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EAN : 9782268034188
3914 pages
Les Editions du Rocher (23/03/2000)
4/5   7 notes
Résumé :
Le livre s'ouvre sur la journée du 3 mai 1988, pour s'achever le 17 septembre 1990, date de la naissance du fils de l'écrivain, Alexandre. Ce quatrième (qui sera le dernier et le plus volumineux) tome du Journal Intime raconte d’abord la fin de l’histoire Nada, puis les visites fréquentes chez Lucette-Céline à Meudon et encore la rencontre-interview d’Arletty commandée par Paris Match. On découvre également les suites et conséquences de la publication du Bonheur don... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
C'est le quatrième et dernier volume publié du Journal intime de Marc-Edouard Nabe.

Le cinquième volume qui était en préparation a matériellement (?) disparu à Patmos en 2000 : c'est ce que Nabe raconte, au milieu de mille et une autres choses, dans Alain Zannini, roman paru en 2002.

Mille trois cent et quelques pages. J'ai pris en le lisant des pages et des pages de notes. J'ai choisi des extraits. Trop. Et je suis bien ennuyée maintenant pour écrire ce billet. Finalement j'ai décidé de relire mes notes, puis de laisser infuser comme pour une inhalation. Ce qu'il en restera ne sera que de la vapeur de vie d'écrivain, comparée à la densité et à l'exhaustivité de la matière travaillée quotidiennement par Nabe pendant plus de sept années, et restituée plus tard sous la forme de quatre merveilleux pavés littéraires.

Il faut lire le journal intégral de Marc-Edouard Nabe. Absolument. du premier au dernier jour.

Les précédents volumes du Journal intime sont : Nabe's Dream, Tohu-Bohu, Inch'Allah

Mai 88, Nabe va sur ses trente ans, ne digère pas bien sa rupture avec Nada, les otages au Liban sont libérés, Mitterand est réélu (toute coïncidence, etc.), Chet Baker meurt à Amsterdam.

bientôt 30 ans : bilan, crise morale

Dimanche 15 mai 1988.- [...] Je suis extrêmement réticent à devoir passer le cap de la trentaine, me transformer en père - moi, le plus fils des hommes - avec femme, enfants, villa, voiture, machine à laver...

“Quand tu as un enfant, tu n'as plus le droit de mourir.” Et si j'ai envie de mourir, moi ? Si cette évolution inéluctable me fait chier ? Si je ne veux pas avoir trente ans ? Si j'essaie d'échapper à mon sort ? Si je veux vivre en enfant toute ma vie ?...

Ce qui me freine ce sont surtout ces quinze années (1968-1983) que je n'ai pas encore transposées dans mes livres et je vis trop sur cette parano de la perte. Vouloir ne rien perdre m'empêche d'avancer ! Avec le Bonheur, j'ai tourné les 10 premières années de ma vie (et celles de mes ancêtres), et je ne me fais pas de souci à partir de 1983 où tout est stocké dans ce journal... Mais entre les deux, il y a mon arrivée à Paris, le succès du Zanine, ma formation, ma puberté, Thiverval, Hara Kiri, Kirt, la guitare, le free jazz, Calmettes, les femmes, l'armée, Hélène, Salem, les croisières, jusqu'à la rédaction du premier Régal (Nabe's Dream)...
Quelles fabuleuses mémoires pourrissent dans mon tronc, avec de ces personnages et situations !... Je vis 15 ans en arrière, c'est ce qui me tue. Si je pouvais me vider de ces oubliettes, je serais un homme. Je me lancerais dans de nouveaux mondes, je volatiliserais dans des espaces neufs, j'irais voir comment sont les Martiens, les Martiennes... Finalement, c'est un bien, ces 15 ans, ça me retient, pas que pour faire un enfant à Hélène, mais de fuir vers de dangereux horizons fantasmatiques aussi qui sait ?...

après le Bonheur

- les mauvais comptes de Gallimard : les ventes du Bonheur sont beaucoup plus faibles que prévu, les retours des libraires inquiètent, l'espoir de publier en poche s'amenuise
- Marc Dachy a une idée : il faut publier le journal intime
- jazz à Calvi, comme l'an passé
- chez Tillinac en Corrèze
- un été dans les Ardennes, et pour la première fois le journal n'est pas quotidien, un mois en une entrée : du 1er au 27 août 1988, trois sections vie intérieure, vie extérieure, vie artistique

mort d'un père : Sam Woodyard, le 20 septembre 1988

"[...] Un de mes pères est mort. Après Orazi en 1979, aucun paternel de cette importance n'était vraiment parti. Je suis aujourd'hui profondément atteint. Je me serais bien passé de ce coup supplémentaire : l'année 88 n'en finit pas de me faire souffrir en accumulant des douleurs. L'année du Bonheur ! Un an après Freddie Green, Sam Woodyard est mort. Il faut y croire : c'est vrai. Une espèce de virilité, de complicité virile traverse la mort de Sam. Je me sens si fier d'avoir connu et aimé ce génie du jazz que ma peine le salue à travers le temps."

voyages

A l'automne, espoirs de voyages à Istanbul et à New-York (pour Monk). Mais les Etats-Unis, ça ne se fera pas. Par contre, Hélène et Marc-Edouard partent très excités pour la Turquie un beau jour d'octobre. Quinze jours tous frais payés.

