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🌗Une nuit à Aden se caractérise par une approche assez nouvelle en ce qui me concerne. Roman sans vraiment l'être, essai sans vraiment s'y prêter, l'auteur nous propose de plongé dans un récit fascinant où le héros, Palestinien de père musulman, de mère catholique, ayant eu une éducation occidentale, s'interroge sur les traditions qui lui ont été enseignées. Le tout est adouci par une romance comme fil conducteur qui apporte un élan de fraîcheur au texte.


Sincèrement, après avoir lu le petit message envoyé par l'auteur avec les deux tomes, j'ai eu quelques craintes quant au fait de l'achever. Le livre se présente grosso modo avec une première partie "essai" qui revient sur le monde musulman, la religion, les interdits, la société. C'est passionnant, mais le lecteur se retrouve complètement repu d'informations parce qu'elles sont nombreuses. Sans parler des notes en fin de livre qui complète les non-dits de l'auteur. Une fois cette partie lue et le lecteur informés de l'environnement dans lequel le personnage a été élevé, voilà que le roman en lui-même débute. Au final, cette première partie permet au lecteur de comprendre les sentiments, les attitudes du personnage principal, ses interrogations face à sa polyculture tant religieuse que sociétale. Par contre, soyons francs... ces éléments d'informations auraient été distillés dans le texte de manière plus équilibré et non en un seul bloc, cela aurait rendu la lecture plus agréable.


Le roman en lui-même est plutôt sympathique et addictif et permet surtout à l'auteur d'aborder des thématiques plus complexes de la société musulmane comme la relation aux femmes, l'amour, les sentiments. L'auteur nous propose une autre version plus humaniste, plus douce de cette culture au travers d'un regard moins sectaire. La romance avec Adèle, celle de son amie avec une jeune femme juive permet d'aborder des sujets épineux qui clivent la société et engendre de la violence. L'auteur nous offre une vision plus pacifique et plus harmonieuse d'une société qui pourrait se comprendre et s'entendre si certains préjugés étaient mis de côté.


Le texte est superbement écrit en dégage une douceur, une simplicité alors que les thèmes abordés sont parfois difficiles. J'ai apprécié les nombreuses citations tant religieuses que littéraires jalonnant le récit. Par moment, le lecteur peut se demander si une partie de ce qui est relaté ne serait pas autobiographique tant c'est fort, réaliste et juste.


Au final, une lecture ardue, mais plaisante. D'ailleurs, un grand merci à l'auteur pour l'envoi du tome 2 en plus du premier et du petit mot accompagnant l'envoi. La fin du tome 1 s'achève de manière telle, que le tome 2 s'impose pour y répondre. 😊
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J'avoue que si j'avais pu me rendre compte que ce livre , du moins le tome un était plus un essai qu'un roman , je n'aurais sans doute pas postulé a cette masse critique privilégiée ( merci a Babelio, a Iggy Book et a l'auteur). Parce que en général c'est un style de lecture qui m'ennuie .

Par ma vie personnelle : française de conviction catholique (agnostique en fait), mariée a un français d'origine maghrébine , musulman et fils d'Imam. Mère de 3 enfants, que l'on élève dans le respect des religions, sans leur donner d'obligation d'en suivre, je pense maitriser une partie de ce que représente l'Islam.
Je sais que l'interprétation des textes peut toujours porter matière a interprétation. Et on le voit encore aujourd'hui avec l'actualité.

Mais au final j'ai trouvé ce livre très intéressant, même si la façon dont l'auteur a amené les choses (beaucoup de notes, de références). La lecture a été compliquée pour moi.

Mais il faut quand même que je reconnaisse l'énorme travail de l'auteur et son érudition. D'un autre côté avec la méfiance que certains peuvent avoir sur cette religion, je comprends parfaitement que l'auteur ai étayé par de nombreuses sourates et autres références ses propos.

Mais ce n'est pas pour moi, et pourtant j'étais curieuse de voir l'approche qu'allait donné l'auteur. Néanmoins pour tous les curieux et qui aime lire les essais je recommande quand même.

