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Nietzsche nous confiait : "Socrate, il faut l'avouer, m'est si proche que je me bats presque sans arrêt contre lui.".
Il pourrait en dire autant de Jésus l'autre grande figure auquel il s'opposait vivement.
Nietzsche est un auteur déroutant, difficile ... il semble se contredire à chaque page. Cette impression est très forte à la lecture de ce livre. Tout y est décousu, parfois les aphorismes arrivent en mode rafale par saccades.
Roger Pol Droit en parle admirablement : "on ne voit pas la même chose du haut de la colline et au fond de la vallée. Or Nietzsche ne cesse de changer de point de vue sur le même objet, ce qui n'est pas la même chose que de changer d'avis. Son avis devient autre parce qu'il dépend d'un lieu d'observation différent. Ce qui est directement lié à sa pratique assidue de la marche en montagne : les escarpements, les dénivelés modifient sans arrêt le panorama."
Ou encore : "je me suis rendu compte que Nietzsche ne propose pas une doctrine mais une façon de déplacer le regard. Lui-même n'a cessé, toute sa vie, de se libérer des carcans qui l'enfermaient : le christianisme, l'université, la métaphysique classique … En fait, il livre les moyens d'une libération, donne les clés pour se débarrasser du sérieux, de la pesanteur."

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la morale trucidée.
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Voilà des années que je veux lire Nietzsche sans jamais me décider à lire autre chose que des extraits de ses plus célèbres écrits.
Par-delà le bien et le mal, voilà un monument dont l'aura rayonne autant que celle d'Ainsi parlait Zarathoustra et dont je ne parvenais pas à franchir le seuil de peur de ne rien y comprendre.
Seulement voilà, lorsque je l'ai vu dans la Masse critique de Babelio, je me suis dit que c'était l'occasion ou jamais de me lancer dans ce défi. Merci donc à Babelio et aux éditions Thélème.

Les deux particularités formelles de l'oeuvre que j'ai reçue sont les suivantes : le format audio et l'enregistrement qui comprend les quatre premiers chapitres du texte.
Le texte lu par Julien Allouf est captivant, ménageant silences et accélérations, adaptant le ton sur un enregistrement sans fioritures. Bref, un travail de lecture de qualité qui nous rend l'écoute agréable et sérieuse.
Les trois premiers chapitres traitent des préjugés des philosophes, de l'esprit libre et de l'esprit religieux, tandis que le quatrième se compose de maximes et autres aphorismes. Nietzsche donne à voir les limites des philosophes qui croient en la valeur absolue de la vérité. Il présente également, dans son deuxième chapitre, un nouveau type de penseur. Cet esprit libre doit redéfinir les valeurs et ne plus se contenter de la binarité du bien et du mal. Enfin, le troisième chapitre interroge la croyance, les superstitions et la morale.
J'ai beaucoup aimé écouter les écrits de ce grand philosophe mais je crois que ce support n'est pas vraiment adapté pour moi. Pour les écrits complexes sur la littérature ou la philosophie, j'ai l'habitude d'annoter, de commenter et de relever les passages clés d'une oeuvre afin d'en faire une synthèse. Et bien que le rythme de lecture ne soit pas rapide, il ne m'a pas permis de pénétrer complètement dans ce texte.
Je vais donc très probablement le lire avant de réécouter les quatre premiers chapitres. Une première lecture me semble indispensable afin d'apprécier l'écoute et de mieux embrasser la pensée de Nietzsche.
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Belle découverte du texte de Nietzsche dans sa version livre-audio offerte par Babelio et l'éditeur (Thélème), via une opération masse critique (je remercie vivement les deux). Une fois n'est pas coutume, je ne parle donc pas ici du contenu, mais du contenant, atypique, qui porte et sert le texte avec précision. Une pochette simple, sans chichis, un CD, pour 2h55 de lecture offerte. Ça tombe bien, ma villégiature en campagne s'annonçait, juillet débarquant avec son soleil caniculaire.

