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La terre, l'art de la description incroyablement talentueuse de Huysmans déclame dans ce livre les affres de deux bourgeois parisiens dans la dèche chez leurs proches en province. Au fond de la noire campagne des environs de Provins, ils découvrent la misère des paysans tout en continuant à vouloir vivre avec de riches et gourmandes habitudes. Leur oncle est un laborieux et poisseux gueux qui profite de tous les larcins possibles entre deux labeurs même sur le dos de ses proches. l'atmosphère devient pesant, lugubre et chargé de misères des uns et des autres, d'argent et de coeur.

Huysmans est précis sans être trop pesant dans ses mots pour décrire les lieux ou les situations.

Toute une époque de la littérature !
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L'histoire est ici d'une simplicité confondante : un jeune couple de parisiens, trouve refuge au château de Lourps, dans la région de la Brie, chez des parents éloignés, suite à une transaction bancaire hasardeuse qui les a mis en faillite. Les voici donc en rade, en pleine cambrousse, sans le sou, sans voiture, isolés dans un château qui tombe en ruine, les nerfs malades de Madame et le cerveau échauffé de Monsieur faisant le reste.
Drôle de roman car sous des dehors encore très naturalistes — scènes de la vie rurale, portraits de personnages rustiques, expressions en patois, comme des tableaux ; l'épisode du vêlage de la Lizarde (qui fait écho à celui de la Lise dans « La Terre » de Zola paru la même année) — précis et sans concession, l'étrange se déploie. Les 3 rêves du roman servent de media au fantastique, à l'inexpliqué, à l'inconscient. Huysmans emploiera souvent le biais onirique à partir du cycle de Durtal mais c'est ici une première. C'est Jacques, le protagoniste, qui inaugure le questionnement sur le sens des songes, problématique très moderne pour l'époque !
Dans sa quête spirituelle intime, l'auteur utilise des procédés inédits chez lui pour accéder à la mystique : la rigueur du naturalisme, la liberté de l'onirisme et l'échappée permise par le symbolisme. le récit donne ainsi des clés importantes pour comprendre la banqueroute amoureuse, financière et existentielle du héros. Même la maladie nerveuse de Louise, proche de l'hystérie chère à Charcot, ajoute un trouble sis entre folie et paranormal.
La splendeur médiévale ruinée par la trivialité du siècle agit comme la métaphore de l'état d'esprit de son auteur et de son double fictionnel. Si l'ancrage est très prosaïque, de la fuite initiale causée par la déroute pécuniaire au retour précipité motivé par la malhonnêteté de leurs hôtes, l'histoire demeure singulière par le pessimisme et l'absence de positivisme qu'elle recèle.. Et toujours cette époustouflante beauté du verbe, incomparable et délicieuse.
Un roman à part dans la bibliographie de l'auteur mais aussi dans l'histoire littéraire puisque Breton en fera le père du roman surréaliste !
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On lit Huysmans pour apprendre la langue française. C'est un professeur d'écriture. On ne lit pas Huysmans pour le sujet mais pour l'écriture elle-même. Ici le sujet est mince (l'origine des pensées est un thème original, intéressant, mais peu exploité dans le livre). Par contraste, la beauté de l'écriture rayonne dans ce livre qui donne une troublante sensation d'apensateur.
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Jacques Marles et sa femme Louise ont fui Paris et les créanciers pour se réfugier au château délabré de Lourps jouxtant la chaumière de l'oncle Antoine et de la tante Norine, paysans de la région de Brie. Cette cohabitation et promiscuité forcées, du couple lui-même ainsi qu'avec les habitants du lieu, auront des conséquences psychologiques inattendues. « (…) il eût mieux valu ne pas se sauver à la campagne, tenir tête aux assaillants, se débattre à Paris, s'installer d'une façon autre (…) »
En rade, c'est un huis-clos étouffant entre deux êtres qui paraissent tout à coup, transplantés dans un univers inconnu, mal assortis, aux prises avec l'âpreté des moeurs rurales. L'issue temporaire réside dans ces rêves et ces cauchemars qui parcourent les nuits agitées de Jacques et ces envolées éveillées que procure la beauté des paysages.
Peu d'action dans ce roman tout en finesse, ciselé par la magnifique écriture de Joris-Karl Huysmans, mais l'impression d'avoir effectué un voyage temporel mille fois plus intéressant que n'importe quelle intrigue romanesque.
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C'est l'histoire d'un couple de trentenaires sans argent qui se voit obligé à stationner dans un château sinistre en province, chez un membre de la famille de la femme, qui les fait payer très cher, par rapport à leurs moyens. J'ai trouvé excellent tout le passage décrivant un rêve du personnage principal, la question du couple est traitée avec finesse, et le style de l'auteur est d'une richesse incomparable.
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Un couple de parisiens, ruiné, malade des nerfs, vient se "ressourcer" à la campagne chez un oncle et une tante gardant le douleureux domaine qu'un riche propriétaire ne parvient à vendre... le séjour devient hallucinatoire, un réjouissant cauchemar éveillé, et ce château délabré, crevé, de Lourps, que les alentours ne parviennent décidément pas à sauver aux yeux de Jacques, une sinistre rade.
Ce récit, plutôt férocement drôle, confronte deux univers : celui, douillet, des citatins contre celui, mal débrouillé, des paysans. Servi sur fond de maladie nerveuse et d'appétits terreux et cupides, encore une fois, ce récit d'Huysmans allie le délice de l'epithète bien sentie (le "terrible fromage"), l'exigence d'une langue presque disparue, à une analytique naturaliste et minutieusement implacable des tréfonds névrotiques de nos âmes d'humains que la gêne étreint douloureusement, parfois jusqu'aux larmes, tourmente, gâche et ruine.
Une pragmatique baudelairienne égarée dans le domaine du roman ? Pourquoi pas ...
À conseiller aux âmes insensibles !
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- Ah ben c'étant !
V'là les Parisiens qui débarquent en province. Pour fuir temporairement des problèmes d'argent, Jacques et Louise vont se réfugier chez des parents de cette dernière, gardiens du château de Lourps. le jeune couple se retrouve à loger dans une chambre défraichie du manoir qui tombe en ruines, abandonné par ses propriétaires, sans soins. Mais hélas, leur "calvaire" ne se limite pas au manque cruel de confort. L'enfer, ici, ce sont aussi les paysans qui, tout oncle et tante qu'ils sont, entendent bien soutirer aux citadins tout ce qu'ils pourront. Aussi, ceux qui devaient être un soutien en ces temps difficiles s'avèrent d'une cupidité, d'une saleté et d'une vulgarité à laquelle Jacques et Louise ne s'attendaient guère. La seule rencontre agréable de ces quelques mois sera un pauvre chat malade, sauvé in extremis des coups de la tante Norine.
Quand enfin, ayant reçu trois cents francs, le ménage décide de rentrer sans plus tarder à Paris, tous deux savent que plus rien ne sera comme avant. En plus de gérer les créanciers et un train de vie plus adapté, ils devront faire avec la fin des illusions au sein du couple. Louise peine à cacher quelques regards de mépris pour ce mari qui n'a pas su mener la barque. Pour Jacques, son épouse, dont les traits campagnards se sont révélés, a perdu de son prestige dans cette chambre humide partagée à deux.