L'auteur m'a également envoyée le tome deux , qui apparemment ressemble plus a un roman. (un grand merci). Je le lirais bien évidemment , mais un peu plus tard, tout en sachant qu'ici je n'aurais pas d'échéance obligatoire.
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Ce volume un d'une nuit à Aden commence alors que Emad Erraja le narrateur dont le prénom et le nom rappellent ceux de l'auteur, est en transit à l'aéroport de Moscou où il attend sa correspondance pour le Caire avant de rejoindre sa destination finale Sanaa au Yemen du Nord où il va prendre ses fonctions au sein du PNUD : Programme des Nations Unies pour le Développement.
Il vient de passer neuf années d'études à New-York en compagnie de son ami de Naplouse Khalil comme lui palestinien sunnite : « deux jeunes Palestiniens exilés à Manhattan ».
Ce pourrait être le titre de ce livre riche en discussions entre ces deux amis qui se retrouvent souvent « au café Dante, au coin de Mac Dougal et Bleeker Street, dans cette rue étroite de Greenwich Village…».
Leurs discussions autour du Coran sont comme une exégèse de l'islam qui se développe à partir des nombreuses questions que leur pose l'islamisme auquel Emad n'adhère pas sans critiques et reproches quant à la suppression du libre arbitre que tout homme devrait pouvoir garder.
Emad, entre son père musulman et sa mère chrétienne, a pu se rendre compte que la tolérance et l'amour peuvent unir les opposés mais il ne sont pas le fait de tous ceux qui se réclament de l'Islam comme d'autres religions également.
Ce premier tome m'a particulièrement intéressée en me permettant de mieux comprendre le poids du texte coranique et ses implications sur la vie des croyants, l'intolérance aussi de ceux qui s'en réclament en refusant toute évolution.
Emad souligne que « l'islam, c'est la communauté avant l'individu », ce qu'il se refuse à accepter.
Le principal reproche que je peux émettre concernant ce volume est qu'il reste plus un essai qu'un roman même si Emad revient sur ses rencontres et sa vie New Yorkaise, sa naissance à Paris parce que sa mère y tenait, son amour pour une jeune française Adèle …. Je suis restée un peu trop extérieure à son histoire et je dois bien admettre que cette lecture, même si elle a pu me retenir par certains aspects, a été un peu laborieuse.
Merci à Babelio et à l'auteur pour l'envoi des deux volumes d'une Nuit à Aden. Je vais entamer le deuxième qui peut-être me donnera un nouvel éclairage.
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Ce livre est un OVNI ! il est d'ailleurs classé « Essai fictionnel »

Le narrateur, Emad nous raconte une histoire d'amour, tout en expliquant au lecteur tous les principes de l'Islam.

Emad parle de son enfance avec son père Palestinien, musulman pratiquant, sa mère chrétienne, dont la famille est d'origine grecque (en fait c'est plus compliqué car il y a des exils). Il est donc musulman d'office puisque son père l'est, mais celui-ci accepte la volonté maternelle qu'il aille au catéchisme. Des parents tolérants, donc car ils s'aiment et forment un couple uni.

Emad est né à Paris car sa mère souhaitait qu'il en soit ainsi, car elle tenait une librairie française à Alexandrie, librairie tenue depuis longtemps par sa famille. Elle lui faisait lire des auteurs français régulièrement. Il a fait ses études au lycée français. Mais les guerres, l'exil ont provoqué des changements.

Durant ses études supérieures aux USA il rencontre Adèle, jeune Française venue y travailler dont il tombe amoureux. Il échange régulièrement avec son ami Khalil.

Emad Jarar (Erraja) dans le livre prend le prétexte de ces rencontres pour évoquer, le Coran, message reçu par Muhammad de la part de l'archange Gabriel durant vingt-trois années, puis traduit en arabe et interprété quelque siècle plus tard pour l'ériger en « loi » : la Sunna ou le dogme.

Ensuite, il reprend la notion de libre arbitre inexistante, car on doit craindre Dieu, accepter que tout vienne de lui, donc forcément le fatalisme, puisque l'homme n'a aucune prise sur son destin et ne peut rien modifier. Il évoque, la femme dans l'Islam, le devoir de conquérir le monde entier en tuant les mécréants, le jihad, le jeune, l'importance de la récitation (psalmodie) les piliers de l'Islam, le rejet de la laïcité, la légitimité du crime pour convaincre …

Emad Jarar est précis, mais entre beaucoup dans les détails pour nous faire comprendre toutes les notions, en nous donnant chaque fois des notes en fin de livre.

