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Rubayat est un recueil percutant, surtout par rapport à l'époque où il fut écrit et aussi pour le contexte culturel qu'il reflète. L'auteur lettré et savant scientifique perse nous offre des vers au ton irrévérencieux envers la société musulmane où il évolue. Il n'hésite pas à glorifier avec une certaine désinvolture, la jouissance terrestre, en s'amusant au travers de ses mots à faire des anaphores sur le vin, des métaphores charmantes sur les femmes, plaidant sans cesse, pour vivre ici bas une vie de plaisirs, en célébrant un hédonisme existentiel permanent sans tabou, envers l'alcool, les filles, la fête sans se soucier des préceptes ou des dogmes d'un carcan religieux étouffant. Car pour lui, le paradis d'Allah n'existe pas, pas plus que l'enfer d'ailleurs, poussant même jusqu'à se moquer avec un humour raffiné de l'abstinence, du jeune en souhaitant au plus vite, le jour d'après ou le vin coulera de nouveau à flots. L'auteur, croit-il un minimum ? Sûrement juste une conviction de façade pour ne pas être trop inquiété dans une société conservatrice. En fait, en décortiquant ses vers, on ressent son agnosticisme, l'amenant au doute peut-être parfois, mais surtout à l'impossibilité de définir Dieu, finalité philosophique le confortant dans son idée de profiter de la vie sur terre au maximum, avant de redevenir poussière pour l'éternité.
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Qui se souvient des Turcs Selkjoukides ? personne. En revanche, le nom d'Omar Khayyam - dont la vie s'est entièrement déroulée sous cette dynastie - reste immortel. Sa célébrité tient seulement à quelques dizaines de brefs poèmes: des quatrains. Dans ces "roubaïyat", écrits dans la langue persane (farsi), les deux premiers vers riment ensemble avec le dernier, le troisième étant un vers libre. La fidèle traduction de ces poésies est sans doute difficile mais, pour autant que je puisse en juger, elle est réussie dans l'édition dont je dispose; la langue me semble fluide, le vocabulaire simple, la poésie dépourvue d'enflure lyrique.

Omar Khayyam démontre qu'il est un esprit libre, aimant la vie, indépendant des imams bigots et des princes de son époque, fasciné par l'impermanence humaine et par la force du destin. On est sidéré par l'audace de certains de ses vers, que les fanatiques ont sans doute considérés comme gravement provocateurs. Par exemple, il a écrit:
"Dans la cellule ou à l'école, au monastère et à la synagogue,
S'abritent ceux qui redoutent l'Enfer et recherchent le Ciel.
Celui qui connait les secrets de Dieu
Ne sème pas de telles semences dans le coeur de son coeur".

Le poète chante inlassablement les plaisirs de l'existence, et surtout le vin: une boisson prohibée dans l'Islam rigoriste. Il insiste tellement là-dessus qu'on peut se demander si, dans ses poésies, le vin n'est pas pour lui la métaphore de l'amour divin. Ainsi, certains critiques ont fait l'hypothèse que son orientation religieuse était le soufisme. Mais il est difficile d'être affirmatif à ce sujet. Quoi qu'il en soit, un grand nombre de ces quatrains sont des merveilles ciselées comme de minuscules chefs d'oeuvre.
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"On assure que celui qui boit ira en enfer. — Comment croire à cette parole mensongère ? — Si celui qui aime le vin et celui qui aime l'amour vont en enfer, — demain tu trouveras le paradis plat comme la main."

La sagesse de ce fou d'amour et d'ivresse n'a de pair que son humilité.
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Cet ouvrage , outre les quatrains , contient une introduction exposant la vie du poète et aussi l'aventure de sa redécouverte par le poète anglais Fitz Gerald . Il présente aussi en appendice un certain nombre de textes sur Kayyam ( Renan,Gauthier, ) et sur le soufisme. J'aime beaucoup cette poésie septique et hédoniste et ce personnage d'un savant et poète si éloigné de l'image que donne aujourd'hui (hélas) de l'Iran les fanatiques barbus au pouvoir.
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Le vin à la bouche

En ces temps misérables où l'intégrisme nie l'intégrité de chacun, il ne faudrait pas oublier que la parole engage le corps et la vie mêmes ; or, quelques dangereux intégristes agités du bocal, par leurs paroles de destruction n'engagent que mort et néant : en ce sens, ils sont bien les apôtres de la négation. Quand on massacre au nom d'une force d'Amour, on en souille le message en se souillant soi-même irrémédiablement.

L'oeuvre poétique d'Omar Khayam, enivrante et ironique, est plus que jamais salutaire en ces temps où l'homme n'en finit pas d'être un loup féroce à l'égard de son semblable : c'est une ode tout entière qui célèbre la vie.