Je suis assurément moins emballée par En rade que je ne l'avais été par A rebours. L'écriture de Huysmans est certes toujours la même, avec une pointe d'humour et un grand art dans les descriptions. Cependant, le milieu paysan et le château délabré, quoique dépeint à merveille, n'ont pas exercé sur moi la fascination qu'avait engendrée la demeure de Des Esseintes. Je suis, moi aussi, restée en rade, restée sur ma faim. Tant pis. Ce roman n'en demeure pas moins très agréable à lire et j'ai beaucoup aimé les récits des rêves de Jacques qui font entrer une part d'imaginaire au milieu des dures réalités de la campagne.

Challenge XIXème siècle 2021
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Ce court roman publié en 1884, se situe dans l'oeuvre de Huysmans entre ces deux romans majeurs que sont À rebours (1882) et Là-bas (1891).

Il n'a ni la flamboyance baroque de A rebours, ni l'exploration teintée d'ironie de l'occultisme et du satanisme de Là-bas.

En rade qui porte bien son nom, tant la vie des héros de ce roman est marquée par l'abandon, le naufrage existentiel, est un récit qui oscille entre naturalisme et symbolisme. Il n'en contient pas moins, je trouve, deux thèmes insolites, celui de l'exploration du rêve et du surnaturel et celui de la maladie psychique.

Jacques, en proie à de graves problèmes financiers et dont le couple bat de l'aile, pense trouver refuge, et prendre un nouveau départ, en s'éloignant de Paris avec son épouse Louise pour se rendre en Normandie dans le vieux Château de Lourps (curieusement le même nom que celui de A rebours) où vivent l'oncle de celle-ci, Antoine et son épouse Norine. L'oncle leur a promis « qu'ils pourraient y vivre en abondance ». En réalité, le château est une ruine sinistre, dont la plupart des pièces sont inhabitables, les jardins qui l'entourent sont à l'abandon, et l'église voisine délabrée. Antoine et Norine, couple de paysans qui vit dans une chaumière près du château sont des personnages antipathiques, grossiers voire grivois, âpres au gain, et malhonnêtes, et dont le couple parisien est contraint de subir les conditions de vie, dont la nourriture pauvre et infecte.
Durant ce séjour, le lecteur suit Jacques dans ses déambulations au sein des salles du château, des caves, de sa rencontre soudaine et terrifiante avec un chat-huant, de ses promenades aux alentours, dans les jardins du château ou de l'église qui lui apportent un peu de paix.
On le voit confronté au mépris et à la malveillance de Norine et d'Antoine, dont il réalise qu'ils le volent, et aussi à la grossièreté de ceux qu'il rencontre dans une auberge voisine.
En définitive, confronté à ces conditions de vie désastreuses et à cette ambiance hostile, le couple va, dès qu'il aura obtenu d'un ami un peu d'argent, s'enfuir avec précipitation vers Paris.