"Je suis bien. On l'a fait quand même ! Je suis allé à Istanbul ! Maintenant il faut l'écrire : quel plaisir ! le vrai voyage va enfin pouvoir commencer !"

C'est formidable de pouvoir aujourd'hui comparer le journal intime d'octobre 1989 qui est celui d'un voyage à deux, avec Visage de Turc en pleurs qui est le récit publié en 1992 du voyage d'un homme seul. le travail de transposition est magnifique à observer.

fin de l'année 88

"Samedi 31 décembre 1988.- Alors, on se la termine cette année pour rien, cette année blanche, cette année nulle ? [...]"
Entre les deux phrases que je cite, c'est le récit d'un réveillon raté chez les Dachy avec Albert Algoud.
"[...] Nous terminons l'année comme elle devait finir : dans le malaise bizarre et la tristesse absurde.
"

"Dimanche 1er janvier 1989.- [...] - Il est temps de changer d'amis... dit Hélène, pleine de résolutions radicales sur nos relations."

non non non

Les uns après les autres les projets et manuscrits déposés avec enthousiasme et confiance auprès d'éditeurs qui se disaient tout d'abord intéressés, sont délaissés par Arléa, Gallimard, Laffont, Grasset, Albin Michel, etc .

" " [...] Vous trouverez un autre éditeur pour ce projet-là, pour le reste, je souhaite que vous ne vous engagiez pas ailleurs. Je vous rappellerai, soyez-en sûr. Au revoir."
Et voilà ! Au suivant ! Bien sûr, je vais remonter sur mon cheval tout de suite, le temps de me relever quand même après ce K.-O... Je suis solide, très solide comme un cow-boy criblé de flèches, mais ils ne sont pas censés le savoir, ces monstres de lâcheté et de goujaterie inconséquente. Jamais je n'aurais cru traverser une si mauvaise passe. Pire qu'il y a quatre ans ! L'après-Bonheur est plus difficile à vivre que l'après-Régal... Je n'arrête pas d'être refusé partout depuis deux mois. Ça fait beaucoup. Comme si j'étais impubliable. En fait, ils ne peuvent pas me soutenir parce qu'ils sont tous mouillés jusqu'au cou. Tous dans les médias de la putasserie absolue. Ils ont tellement honte qu'ils deviennent agressifs. Mais je persisterai ! Jusqu'au bout ! Je ferai le tour de toutes les maisons d'édition ! Plus ils me demanderont un roman tranquille, plus je leur donnerai du pamphlet."

mai 89, la fin du marasme ?

En avril, Nabe touchait le fond :

"Chute de l'ange... Une déprime terrible me prend. La proposition dérisoire d'Albin + mon Istanbul qui traîne + l'hésitation à publier mon pamphlet + la bourse qui tire à sa fin + les possibilités d'appartement qui s'amenuisent + Barnabé qui n'est pas pressé de se concevoir..."

Et puis soudain, un voyage de détente aux Pays-Bas avec les Charnay pour visiter les musées (réussi), Hallier qui rechippe et relance L'Idiot, Sollers qui pousse Nabe à écrire dedans tout en acceptant d'autres textes pour L'Infini...

"Ecrire, c'est vivre et publier, c'est revivre..
Opération réussie. Si demain, L'Idiot sort comme c'est prévu, j'aurai fait un beau tir groupé : L'Infini, La Quinzaine, Pivot, L'Idiot ! Mais c'est une résurrection ! L'espérance paye ! Positivité totale ! "

"Vendredi 17 mai 1989.- [...] C'est la première fois que j'ai vraiment la sensation de sortir enfin du gris. Il était temps. Après un an ! Oui ! Ca fait un an que je marine morosement dans le marasme : ce journal a dû témoigner de ces mois nuls. Si je le relisais, je me redéprimerais moi-même !... Qu'est-ce que j'ai pu souffrir à me cogner de partout comme un bourdon affolé contre les vitres de l'Edition !..."

positivité totale (ça continue)

- visite aux Tillinac en Corrèze et Castle-party en Charentes
- La Marseillaise va être publié au Dilettante. Siné dessine la couverture.
- changement d'appartement : pistonnés par Denis Tillinac (chiraquien !) auprès de la Mairie de Paris, les Nabe obtiennent un deux-pièces au 103 rue de la Convention (je connais bien le quartier !). Nabe fait ses courses bricolage chez Zolacolor, et dîne avec Patrick Besson chez Kushiken (!).
- rabibochage avec Hallier
- L'Idiot, la rédaction, la fabrication, du journalisme avec de la littérature inside!
- l'idée de publier le journal initialisée par Marc Dachy, fait son chemin, Patrick Besson est enthousiaste :

