Cette lecture débutait franchement mal : dans le cadre de masse critique j'attendais un écrit d'essence psychanalytique sur la notion de refoulement et me voici en tête à tête avec un philosophe inconnu, du moins de ma petite personne, mais dont le statut de professeur de
philosophie à l'Université de Bruxelles suffit néanmoins à aiguiser ma curiosité … Pression supplémentaire, je compris dès les premières pages que cet homme n'était ni plus ni moins que l'initiateur du courant
de la problématologie, ou la théorie du questionnement, alors excusez-moi du peu mais la tâche me paraissait ardue.
Je me suis accrochée, j'ai joué le jeu. J'ai lu et relu, gobergé et absorbé, un peu dans la douleur, comme dans un revival de mes cours de philo de terminale au moment de l'ingestion des textes d'
Emmanuel Kant … Un peu panique à bord quand même… Je suis ensuite passée à la phase travaux pratiques, genre « ce que j'ai compris, je l'applique », exemple : s'efforcer de non plus s'intéresser aux réponses mais plutôt aux questions qui les précèdent, parce que d'après
Michel Meyer et pour citer
Roger-Pol Droit, nous commettons souvent l'erreur suivante : « Au lieu de considérer l'interrogation comme la base de l'activité intellectuelle, nous cherchons systématiquement des certitudes, c'est-à-dire des réponses définitives capables de faire disparaître les questions. » Ah ! L'effort paye ! Et je retrouve là mon si cher concept de refoulement, ici refoulement des questions, que mon belge de philosophe récupère à son compte et s'approprie en énonçant et posant le refoulement problémato
logique, ou refoulement du questionnement. Jusque-là, je gère.
Seulement voilà, ce n'est pas si simple… voire trop facile, parce que ce refoulement peut être de nature faible ou forte ; c'est-à-dire que dans le premier cas, on se questionne beaucoup, genre Socrate ; alors que dans le deuxième cas, le refus des questions est élévé, privilégiant les identités fortes genre les mathématiques. Et dans un cas comme dans l'autre, il faut rétablir l'équilibre non ? C'est naturel, alors il est fait appel au refoulement apocritique. Bref, je résume : un refoulement peut en cacher un autre, c'est ce que Meyer nomme la double mécanique, soit un équilibre entre le rejet des questions et le rejet des réponses, phénomène inversement proportionnel. Waouh.
Et quel est le point de départ du refoulement problématique et de son pendant ? L'Histoire bien sûr, plus exactement l'accélération de l'Histoire, car, lorsque le cas se présente : fi des valeurs, des pratiques, des réponses acquises, il n'y a plus trop de différences entre les questions et les réponses, le refoulement problémato
logique est alors faible. C'est fou mais ça commence à me plaire cette théorie, surtout lorsque
Michel Meyer revoit l'histoire de l'art ou des sciences au prisme de sa
logique, rien à dire : ça se tient ! Je n'adhère pas encore mais je suis sous le charme… Vous ai-je convaincu de vous lancer à votre tour ?