AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
3,97

sur 208 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Loin de Moscou et de St-Petersbourg se trouvent les postes frontaliers, aux confins des régions les plus sauvages et les plus inconnues du continent, à la lisière de l'Europe et de l'Asie. Et c'est dans l'une de ces régions, le Caucase, entassé entre la mer Noire et la mer Caspienne, que s'ouvre le roman Un héros de notre temps, écrit par Mikhail Lermontov.

Le narrateur, qui voyage entre l'Ossétie, la Géorgie, l'Arménie et d'autres petites contrées sous contrôle russe, traverse les montagnes, les cols et les défilés de cette étroite bande de terre. En route, il rencontre Maxime Maximitch. Ce militaire est de bonne compagnie et lui raconte une des aventures de Grigori Alexandrovitch Pétchorine, un homme de sa connaissance. Un héros plus grand que nature, qui ne craint ni les balles des montagnards hostiles ni les duels des nobles russes.

En effet, Pétchorine, pour se divertir, sème la zizanie entre Tchétchènes, Tatars, Circassiens. Il promet le magnifique cheval de l'un contre Bella, la soeur d'un autre. Lorsqu'il parvient finalement à se faire aimer de sa nouvelle femme, arrachée à sa famille, il s'en lasse tout comme il s'ennuie de la compagnie de ses semblables. Rien dans ce bas-monde ne s'élève aux idéaux auxquels il aspire. La mort tragique de Bella semble l'affecter un moment mais la fatalité le destine à d'autres aventures. Bref, il souffre de spleen bien avant qu'on ne commence à parler de ce phénomène…

Loin des bals et des raffinements de la capitale et des grandes villes, on découvre la rude vie des militaires, leur éternel combat contre les contrebandiers, les peuplades montagnardes soumises mais hostiles, etc. le tout dans un paysage caucasien merveilleusement dépeint. Les monts Elbrouz et Krestovoï, la rivière Tchertovaïa, le col du Diable, etc. Des habitants déguenillés mais fiers, des sauvagesses envoutantes, etc. Bref, une Russie assez peu évoquée dans la littérature classique.

C'est dans ce décor que Pétchorine, dans une partie du récit où il devient le narrateur, développe une relation amoureuse avec Véra, se lie d'amitié avec Grouchnitzky, puis fait la cour à la princesse Mary pour contrarier son nouvel ami intéressé par elle. Il s'ensuivra bien des complications et un duel. Après tout, ces petites gens ne sont-ils pas des pions pour lesquels il ne peut que devenir un ennemi implacable, voire vicieux? Qu'est-ce qu'un homme blasé ne ferait pas pour s'amuser un peu, faire valoir sa supériorité, se prouver qu'il est vivant ? Se lancer vers d'autres aventures !

Lire Un héros de notre temps fut également une aventure : les changements de narrateurs agacent. On passe du voyageur (dont le nom demeure inconnu) à Maxime Maximovitch, on retourne au voyageur pour passer à Pétchorine, mais en plus tous racontent à la première personne. Confusion à l'horizon. Heureusement, le lecteur ne s'attaque pas à un roman fleuve comme les Russes avaient l'habitude d'en écrire !

Ceci dit, les décors pittoresques, les voyages dépaysants, les aventures rocambolesques, les élans amoureux, les intrigues rebondissantes… enfin tout ne peut que compenser et plaire. Mikhail Lermontov a pondu une oeuvre qui a influencé des générations de Russes et qui continue sans doute à émerveiller des lecteurs partout à travers le monde.
Commenter  J’apprécie          271
Un héros de notre temps est, sans conteste, un classique de la littérature russe puisqu'il est intimement lié à un des épisodes les plus connus de l'Histoire de la Russie, je veux bien entendu parler de la mort de Pouchkine.

Lermontov composera le sulfureux poème « La mort du poète » en l'honneur de Pouchkine mais surtout à charge contre le pouvoir en place. Cela lui vaudra illico presto un exil forcé dans le Caucase russe où il mettra un point d'honneur à finir le roman dont il est question ici: Un héros de notre temps.

Il s'agit, pour moi, d'une oeuvre hybride couvrant une multitude de styles: Roman, conte, nouvelle, poésie, chant, journal de bord, lettre, etc.
Le livre de Lermontov se compose de 5 parties qui peuvent se lire indépendamment les unes des autres (j'avais d'ailleurs lu Taman dans un recueil de nouvelles russes avant de savoir qu'il s'agissait d'une partie d'un roman de Lermontov).

La première partie concernant Bèla m'a fait pensé à Rouslan et Ludmila en plus rugueux où la femme est reléguée au rang de princesse-objet. Sans doute, cela représentait-il l'idéal amoureux de cette époque dans cette région du monde.

