Dans le jardin de la bête
Philippe Kerr dit de cette histoire qu'elle ne peut fait l'objet d'un roman tant la vérité dépasse la fiction. Et de fait nous ne sommes pas dans un roman mais dans un comptage évènementiel rédigé dans ce que l'Histoire (qui n'est pas un genre littéraire, encore moins une science) sait produire de plus formaliste (avec ses fatales erreurs et ses approximations) .
Les péripéties de l'ambassadeur des états unis à Berlin de 1933 à 1938 accompagné de sa femme et de ses enfants, sont censées nourrir la curiosité du lecteur pendant plus de cinq cent pages et surtout plus de 850 notes réunies en 80 pages à la fin de l'ouvrage.
Dans une longue digression en forme de remerciements,
Erik Larson prétend que certains lecteurs sont friands de ces notes. Ceux-là seront assurément bien servis, puisqu'à les suivre, on serait tenu pour un oui , pour un non, de se reporter 850 fois à la fin du livre pour découvrir des éléments essentiels qui se révèleront pour la plupart anecdotiques, voire mystérieux. Quelle gymnastique absurde.
Le traducteur s'est retenu d'en rajouter mais il ne résiste pas, lui non plus, à la note en bas de page du genre « en français dans le texte ».
On pense à Pignon et ses allumettes et M. Larson ferait bien de se méfier si un éditeur l'invite à dîner un mercredi.
Toujours est-il qu'on côtoie l'hôtel Aldon, Goering, Hitler et le « presque gentil » Diels chef de la Gestapo (avant Himmler et Heydrich), on se promène dans le Tiergarten et Unter den Linden. Dodd, l'ambassadeur est confondant d'incompétence. Professeur d'histoire, déraciné de son cher Sud raciste et vaincu, il note ce qu'il consigne dans un carnet (de notes) et n'en tire pas vraiment les bonnes conclusions. C'est un professionnel de l'évitement.
Que sa fille couche avec les nazis ou les espions russes, ou l'attaché de l'ambassade de France, voire avec tout ce qui bouge avec une belle gueule et des biscotos, ne le choque pas plus que çà. Ni le reste de la famille d'ailleurs.
La réalité qu'on retiendra deDodd ne dépasse pas la fiction et ne constitue en soi rien d'extraordinaire sauf à considérer que ce qu'il regrette dans le nazisme ce ne sont pas les idées mais la méthode et qu'effectivement Roosevelt dont c'était le 11eme choix, s'est fourvoyé totalement en engageant cet imbécile pour un poste aussi délicat.
Le pire je crois est qu'il n'en tire aucune leçon et meurt bêtement dans son lit en Amérique et en plein conflit.
Pas de quoi « fouetter un chat » (Cf les derniers sketches inénarrables de
Muriel Robin à la porte St Martin)