Je me suis accrochée, j'ai failli abandonner, page 88 je pensais : « nous sommes à la P 88 et il y a déjà 25 pages de notes, il faut lire avec deux marque-pages et on fait le va-et-vient entre les deux parfois cinq fois par page ! je m'engage à lire les deux premières parties, (jusqu'à la P 101) avant de lâcher car j'ai lu deux critiques admiratives »

Dans les années quatre-vingts on disait que l'Islam était une religion tolérante, mais le terrorisme est passé par là et on a vu un autre visage, ce qui a rendu ma lecture difficile au départ, car j'avais la peur au ventre en lisant certaines notes, certains extraits du « Livre » en tant que femme ce n'est pas facile…

Je suis contente d'être arrivée au bout, il m'aura fallu 25 jours quand même, car c'est vrai il y a une belle histoire d'amour, et Emad est tout aussi prolixe, coupeur de cheveux en quatre, ou même dix, lorsqu'il parle avec Adèle que lorsqu'il parle de religion ! je retiens notamment l'auto-dérision dont il fait preuve en expliquant la position de l'Islam par rapport au vin :

« Ô ciel ! une bouillie, voilà ce à quoi toutes mes litanies, ma manie stupide de creuser inutilement les mots et mon interminable jactance me donnaient à penser. Je me demandais par quelle sournoiserie de l'âme, aussi peu de la chaleur de toute la passion que je ressentais se pouvait retrouver dans mon discours à effet, ma parlerie sans fin et ennuyeuse, fait plus pour l'esprit que pour le coeur, substituant à l'amour le plus tendre les mots les plus plats. »

Emad Jarar écrit magnifiquement bien, les phrases sont belles, les termes sont précis, affutés, il manie l'imparfait du subjonctif de façon magistrale… Son écriture, à elle seule, mérite que l'on aille jusqu'au bout de la lecture et la suite du récit est passionnante car on se promène : Moscou, le Caire, New-York, Sanaa et la perception intime de la religion de l'auteur est très fine. Il emploie un français littéraire, riche, de la veine De Balzac ou Proust, comme souvent les exilés (cf. par exemple, George Semprun)

Il cite souvent Pascal, Gide, Camus, Voltaire et même Sade ou Chateaubriand

Un exemple lorsque l'auteur parle du voile :

« … Je me retenais toutefois de penser que l'archange Gabriel eût pu s'attarder sur des tenues vestimentaires ou des effets d'élégance féminine, dans ses révélations au Prophète. N'était-ce même grotesque de concéder à Dieu un thème aussi futile ? Comment pouvait-on croire que Dieu eût pu s'éterniser sur un problème aussi frivole pour jauger la valeur de la vertu de l'homme sur terre. »

