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EAN : 9782330133658
256 pages
Actes Sud (04/03/2020)
3.84/5   56 notes
Résumé :
Deux enfants d'une douzaine d'années, l'un et l'autre de famille monoparentale, deviennent amis. Ensemble ils apprennent à formuler ce qu'ils ressentent. Ainsi s'imposent à eux les nuances du langage, la nécessité de nommer au plus près du sens les sentiments envahissants qui bousculent la fin de leur enfance et les peines enfouies dans leur mémoire. Sans compter la violence que leur impose l'incapacité de leurs parents à leur parler de la mort ou de l'abandon qui o... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (22) Voir plus Ajouter une critique
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Lors d'une de mes précédentes lectures d'un roman de Natsuo Kirino, je me suis intéressée au système éducatif et aux valeurs familiales nippones, découvrant un système et des valeurs bien différents du modèle occidental. Un système dans lequel la pression de la réussite est exercée dès le plus jeune âge sur les écoliers dont le peu de temps libre est consacré aux "jukus" (stages de révisions intensifs) ; une structure familiale où le silence et la modération du langage sont de mise et font office de politesse, reléguant ainsi l'expression spontanée des sentiments au second plan, la proscrivant bien souvent en public, lui préférant une forme de pudeur et de distance.

"L'adolescence c'est l'âge où l'on doute de tout ce qui est possible et de rien de ce qui est impossible" (Jean Dutourd), d'où l'importance de pouvoir mettre des mots, des paroles sur les émotions, les sentiments qui submergent l'adolescent face à des évènements passés ou à venir, graves ou moins graves et encore plus lorsque se pose la question du deuil comme c'est le cas dans ce récit. Faire le deuil d'un parent est loin d'être chose aisée pour un enfant ou un adolescent, le chemin pour y parvenir est long et il s'effectue en partie grâce aux échanges et à la parole avec l'entourage et le parent restant.

C'est de cela que nous parle ce très joli roman de Mieko Kawakami dont l'écriture élégante et pudique a le mérite de ne jamais tomber dans l'excès propre au jargon adolescent. le récit, par le biais de sa double narration, donne la parole tour à tour à Mugi et Hegatea au Japon de nos jours, un garçon et une fille, tous deux âgés de douze ans que la perte respective d'un de leurs deux parents alors qu'ils étaient encore très jeunes va rapprocher instinctivement. Une double narration très pertinente qui accentue la caractérisation psychologique des deux personnages principaux, permettant ainsi au lecteur de s'approprier dès les premières pages, leurs pensées et leurs humeurs.

Mieko Kawakami nous dresse les portraits touchants et emplis de tendresse de ces deux enfants qui entrent dans l'adolescence, période troublée et régie par son lot de questions existentielles. Deux enfants qui ont beaucoup de respect et d'attention mutuelle l'un pour l'autre, qui ensemble vont grandir, vont avancer sur le chemin qui est le leur et tenter de découvrir ce que les adultes ont occulté et rangé dans des tiroirs tels des secrets inavouables. Ces mêmes adultes qui ont préféré enfouir ces secrets plutôt que de les affronter comme en témoigne le sapin de Noël qui trône comme une relique de sanctuaire dans le salon chez Hegatea depuis huit années que sa maman a disparu.

Comment un enfant peut-il faire son deuil si on ne l'autorise pas à y mettre les mots et qu'il est laissé dans l'ignorance ?
Apprendre à parler et à s'exprimer c'est aussi apprendre à poser des questions et qui sait (et c'est déjà beaucoup) tenter d'y trouver des réponses...

La nuit n'est jamais complète.
Il y a toujours, puisque je le dis,
Puisque je l'affirme,
Au bout du chagrin,
une fenêtre ouverte,
une fenêtre éclairée.

Il y a toujours un rêve qui veille,
désir à combler,
faim à satisfaire,
un coeur généreux,
une main tendue,
une main ouverte,
des yeux attentifs,
une vie : la vie à se partager...

