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EAN : 9782707177476
224 pages
La Découverte (03/10/2013)
3.89/5   14 notes
Résumé :
Dans l'ordre de la modernité, le Nègre est le seul de tous les humains dont la chair fut faite marchandise. Mais dans un retournement spectaculaire, ce nom honni est devenu le symbole du désir de vie, une force pleinement engagée dans l'acte de création.

En analysant cette étonnante contradiction de l'" expérience nègre ", Achille Mbembe répond ici à quelques questions dérangeantes : la relégation de l'Europe au rang d'une simple province du monde si... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique

Ouvrage très intéressant mais qui pourrait rebuter certains du fait de la complexité de l'expression, de la richesse du style.
Au-delà de la forme, force est de reconnaître l'érudition de l'auteur sur le plan du traitement de la dimension historique de l'Africain et des souffrances attachées à son état à travers les siècles. En revanche, on ressent tout au long de l'ouvrage l'omniprésence d'une sensibilité marxiste manifeste dans les démonstrations qui y figurent ainsi que celle de la distance qui se creuse entre lui et les réalités africaines d'aujourd'hui telles que des lecteurs européens comme moi les vivent quotidiennement en étant installés en Afrique de l'Ouest et parfaitement intégrés dans la société du pays où ils vivent, notamment du fait d'un mariage mixte.

Achille Mbembe focalise sur la relation historiquement entachée d'une négation de l'humain entre l'Europe et l'Afrique car liée à l'exploitation de l'Africain par le capital, ce qui rend négligeable les autres sources d'esclavage qui ont existé voire qui existe encore contre l'homme noir dans certains pays de confession musulmane.

Plus grave encore, la machine exterminatrice des Amérindiens mise en oeuvre par les Etats-Unis est presque totalement occultée, tout comme pour ce qui concerne les Aborigènes sur leurs terres. Certes, il s'agit de traiter le cas de ceux qu'Achille Mbembe appelle les" Nègres" mais son approche pose le cas de ces derniers comme étant les victimes de la pire discrimination et violences associées. C'est surtout cette gradation dans le statut des victimes qui est gênante en raison de l'empreinte culturelle marxiste manifeste de l'auteur. Attitude qui s'inscrit dans la tendance actuelle visant à conduire les Occidentaux à culpabiliser et à se repentir. Démarche sur laquelle on peut également s'interroger en termes de pertinence car il y a lieu de prendre en compte les objectifs manifestes et les objectifs latents des accusateurs.

Enfin, il importe de souligner l'utilisation subjective des mots dans les démonstrations de l'auteur. Utilisation au service d'objectifs et qui impose au lecteur de prendre du recul afin d'analyser objectivement les problématiques traitées. La réalité étant plus complexe que les oppositions radicales présentées.

Ouvrage intéressant mais réservé aux érudits et amateurs d'analyse socio-politique.
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critiques presse (2)
LaViedesIdees
02 mai 2014
En puisant dans l’histoire ainsi que dans l’inconscient littéraire, Mbembe identifie trois contextes de fabrication de l’identité nègre : l’esclavage, la colonisation et l’apartheid. Il déconstruit ainsi le discours qui a entraîné, tout autant que masqué, les douleurs de la violence raciale.
Lire la critique sur le site : LaViedesIdees
NonFiction
10 mars 2014
L’historien et politiste Achille Mbembe invite à penser le monde contemporain à l’aune de ce que fut la "condition nègre" depuis la traite atlantique, tout en dessinant une réflexion critique sur les potentielles dérives du capitalisme néolibéral.
Lire la critique sur le site : NonFiction
Citations et extraits (2) Ajouter une citation
Il est vrai que, d’un point de vue historique, l’émergence des institutions que sont la plantation et la colonie coïncide avec la très longue époque au cours de laquelle une nouvelle raison gouvernementale s’esquisse et, finalement, s’affirme en Occident. Il s’agit de la raison mercantile. Celle-ci tient le marché pour le mécanisme par excellence des échanges et le lieu privilégié de véridiction aussi bien du politique que de la valeur et de l’utilité des choses en général. L’essor du libéralisme comme doctrine économique et art spécifique de gouverner a lieu sur fond du commerce des esclaves, à un moment où, soumis à une rude concurrence, les États européens s’affairent à majorer leur puissance et considèrent le reste du monde comme leur possession et domaine économique.

En gestation depuis la seconde moitié du XVe siècle, la plantation en particulier et plus tard la colonie constituent de ce point de vue des rouages essentiels d’un nouveau type de calcul et de conscience planétaire. Ce nouveau type de calcul pense la marchandise comme la forme élémentaire de la richesse, le mode de production capitaliste se présentant, dans ces conditions, comme une immense accumulation de marchandises. Les marchandises n’ont de valeur que parce qu’elles contribuent à la formation des richesses. C’est d’ailleurs dans cette perspective qu’elles sont utilisées ou échangées. Dans la perspective de la raison mercantiliste, l’esclave nègre est à la fois un objet, un corps et une marchandise. En tant que corps-objet ou objet-corps, il a une forme. Il est également une substance potentielle. Cette substance, qui fait sa valeur, découle de son énergie physique. C’est la substance-travail. Le Nègre est, de ce point de vue, une matière énergétique. Telle est la première porte par laquelle il rentre dans le processus de l’échange.
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"Il ne saurait donc y avoir de discours sur les formes contemporaines de l'identité africaine qui ne tienne compte du génie hérétique au fondement de la rencontre entre l'Afrique et le monde. De ce génie hérétique découle la capacité des Africains d'habiter plusieurs mondes et de se situer des deux côtés de l'image simultanément. Ce génie lui-même opère par enroulement du sujet dans l'évènement, par la scission des choses, par leur dédoublement, par le surcroît de théâtralité qui, chaque fois, accompagne toute manifestation de la vie. C'est également ce génie hérétique qui, porté aux extrémités, produit des situations d'extraordinaire instabilité, volatilité et incertitude. Si, comme on tend à le croire, l'Afrique a été falsifiée au contact de l'extérieur, comment rendre compte de la falsification à laquelle, dans leur effort pour ingérer le monde, les Nègres ont, en retour, soumis le monde ?"
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Videos de Achille Mbembe (18) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Achille Mbembe
Le 25.04.2020, Achille Mbembe évoquait “H+” d'Alexandre Friederich dans l'émission “Dans quel monde on vit” (RTBF).
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