Première expérience auditive pour moi depuis l'école maternelle. La voix du lecteur - Julien Allouf - est belle, posée, le ton clair, on boit les mots du philosophe à la moustache, avec facilité et enthousiasme. J'ai donc testé cette écoute sur la route des vacances, parfait accompagnement de circonstance. Attentif au moindre détail du pamphlet critiquant le dogmatisme des philosophes chrétiens et platoniciens, la route file à toute berzingue. On ne voit pas le temps passer, ni l'essence filer. Attention cependant, l'abus de Nietzsche sur le macadam peut entraîner de sérieuses pannes d'essence.

Je l'avoue, le concède volontiers, les aires de repos ont peut-être été quelque peu écourtées à l'occasion, afin de rejoindre le philosophe allemand, mais il faut me comprendre, on arrivait sur la partie originale dans laquelle Friedrich pousse à remettre de la créativité dans une pensée trop ancrée dans les croyances. Ça vous fait aisément sauter un pipi ou deux.

Idiotie de l'homme se fantasmant subitement éclairé, je me sentais bien plus apaisé au volant de mon véhicule, éloigné des bisbilles habituelles, concentré sur l'"esprit libre" que Nietzsche tentait de faire naître en moi (j'ai manqué d'expérimenter cette liberté en fraudant deux ou trois péages autoroutiers, en vain, ma liberté n'était pas placée dans le larcin).

Bref, ce que je cherche à démontrer ici, c'est l'absolue modernité du texte, ancré dans notre quotidien, résonnant aujourd'hui plus que jamais, universel et inventif. Il est certain que je vais me pencher plus régulièrement sur ce genre de propositions (le catalogue des éditions Thélème est très intéressant et fourni), parfaites pour s'instruire sur la route, relativiser la vie, au lieu de hurler sa bile au volant.
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Nietzsche, j'en ai entendu parlé lors de mes cours de philosophie au lycée. J'avais envie de découvrir cet auteur par l'un de ces textes et Par-delà le bien et le mal est donc le premier de ses ouvrages que je découvre.

Je l'ai découvert en livre audio et je pense finalement que ce format n'était pas très bien adapté dans mon cas. En effet, le rythme imposé du lecteur n'était pas forcément celui dont j'avais besoin : j'aurais aimé par moment revenir quelques passages en arrière, relire une phrase ou passer plus de temps sur un passage - chose que l'on peut aisément faire avec un livre papier mais pas tellement avec un livre audio -.
De plus la version audio ne présente que le texte du chapitre I au chapitre IV si bien que le texte fini très abruptement (je ne sais pas combien de chapitres composent le texte papier).

Concernant le contenu de cet essai, je suis un peu déçue. En effet, l'ensemble me donne l'impression de gros fouilli. Les thèmes abordés sont nombreux (point positif si on ne s'intéresse pas à un thème particulier) mais ceux-ci le sont trop à mon goût, ne permettant pas un développement clair et profond des idées (but principal selon moi d'un texte philosophique...).

Rien n'a de grâce aux yeux de Nietzsche et il critique un grand panel d'auteurs tout au long de cet ouvrage. Sa vision de la femme, très misogyne, m'a particulièrement dérangée, me laissant un goût amer à la fin de mon écoute.
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Par Delà le bien et le mal peut ressembler à un cri pour l'indépendance du philosophe, ou mieux ses Lumières. Nietzsche ouvre son livre sur les préjugés des philosophes. Oui, les philosophes aussi ont des préjugés, leur science n'est pas si objective qu'ils le prétendent.

On entre aussitôt dans le monde Nietzsche, on aborde la côte du perspectivisme. Bien qu'il y ait des pensées non approuvées par le lecteur, l'explorateur- lecteur peut très bien voir des décors exotiques, des sculptures étranges, surprenantes, il continue son exploration en acceptant la découverte d'un monde, celui d'une subjectivité avec des points de vue autres que les siens. Ce monde qui nous apparaît éclaté, sans frontières, a sa cohérence et porte un projet.

Nietzsche rejette de ses terres le dogmatisme en matière de philosophie. le philosophe ne doit pas être assimilé à Oedipe, qui cherche uniquement une réponse à des questions ; il apprendra à détrôner l'art du Sphinx, à savoir poser des questions audacieuses, dangereuses ; et découvrir dans une archéologie leur matière première, leur fondation. Par là, la philosophie sera considérée comme problématique. On s'interrogera sur la valeur de vérité. Au-delà, une rupture fondamentale s'opère : la recherche est astreinte à une exigence d'authenticité, ou de radicalité.