"- D'habitude, les journaux sont des carnets de notes emmerdants, toi il y a une montée dramatique, tu avais raison de dire que c'était un super-roman. Et puis quelle santé, quelle cohérence... C'est le journal d'un champion de tennis... Tout est si logique dans ton comportement, si sain. Et quelle générosité... Tu n'es pas un déséquilibré. On en apprend beaucoup sur toi. Ça peut te faire un bien fou. J'ai beaucoup aimé le Bonheur, mais à certains passages on se dit : “Pourquoi il transpose tant ?”. Tu n'as pas besoin de transposer. le journal donne une forme si brute à ta vie et à ton écriture, c'est ta forme naturelle. Tu es un diariste. Et puis sur Sollers, Boujenah, Guers, tout ce que tu dis est génial. L'épisode de Bauby, mais c'est une dissection du journalisme extraordinaire ! Et Henric, qu'est-ce qu'il prend... Enfin, je vais te soutenir fortement chez Fixot. Si je pouvais je te donnerais cinquante bâtons. Ça les vaut. 150 000 par tome, c'est jouable. Je vais tout faire pour que ça marche. Ce serait un honneur pour moi d'avoir aidé à ce que ce journal soit publié. "

du côté de chez Fred

C'est en somme la revanche de l'émission catastrophe de Dechavanne en 87. Nougaro, Siné et Fred (le dessinateur) sont là, invités pour l'émission de Marcel reçu par Frédéric Mitterand le 28 juin 1989.

" C'est vrai que ce du côté de chez Fred a été élégamment construit à notre gloire par ce fin psychologue cachottier de Mitterand qu'Hélène va féliciter à la fin. Une étape médiatique a été franchie là, pour Marcel comme pour moi : le snobisme de cette émission propulse le Zanine à la place d'un jazzman aventurier et intellectuel ayant plein d'amis de qualité et, en ce qui me concerne, nimbe mon image diabolique d'un halo de “valeur sûre”, d'un indiscutable talent au-delà de toutes les détestations, de fils-poète sensible, calme et profond... Je sors de là très exalté ! Si Pivot, sur le Bonheur, avait fait la moitié du boulot de Mitterand cet après-midi, c'était gagné pour mon roman."

interlude

Un peu hors propos mais pas tant que ça, voici ce qui s'est passé dans la vraie vie le jour où je lisais le Dimanche 4 juin 1989 dans Kamikaze :

"Le plus grand dimanche de l'année... Les astres se déchaînent... Incroyable explosion de vie sur la planète."

C'est la révolte des étudiants et le carnage de Tian Anmeen. Mais ce n'est pas tout, le 4 juin 1989, c'était aussi : l'ayatollah Khomeyni est mort !

Dans ma vraie vie nous étions le samedi 10 avril 2010 quand je lisais ça. Et le 10 avril 2010, c'était Katyn au carré...

bicentenaire de la révolution française

Marc-Edouard et Hélène sont en vacances à Belle-Ile avec Albert Algoud, sa maîtresse, et son fils. Ça ne se passe pas bien du tout... : incompatibilités d'humeurs et de comportements dans le petit groupe.
"Vendredi 14 juillet 1989.- Si j'étais Louis XVI, j'écrirais : rien. Mais pour moi aucune journée ne mérite le néant, pas même la pire de l'année. [...]
Le soir je regarde, ravi, le défilé raté de Jean-Paul Goude à la télévision. [...]
Même l'énorme Jessie Norman a l'air de chanter faux sa Marseillaise !... [...]
Ça fait ce que j'avais prévu dans ma Marseillaise à moi : enterrement. Et pas en grande pompe ! L'enterrement d'une certaine France, celle des droits de l'homme et de la démocratie frelatée. Ce 14 juillet, je le sens, c'est le début de la fin. Rideau sur l'esbrouffe !"

une fin de décennie riche en événements historiques

En novembre 89, c'est la chute du Mur de Berlin, et pour la première fois, l'élection d'un maire noir à New-York.

"Je fignole mon Toujours plus noir qu'Edern trouve si bon qu'il le colle à la une. Il n'en a pas marre de m'aimer ?"


Évidemment on pense au tract Enfin Nègre placardé à l'occasion de l'élection d'Obama en novembre 2008 !
En décembre, c'est la fin des Ceausescu, feuilleton catastrophe télévisé en direct, ou presque.

une technique pour rattraper le temps

Fabienne, la secrétaire dévouée, a fait l'acquisition d'un macintosh.

"On a trouvé une technique. Une fois par mois je lui dicte le mois écoulé. Ensuite je corrige. Il s'agit de sculpter l'oral comme dit Stanislas Fumet. C'est harassant pour elle et pour moi. Une seule pause pour dix heures de dictée et de frappe. Vers 20 heures, nous avons remonté un mois et demi. Emportés par le flot, nous pourrions poursuivre. Fabienne rage d'être si prêt du but, c'est-à-dire aujourd'hui. Quelle course ! Il nous reste quinze jours pour être à jour. En deux séances, nous avons rempli trois mois que je désespérais de laisser vides."

