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EAN : 9782918767664
192 pages
Asphalte (12/01/2017)
3.76/5   27 notes
Résumé :
Australie, dans les années 1960. Le narrateur, jeune métis aborigène, sort d’un court séjour en prison suite à un cambriolage. Livré à lui-même, il erre entre les bars jazz, où il risque de retrouver ses mauvaises fréquentations, et les plages où flâne la jeunesse dorée locale. Il se heurte de nouveau aux multiples barrières entre lui et les blancs, lui et les Aborigènes, lui et une société dans laquelle il ne trouve pas ses repères. Dans une librairie, il tombe sur... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (10) Voir plus Ajouter une critique
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Bonne idée de la part des éditions Asphalte que de republier Chat sauvage en chute libre, roman paru à la naissance de la maison, en 2010. Et encore meilleure idée que d'y ajouter une postface de l'auteur qui justifie amplement cette réédition.
Paru en 1965 en Australie, Chat sauvage en chute libre est devenu là-bas un classique. Statut qui tient autant aux qualités littéraires de l'ouvrage qu'au fait qu'il a été considéré comme le premier roman écrit par un aborigène. Mudrooroo y met en scène, à la première personne, un jeune métis aborigène qui vient de sortir de prison. Sans projets, résigné au fait qu'il ne tardera pas à retourner d'où il vient, le jeune homme erre.
« Aujourd'hui, c'est fini, les portes vont s'ouvrir et me rejeter, seul et soi-disant libre. Encore une dette payée à la société alors que je ne lui devais rien. J'émerge enfin dans ce paradis de pacotille dont je rêvais depuis dix-huit mois. Des mois de galère dans une vie. Des mois d'ennui sans fin, sans bornes. Les mêmes visages, les mêmes conversations, les mêmes blagues salaces jusqu'au dégoût. Les mêmes récits pathétiques de combines passées et à venir. Souvenirs héroïques. Espérances folles. »
Sans doute ce premier paragraphe résume-t-il déjà tout ce qui nous attend à la lecture du roman en partie autobiographique de Mudrooroo. L'ennui, face à un monde qui ne change pas vraiment, face aux barrières qui ne cessent de se dresser devant un jeune homme qui n'a aucune envie de s'épuiser à tenter en vain de les franchir ou qui, par provocation, tapera dedans. On tire de ce récit un sentiment paradoxal : il y a pour le narrateur une fatalité. Il retournera en prison, la société ne voudra pas de lui. Et sûr de cela, il va s'ingénier à s'assurer que cela arrive bien. C'est dans la description de cet abandon actif que Mudrooroo excelle dans un roman noir qui touche juste et qui n'épargne ni ces blancs de classe moyenne ou supérieure tellement concernés par les problèmes de aborigènes qui portent un discours terriblement paternaliste sous une couche d'indignation d'ailleurs même pas feinte, ni ces aborigènes résignés, à commencer par sa mère, que croisent le narrateur. Intelligent, le jeune homme est bien conscient de son enfermement – dans une classe, dans une caste – et, d'ailleurs, sa seule réelle tentative d'excursion consiste à revenir dans les lieux où il est né et qu'il a fuis. Cette chute, pas si libre que ça finalement, on la suit tout en revenant sur le passé du narrateur qui dévoile une société inégalitaire, rude, impitoyable envers ceux qui dévient du modèle imposé et que l'on s'ingénie à formater, sans grand succès d'ailleurs.
Et puis vient donc cette postface écrite en 2015 par Mudrooroo et intitulée Je suis moi. Et personne d'autre !, édifiante réflexion de l'auteur sur son parcours et, surtout, sur son identité. Sur la manière dont il s'en est saisi et celle dont on a voulu la lui confisquer. Sur son ouverture au monde aussi.
Tout cela fait de cette réédition un livre noir et politique qui, pour dater de plus de cinquante ans n'a rien perdu de sa pertinence et de l'acuité de son regard sur la manière dont nos sociétés traitent ceux qui ne veulent pas entrer dans les cadres préétablis et y demeurer.

Lien : http://www.encoredunoir.com/..
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"Les hommes naissent égaux. le lendemain, ils ne le sont plus" (Jules Renard). Pour certains, même avant leur naissance c'est déjà foutu pour les droits...

L'auteur de ce roman paru en 1965 n'avait pas les bonnes cartes en main pour faire une Grande Suite.

Son père était Blanc, et sa mère Aborigène, ce qui fait de lui un métis : pour les Blancs, il est Aborigène, pour les Aborigènes, il est Blanc. le cul entre deux chaises.

Jugé par tout le monde dès sa naissance, même avant, étiqueté dès l'enfance, condamné par les deux populations, la Blanche et les Aborigènes, il aurait eu du mérite de s'en sortir, vu le sale ticket perdant qu'on lui a casé dans les mains dès qu'il est sorti du ventre de sa pauvre mère.

Il a bien entendu sombré assez vite, pour une broutille, bien entendu, et le fait d'être placé chez des gentils Blancs (ironie) d'une espèce de maison de redressement n'a pas arrangé les choses. Séparé de sa mère, cela ne fera que de le précipiter plus dans la merde totale. Une vraie merde, pas de la glace au chocolat (cfr scandale du Cacagate).