En premier lieu, la morale. Nietzsche distingue une typologie de la morale, elle est donc vue comme un problème. Il affirme que la morale a été considérée uniquement en tant que phénomène descriptif. Nietzsche se demandera : pourquoi la morale ? de là, sa généalogie du bien et du mal, d'abord le bien/ le bon est ce qui est bénéfique à la communauté, puis ce qui s'en distingue par la suite, devient mauvais. Il gratte ainsi le palimpseste de la morale.

Dès lors, c'est la navigation des « dangereux peut-être » qui s'ouvre pour le philosophe. Son exploration est ponctuée de question comme : pourquoi le vrai et pas le faux ? Pourquoi l'Un plutôt que le multiple ? Que nous cache cette valeur de vérité ? Nietzsche dira que la « pensée consciente du philosophe » est imputée aux « activités instinctives ». Alors, il pourra dire aussi que renoncer au faux, c'est renoncer à la vie ; qui est perpétuel changement, perpétuelle sculpture. Par conséquent, toute quête, toute fouille répond à des "exigences physiologiques".

Le platonicisme est vu comme un « christianisme du peuple ». La volonté de puissance agit ; les philosophes aussi objectifs qu'ils se prétendent, veulent forger le monde à leur façon ; de là, un « instinct tyrannique » nous dit Nietzsche, de là, cette volonté de vérité unique. Toute philosophie n'est pas aussi froide, aussi distante de la subjectivité : le philosophe voit dans les réponses des « confessions de son auteur, des sortes de mémoires involontaires ». Nietzsche déconstruit par là le « préjugé » de vérité unique, dès lors, il n'y aura pas qu'une seule vérité, mais des multiples interprétations. de son voyage, le philosophe n'aura pas la même vision que les autres navigateurs. C'est une expérience unique que rend possible le perspectivisme. Ce sera une quête dont la boussole d'orientation sera la vie.

A l'esprit de « préjugé » il opposera un esprit « libre » ou encore « aristocratique ». Contre le nihilisme des philosophes, ou du christianisme, Nietzsche refonde les valeurs cardinales : le courage, la lucidité, l'intuition et la solitude. Cet esprit « a le respect de soi », il ne cherche nullement la mortification. Il a le « courage d'aventuriers », « une curiosité agile et subtile » qui lui permet une exploration riche sur la mer de la connaissance. Il se distingue, de ceux qui restent sur les côtes, ne contemplant que la lumière du soleil immuable. Aussi, se dirige-t-il aisément au sud, que Nietzsche dit être « une grande école de guérison de l'esprit » : la santé, l'épanouissement se trouvent à la côte méridionale. le philosophe fuira la côte septentrionale, l'Europe, l'Allemagne, dont il voit l'étendard du nihilisme, son drapeau flotter au loin.

Nietzsche fait sortir la philosophie de son « obscurantisme », de ce qu'il qualifie de dogmatisme ; pas de réfutation de doctrine, mais à l'horizon, autres terres d'explorations. Mais tout ne se vaut pas, car il faut évaluer, ce qui implique une forme interprétative.

Par delà le bien et le mal, c'est dépasser le bien et le mal, valeurs du christianisme. Niezsche ne proclame pas l'absence de tout "bien" ou "mal."
Si Dieu est mort, l'hypocrisie continue, ces valeurs sont vides de substances. L'homme va pouvoir, dans cette aurore nouvelle , créer de nouvelles valeurs et rechercher ce qui est bon pour lui.
Il s'agit plus d'une forme de sagesse que de morale. Ainsi Zarathoustra défend le bon égoisme : se développer individuellement pour pouvoir apporter sa richesse à l'autre. N'est-ce pas là un signe de santé après un long voyage ?

