jeune fille), qu'ils sont quasiment passés dans le langage courant, il n'en demeure pas moins qu'il y a quelques longueurs au début (la bataille de Waterloo, ah morne plaine et les début de jean Valjean), hormis ce bémol, c'est fantastique. A lire absolument.
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Je vais tenter en toute modestie d’écrire mon ressenti à propos de cette très très grande œuvre sur laquelle tout semble déjà avoir été dit …Je me sens bien petite face à ce colosse de la littérature, je vais malgré tout essayer, à mon tout petit niveau, de rendre hommage à cet ouvrage.

Les misérables est une œuvre qui contient absolument tout. C’est à la fois un livre historique, un essai, un roman policier, une œuvre poétique, un roman d’amour, une encyclopédie. Victor Hugo nous offre une multitude de tableaux, nous invitant à la réflexion souvent, en nous proposant du suspense parfois.

Je suis toujours assez admirative de la force avec laquelle les images nous parviennent lors des descriptions de cet auteur. Nous sommes avec Cosette, seule, dans le froid humide au bord du puits alors qu’elle remplit un seau plus gros qu’elle ; nous sommes avec Jean Valjean quand il tente par tous les moyens d’échapper à Javert se cachant dans les rues sombres ; nous sommes avec Marius, debout sur sa commode à regarder chez ses voisins et à y découvrir l’inimaginable ; nous sommes avec Gavroche caché dans l’éléphant à l’abri des rats serrant la main de son frère ; nous sommes presque physiquement avec tous ces personnages qui ont en eux une réelle force et un profond réalisme, une telle présence, cela enjolive considérablement la lecture.

Victor Hugo de nous proposer des leçons de politique : « Résolvez les deux problèmes, encouragez le riche et protégez le pauvre, supprimer la misère, mettez un terme à l’exploitation injuste du faible par le fort, [...], ajustez mathématiquement et fraternellement le salaire au travail, mêlez l’enseignement gratuit en obligatoire à la croissance de l’enfance et faites de la science la base de la virilité,[...] en deux mots sachez produire la richesse et sachez la répartir ; et vous aurez tout ensemble la grandeur matérielle et la grandeur morale ; et vous serez dignes de vous appeler la France. » faisant de cette œuvre un ouvrage profondément moderne et contemporain des évènements de notre monde.

Par ailleurs, Hugo fait vivre ses personnages en les faisant se rencontrer puis se quitter puis de nouveau se revoir dans des situations qui peuvent frôler parfois le manque de cohérence, cependant le rythme de l’histoire est tel qu’on se laisse porter à ces liens qui se nouent et se défont au fil des pages. Cet aspect est sans doute finalement un support à la réflexion, à la critique que Hugo fait de la société. Dès la préface, il annonce d’ailleurs cette volonté de nous proposer un ouvrage engagé : « Tant qu’il y aura sur la terre ignorance et misère, des livres de la nature de celui-ci pourront ne pas être inutiles ».

J’ai vraiment beaucoup aimé cette lecture, même si les diversions sont parfois longues voire fastidieuses quand on a hâte surtout de reprendre l’intrigue là où nous l’avions laissée auprès des personnages auxquels on se trouve très vite attachés. Cependant, ces diversions ne sont pas aussi importantes que dans les travailleurs de la mer où l’histoire ne commence réellement qu’à la trois centième page il me semble … Victor Hugo nous propose en l’occurrence une visite des égouts de Paris d’une précision remarquable, presque encyclopédique.

Et ces citations ! Ces phrases que l’on souligne modestement du bout du doigt (j’ai lu l’ouvrage sur liseuse) et qui pourraient être suspendues aux murs du monde !

« De même que les incendies éclairent toute la ville, les révolutions éclairent tout le genre humain. »

« Malheur a qui veut être parasite ! il sera vermine. »

« La misère d’un enfant intéresse une mère, la misère d’un jeune homme intéresse une jeune fille, la misère d’un vieillard n’intéresse personne. »

« Ainsi la paresse est mère. Elle a un fils, le vol, et une fille, la faim. »

Je ne suis pas partisane des listes des livres qu’il faut absolument avoir lus (même pas du tout !) cependant, Les misérables représentent un tel monument profondément contemporain qu’il serait dommage de ne pas en faire la rencontre. Je suis désormais heureuse d’en avoir fait la découverte intégrale.
Lien : http://www.adeuxlignes.fr/?p..
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Je ne vais pas reprendre les excellents commentaires des nombreux babéliophiles qui ont adoré « les Misérables » de Victor Hugo qui date pourtant du 19ème siècle. Pour ma part, je dirai que ce qui en fait un chef d'oeuvre ce sont les personnages qui sont devenus, pour la plupart, des figures emblématiques. On y trouve :

- La fille-mère héroïque
Fantine, belle et naïve ouvrière abandonnée avec une enfant pour laquelle elle fera tous les sacrifices.
«Fantine était belle et resta pure le plus longtemps qu'elle put. C'était une jolie blonde avec de belles dents. Elle avait de l'or et des perles pour dot, mais son or était sur sa tête et ses perles étaient dans sa bouche.»

- L'enfant martyr
Cosette, la fille de Fantine, maltraitée par les Thénardier qui l'ont recueillie.
« Ses grands yeux enfoncés dans une sorte d'ombre étaient presque éteints à force d'avoir pleuré. Les coins de sa bouche avaient cette courbe de l'angoisse habituelle, qu'on observe chez les condamnés et chez les malades désespérés. »

- le couple cupide et cruel
Les Thénardier qui exploitent odieusement la naïveté de Fantine et martyrisent Cosette.
« Ces êtres appartenaient à cette classe bâtarde composée de gens grossiers parvenus et de gens intelligents déchus, qui est entre la classe dite moyenne et la classe dite inférieure, et qui combine quelques-uns des défauts de la seconde avec presque tous les vices de la première (…). »

- le gamin de Paris
Gavroche, fils Thénardier, meurt glorieusement sur une barricade.
« C'était un garçon bruyant, blême, leste, éveillé, goguenard, à l'air vivace et maladif. Il allait, venait, chantait […] volait un peu, mais comme les chats et les passereaux, gaiement, riait quand on l'appelait galopin, se fâchait quand on l'appelait voyou. »

- le policier implacable
Javert qui traque Jean Valjean.
« Quand Javert riait, [...] ses lèvres minces s'écartaient, et laissaient voir, non seulement ses dents, mais ses gencives, et il se faisait autour de son nez un plissement épaté et sauvage comme sur un mufle de bête fauve. »

Roman culte à mettre entre toutes les mains.


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Que dire?… je ne me sents pas vraiment capable de chroniquer un tel « monument », mais je vais livrer mon sentiment « à chaud ». D'abord, c'est un peu fou d'arriver à l'âge que j'ai sans l'avoir lu ! ( je suis une senior en retraite …).Mais je suis très contente finalement, je l'ai peut-être davantage apprécié aujourd'hui.
Je dirais que ce roman est tellement une révolte contre la pauvreté et l'injustice sociale que cela en fait une lecture presque contemporaine. Hugo réfléchit tout au long de ce premier tome à toutes ces injustices qui frappent les plus humbles et les amènent plus bas encore. Hugo se délecte dans une analyse fine, précise , impeccable de ses personnages pour nous amener à comprendre, à vivre leur détresse .Je connaissais « les misérables », je n'en connaissais rien, j'ai découvert Hugo…merci les livres open source sur la liseuse !
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