C'est le récit d'un renoncement à tout, sauf aux mauvais coups, le récit d'un naufrage humain, la chronique d'une renonciation annoncée. La chronique d'un jeune gars dont le seul tort était de n'être ni Blanc, ni Aborigène et qui n'a jamais réussi à trouver sa place, ses marques.

Les paragraphes alternent entre des récits du passé et ceux du présent, donnant à certains moments des airs de foutoir, mais comme un chat, on retombe vite sur nos pattes.

Un récit qui n'est pas joyeux, bien entendu, rien qu'aux titres des trois parties on a déjà compris le final. Notre auteur est désabusé, n'attend rien de la vie, rien des autres, ne sait pas trouver sa place et reste assez cynique lorsqu'il porte un regard sur la société Australienne.

C'est court, c'est pas long, mais c'est puissant, l'amertume de l'auteur transpire de chaque phrase et on sent bien que jamais il ne fera un effort pour s'en sortir dans la vie puisque la vie l'a mis sur le côté dès le départ.

Un récit qui, hélas, est toujours contemporain.

Lien : https://thecanniballecteur.w..
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Remettons dans son contexte d'origine ce roman exceptionnel, paru en 1965, il fut le premier récit publié de la littérature australienne par un aborigène. Il est depuis devenu un classique qui a donné à son auteur une stature d'écrivain dans le monde entier. Rééditer plusieurs années de suite en 1992, 2010 et 2017…

Vous constaterez que la préface se trouve en fin de livre car l'auteur souhaite que le lecteur n'ai aucune interférence à sa lecture. Entrons directement dans ce roman. Une découverte pour moi avec le Prix Étranges Lectures "Prix des lecteurs" qui débute le 1er novembre 2021 et se termine le 30 avril 2022 auquel je participe pour la seconde fois par ma bibliothèque préférée : Bibliothèque de Saint Geyrac.

Mudrooroo, personnage controversé, ambiguë, mais vrai et sans filtre, jeune métis aborigène, rejeté par la société des blancs et par celle des aborigènes (qui à ce moment vivent à la périphérie des villes, en marge de la population blanche) nous livre ici son combat social et culturel, il sera condamné dès l'âge de 9 ans pour un vol mineur!

"Je sanglote en m'accrochant à elle. Plus rien n'ira jamais bien, désormais. On m'a jugé et reconnu coupable. Et j'ai déjà neuf ans…"

Premier chapitre "Liberté retrouvée" :

"Aujourd'hui, c'est fini, les portes vont s'ouvrir et me rejeter, seul et soi-disant libre. Encore une dette payée à la société alors que je ne lui devais rien. J'émerge enfin dans ce paradis de pacotille dont je rêvais depuis dix-huit mois…"

Le conteur se révèle dans les années 1960 en Australie et reviens avec des flash-back sur sa vie de jeune garçon, en partie autobiographique. C'est un homme torturé devant une fatalité létale, tout en contradiction, dans un enfermement quelque fois psychologique mais aussi physique avec ses retours réguliers en centre de détention. Un récit poignant, un roman noir ou l'espoir n'est pas au goût du jour. Une chouette couverture.

Ce titre est suivi de "Je suis moi. Et personne d'autre!" où l'auteur nous dévoile la puissance du langage qu'il inclus dans ses textes, sa façon d'écrire, son inspiration. Pour ce premier titre du Prix Étranges Lectures (sur 5 textes) ce fut une très belle découverte. Je le conseille fortement à la lecture pour tous.


Lien : https://passionlectureannick..
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Je ne voudrais pas dévoiler l'intrigue de ce livre tant c'est touchant et moderne. Ecrit en 1965, on croirait lire un roman contemporain tant tout y est subtil, intelligent, suggéré, vrai, réaliste, avec une vraie réflexion sur les peuples dont le rêve est de vivre et qui cherchent à atteindre un rêve que les blancs ne veulent pas partager.

Ce personnage est fort à un point qu'on vit tout ce qu'il traverse, on entre sans problèmes dans sa logique et on finit par comprendre sa démarche pour conduire sa vie. Et il en va de sa relation avec sa mère, avec les filles qu'il rencontre, avec ses anciens amis, avec sa famille. C'est un être qu'on a éduqué avec des règles qui ne sont pas les siennes, et qui s'est brûlé les ailes à vouloir un bonheur qui, dès le départ, lui était interdit.

Vous l'aurez compris, ce livre est une visite d'une ville d'Australie, parsemée de flash back pour mieux comprendre son parcours. L'auteur utilise la passage de la première à la troisième personne du singulier, non pas pour passer du présent au passé mais pour montrer que le narrateur prend du recul par rapport à ce qu'il était, par rapport à ce qu'on lui a appris.