J'ai découvert cet essai fictionnel grâce à une opération masse critique spéciale pour laquelle je remercie Babelio et l'éditeur Iggy Book qui a eu la gentillesse de m'envoyer les deux tomes.
Lien : https://leslivresdeve.wordpr..
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Courageuse et étonnante entreprise, Une nuit à Aden dont le tome 1 a une suite qui peut se lire indépendamment, est roman mais surtout un essai dont la pédagogie est réussie, se mettant à la portée de tout lecteur qui veut essayer de comprendre l'Islam : « Par Islam, j'entends la civilisation islamique ; avant tout une religion où le destin d'une vie n'est qu'une dépendance absolue de la volonté d'un dieu unique et transcendant, Allah. Mais aussi un culte avec ses tabous, sa liste interminable de prescriptions et de prohibitions, de proscriptions, de châtiments, de normes et de coutumes. »
Par cette citation, Emad Jarar s'exprime par l'intermédiaire de son héros qui porte le même prénom mais se nomme Erraja. Il pose, dès le début du livre, le problème dont il veut traiter après un court préambule et déjà une première volée de sourates du Coran qu'il va analyser sans concession, avec une lucidité remarquable.
Pour lire Une nuit à Aden (1), j'ai dû utiliser un second marque-page pour suivre l'abondant dossier de notes. Certes, elles cassent la lecture, la freinent mais en même temps, elles sont, pour la plupart, très instructives.
Tout commence par une escale à Moscou, le 2 septembre 1989, car le narrateur est en route pour Sanaa, au Yémen du Nord où il est envoyé au titre du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD). Ce n'est qu'en dernière partie du livre que l'auteur nous ramènera à Sanaa. Auparavant, il se livre à une analyse détaillée et très argumentée du Coran et de la Sunna, seconde source de la loi islamique. Un glossaire précieux complète le volume.
Une escale au Caire donne l'occasion au narrateur de parler de ses origines palestiniennes puis de son enfance heureuse à Alexandrie, entre un père musulman et une mère chrétienne (rite grec-melkite) venue de Salonique. C'est l'occasion d'expliquer ce qui se passe en Islam lors d'un mariage mixte avec deux personnes de religions différentes.
Ainsi, tout au long du livre, chaque occasion, chaque rencontre, chaque fait de vie donne lieu à analyse, explications, commentaires puis cela se calme un peu lors de la période newyorkaise où le roman prend nettement le dessus avec un passage digne d'un thriller mais toujours sur fond de problèmes religieux.
Une nuit à Aden (tome 1) constitue une documentation essentielle à lire et relire pour toute personne voulant comprendre ce qui se passe avec l'islam. L'auteur a un regard très critique sur sa religion pour en étudier toutes les caractéristiques, toutes les déviances et tenter de pacifier les relations avec les autres monothéismes.
Son narrateur ne peut se passer de l'idée de Dieu et utilise les arguments habituels pour faire admettre cette nécessité. Pourtant, tout au long de ma lecture, je me suis dit que seule la laïcité recèle la solution à tous les maux apportés par ces religions monothéistes qui n'ont eu de cesse de se combattre au fil des siècles, laissant sur leur passage des quantités de vies abrégées, de souffrances imposées pour asseoir, en fait un pouvoir masculin et politique.
J'ai aimé le côté romanesque du récit, les amours du narrateur et surtout les mises en garde devant les jusqu'au-boutistes musulmans, ceux qui veulent revenir au Moyen Âge et sont prêts à tout pour asservir les femmes. Certaines choisissent de se soumettre pour assurer un confort relatif et une sécurité provisoire.
Ce tome 1 se passe à la fin des années 1980 mais, depuis, tout ce que l'auteur mentionne, décrit, s'est aggravé, amplifié, allant jusqu'au pire. Emad détaille bien l'héritage des textes coraniques et explique abondamment les interprétations qui en ont été faites au cours de discussions, d'entretiens amicaux ou pour répondre à des questions. Je remercie vivement Babelio et Emad Jarar qui m'ont permis cette lecture très instructive.

Lien : http://notre-jardin-des-livr..
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[Lu dans le cadre d'une Masse critique Privilège Babelio]

Par la voix de son narrateur, Emad, musulman palestinien né d'une mère chrétienne, l'auteur d'« Une nuit à Aden » interroge l'islam, son histoire, ses différents courants et leurs pratiques et pose la question du bien-fondé et de la valeur spirituelle d'une voie religieuse qui – au moins dans son approche fondamentaliste – refuse toute interprétation et toute analyse de son texte sacré à des croyants condamnés à une éternelle récitation privée de réflexion et de conscience : « A l'approche du XXIe siècle, qu'en est-il de ce culte dont l'ostracisme et la rigidité transforment ses fidèles en fervents sectateurs, et de ses adeptes, en font de simples spectateurs, à défaut de les laisser être les acteurs de leur propre vie ? »

Emad se remémore les très nombreuses discussions théologiques qu'il a eues pendant huit ans avec Khalil, son ami d'enfance – un érudit, comme lui musulman palestinien - , confronte les points de vue, relit les sourates et la sunna, explore les différents piliers de l'islam et démontre à quel point peuvent être fragiles et théologiquement sujets à caution les dogmes (le djihad, le voile…) sur lesquels s'appuient les fondamentalistes pour faire de l'islam une religion carcérale – surtout pour les femmes – ouverte à tous les excès et à leurs conséquences.

Ce faisant, Emad Jarar adopte une attitude courageuse et peu répandue – qui n'est peut-être pas d'ailleurs, pour lui, sans danger : celle d'un musulman qui est également un intellectuel et qui s'efforce de « porter un regard sans indulgence sur son histoire, sur les livres qui gouvernent et son âme et sa vie (…) pour éviter que seules les passions et les émotions l'emportent sur la réflexion. » Et il nous livre un récit brillant, intelligent, extrêmement érudit et bourré d'informations encore enrichies de nombreuses notes… toutes qualités qui, au moins pour moi, sont également le principal défaut de cet ouvrage par ailleurs passionnant.