"Ma force est dans mon travail et si, malgré l'épuisement nerveux qu'il provoque, mon entourage peut recevoir un peu de joie et de passion grâce à lui, je suis l'écrivain le plus comblé de ma génération."

un nouvel éditeur pour ses 31 ans

"Je vais au Rocher donner ma réponse à Bertrand : c'est d'accord. Je fonce, le Journal sera publié en septembre 90 (premier tome : 550 pages). Tant pis pour les conséquences. [...]
Quelle aventure ça va être ! Il me fallait un grand événement dans cette vie insupportable. J'espère que la publication du Journal sera la première d'une longue série. Tout doit être bouleversé de fond en comble."

d'un réveillon l'autre

Après la calamiteuse fin d'année 88, le réveillon 89 prend des allures de triomphe médiatique pour Nabe et ses nouveaux amis, dont Patrick Besson, Ardisson et Alain Bonnand (qui fait lui aussi un petit bout de chemin dans Paris 2000 avec L'Homme qui arrêta d'écrire !). C'est Jean-Paul Bertrand pour le Rocher qui organise l'Adieu aux années 80. Dix jeunes écrivains en vue de la décennie sont invités à l'hôtel Meurice le 31 décembre. Les chambres du palace sont tirées au sort. Les écrivains s'y enferment toute la journée pour écrire leur histoire de la décennie, chacun la sienne. Les papiers seront ensuite publiés ensemble au Rocher. Nabe se voit attribuer la chambre de Dali, la plus belle ! Ambiance plus festive que studieuse !

Éros, c'est la vie !

Enfin le test de grossesse vire au rose. Un premier calcul approximatif fait remonter la conception du bébé d'Hélène et Marc-Edouard au 1er janvier 1990 dans la suite Salvador Dali au Meurice !

le Rideau est ouvert

Cela faisait des mois que le texte du pamphlet sur les médias longuement paufiné attendait... (le titre a même oscillé longtemps de Kamikaze (!) aux Versets médiatiques)
"Mercredi 14 février 1990.- Rideau dans tous les kiosques ! Ouf c'est encore plus beau que ce que je croyais. [...] On peut même enlever les quatre pages de Rideau dans L'Idiot. C'est indépendant du numéro. Jean-Edern m'a promis qu'il me paierait un tirage à part. Je gratterai la date et la pagination sur le film. C'est un grand pamphlet comme ça se faisait à la fin du siècle dernier, sur papier journal, quasiment en tract. Ce n'est pas un hasard si le texte a attendu si longtemps son support idéal. Beaucoup mieux qu'un livre tiré vaseusement (je voulais à tout prix éviter la coédition avec Messidor, ce qui a poussé Besson, pour d'autres raisons, à m'aider à convaincre Edern de publier Riceau ainsi) à 3 000 exemplaires et boycotté immédiatement dans les librairies. Ici, je sors à 50 000, et je suis lu au minimum par les 15 000 fans de L'Idiot. En plus, c'est tout à fait cohérent avec le contenu du texte qui ne pouvait être un livre normal, envoyé en service de presse aux crapules journalistiques dans un système que je dénonce dedans. Et puis tant pis si ça ne passe pas : je l'aurai fait. Pour toujours, on saura ce que je pense des médias. Et quelle gueule ça a ! Sur ces grandes pages, en haut : Rideau. Personne n'a jamais eu un tel espace dans la presse. Chouchou n'est plus martyr. Dans L'Idiot j'aurai exploré tous les registres du journalisme. Ca pourrait s'arrêter demain, moi ça me suffit. de L'espérance à Rideau ! Trajet parfait. Comme j'avais écrit Rideau avant d'écrire dans L'Idiot, le ton de L'espérance est exactement le même que celui des dernières pages de Rideau. La boucle est bouclée ! En une trentaine d'articles, le mouvement perpétuel... Et le texte semble tenir ! Les réactions pleuvent."

Après ça, L'Idiot peut bien s'arrêter, ce qui n'attendra pas très longtemps la velléité de Jean-Edern Hallier, malheureusement.

tableaux d'une exposition

Le 7 juin, c'est le vernissage d'une exposition des peintures et dessins de Nabe organisée pour lui par ses amis Contencin dans leur appartement/villa de fonction du Sénat donnant sur le jardin du Luxembourg. Un énorme succès, beaucoup de monde, beaucoup d'amis : Un serveur me jure qu'à un moment, il y avait 250 personnes dans la pièce !
"Vendredi 8 juin 1990.- Comment sortir de la magie ? Me retransformer en crapeau, moi, prince d'un soir ?... Je ne le veux pas d'ailleurs. Je suis encore hier, et je crois bien que demain j'y serai toujours. J'aimerais faire durer ce 7 juin éternellement, enrayer ma vie comme un journal intime qu'on arrête. Buter sur cette date, m'y clouer comme sur une petite colline de bien-être..."

