Les décennies 1951-1960 et 1961-1970 sont certes marquées par un rafraîchissement modéré et momentané que symbolisent, parmi d’autres annuités et mensualités effectivement fraîches, les grands hivers de février 1956 et de 1962-1963 ainsi que l’année 1958, hyper-pluvieuse et plutôt fraîche. Le réchauffement reprend, avec beaucoup de modération dans le moyen terme, à partir de la décennie 1971-1980 (canicule et sécheresse de 1976) et surtout, et bien davantage, au cours des années 1981-1990 : le triennat 1988/89/90 marque un véritable bond en hauteur des températures pour les hivers, les printemps, les étés et l’année entière. Les automnes français avaient pris de l’avance, calorifique, dès 1981-1982. La décennie 1990, souvent agréable de ce fait, est la plus chaude du xxe siècle ; le réchauffement culminera plus encore lors de la décennie suivante, première du xxie siècle. Je pense notamment aux deux canicules d’août 2003 et juillet 2006.
Aujourd’hui, les enfants sont assez bien protégés des effets de la canicule ; mais lors de l’été très chaud de 2003, la déshydratation et d’autres effets annexes ont provoqué le décès de 15 000 personnes âgées en France et des dizaines de milliers dans toute l’Europe. C’était évidemment bien pire au xviiie siècle (notamment pour la mortalité infantile), mais le chiffre de 2003 a néanmoins frappé, avec raison, nos contemporains. Juillet 2006 a provoqué aussi une mortalité supplémentaire mais infiniment moins considérable : les autorités, les services compétents, notamment dans les asiles pour les vieilles personnes, avaient été prévenus et des précautions avaient été mises en place.
la disette : on peut la définir comme manque des blés accompagné ou suivi de morts assez nombreuses, mais sans le côté apocalyptique de la famine, tel qu’en 1315, 1693 ou 1709. L’an 1740 est ainsi marqué par une grosse disette : elle provoque le décès de 80 000 à 100 000 « Français ». C’est tout de même « moins pire » – et comment ! – qu’en 1693.
Ne parlons pas de causalité. Ce serait simpliste et même ridicule. Mais disons que climat et/ou météo sont souvent tangentiels à certains aspects de cette Révolution ainsi qu’à divers préparatifs de celle-ci.
La notion de « grand hiver » dépend de la durée du froid – au moins deux à trois semaines sur un mois donné – et du gel survenu des rivières et des lacs.
L'historien Emmanuel le Roy Ladurie, auteur de travaux précurseurs sur l'histoire du climat, dont Histoire du climat depuis l'an mil (1967), décrit l'impact environnemental, social, démographique, économique et politique du Petit âge glaciaire qui a affecté l'Occident entre 1300 et 1850 environ.
Conférence issue de l'édition 2001 des Rendez-vous de l'histoire sur le thème "L'Homme et l'Environnement, quelle histoire ?".
© Emmanuel le Roy Ladurie, 2001.
Voix du générique : Michel Hagnerelle (2006), Michaelle Jean (2016), Michelle Perrot (2002)
https://rdv-histoire.com/