Lensel
Pierre-Louis – "
Le duc du Maine : le fils préféré de Louis XIV" – Perrin, 2021 (ISBN 978-2-262-07518-7) – format 24x17cm, 490p. + un cahier de huit feuillets d'illustrations
– index des noms de personnes pp. 475-485, biographies pp. 9-13, tableaux généalogiques pp. 14-17
– nombreuses notes bibliographiques de bas de page, mais absence de bibliographie systématiquement organisée en fin de volume.
Un livre étonnant, qui se lit et se re-lit avec le même plaisir, car il est tout aussi solidement charpenté que bien écrit (c'est le moins lorsque l'on fréquente assidûment les grandes et grands "écrivants" de cette époque qui vit probablement l'apogée de la langue française).
Un livre fort original car – sans aucune mièvrerie ni penchant hagiographique – l'auteur aborde Louis XIV (né en 1638, roi de France à partir de 1643, mort en 1715), le "Roi Soleil", sous l'angle le plus humain qui soit, à savoir ses liens et inclinaisons de père envers sa descendance dite "illégitime", ces "bâtardes" et "bâtards" engendrés par ses maîtresses successives,
- Louise de la Valière (1644-1710, maîtresse du roi de 1661 à 1667)
- puis Mme de Montespan (1640-1707, maîtresse du roi de 1667 à 1678).
Ces enfants illégitimes se voient presque toutes et tous confiés à
- Mme de Maintenon (1635-1719), amie, puis maîtresse du roi à partir de 1680 (liaison bénie par un mariage secret en octobre 1683).
Comme le dit l'auteur lui-même dans les dernières pages où il expose son projet :
"On en apprend beaucoup sur Louis XIV, sur Mme de Maintenon, sur le Régent ou sur
Saint-Simon en s'intéressant à leurs relations avec
Louis-Auguste [duc du Maine]." (p. 471)
Le cas du dernier cité – le duc de
Saint-Simon – est peut-être le plus intéressant pour les gens s'intéressant à ses fameuses "
Mémoires", si délectables à lire tant elles sont fielleuses, méchantes, injustes, pétries d'un orgueil démesuré tout en atteignant des sommets en ce qui concerne l'écriture littéraire de la langue.
Tout au long de l'ouvrage, l'auteur met en effet en regard les passages – pour le moins haineux – écrits par le duc de
Saint-Simon en évoquant
le duc du Maine qu'il abhorre, avec ce qui constitue fort probablement la réalité historique attestée par les témoignages d'autres contemporains. Cette démarche permet de relativiser les limites du témoignage laissé par
Saint-Simon.
Pour ce qui concerne l'orgueilleuse Montespan, cet ouvrage montre à quel point certaines femmes dites "du grand monde" pouvaient purement et simplement se désintéresser de leur progéniture. Suite aux films imbéciles récemment sortis présentant la reine
Marie Antoinette comme une de ces "femmes libérées" tant prisées chez les bobos, on ne peut que s'étonner qu'aucun film du même acabit ne lui soit encore consacré par l'un de ces cinéastes éclairés recherchant un brevet de "féminisme" leur ouvrant les portes des cercles germanopratins aristo-bobo...
La duchesse du Maine, Louise Bénédicte de Bourbon, et le contraste qu'elle offre avec son mari, fait l'objet de pages fort élogieuses, fines, pleine de l'esprit qui animera les fameux "salons" du XVIIIe, la jeune Mme du Deffand (1696-1780) vient y faire son apprentissage, souvent en compagnie
De Voltaire.
La personne finalement la plus attachante dans ces pages reste Mme de Maintenon, que l'historiographie habituelle présente traditionnellement au mieux comme une vieille dévote bigote racornie dans la dévotion, mais dont l'auteur rétablit la personnalité humainement fort intéressante.
Un ouvrage incontournable pour toute personne s'intéressant au XVIIe siècle...