aparté - j'imagine assez bien que Nabe s'est retrouvé dans ce même état d'euphorie triomphante et durable après la Soirée des 3000 du 15 avril 2010... (lien vers les photos d'Arnaud
Lien : http://tillybayardrichard.ty..
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Citations et extraits (3) Ajouter une citation
1870 : guerre franco-prussienne, Monet quitte Paris pour se fondre dans le brouillard londonien. Là, il a l’occasion d’admirer les oeuvres du peintre anglais Turner (1775-1851), notamment ses oeuvres avec brouillard sur la Tamise. Il « flashe » sur le rendu de la lumière par Turner. Se lie d’amitié avec Whistler, lui aussi admirateur de Whistler, et tous deux, chacun à sa manière, n’a de cesse de capter la lumière à la façon de leur prédécesseur.

Même si on les a rapprochés, la série londonienne de Monet et les Nocturne de Whistler sont des créations propres à chaque artiste. Comme aussi, les brouillards sur la Tamise de Turner.
De même, si la lecture des Petits Riens de Nabe a donné l’idée à Sollers d’écrire les siens, nous avons affaire à deux créations propres, avec la plume typée et le rendu propres à chacun.

Mais laissons Nabe nous conter l’histoire. Elle illustre aussi les rapports complexes de l’écrivain et de l’éditeur, et quand ce dernier est aussi écrivain, cela peut donner Carnet de nuit. Et pour Nabe : son journal intime (tome 4) Kamikaze dont sont extraits les passages qui suivent. Leur amitié y survivra t-elle ?
Je vais redéposer mes Petits Riens chez Gallimard
Vendredi 25 novembre1988. - Je vais redéposer mes Petits Riens chez Gallimard. Je rate Sollers. Enfin, j’espère qu’il aura au plus vite sous les yeux ma sélection (j’en ai repêché 198, et pourtant je suis sévère !), qu’on discute un peu ! En annexe, je lui ai mis de nouvelles maximes bien glaciales, des couperets indiscutables comme il les aime, du genre « Si vous êtes vivant, vous n’existez pas », ou « La gloire est sadique ». J’ai également rédigé une quatrième de couverture qui ne peut que l’amuser...


Mettez-vous à genoux et priez
Mercredi 30 novembre 1988.
- Allô, Marc-Édouard ? Vous ne serez jamais publié chez Gallimard ! Ils ne vous veulent plus... Antoine a réfléchi ... Il y a trop de gens dans la maison contre vous, toutes générations confondues, et puis Sollers répète partout qu’il a été déçu par les Petits Riens, alors ça ne sortira pas. En revanche, si vous m’apportez un manuscrit, moi je pourrai le publier dans « L’Arpenteur », j’y suis beaucoup plus libre que Sollers dans « L’Infini ». Pauvre Bourgadier ! Il ne sait plus quoi faire pour me récupérer. Il essaie de foutre la merde entre Sollers et moi.
[...]
Je vais, tout inquiet, voir Sollers pour rechercher mes Petits Riens et lui demander d’arrêter de me mener en bateau.
[...]
- Vous n’êtes pas proscrit. Personne n’a rien contre vous. Vous n’avez jamais rien écrit contre Gallimard et même si vous l’aviez fait, la maison n’est pas contre, ça fait partie du fantasme Gaston... C’est comme Céline !

Voilà ce que me dit Sollers quand je m’ouvre à lui de mes inquiétudes gonflées par Bourgadier...

- Laissez ce con ! Il essaye de vous troubler. Il a tenté le coup... Jamais je n’ai entendu quiconque vouloir vous bloquer ici. Une fois que j’aurai le texte définitif, Antoine le publiera. Une fois que ça nous plaira à tous les deux(vous et moi) : ça fera déjà du monde ! Avant, c’est pas la peine d’en parler :
[...]

Voyez, moi : je sors en même temps que mon roman ici un « Carnet de nuit » chez Plon. Le Canard de cette semaine s’en moque : « Il auraient dû appeler ça Carnet de chèques... » Antoine m’appelle : « Qu’est-ce que c’est que cette histoire ? J’aimerais bien les lire... » Il me les rapporte : J’aime beaucoup ça... C’est pas grave : on les rachètera plus tard à Plon... » Voilà : il a très bien vu que je n’avais pas fait une magouille commerciale : le texte avait parlé pour moi... Allez travailler, Marc-Édouard, mettez-vous à genoux et priez ! Il faut du Nabe nouveau, du Nabe qui cache son jeu, du Nabe qu’on n’attend pas...

Je ne devrais peut-être pas mais je suis rassuré. Je vais réorganiser un tri impeccable de mes Petits Riens et on verra. Faire passer mes rages diverses vers des maximes glaciales m’amuse. Je vais redresser tout ça, [...] .




La trahison. Dachy me téléphone
... Mardi 13 décembre 1988.
[...]