Alors que, pourtant, je porte un intérêt très vif aux questions (et questionnements) spirituels et théologiques et que, pour cette raison, « Une nuit à Aden » aurait dû d'emblée capter mon attention, j'ai eu au contraire beaucoup de mal à pénétrer dans ce récit dont j'ai d'ailleurs (je l'avoue) survolé certains passages. La forme de « l'essai fictionnel » choisie par l'auteur rend en effet la lecture particulièrement ardue et malaisée : car, à la fois essai et fiction, « Une nuit à Aden » n'est en réalité ni tout à fait l'un, ni tout à fait l'autre.

Parce que, pour la partie « essai », l'auteur a choisi de recourir au procédé narratif d'une remémoration, au fil de la plume, de conversations anciennes, le corpus théorique, théologique et philosophique souffre d'un manque d'organisation et de classement – tels qu'on pourrait les trouver dans un véritable essai. de ce fait, il emporte le lecteur dans un flot ininterrompu d'informations certes intéressantes mais à la présentation décousue qui donne le sentiment d'un labyrinthe touffu dans lequel il est malaisé de s'orienter.

Quant à la partie « fiction », qui vient fluidifier le propos en y introduisant une dimension d'émotions et d'humanité bienvenue, nous ne sommes pas là non plus dans un registre réellement romanesque dans la mesure où, dans ce premier tome, les éléments biographiques des différents personnages, comme les sentiments, les liens et la romance qui les unissent servent surtout – c'est du moins ce que j'ai ressenti – de toile de fond et de prétexte à cette exploration théologique.

Au final, « Une nuit à Aden » est une lecture exigeante et relativement ardue, mais néanmoins enrichissante et pleine d'intérêt qui nécessite de prendre son temps et « se mérite » mais qui risque fort – pour les raisons exposées plus haut – de déconcerter autant les amateurs d'essais que de fiction. Tous y trouveront, néanmoins, quantité d'informations de première main sur l'islam, sa diversité, sa foi et ses pratiques, ainsi que la matière nécessaire à une meilleure compréhension de l'islam radical, de son argumentaire et de ce qui peut nourrir ses possibles dérives.

Une belle et riche découverte, donc, pour laquelle je remercie Babelio et surtout Emad Jarar qui m'a de surcroît également et très gentiment envoyé le tome 2 de cet ouvrage.

[Challenge MULTI-DÉFIS 2019]
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Livre puissant, à la documentation exceptionnelle.
Un essai plus qu'un roman qui plonge le lecteur au coeur des religions, dites révélées. Une clarté d'écriture dont certains Goncourts devraient s'inspirer. Aucun obscurantisme, mais un retour aux sources si nécessaire, à chaque fois explicité et détaillé.


Une vraie plongée dans l'islam écrit. Les textes en préambule, puis le temps de l'analyse, avant de traduire les grandes évolutions jusqu'à nos jours.

Né palestinien, musulman par son père, chrétien par sa mère et de langue française, un croisement, qui peut mener souvent à une impasse, à un rond point sans issues à la Raymond Devos, à des possibles voies de traverse. La tolérance comme choix de vertu régalienne est affirmée, pour le comportement des hommes dans la cité.
Magnifique.

Je viendrais étoffer quelques points clé de ce très gros travail précis et convainquant.
Pour un néophyte de l'islam, enfin une belle porte d'entrée solide, non grinçante, bien huilée.
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Une nuit à Aden est un roman passionnant et demande à son lecteur une certaine attention car il allie fiction et essai sur l'Islam.
Cet effort est récompensé.

Emad est un jeune homme palestinien, né à Paris, d'un père palestinien, de confession musulmane sunnite, et d'une mère grecque, de confession catholique-melkite. Par sa naissance, la Loi islamique fait de lui un musulman, mais étonnamment, grâce à sa mère, il reçoit aussi une éducation catholique.

J'ai apprécié le parcours d'Emad, son regard sans concession sur les musulmans, sur la violence des commandements et devoirs du Coran et de la Sunna. La double culture de l'auteur, aussi riche d'enseignements religieux et historiques que de littérature française ou russe, apporte un regard juste et précis à ce récit. En scrutant le passé, et par son introspection, il nous donne les clés pour comprendre le monde actuel : le statut de la femme musulmane, le sort des homosexuels et de l'apostasie, le jihad, l'impact d'une telle violence « sacrée », sur des esprits incultes, influençables, parfois fragiles.