La partie la plus intéressante est sans doute celle où le caractère de Petchorine (le personnage principal) est passé au crible. Séducteur-manipulateur usant de cynisme pour arriver à ses fins, il m'a souvent fait penser à un certain Valmont des Liaisons Dangereuses ou à une version inavouée de... Lermontov lui-même.

Alors, à qui est destiné ce livre?

Aux amateurs de nouvelles, du Caucase, de l'Histoire de la littérature russe qui n'ont pas peur de se plonger dans une réalité révolue, celle des duels à bout portant !

« Nous allons tirer au sort celui qui fera feu le premier ... Je vous déclare pour conclure qu'autrement, je ne me bats pas. »

Commenter  J’apprécie          214
Plus risible que les femmes qu'il dénigre (« La race est chose très importante chez la femme, de même que chez les chevaux »), Pétchorine figure le modèle d'un héros de notre temps –à condition que « héros » se confonde ici avec « bouffon ». La comparaison est implicite, elle ne tardera toutefois pas à se révéler au fil des différentes parties qui constituent ce roman.


Les points de vue autour de Pétchorine s'enchaînent ainsi pour constituer un portrait morcelé, qu'il faudra reconstituer au-delà des failles chronologiques et des doutes véridiques que nous inspirent la narration des témoins invoqués. L'imbrication des récits ne permet pas toujours de faciliter la compréhension des événements lorsqu'elle n'empêche pas carrément de suivre correctement le déroulement de l'histoire. le roman, rabiboché de bric et de broc, semble avoir été composé dans l'hésitation, comme si Lermontov, ne sachant pas quel point de vue choisir pour décrire Pétchorine de la manière la plus convaincante, avait finalement décidé de garder tous ces brouillons et de les unir par un fil conducteur qui convainc surtout par son caractère artificiel. le thème des amours désillusionnés, de l'individualisme naissant d'une génération, de la quête existentielle impossible à mener sans l'illusion d'une gloire proche, semblent hanter Lermontov qui développe ici les mêmes thématiques que celles qui apparaissaient déjà dans la Princesse Ligovskoï, qu'il avait commencé à rédiger quatre ans auparavant sans réussir à en achever la rédaction. le héros porte d'ailleurs le même nom –pour un peu, il aurait suffi que la Princesse Ligovskoï trouve une conclusion pour que son histoire constitue un nouveau volet des aventures d'un Héros de notre temps.


Bien sûr, l'écriture enchante par son ton mordant, ses descriptions acerbes et sa verve ironique, et il n'est pas déplaisant de lire six fois de suite la variation d'une même histoire –mais il faut quand même avouer que dès la troisième redite, on commence à espérer une évolution du personnage de Pétchorine. Ce n'est pas le cas et le vaillant guerrier de l'amour, séducteur par fatalité plus que par désir, reste buté du début jusqu'à la fin. S'il s'agit d'un autre des ressorts comiques déployés par Lermontov, il entraîne toutefois davantage de désagréments que de véritables réjouissances. le bouffon rigolo vire en ennuyeux chantre du désenchantement et ne parvient même plus à convaincre de l'inanité des passions terrestres. Autour du personnage de Pétchorine, la perfection aurait été atteinte si Lermontov avait su allier l'unicité du récit de la Princesse Ligovksoï à la possibilité d'une conclusion à la manière d'un Héros de notre temps.