Dachy me téléphone, très inquiet et un peu révolté, pour m’annoncer que le dernier Infini est paru avec en pré-publication quelques extraits du Carnet de nuit que Sollers va sortir chez Plon en janvier :
- C’est tes Petits Riens ! Il t’a copié : c’est évident... Ton ton, ta forme, tes sujets, tout, sauf que les siens sont très mauvais... Je t’en lis un : « Pour vivre cachés, vivons heureux... » Il n’a pas l’élan nécessaire pour faire ça... Je ne comprends pas ce plagiat manifeste, et ce chassé-croisé absurde publier de mauvais aphorismes de lui chez Plon et de bons de toi chez lui.


Voilà qui m’achève bien ! Et après on me traitera de parano ! Je savais ce que je disais en reniflant que Sollers retardait la mise en route des Petits Riens pour me doubler avec ses carnets... Doublé pour Monk, doublé pour les Petits Riens, il ne manquerait plus que je sois doublé sur Istanbul ( ça vient : tout le monde est sur Byzance et l’Orient ! ). Marc, d’habitude sollersien fanatique, en convient : il ne rigole plus, il voit que j’avais raison... Qu’est-ce que ça veut dire ? Il y avait donc beaucoup de vrai dans le « délire » jaloux de Bourgadier... Sollers a-t-il réellement l’intention de me faire entrer chez Gallimard ?... Je pourrais me fâcher avec lui pour cette « trahison », mais qu’est-ce que j’en ai à foutre si trois connards disent en lisant mes Petits Riens : « Il copie Sollers » ! Le texte jugera, et pour moi, c’est excellent de publier l’original dans la collection du « plagiaire » (Dachy dixit) même, ça me dédouane !... Je vais les lui préparer au peigne fin au contraire, il n’aura plus d’excuses de me les retarder et s’il n’arrive soi-disant pas à les sortir, je saurai à quoi m’en tenir, le texte sera parfait de toute façon, c’est ça qui compte. Ah ! L’heure de l’angélus sollersien va-t-elle sonner ? J’entends déjà les premiers coups de la cloche... La cloche, c’est moi, et la girouette, plus haut bien sûr, c’est lui, mais toute l’église est en émoi !

Dachy aux Deux Magots
Mercredi 21 décembre 1988.
[...]
Dachy aux Deux Magots. Il me remet la première partie des Petits Riens qu’il a lue soigneusement pendant mon absence. Lui aussi a mis des croix et c’est quelquefois les mêmes que celles de Sollers ou les miennes. D’autres pas, il en a trouvé qui m’avaient échappé... A trois c’est bien le diable si je n’extrais pas un petit bijou de ce magma. Un ou plusieurs, parce qu’il y a là de quoi faire les Petits Riens, mais aussi une sorte d’Index (c’est Marc qui a l’idée) des noms cités par moi (mini-portraits sur tous), et puis mon pamphlet sur les médias Rideau, et encore des réponses éventuelles à des interviews.
- Tout est passionnant, dit Marc, mais il faut le disperser dans plusieurs manuscrits.

Nous discutons ensuite du fond qui l’inquiète beaucoup ... Sacré Marc ! [...]
Nous parlons de la différence entre l’écrit parlé, entre le parlé et le pensé, entre l’écrit et le publié. Moi je pense qu’il faut publier tout ce qu’on pense carrément .
[...]
Parce que dans les Petits Riens, il y a des choses non seulenent impubliables, mais d’après lui impensables. Sur Céline bien sûr, ça choque. Il s’est même permis de typexer une phrase dans un paragraphe où il est écrit : « J’aime les idées de Céline. » Marc a commenté au crayon :: « J’ai effacé ces six mots, notre amitié est à ce prix (sic !! !). » Il a du pot que ce paragraphe entier ne soit pas retenu par moi, sinon nous aurions été forcés de fixer ainsi le montant de nos relations houleuses. La facture eût été salée ! Nom d’une chique !

Bonne année ! Ah ! J’ai gagné !
Lundi 9 janvier 1989
[...]
- Bonne année ! Ah ! J’ai gagné ! Il fallait dégainer plus vite !...
C’est Sollers qui parle au téléphone. Je lui demande si je peux lui porter mes Riens
- Oui

Une demi-heure plus tard je suis dans le hall de chez Gallimard, feuilletant le bulletin de janvier qui annonce la sortie du nouveau roman de Sollers, Le Lys d’Or ( en 89 bien sûr...) : une histoire de professeur de chinois tombant amoureux d’une riche héritière aristocrate qui lui demande d’écrire sa vie (si j’ai bien compris) : de la fiction donc...
[...] ...Voici Sollers, enjoué, d’excellente humeur.
- La vie, ça va ?
Sans attendre ma réponse qu’il connaît ( Non »), il prend ma chemise rouge et comnence à lire.
- Ca ne vous dérange pas que je lise devant vous ?
- Allez y, je n’existe pas.