Mais ce séjour, et c'est sans doute le point le plus important, est celui de la révélation de la faillite du couple formé par Jacques et Louise. Une incompréhension et du mépris réciproque s'installent progressivement entre les deux époux. À cela s'ajoute pour Jacques l'énigme de la maladie de Louise, point sur lequel je reviendrai.

Et je crois que les trois rêves extraordinaires de Jacques, auxquels sont consacrés trois chapitres, expriment de façon inconsciente son sentiment du naufrage financier, sentimental, et sexuel de son couple.
Ainsi, particulièrement troublant est ce deuxième rêve décrivant la déambulation du couple sur la Lune, astre féminin par excellence, et de la vision de tous ses paysages figés, de ses mers et montagnes hostiles, rêve qui se termine par le constat que fait Jacques de la sottise de sa femme. Et alors que le premier rêve représente comme la promesse d'une femme jeune et offerte à un roi de l'Antiquité, le dernier révèle la femme sous un aspect physique horrible et devant laquelle Jacques s'exclame «Cette abominable gaupe, c'est la Vérité ».

On sait que plus tard André Breton fera de ce roman de Huysmans un jalon précurseur du surréalisme. Je ne sais qu'en penser, car ici, l'auteur ne fait pas explicitement du rêve le matériel de sa création.
Mais on pourrait aussi évoquer Freud qui publiera à peu près à la même époque (1899), le rêve et son interprétation.

L'autre thème qui fait pour moi l'étrangeté du récit, et qui nous éloigne du naturalisme de cette histoire aux accents souvent pessimistes et sordides, c'est la maladie de Louise. Une maladie dont Jacques nous dit qu'aucun médecin n'arrive à la soigner, et dont les manifestations, les crises de boulimie et d'anorexie, la crise pseudo-épileptique décrite dans le roman font penser à un trouble psychique et plus particulièrement à l'hystérie telle que Charcot la décrivait en fin de 19ème siècle. Devant cette maladie, on trouve un mari désarmé, mais, quant à lui, sans énergie et au psychisme dépressif.

En conclusion, un roman que j'ai eu plus de difficulté à cerner que À rebours et Là-bas, mais dont l'irruption du rêve dans le récit fait l'originalité.
Et puis, il y a comme toujours la beauté du texte, l'écriture toujours aussi riche de Huysmans, l'emploi de ces mots rares qui sont autant de bijoux qui parsèment le récit.
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un vocabulaire riche et baroque pour une histoire de parisiens à la campagne qui tourne en rond entre ennui et rêves.On n' est pas chez Maupassant.Il manque l' ironie grinçante
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Enfer et putréfaction !

Jacques et Louise Marles sont ruinés et "abandonnés par tout le monde, dès la débâcle", ils pensent "à chercher un abri, une rade, où ils pourraient jeter l'ancre et se concerter pendant un passager armistice, avant que de rentrer à Paris pour commencer la lutte." Ils sont invités à se confiner dans le vétuste château de Lourps par l'oncle Antoine, régisseur de la demeure délabrée.

Là, le jeune couple croupit dans une solitude effrayante, une déréliction absolue. Tout prend l'eau dans leur méchante embarcation et écoper semble vain. le père Antoine et son affreuse Norine, cupides cul-terreux, profitent de cette faiblesse. Tout leur devient hostile. Peu à peu, leur amour sûrit...

Chantournant ses phrases, alternant courbures et saillies, Huysmans gangrène son récit. Insidieuse, la chancissure s'immisce qui altère murs et jardins du ténébreux château : l'auteur le transforme en une monstrueuse tumeur. Saupoudrant d'adjectifs sporagineux ses descriptions hallucinées, il ricane de la chute de la maison Lourps.

Naturaliste et nécromancien, l'écrivain empile éprouvantes scènes de genre (un vêlage sanguinolent, une saillie taurine, l'épouvantable agonie d'un chat,...) et angoissantes visions oniriques (où frelatent les eaux-fortes de Redon, chatoient les délires de Moreau ou prophétisent les concrétions minérales d'un Max Ernst).

Le lecteur s'agite, voulant s'extraire de ce mauvais rêve, à l'instar de Louise prises de ruades tabétiques ou de Jacques se débattant dans ses chimères nocturnes mais l'inflexible Huysmans nous éthérise : nous boirons jusqu'à la lie son noir calice !

Gibbeux, contrefait, le récit va cahin-caha. Mal ajointés, son réalisme scrofuleux et sa préciosité mignarde le bâtardent. D'où cette impression de boursoufflure factice, d'exercice de style fongueux. Mais l'esthétisme Fin de Siècle de sa langue sophistiquée en fait un ragoût délectable pour les raffinés dont je veux bien être.

"(...) une hémorragie d'ordures"
Lien : http://lavieerrante.over-blo..
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