(Paul Éluard ; La nuit n'est jamais complète)

*Je remercie Tetrizoustan pour le partage régulier de sa bibliothèque.
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“J'adore “ raconte l'univers de deux enfants qui grandissent, l'un et l'autre dans une famille monoparentale. Mugi est orphelin de père et Hegatea ( surnom) orpheline de mère. Ils fréquentent la même école élémentaire, et au départ ne sont pas à proprement parler amis. Leurs solitudes et leurs vies de famille insolites vont les pousser à comprendre et partager leurs ressentis réciproques sur leur existence au quotidien.
Muji a une maman devin astrologue très occupée, aime les yeux de Miss Ice Sandwich, dessiner et se confier à sa grand-mère paralysée.
Hagetea aime regarder des films avec son papa, critique de cinéma, et possède déjà une philosophie de vie précoce pour son âge "je suis devenue une habitante d'un univers où ça n'existe pas, la prochaine fois. Il n'y a que maintenant. Je l'ai décidé il y a très longtemps". Confrontée à un secret concernant sa propre vie au hasard d'une recherche sur Google, elle va passer une épreuve où Muji va l'y épauler sans hésiter , "Si on est épaule contre épaule, c'est plus facile que de rester debout tout seul “. Tous les deux en sortiront grandis et soudés à Vie.... du moins je l'espère 😊.

C'est une jolie histoire écrit avec poésie et amour, qui dépeint la difficulté d'exister dans notre monde actuel, pour deux enfants solitaires, qui n'ont pas encore basculé dans le monde des apparences, et cherche à rester dans leur propre vérité.
Beaucoup aimé.

"alpacino ! C'est notre façon de nous dire au revoir que personne d'autre ne peut comprendre...."😊
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C'est sûr, Mugi est le garçon avec lequel Hegatea s'entend le mieux. Sa maison se trouve à cinq minutes de la sienne, et il vient souvent regarder des films chez elle, alors que son père, critique de cinéma, dort sur le canapé à côté d'eux. Oui, c'est sûr, avec Mugi, dont la mère est astrologue, ce n'est pas comme avec ses camarades qui ont fini par se dire qu'elle n'était pas tout à fait comme les autres. Mugi a perdu son père et Hegatea sa mère, et cet état d'orphelins rapproche les deux enfants qui l'un avec l'autre cherchent des réponses aux questions restées en suspens avec leur parent respectif, et grandissent moins solitaires.

« — Hegatea, a dit Mugi au bout d'un moment.
— Quoi, j'ai dit en me frottant les yeux avec les doigts pour pas montrer que je pleurais.
— Hegatea.
— Quoi.
— Il faut qu'on se mette épaule contre épaule.
— Épaule contre… ?
— Oui, épaule contre épaule, il a dit.
— Pour quoi faire ?
— En se mettant épaule contre épaule, ce sera un peu plus facile.
Mugi m'a regardée et a souri. 
— Si on est épaule contre épaule, c'est plus facile que de rester debout tout seul. Tu veux essayer ? »

Une réflexion poétique et sensible sur la façon dont le langage chez l'enfant exorcise ses peurs, et participe à la construction de l'identité de l'adulte en devenir.

Merci Idil pour cette belle lecture

Challenge MULTI-DÉFIS 2020
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Hegatea et Muji sont en dernière année d'école primaire au Japon et commencent à peine à sortir de l'enfance. Alors que, dans un océan de non-dits, l'une vit avec son père et l'autre avec ses mère et grand-mère, les deux enfants liés par une amitié grandissante vont tenter de trouver eux-mêmes la réponse à leurs questions, notamment sur leurs familles monoparentales.


Mieko Kawakami réussit merveilleusement à se glisser dans la tête de ces deux pré-adolescents, restituant leurs doutes et leurs émotions avec une justesse d'autant plus frappante que l'écriture reproduit à s'y méprendre leurs façons de penser et de s'exprimer. Unis par une touchante amitié, un solide bon sens, et la sincérité simple et directe de jeunes êtres qui n'ont pas encore rejoint le monde adulte des faux-semblants, Hegatea et Muji partagent leurs difficultés à quitter le cocon de l'enfance pour entrer peu à peu dans une réalité qu'ils commencent juste à discerner et à s'approprier.


Pétrie de tendresse et de délicatesse, cette lecture s'avère un attachant moment de fraîcheur, où la candeur le dispute à l'étonnant sérieux de ces deux enfants appliqués à trouver leur chemin parmi les ombres et les mystères des adultes qui les entourent.