Il faudrait extraire du Coran toute la violence, les menaces, les contradictions, la lourdeur et la redondance, et n'en laisser que la beauté, la lumière, la divinité. le Coran est incréé, on ne peut y toucher ? Pourtant ce sont des hommes qui l'ont écrit, interprété, tout comme la Bible ou la Torah, à une époque si reculée que ces Textes sont devenus inadaptés à la société contemporaine. Des hommes avec des rêves d'invasion, de puissance, qui ne se préoccupaient nullement de tolérance ou de charité, supprimant ou modifiant certains versets à leur convenance, profitant des difficultés de traduction de la langue d'origine (« plus du bon syro-araméen que du mauvais arabe.» p.93), des allégories aux sens multiples et obscurs.

Un roman à lire pour mieux comprendre les liens entre les religions monothéistes. Un seul Dieu et plusieurs prophètes pour mieux se haïr ?
Emad a trouvé son équilibre, riche de son exil. Il choisit sa patrie là où il y a tolérance et espérance.

C'est le genre de roman-essai que j'apprécie, tout comme Illusions dangereuses de Vitaly Malkin qui permet d'ouvrir les yeux sur les fondements des croyances et leurs incidences sur l'humanité. Je remercie Babelio, l'éditeur Iggy Book, et Emad Jarar pour ces deux tomes qui mettent en lumière l'obscurantisme. Un auteur à suivre.




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Une nuit à Aden fût une lecture déroutante, qui m'aura d'abord trouvée fort enthousiaste avant de me perdre irrémédiablement. Ce qui a fini par me lasser de cet essai fictionnel, c'est qu'il est "beaucoup trop".

Trop rempli de notes pour commencer. Elles ne sont pas toujours indispensables et ont même tendance à se répéter. Il y en a même deux pour expliquer le choix du patronyme du personnage principal : avez-vous déjà lu un auteur s'expliquer sur le choix du petit nom de ses personnages dans une note ? Cela renvoie le lecteur à l'acte d'écriture et empêche toute immersion dans le récit.

Et justement, il y a trop de références à l'acte d'écriture. Je me suis retrouvée de nombreuses fois projetée sur mon canapé, incapable de reprendre sereinement le fil du récit.

Il y a aussi trop d'emphase. Si la plume d'Emad Jarar apparaît d'abord très belle et érudite, cela devient vite excessif dans la partie fiction. Même les personnages s'expriment avec grandiloquence, ce qui est souvent loin d'être naturel. Là encore, ce style un peu ampoulé nuit à la narration.

Enfin, il y a trop de mélange de genre. Ni essai ni fiction, cet ouvrage ne m'a convaincue ni d'un côté ni de l'autre. Dur de suivre un récit romanesque lorsque l'auteur part dans de longues digressions sur la religion, sur des dizaines de pages, sans qu'il y ait de lien logique immédiat avec la partie narrative. Je formule exactement le même reproche au côté essai.

Mais je me dois de dire que j'ai appris beaucoup sur l'islam, le Coran et la Sunna. J'ai vraiment apprécié les 50 premières pages environ, que j'ai pris un réel plaisir à lire.
Emad Jarar a une vision moderne de l'islam. Il cherche à questionner le Coran, ce qui n'est pas du tout évident dans la culture musulmane. Je suis certaine que je prendrais plaisir à lire un essai de l'auteur sur le monde islamique. Sa plume conviendrait parfaitement à ce genre littéraire et son érudition serait mise au service de ses réflexions.

J'espère avoir été aussi honnête que bienveillante dans mes propos, ne souhaitant pas choquer l'auteur, qui a été par ailleurs d'une gentillesse remarquable (son ouvrage, gagné dans le cadre d'une Masse Critique privilégiée, était accompagné d'une assez longue lettre et du second tome).
Je le remercie pour m'avoir laissé la parole, pour m'avoir appris beaucoup et m'avoir donné envie d'approfondir mes connaissances sur l'islam et le monde musulman.
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Prenez un auteur, Emad Jarar, nouvellement arrivé au pays des écrivains. Prenez un personnage principal qui s'exprime à la première personne et qui se nomme lui aussi Emad. Dès la première ligne, Emad (l'auteur) nous avise qu'il jettera "un oeil critique sur le Coran et la Sunna" et qu'on lui reprochera probablement " d'avoir recours à des études d'auteurs non- musulmans". Crainte. Courage. Où ai-je mis les pieds ?

Des extraits du Coran illustrent les propos de l'homme tout au long de son livre qui débute ainsi : à Moscou une discussion entre deux jeunes palestiniens exilés à Manhattan revient à la mémoire de l'un d'eux (Emad, forcément). Elle a duré huit ans et portait sur la question de savoir si l'on peut exister sans la parole divine et si l'homme peut posséder un quelconque sens moral sans avoir recours au Coran ?