Lien : http://colimasson.over-blog...
Commenter  J’apprécie          200
En voyant la couverture de ce livre, je sens que les visiteurs réguliers de ce blog vont s'exclamer : « Quoi ! Encore une histoire de soldat ! Elle s'est entichée de l'armée ou quoi ? ». Malgré les apparences trompeuses, je ne savais absolument pas que ce livre parlait de la vie d'un soldat car je n'avais pas lu le résumé. Mon choix s'est basé sur deux éléments : le titre, un peu mystérieux et qui invite à la découverte ; et le fait que ce soit un auteur russe.
Et là, ce fut encore et une fois de plus une très belle découverte dans la littérature russe : loin de la vie de garnison monotone de Joseph Roth (cf. La marche de Radetzky), on suit un personnage atypique nommé Petchorin. C'est un être égoïste, désabusé et méprisant, qui parfois choisit volontairement la méchanceté et la cruauté : il n'hésite pas à enlever une jeune fille pour ensuite la délaisser une fois la passion éteinte ; il séduit une fille que courtise un de ses camarades pour le provoquer un duel ; il ignore ses anciens amis et se soucie peu de ce que les gens pensent de lui.
Je ne sais pas comment vous l'expliquer mais je l'ai apprécié : c'est vrai que dans ma description, je n'arrive pas à rendre le personnage en entier et pire, j'ai l'impression de le caricaturer. Mais il m'a plu, peut-être parce que son comportement atypique représente des morceaux de caractère de gens que je connais et que de ce fait, son attitude ne m'a pas choqué mais au contraire m'a paru très concrète. Il m'a plu aussi car il me rappelle les héros tortueux de Dostoïevski ainsi que l'Eugène Onéguine de Pouchkine.
On sent dans l'écriture de Lermontov les prémisses des chefs-d'oeuvre qui ont façonné la littérature russe du XIXème siècle. Ces descriptions sont magnifiques et rendent parfaitement l'ambiance du Caucase. Son style est riche, soutenu, avec des phrases poétiques mais il n'y a pas de longueurs, pas de mot en trop. Tout est à sa juste place et le rythme est agréable. Je n'ai pas mis le 4ème coeur car les remarques désobligeantes et condescendantes que le narrateur et Petchorin avaient envers les autochtones m'ont agacé. On sent encore la domination impérialiste et le mépris des peuples vaincus dans ces écrits.
Bref, je recommande ce livre exclusivement aux amoureux et familiers de la littérature russe ! Pour les débutants, essayez de commencer par quelque chose de plus doux et ensuite revenez vers Lermontov.
Lien : http://leslecturesdehanta.co..
Commenter  J’apprécie          72
Si moins connu que ses illustres pairs, Michel Lermontov, l'auteur du roman adapté par Céline Wagner, est un écrivain important de la littérature Russe. Dans ce Héros de notre temps, il nous présente Petchorine, un personnage cynique et désabusé, à mi chemin entre un Julien Sorel et un Vicomte de Valmont, dans une aventure romanesque et romantique où il va séduire par jeu et ennui une jeune princesse aimée par l'un de ses amis. du décor aux protagonistes en passant par les thèmes, on retrouve dans ce récit à tiroir le souffle des écrits de Boulgakov ou de Dostoïevski. L'artiste, grâce à un dessin en noir et blanc dans un style épuré sur les visages et détaillé sur les décors, délicieusement faussement suranné, donne vie de la meilleure des façons à cette oeuvre qu'il est fort agréable de (re)découvrir.
Et voici de quoi écouter avec: http://bobd.over-blog.com/2014/07/russie-romanesque-un-heros-de-notre-temps-vs-symphonie-concertante.html

Lien : http://bobd.over-blog.com/20..
Commenter  J’apprécie          70
Que faire de soi et de sa vie quand tout ennuie à force d'être prévisible, jusqu'à nos propres sentiments, quand le bonheur est une chimère et qu'on n'est plus capable de passion, alors qu'on ne vit que de passions ?... Eh bien, on peut, par exemple, comme ce « héros de notre temps », Pétchorine, s'ingénier à abuser les passions des autres, travailler sans relâche à leur malheur, faire de soi un maître de la perversion qui bafoue l'amitié, qui brise le coeur des femmes et des jeunes femmes. On pourrait se retenir de faire le mal, mais on ne se retient pas et de cela on s'étonne, et on y pense, on y réfléchit, on creuse la question dans son journal intime. Quand la vie n'a plus de sens, blesser, détruire, est encore une manière de sens pour ce « héros » errant… la dernière passion possible.