Et pendant un quart d’heure, il lit tout, s’allumant des cigarettes à tâtons pour ne pas se déconcentrer, faisant mine de plaquer de ses doigts bagués des accords imaginaires sur la table pour signifier la musique réussie de ton assemblage d’aphorismes :

- C’est bien, très bien, bien serré, compressé... Ah ! J’aime beaucoup celui-là... Et ça, comme c’est vrai !... À qui le dites-vous... Mhh... Mhh... Oui... Mhh... « La merde me fait chier », ça il faut le dédier à Henric !

Je lui dis que, en effet, chaque aphorisme correspond à quelqu’un de bien précis, on pourrait s’amuser à les dédier tous. « Oh ! Dédiez-moi le tout et n’en parlons plus », me glisse-t-il dans un éclat de rire ! Ah ! Ah ! Il l’ a dit quand même ! Sacré Sollers ! Le désir est là ... Comme si je n’y avais pas pensé ... Lui dédier les Petits Riens ? Même si je ne suis pas soupçonnable de flagornerie comme les larbins d’Art Press qui n’ont cessé de tout dédier à Sollers, je trouve un peu mal placé de le faire dans sa propre collection. Et puis sans la manigance de son Carnet de nuit, ce n’était peut-être pas exclu. Mais dans l’amitié sincère qui se dégage d’un tel appel, il y a toujours la roublardise de l’homme de lettres chez lui. Je trouve ça un peu gros qu’en plus de m’avoir devancé, il soit le dédicataire ! Et qu’on puisse comprendre « À Philippe Sollers (ces Petits Riens, à lui qui est le maître du genre) » plutôt que « À Philippe Sollers (ces Petits Riens pour lui apprendre à en faire) », ça me gêne ...

Enfin, il trouve ça très bon. « Ouf
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Enfin, il trouve ça très bon. « Ouf ! C’est fait ».
- Je vais le défendre avec vigueur... - La date de publication ?

Je ne peux pas vous dire. Ça dépend du Kremlin ...


Sollers me montre aussi son Carnet de nuit, sans me laisser l’ouvrir !
Lundi 23 janvier 1989
[...]
Les Petits Riens... Ils sont en lecture. Il a fait une « note « très favorable. Le manuscrit circule dans les innombrables estomacs de la maison ! Par tous les boyaux...
Pas de nouvelles. Sollers me promet de demander à « Antoine » ce qu’il en est ». Il le fera, mais pas plus. C’est bien la peine de connaître Sollers depuis 1981 pour que mon manuscrit soit à la merci de toute une secte d’inconnus, seulement appuyé par une « note de lecture » de sa part !
... C’est encore dans la poche

[...] Il me montre aussi son Carnet de nuit, sans me laisser l’ouvrir ! Tant pis, j’irai le toucher à La Hune.




Le verdict
Mardi 7 février 1989. - Certain du résultat, je vais au rendez-vous que m’a fixé Sollers. Il va me dire si Gallimard accepte ou non mes Petits Riens... Que j’en ai marre de ces puérilités professionnelles. Sollers s’amuse. Moi pas...

Le voilà !... Je vois sa tête, j’ai compris. Il m’entraîne au café. Déjà dans la rue, il m’annonce - bien sûr - que « c’est non ». Je fais mine de le laisser sur place. « Allez, salut »... Je lui tends la main. Un instant, il pense que je ne déconne pas.
- On peut quand même aller boire un jus de fruits... dit-il.
- Un porto !

Avec sa tête de penaud rougissant, l’air emmerdé mais un peu forcé, Sollers me raconte alors qu’il est allé dans le bureau d’Antoine Gallimard. .
- Et Nabe ?
- ...Non.
- Mais enfin...
- Non.
Et c’est tout. Il est reparti, mes Petits Riens entre les jambes. Ça me rappelle l’époque du Régal. Sollers se croit toujours plein de pouvoir chez Gallimard alors qu’il n’est rien. Il a déjà du mal à publier ses livres. Il me l’avoue lui-même.
- Mon seul cercle de liberté, c’est cette petite revue à la con qui sort tous trois mois et qui s’appelle l’Infini ...

Alors pourquoi s’avancer tant ? Vouloir des aphorismes et non pas des Zigags. Me faire bosser sur les Petits Riens pendant des mois. Tout ça pour rien. Il se doutait bien qu’Antoine Gallimard ne les voudrait pas.Il a réussi à me faire rater mon virage chez Gallimard ! Maladroit ou perfide ! Bien sûr, ça arrange l’auteur du Carnet de nutt que mes petites phrases ne sortent pas, au fond, mais je suis persuadé que en ce qui me concerne, Sollers agit davantage par maladresse et négligence que par calcul. Il se vante et fout tout par terre. Quand je pense qu’il y a un mois à peine il me disait : « C’est bon ! Chez Gallimard, il n’y a que le texte qui compte. Ils n’ont rien contre vous.