Lien : https://leslecturesdecanneti..
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Une belle découverte cette histoire d'amitié entre deux enfants d'une douzaine d'années !
Mugi a perdu son père et Heagatea est orpheline de mère.
Ils fréquentent la même école élémentaire , solitaires de par leur statut, discrets ils ne sont pas à priori amis , n'en parlent jamais ....
Pourtant c'est ce contexte familial particulier, insolite qui les rapprochera.


Heagatea habite avec son père , critique de cinéma assez connu.
Passionnée de cinéma elle adore rejouer la scène de fusillades de Heat avec Al-Pacino, avec une perfection glaçante...

Mugi dont la maison se trouve à cinq minutes à pied de la sienne vient souvent visionner des films .
Il vit avec sa mère devin - astrologue et sa grand- mère paralysée à la suite d'une attaque cérébrale , il aime dessiner , participe même à des concours, peint à l'aquarelle ...
Petit à petit ils tentent de mettre des mots sur les réponses délicates à leurs questions .
Ils ressentent le besoin de nommer leurs émotions au cours de dialogues hésitants et tendres, cherchent des réponses sur les graves non- dits des adultes et leurs mensonges ...

Et Justement Heagatea cache un lourd secret ...

L'auteure tient la gageure étonnante de conter à hauteur d'enfant la notion de temps qui passe, le langage chez l'enfant , les MOTS : telle une passerelle ou un saut vertigineux entre le monde adulte et adolescent semblable à un beau voyage sur la construction de l'identité ...

Réflexion poétique sensible , touchante , roman tendre et gracieux à l'écriture pétrie de sensations éclairantes .... sur fond de culture japonaise .
.Jolie couverture surprenante , que l'on ne peut qu'admirer ...
—«  - Heagatea
—- Quoi .
——Il faut qu'on se mette épaule contre épaule .
—- Épaule contre,..?
—- Oui, épaule contre épaule , il a dit.
—- Pour quoi faire ?
—- En se mettant épaule contre épaule , ce sera un peu plus facile » ....

Et je ne résiste pas au plaisir de vous livrer la dernière phrase :
«  Je ne sais pas pourquoi , mais j'ai pensé que je n'oublierais jamais ce jour- là . »
Merci beaucoup Idil pour cette lecture rafraîchissante !
«  -J'adore » Éditions Actes-Sud , roman traduit du japonais par Patrick-Honnoré. .





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Citations et extraits (45) Voir plus Ajouter une citation
Maman,