Né au XIIe siècle à Nichapur en Perse et reconnu surtout pour ses travaux de mathématicien, de philosophe et d'astronome, c'est dans le secret que le poète persan chantre du vin écrivit ses “Rubayat” car, bien tôt, il avait compris qu'en terre hostile à la liberté de l'esprit il faut toujours s'avancer masqué ; et garder sa parole la plus intime par-devers soi. Les “Rubayat” d'Omar Khayam ont le don de revivifier l'âme et le corps dans un même élan par leur sagesse, leur bon sens, leur sauvagerie dionysiaque et leur irrévérence. La traduction du poète Armand Robin est d'une vigueur exemplaire.

Dans le très beau livre “Samarcande” (que je recommande chaleureusement à tous ceux qui aiment l'oeuvre d'Omar Khayam), le romancier libanais Amin Maalouf nous narre avec passion les quelques éléments connus de l'histoire tumultueuse de ce prince des poètes dont la parole demeure toujours essentielle.

À présent, quoi de mieux pour vous donner le “vin” à la bouche, que de verser dans la coupe de vos lèvres, tel un échanson fidèle, quelques “quatrains” du grand poète de Nichapur (en persan, le mot “rubayat” signifie “quatrains”).

« Prends peur ! ton âme de toi va se débarrasser !
Dans les mystérieuses terres de Dieu tu vas entrer !
Bois du vin ! tu ne sais pas d'où tu es venu !
Vis la vie ! sais-tu, vers où t'en iras-tu ? »
Omar Khayam (p. 16, traduction : Armand Robin)

« Cette chair, ce costume corporel, c'est rien !
Cette enceinte, cette voûte tentière des cieux, c'est rien !
Fais la fête ! dans ce tintamarre de vie et de mort
Nous ne tenons que par un souffle, et ce souffle c'est rien. »
Omar Khayam (p. 58, traduction : Armand Robin)

« Serveuse, le vin que je bois sur ton visage est brillant de sueur ;
Puisse le mauvais oeil ne pas t'atteindre, toi, visage, mon but d'ébène !
Ta bouche aux teintes de vin est une fontaine de grâces ;
Il vaut cent Christs ressuscités celui qui boit le vin que tu es ! »
Omar Khayam (p. 84, traduction : Armand Robin)

« Ils disent tous : “À la Résurrection il y aura ceci et cela
Et Dieu, ce doux ami, aura le coeur hargneux !”
Non ! du Bien absolu ne vient que du bien.
Sois bon de coeur et bonne sera la fin. »
Omar Khayam (p. 88, traduction : Armand Robin)

© Thibault Marconnet
le 28 décembre 2014
Lien : http://le-semaphore.blogspot..
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Rien n'est plus difficile que de se procurer une édition fiable des Robâ'iyât, des Quatrains, de Khayyâm. Ni le texte persan, ni les traductions ne sont sûrs : le 'divan', ou poésies complètes, de cet auteur, varie considérablement (de 170 poèmes à plus de 850), car il y a plus de poèmes attribués à Omar Khayyâm qu'il n'a pu en écrire de toute sa vie. En Iran, on m'a dit que chaque mollah qui se sentait un peu poète et qui buvait en douce y allait de son quatrain qu'il attribuait à Khayyâm pour ne pas avoir d'ennuis. Ainsi, l'édition bilingue Maisonneuve et Larose propose-t-elle la vieille traduction de J. B. Nicolas (1861), qui comprend 464 quatrains tirés d'un manuscrit du XV°s ; il y en a même un autre à Lucknow, qui contient 845 quatrains. Heureusement, en 1949, l'université de Cambridge acquit un manuscrit datant de 1259, le plus ancien de tous jusqu'à la découverte du manuscrit de Téhéran (1209), et venu de Nishapour, la ville du poète, contenant 172 quatrains. le traducteur français de Poésie Gallimard, Armand Robin, pense que la meilleure version française est celle de Claude Anet, "jolie plutôt que forte".
*
En somme, le lecteur français doit s'orienter seul au milieu d'une jungle textuelle difficile, et prier pour ne pas tomber, comme il arrive, sur une version française prétendument faite sur l'original persan, alors qu'elle ne traduit que celle de l'Anglais Fitzgerald, aussi célèbre que fausse dans le monde anglo-saxon : "En tant que traduction elle est inadmissible ... C'est quelque chose comme une attitude mentale coloniale à l'égard de la littérature de l'Orient", écrivait Arberry dans sa préface à son édition du manuscrit de Cambridge.
*
Pour ma part, trop peu versé en persan pour vérifier, j'accorde ma confiance au probe Sâdegh Hedayat et à l'éditeur José Corti pour leur édition critique intitulée "Les chants d'Omar Khayyâm".
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Ce livre-ci publié par les Mille et Une Nuits, a certes l'avantage de tenir en poche, mais à moins de retracer toute l'histoire du texte, je n'irais pas jusqu'à le recommander.
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Les quatrains de ce poète du XIè siècle chantent dans une langue savoureuse (merci la traduction de M Armand Robin) les plaisirs de la vie. C'est une véritable ôde aux femmes, au vin et aux plaisirs, en parfait hédoniste.
Le poète vivait à une époque marquée par les attentats de la secte des Haschichins, perchée dans sa forteresse d'Alamut. Pourtant, ses poèmes foisonnent d'une grande liberté et indépendance d'esprit vis-à-vis de la religion ou de l'ordre établi.
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J'ai une grande admiration pour les poètes et la poésie en général et particulièrement la poésie perse, je me suis régalée à lire ce petit recueil. A travers les vers d'Omar Khayyam on comprend mieux l'univers du soufisme et sa complexité.