L'intérêt de cet ouvrage, premier roman russe psychologique, réside dans les débats intérieurs chez Pétchorine, un dialogue avec lui-même causé par les sursauts du reste d'humanité qui subsiste chez lui malgré qu'il a vendu son âme au cynisme et à la cruauté morale. Ce dialogue fait apparaître dans la conscience du lecteur (doué de morale) que ne pas faire le mal n'est pas une passion supplémentaire, une passion qui, elle aussi, comme toute passion, peut s'éteindre : ne pas faire le mal est un choix moral ! Mais voilà, Pétchorine, lui, est un être de passion, un être presque totalement amoral. Et dans ce « presque » crépusculaire palpite le coeur égaré du livre.
Commenter  J’apprécie          67
De prime abord, ce roman apparaît comme un patchwork, un collage de plusieurs nouvelles. On peut regretter le manque de cohérence ou saluer l'art de l'écrivain, qui utilise trois narrateurs différents pour faire tenir l'ensemble. Tout tourne autour de l'antihéros Petchorin, qui apparaît comme un double de Lermontov : un homme d'action qui ne trouve pas le bonheur dans celle-ci et qui ne peut s'empêcher de faire naître des inimitiés par ses remarques blessantes.
Pourquoi en est-il ainsi? Est-ce la nature de Petchorin, un concours de circonstances qui a forgé sa personnalité actuelle, la prédestination ?
Il me semble que chacune des nouvelles apporte un éclairage différent et met en avant l'une de ces raisons. L'allure décousue de l'ouvrage ne serait alors qu'une apparence.
De toutes les nouvelles, "La princesse Marie" me semble la plus intéressante. Lermontov décrit de l'intérieur, à travers le journal de Petchorin, la société russe en cure dans les stations thermales du Caucase. L'évocation des peuples autochtones des autres nouvelles est assez extérieure et correspond à la vision d'un militaire russe en garnison. Honnêtement, je n'y ai pas trouvé un grand intérêt, pas plus qu'à la description de la nature caucasienne qui me semble être surtout une toile de fond. Dans la princesse Marie, Petchorin s'explique sur son caractère et semble en rejeter la faute sur les autres, qui ne l'ont pas compris dès l'enfance et l'on contraint à se replier dans la fausseté. On ne saura jamais si Petchorin croit à ces explications. C'est en tous cas un type psychologique intéressant, dans lequel Lermontov s'est projeté et qui contredit par avance les conclusions du personnage des carnets du sous-sol de Dostoïesvski. Petchorin est-il le portrait d'une génération et de ses vices comme l'annonce l'auteur ? Il faudrait demander à un spécialiste de la période.
Évidemment, on est frappé par le parallèle entre la destinée de Lermontov et certains des éléments présents dans le roman. Cet être supérieurement intelligent mais égocentrique aurait-il pu écrire sur quelqu'un d'autre que lui-même s'il avait vécu plus longtemps ?
J'ai envie de me pencher sur la vie de Lermontov maintenant et de savoir ce que les spécialistes ont pensé d'"un héros de notre temps".
Pas un immense plaisir de lecture en ce qui me concerne, mais un livre qui est plus qu'un divertissement.
Commenter  J’apprécie          40
Le cadre pittoresque de ce livre, la région du Caucase colonisée par la Russie, m'a immédiatement ramené aux histoires de Pouchkine et aux premiers travaux de Tolstoï. Mais l'approche unique de Lermontow est la manière ingénieuse dont il présente son protagoniste, l'officier russe amoral Pechorin : d'abord à travers des histoires de tiers, puis à travers une courte rencontre personnelle et enfin à travers des fragments de journal intime de Pechorin lui-même. Cela donne une dynamique à l'histoire qui vous aspire dans le roman et ne vous lâche pas. Bravo, pour un livre publié en 1840, donc avant l'apogée du Grand Roman Européen.
Je peux très bien m'imaginer pourquoi Dostoïevski était si enthousiaste à propos de cette oeuvre : Lermontov a fait de Pechorin presque la même figure cynique, amorale et en même temps double, séduisante et faible que nombre des protagonistes du futur grand maître, un vrai ‘bad-ass'. Les pages introspectives du journal de Péchorine, en particulier, témoignent d'une profonde perception psychologique d'une âme damnée. Certes, Lermontov n'a pas encore atteint le niveau diabolique de Dostoïevski, mais il s'en rapproche. L'orientation romantique précoce de son histoire, avec l'accent mis sur les descriptions lyriques de la nature et les émois dramatiques de l'âme, pourrait nous rebuter un peu maintenant, mais cela n'empêche pas que ce roman soit impressionnant. Je suis même enclin à le noter plus haut que Pouchkine.
Commenter  J’apprécie          40
portrait d'un journal traduisant le regard de son auteur, d'un simple personnage de roman ou bien, encore celui que le lecteur va se faire au fur et à mesure des personnages et situations que l'auteur va lui faire découvrir ?

Sous une apparence de textes pas nécessairement structurés comme on peut en avoir l'habitude en bon occidentaux, le personnage principal avec son cynisme et sa désinvolture emmènera le lecteur à la découverte d'une société du dix neuvième siècle quelque peu surprenante parfois, peut être….
Petite balade à ne pas hésiter à faire pour se dépayser et s'initier à es déclinaisons d'ailleurs et d'alors.
Commenter  J’apprécie          40
Quelle très bonne surprise que ce roman de Lermontov.
Un vrai héros ce Petchorine, détestable mais humain, comme souvent.
Ce roman est très bien écrit, nous fait voyager dans le Caucase, nous fait partager des tranches de vie d'un héros atypique, au travers de son journal.
Après Dostoievski, le maitre et sa collection de romans psychologiques ; il y a maintenant pour moi Lermontov et son unique roman ; et le même plaisir.
Commenter  J’apprécie          10


Lecteurs (724) Voir plus



Quiz Voir plus

La littérature russe

Lequel de ses écrivains est mort lors d'un duel ?

Tolstoï
Pouchkine
Dostoïevski

10 questions
437 lecteurs ont répondu
Thèmes : littérature russeCréer un quiz sur ce livre

{* *}