C'est indéniablement un roman fort, avec peu de sentiments, mais avec une psychologie et une narration impeccables. Sur une intrigue simple, Mudrooroo nous tisse un roman profond dans un style limpide et intemporel. Et à la question : est-ce qu'un chat sauvage en chute libre retombe sur ses pattes ? La réponse est non. C'était écrit, c'était son destin. C'est un coup de coeur de Black Novel. Un superbe roman noir comme je les aime.
Lien : http://black-novel.over-blog..
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Plongeon dans l'univers d'un jeune métis aborigène en errance :
Horizon porte de prison. En arrière-plan, une petite ville australienne, et une société perçue en mode schizo, décrite de l'intérieur d'un gars qui y sera toujours un outsider. Au loin, à l'origine, et au plus près peut-être, les étendues du bush.

Un roman fort, rapide et pugnace, où l'on sait l'art de faire danser les mots sur le papier, même quand le désespoir plombe les pensées...
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Citations et extraits (8) Voir plus Ajouter une citation
Aujourd’hui, c’est fini, les portes vont s’ouvrir et me rejeter, seul et soi-disant libre. Encore une dette payée à la société alors que je ne lui devais rien. J’émerge enfin dans ce paradis de pacotille dont je rêvais depuis dix-huit mois. Des mois de galère dans une vie. Des mois d’ennui sans fins, sans bornes. Les mêmes visages, les mêmes conversations, les mêmes blagues salaces jusqu’au dégoût. Les mêmes récits pathétiques de combines passées et à venir. Souvenirs héroïques. Espérances folles.
Il est près de onze heures, je m’apprête à prendre la couche qui purifiera nos corps souillés par la prison, les préparant à l’air doux et frais du monde libre. Un maton nous observe tandis que nous nous alignons. Les cabines nous arrivent à la taille, pour éviter que les prisonniers ne transgressent les règles. Pas de bavardage. Pas de sexe. Aujourd’hui, il n’empêche pas les conversations et choisit de regarder dans le vide, impassible. Personne ne songerait à enfreindre le règlement le dernier jour. A part moi, peut-être.
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J’ai remarqué la librairie près du café. Un livre ferait bien dans ma panoplie et pourrait presque me faire passer pour un étudiant. J’entre et reste stupéfait devant les rayons et les tables qui débordent de volumes. Que choisir dans tout ça ? Un bouquin pas cher. Peut-être un de ces livres de poche à l’air austère. J’en tire un d’un rayon. Crime et Châtiment. C’est drôle, je l’ai lu en prison. Chouette histoire. Guerre et Paix. Anna Karénine. Mince ! On ne s’attendrait pas à les trouver ici aussi.
Je passe à la section Psychologie et creuse comme un chien déterrant un os. Plus mon genre, mais trop cher. Le temps passe. Théâtre. En attendant Godot. Je le feuillette au hasard.
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Déprimé par mes souvenirs, je reviens vers les bâtiments et ne tarde pas à trouver L’Expresso, le café où je suis censé avoir rendez-vous avec la fille. Des étudiants vont et viennent, certains l’air grave, des livres sous le bras, d’autres en groupes ou en couples, riant ou bavardant. Je tends l’oreille pour écouter leurs conversations :
« Aucun doute possible ! Le plus grand des misanthropes, c’est Kafka ! »
Plus grand que qui ? Et qu’est-ce qu’un misanthrope ? J’ai lu un livre de cet écrivain, en prison. C’était étrange, mais je pense avoir fini par le comprendre. Je suis le groupe vers le café et l’un des étudiants me tient la porte, attendant que j’entre à mon tour. Je fais non de la tête et reste dehors, les poils de mes bras hérissés comme ceux d’un chat de gouttière effrayé, surpris dans un lieu incongru. [
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La prison de Freemantle a été une sorte de refuge pour moi. Ils m’ont accepté ici comme j’ai moi-même accepté le désespoir et la futilité. Les autres ont su garder l’espoir. J’en connais même certains qui ont pris des résolutions, mais ils ne s’y tiendront pas et rechuteront. Libéré pour quelques semaines, quelques jours, puis de retour dans cette prison bien-aimée quelques années. L’espoir et l’illusion des tocards. Moi, je ne me laisserai plus avoir. Je me fous de tout. Je me suis endurci afin qu’aucune émotion bidon ne puisse plus m’effleurer. J’agis dans la vie comme dans un rêve. Acteur et spectateur en même temps. Limite schizo. J’arrive à m’extirper de moi-même pour me regarder agir.
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Retour assuré à la case prison.

Je n’ai pas oublié la première fois. Seize ans, malade et raidi par la peur dans un couloir, j’aurais préféré être mort. Le lieu me semblait immense. Trois étages de cellules jusqu’au plafond, où la lumière du jour transparaissait péniblement au travers des vasistas gris de poussière. Un espace au centre, où les prisonniers s’alignaient avant de partir travailler, souper ou retourner dans leurs cellules, enfermés à double tour. Dans ces petits cubes aux murs blanchis à la chaux et au plancher ciré, on trouvait un lit, un tabouret, une table boulonnée au sol et un seau hygiénique. Une ampoule au plafond, comme un œil maléfique. Laideur et désolation de l’enfer. C’est la même laideur aujourd’hui, mais tellement familière que je ne la remarque plus.
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