Les questions existentielles d'Emad sont les suivantes :
- La réflexion morale et spirituelle d'un croyant peut-elle exister de manière individuelle ?
- Pourquoi faut-il toujours la reléguer à un simple exercice collectif ?

C'est par le biais de cet « essai fictionnel » qu'une sérieuse (et périlleuse) grande mise au point est réalisée, en ce 21e siècle en ce qui concerne « ce culte dont l'ostracisme et la rigidité transforment ces fidèles en fervent sectateur, et de ses adeptes enfants de simple spectateur à défaut de les laisser être les acteurs de leur propre vie » (page 15).

J'ai été stupéfaite de lire un écrit de ce genre, comprenant mieux sa faisabilité, quand Emad dit, que « loin de leur patrie dans une ville où les religions en l'absence de rites quotidiens rendent moins aliénante la vie d'un musulman » de telles analyses peuvent être menées.

Un retour aux sources jusqu'au 12e siècle en Islam par la bouche de son meilleur ami Khalil nous éclaire sur les fondements et les débuts de cette religion dans un temps où la démarche spirituelle du croyant était alors plus individuelle et se cantonnait davantage à la sphère privée. Où l'on découvre aussi l'arabité de la religion musulmane, mainmise des Arabes sur leur texte sacré. Entre choix de langue et pouvoir géopolitique, on revient toujours au même quand il s'agit des Hommes : pouvoir, violences, arbitraire.

Emad nous raconte cet « arbitraire féroce » vécu depuis 8 siècles qu'il juge
« illogique » et qui selon lui « a entraîné l'islam dans un monde d'intransigeance ».
Description fine et argumentée d'une « orthodoxie de masse, coercitive, intransigeante, réfractaire à l'individu et à la grandeur de son existence propre et indépendante ».

Le personnage principal apatride, et issu de deux cultures religieuses différentes, a décidé de trouver intellectuellement le ressort nécessaire pour tracer sa route comme il l'entend, et prendre en main son avenir malgré cette difficile double appartenance. A la fois français grec palestinien et arabe, avec un père musulman et une mère chrétienne, il est moins arrimé à la terre de ses ancêtres que les générations précédentes et il a développé un intérêt certain pour mieux comprendre les enjeux politiques : « Je suis un musulman avec les yeux d'un chrétien à défaut d'en avoir le supplément d'âme ». C'est à un islam tolérant qu'il souhaite être rattaché, c'est un louable crédo.

Chaque pays, lieu d'une escale pour le personnage principal a droit à sa petite analyse historique et géopolitique, ce qui fait de cet ouvrage plus qu'un roman, plus qu'un essai, une carte historico-spirituelle-géopolitique du monde.
Emad se veut " un Arabe, mais aussi un homme libre » capable de voir au-delà des textes sacrés.

J'ai trouvé ce texte foisonnant d'érudition et étayé par une écriture romanesque accessible. Ce qu'il nomme la " logosphère islamique " ou encore le "ghetto arabo islamique" (en annexe) est vilipendé dans ce texte parfois sarcastique, auquel je ferai tout de même un reproche : sa trop forte densité textuelle. Les répétitions (idées) sont importantes faisant souvent de la narration quelque chose d'un peu fastidieux, ennuyant à certains moments. Une synthèse, voire une réduction littéraire aurait grandement permis à Une nuit à Aden de gagner en lisibilité. C'est vraiment dommage.

Si l'on a beaucoup de temps, et de patience, on ne peut que reconnaître et apprécier qu' Une nuit à Aden fut rédigé « au nom de la culture générale et de la tolérance ». Sorte de recontextualisation historique de toutes les religions et des peuples, il est donc une gifle littéraire bien nécessaire par les temps funestes qui courent. Cette courageuse autocritique romancée pourra éviter les discussions à l'emporte-pièce sur ce sujet, car les nombreux éclaircissements qu'il nous offre permettent de mieux expliquer le monde oriental d'aujourd'hui ; ses conséquences et sa relation avec les autres civilisations. Merci à Babelio et à l'auteur pour cette découverte que je m'en vais faire suivre de la lecture du tome 2, en espérant y retrouver les qualités du premier tome, sans les écueils.

Lien : http://justelire.fr/une-nuit..
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