J'espère que tu vas bien. Moi, je vais bien.
C'est la première fois que je t'écris une lettre, je ne sais pas si je vais pouvoir écrire comme il faut mais bon, j'ai quand même envie de t'écrire.
Des fois, quand je suis seule, ou quand je suis triste, je pense souvent à toi. Mais tu es partie tellement vite, avant que je sois grande, en fait je ne me souviens pas bien de toi, alors en réalité je n'arrive pas à penser à toi comme il faut et donc chaque fois, je t'appelle mais c'est tout, même si, des fois, j'ai quand même l'impression que je réussis à penser à toi en vrai.
Où tu es, maintenant ? Ce n'est pas trop solitaire, là où tu es ? Ce n'est pas trop triste ? En ce moment, je suis en sixième année d'école primaire, j'ai 12 ans. L'année prochaine, je vais au collège. Je mesure 154 centimètres, en chaussures je fais du 34, je suis la meilleure de la classe en sprint, et la troisième de toutes les sixième année. J'ai une coupe au carré qui descend jusqu'aux épaules. La matière où je suis la plus forte, c'est le japonais. On a commencé l'anglais aussi, mais pas beaucoup, juste un peu. Tous les jours, je mange avec papa, et des fois on regarde un film ensemble. Et on fabrique de la confiture de fraises qui est très bonne.
Parfois, je regarde tes photos. J'ai déjà vu la vidéo de
toi quand je suis née, une fois. Dans les vidéos ou les photos où je suis bébé ou de mon anniversaire, tu souris toujours, et quand je pense que tu es ma maman, les larmes me viennent toutes seules. Mais j'étais toute petite, alors quand on était ensemble et comment tu étais, je ne m'en souviens presque pas. Si tu étais restée vivante un peu plus longtemps, je pense que je pourrais penser à toi à l'intérieur de moi, n'importe où, même si je deviens plus grande, même si je deviens n'importe quoi, quand je veux, et ça aussi ça me fait pleurer. Je ne peux pas me rappeler, mais quand je pense à toi ça me fait quand même pleurer. Pourtant je ne peux pas, mais je t'appelle quand même : Maman ! Pardon de pleurer. Tu t'inquiètes peut-être, mais quand je serai grande, même très grande, je pourrai faire tout ce que je veux, je serai très forte, je travaillerai bien et je deviendrai adulte...
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Une seule fois, j'ai parlé du sapin de Noël avec papa.
Maman est morte l'hiver avant que j'aie quatre ans, juste après Noël, il paraît.
J'avais dit que je voulais un grand sapin de Noël plein de lumières qui brillent, alors ils m'avaient emmenée au magasin. Et on avait choisi ce sapin tous les trois, on l'avait décoré tous les trois et on était si heureux, il m'a raconté. Je ne me souviens de rien, comme l'histoire de la confiture de fraises que maman fabriquait, mais puisqu'il dit que ça s'est passé comme ça, j'ai l'impression que c'est vrai. Aujourd'hui encore, quand je regarde le renne argenté suspendu au bout d'une branche, ou l'étoile vaguement de guingois au sommet du sapin, je ressens je ne dirais pas de la nostalgie mais en tout cas une onde de quelque chose dans la poitrine, et j'ai l'impression qu'il faut que je le regarde tout le temps. En principe, un sapin de Noël, je suppose qu'on le range quand Noël est passé, et on le ressort quand arrive le Noël suivant, mais chez moi, le sapin de Noël reste en place en permanence, on ne peut pas le ranger. Autrement dit, il est là depuis l'hiver de la mort de maman, comme s'il était planté et qu'il poussait directement à travers le plancher.
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J’ai senti que ma voix tremblait et qu’une larme allait couler au bord de mes yeux. J’ai tourné le dos à Mugi et j’ai respiré par à-coups. Beaucoup de feuilles mortes flottaient dans le bassin du jet d’eau et se collaient en paquets pour faire un rond sur l’eau. On est restés sans parler, on n’a rien dit.
— Hegatea, a dit Mugi au bout d’un moment.
— Quoi, j’ai dit en me frottant les yeux avec les doigts pour pas montrer que je pleurais.
— Hegatea.
— Quoi.
— Il faut qu’on se mette épaule contre épaule.
— Épaule contre… ?
— Oui, épaule contre épaule, il a dit.
— Pour quoi faire ?
— En se mettant épaule contre épaule, ce sera un peu plus facile.
Mugi m’a regardée et a souri.
— Si on est épaule contre épaule, c’est plus facile que de rester debout tout seul. Tu veux essayer ?
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J’avais encore le cafard en rentrant à la maison. Je n’avais rien envie de faire, alors, tu parles, mes devoirs… Dans ces cas-là il m’arrive d’essayer d’écrire ce que j’ai sur le cœur. Parce qu’il me semble qu’une fois qu’elles deviennent des mots, les choses que je ne comprends pas s’éliminent.
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- Ton nom "Musgi" me fait penser à Van Gogh, puisque ça veut dire "le blé".
- Euh... Vous voulez dire, parce que Van Gogh a peint des champs de blé ? a demandé Mugi d'un air un peu tendu.
- Oui, il y a ça, aussi, mais il y a une phrase de Van Gogh que j'adore, c'est : "Nous sommes du blé"
- Oui, oui.
Ao avait l'air de s'amuser, elle riait.
- Parce qu'à l'époque, les gens ne mangeaient que du blé, c'est pour ça. Comme nous ne mangeons que du blé, nous sommes faits de blé, c'est ça que ça veut dire. Et l'art, tout ça, n'est-ce pas le blé véritable, en définitive ? Tu ne trouves pas ça formidablement simple et puissant, comme expression ? Si les gens sont du blé, la société est un champ de blé. (p; 190)
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Vidéo de Mieko Kawakami

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Payot - Marque Page - Mieko Kawakami - Seins et Oeufs
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