- Oui, il y a eu des pressions, me dit-il maintenant. C’est évident. Quand Antoine m’a dit : « Qu’il apporte un roman, on verra peut-être... » je ne l’ai pas senti convaincu. Il a dû se faire influencer. ] J’ en saurai plus par Quignard...

Tu parles ! Il ne saura rien, toujours à se croire plus malin. Mettre trente ans pour en arriver là : avoir un petit poste chez Gallimard et être incapable de publier ce qu’il veut...

- Oui, je considère ça comme un échec, un échec personnel. Mais que voulez-vous que je fasse ? Démissionner ? Aller me suicider au large de l’île de Ré ?
- Pourquoi pas ?

On rigole. Une jeune femme vient lui demander un autographe. Plus intimidé qu’elle, Sollers sort une carte postale de Picasso et la lui signe, tout timidement... Me voilà au point de départ. Refusé de partout.

- C’est tout à votre honneur, me dit Sollers, jouant les envieux.

Ça ne marche plus. Pour moi, quelque chose est cassé. L’inconséquence sollersienne a fait son temps. Il n’avait pas le droit de prendre ce risque. C’était couru qu’Antoine Gallimard veuille un roman. Il fallait que Sollers me laisse faire Zigzags II chez Bourgadier et qu’il ne m’emmerde pas avec les Petits Riens. Il a voulu m’avoir dans sa petite collection et il est incapable de m’y défendre. ]’ ai envie de ne plus rien donner à L’Infini . Inconséquent ! Vantard ! Dégonflé ! Je suis furieux contre lui. Il ne sait pas que j’ai encore une carte dans ma poche : Grasset ! Grasset, son problème ! Si ça pouvait marcher ! La gueule qu’il fera quand je lui mettrai Rideau sur la table...
- Acceptez-vous de déjeuner avec moi ? me demande-t-i1...
- Je n’aurai pas faim...
- Allez ! Une petite omelette théologique, Nabus...

Lui s’en fout ! Il ne pense qu’à lui-même : Le Lys d’or chez Gallimard, Carnet de nuit chez Plon. Le reste n’a pas d’importance... Tout ce qu’il trouve à me dire c’est d’écrire pour Laffont une biographie de Lesage ou de Le Nôtre. « Il y a bien un Français du XVIIe ou XVIIIe qui vous plaise ! » Toujours avec son XVIIIe ! Espèce de Sagittaire superficiel !... Mais ma parole, il le fait exprès ou quoi ? Me méconnaît-il à ce point ? Je me fous de passer un autre siècle pour dire ce que je veux dire sur le mien... Ruse de Sioux pâle comme un visage ! Y en a marre de toutes ces pirouettes de marquise... Ca ne m’a pas réussi depuis un an de mariner dans la prudence et la stratégie ! Retour à la barbarie et à l’instinct ! Je me suis assez humilié dans des halls, de Denoël à Gallimard, attendant que Sollers vienne me raconter des salades !

J’ai à peine le temps d’annoncer la bonne nouvelle à Hélène que Tillinac arrive... Il vient voir l’exiguité de notre studio[...]




Epilogue
Jeudi 16 février 1989.
J’ai 30 ans, je n’ai pas l’âge de Sollers pour me ranger des voitures ( je ne sais pas conduire ! ), ni pour écrire des livres sur mesure. Ce que je voudrais, c’est que Gallimard me prenne un livre hard que je n’ai pas écrit exprès pour eux. C’est trop tôt, donc j’ai le temps, le temps de saigner ma veine polémique. Elle bout depuis plusieurs années ! Je suis comme ça...

Mercredi 22 février 1989. - Comme j’ai dit à Dachy que j’étais remonté contre Sollers à cause de son inconséquence à mon encontre [...] il a profité que je parte jouer au Petit Jo pour téléphoner à Hélène plus moelleux que jamais, et pour lui demander de me calmer. Comme si j’allais rompre avec Sollers ! Monsieur Dachy ne pouvait pas imaginer que j’ai toujours dit ce que je pensais à Sollers sans que cela nuise à notre affectueuse relation. Hélène, qui en a marre de vivre toutes ces péripéties littéraires (au point que nous avons décidé de foutre le téléphone dans le couloir), renchérit, se montre encore plus violente que moi, et rabroue le Dadaïste loukoumisant derrière mon dos.

Au même moment, j’étais moi-même accablé par les recommandations de Fabienne venue au Petit Journal [1] pour me démonter la psychologie sollersienne en ce qui me concerne, me rappeler toute l’estime qu’il a pour moi alors qu’il n’exerce qu’une tactique de pute pour les autres, la quatrième de Billie inoubliable à laquelle il faut que je me raccroche, la conscience qu’il a de mon talent qu’il veut laisser s’épanouir tout seul, de mon masochisme respecte, de sa propre lâcheté touchante, etc. Qu’ils se rassurent tous ! Je ne lui ferai pas de mal à leur petit Joyaux en sucre...
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Je ne supporte pas l'esprit scolaire, même celui des cancres. L'école m'a à jamais dégouté des radiateurs.
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