J'aime le fait aussi que les quatrains puissent se lire d'une traite ou se picorer comme on le souhaite nous laissant le temps de méditer ou de se délecter de chaque mot. Ce qui est toujours bluffant quand je lis Khayyam c'est de voir à quel point ses idées étaient modernes et emplit de liberté et d'ouverture d'esprit.

Le quatrain ou rubâi se compose de quatre vers dont le premier, le second et le quatrième riment ensemble ; le troisième est blanc. le quatrain est tout un poème qui a son unité de forme et d'idée ; c'est le genre le plus puissant de la poésie persane. La répercussion des rimes produit des harmonies et des contrastes de sons qui donnent un relief étrange aux harmonies et aux contrastes de l'idée.

Véritable hymne à la vie et à ses plaisirs , c'est une poésie raffinée et accessible, sensuelle où l'on y parle de parfums, de femmes, d'amitié, de vin, de parfum de fleurs, de musique… Ce poète est passionnant et sa poésie tellement moderne.

VERDICT

INDISPENSABLE pour les férus de poésie mais pas que, pour se familiariser avec la Perse, la sagesse soufie. A offrir, à glisser dans son sac. SAVOUREUX
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Les Quatrains d'Omar Khayam sont une source inépuisable de sagesse et de réflexion.
On ne sait pas vraiment lesquels lui attribuer véritablement, mais tous ceux présentés ici semblent liés d'une même veine, mêlant humour, vin consommé sans modération et amour de la vie au jour le jour.
Ces petits aphorismes, ces poèmes court peuvent nous accompagner tout au long d'une journée ou tout au long de la vie !

Quel plaisir de lire ces petits chefs d'oeuvre au détour d'un instant de calme.
Rire, amour et ivresse par la plus belle plume de l'Iran du XIIeme siècle.
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Alors que Khayyam n'a pas catégoriquement nié l'existence de Dieu, il avait ses questions et ses inquiétudes au sujet d'un tel être surnaturel, et était pour le moins fortement sceptique quant à l'idée d'une vie après la mort.
'Khayyam ', se demande-t-il dans un quatrain, 'qui a dit qu'il y aurait un enfer ? Qui a été en Enfer et qui est revenu du Ciel ? '

Khayyam rit à l'idée qu'il vivra après sa mort, en particulier dans un paradis islamique rempli de belle jeunes femmes et de vin - les mêmes choses que l'islam orthodoxe en Iran proscrivait. Doutant des promesses faites par la religion dans laquelle il est né, il ne s'intéresse qu'à cette vie, dont il déplore amèrement l'éphémère et est déterminé à tirer le meilleur parti - avec des quantités prodigieuses d'alcool.

Malgré toutes les libertés qu'il a prises avec les Rubáiyát, c'est en grande partie grâce à FitzGerald que Khayyam s'est si bien comporté en Occident. En revanche il est une figure controversée dans beaucoup de pays musulmans compte tenu de ses opinions sur la religion et l'au-delà, ainsi que de son goût insatiable pour le vin (et la belle vie en général).

Certains ont tenté de dépeindre Khayyam comme un musulman soufi, affirmant que le vin qu'il prône si longuement et avec tant de détails est métaphorique plutôt que littéral – le vin serait l'âme...En fait ils détournent la poésie de Khayam comme l'ont fait les targoumins juifs et les glosateurs chrétiens avec la Cantique des cantiques

D'autres l'occultent : la République islamique selon un article de 2019, a commencé à retirer Khayyam et d'autres géants littéraires persans des manuels scolaires.

Vous aimez Omar Khayyam et vous lisez l'anglais ,alors c'est la splendide traduction de FitzGerald qu'il faut lire; le traducteur a fait de ce recueil une des gloires de la poésie anglaise.

Lien : http://holophernes.over-blog..
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