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L'oeuvre nietzschéenne n'est, il est vrai, pas dépourvue de faiblesses. Il y a des galimatias pompeux et vides, des postulats contestables et extravagants, des positions radicales où le célèbre philosophe allemand manque de nuance, et bien d'autres défauts.
Mais, toutefois, malgré ces importantes faiblesses, on aurait tort de négliger entièrement l'oeuvre de Friedrich Nietzsche.
D'abord, parce que tout n'est pas que défauts dans l'oeuvre de Nietzsche ; c'est vrai qu'il y a des galimatias, c'est vrai qu'il y a un certain manque de nuances. Mais il y a aussi des idées très justes.
Mais pas seulement.
Car, en plus, des idées très justes, Friedrich Nietzsche a un autre mérite : celui de pousser son lecteur à la réflexion. Même ses postulats contestables peuvent pousser à des réflexions intelligentes et justes.
Une autre chose intéressante, chez Nietzsche, est ce qu'on pourrait appeler la "valeur de la remise en cause" ou de "remise en question", c'est-à-dire la valeur de la remise en cause des dogmes.
Plus encore, ce qui fait toute la valeur de "Par-delà bien et mal" est la défense que Nietzsche y opère de la liberté de pensée. Une valeur importante, que Nietzsche fait briller autant par son éloge en lui-même que par le reste de son propos, tout entier tissé de pensées libres, complètement libre, loin des dogmes, des lieux communs, des idées traditionnelles.
Un livre à méditer !...
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Par-delà le bien et le mal, qu'y a t-il ?
Par-delà le bien et le mal, c'est-à-dire la morale...
par-delà le bien et le mal, il y a le cerveau, comme une voûte céleste multicolore ;
par-delà le bien et le mal, il y a l'humain, trop humain ;
par-delà le bien et le mal, se trouvent l'esprit, le masque des pensées, la corruption, le jugement moral, l'immoralisme ;
par-delà le bien et le mal, se trouvent l'arrogance, la provocation ;
par-delà le bien et le mal, se cache la fameuse volonté de puissance, la vie ;
par-delà le bien et le mal, il y a les devineurs d'âme, et la psychologie.
.

Friedrich Nietzsche, au style toujours compliqué ;
Friedrich Nietzsche, manquant toujours d'explicitations, devant être deviné à demi-mots ;
Friedrich Nietzsche, au risque d'être mal interprété ;
Friedrich Nietzsche, cachant, lui aussi, ses vérités dans des délires, des logorrhées, des trucs-bidons, des phrases énigmatiques ;
.
mais Friedrich Nietzsche fonçant tel le taureau, bousculant Aristote, Socrate, l'ironie De Voltaire, les Anglais, la mathématique de Spinoza, Leibniz, l'impératif du vieux Kant, le romantisme de Schumann, et même Jésus et l'invention de Dieu ;
.
mais Friedrich Nietzsche fasciné par le génie de Platon, Empédocle, Héraclite, Shakespeare, le combat de Pascal, Delacroix, les psychologues français, l'Europe, Schopenhauer, Hegel, et surtout Wagner ;
.
Friedrich Nietzsche analyse, au-delà de la morale, quelques concepts en 9 chapitres.
.
Ce que je retiens de cet essai, après avoir lu Humain, trop humain, c'est la fragilité de l'homme, mais ça, on le savait..
.
Je pense comme lui, quand il déclare que chaque philosophe détient SA vérité ;
je loue son effort pour tenter, avant Freud, de découvrir les secrets de l'âme ;
je compatis quand il se défoule sur l'Eglise, sa bête noire ;
j'aime bien quand il se définit ainsi :
nous autres, savants ;
nous autres, ermites ;
nous autres, Allemands ;
nous autres, mandarins...
J'aime aussi quand il apostrophe les lecteurs : "Mes amis..."
Je trouve bizarre, mais c'est la mode en 1885, sa classification des matières, plaçant la philosophie au-dessus des autres disciplines ;
Je trouve culottée sa façon de se positionner au-delà du bien et du mal : "nous, les immoralistes", comme avec une sorte de vertu, mais le bien et le mal, c'est issu de l'Eglise, qu'il ne peut pas saquer...
Enfin, au chapitre VIII, il analyse l'Europe, analyse que j'ai retrouvée dans Mein Kampf, sauf pour les Juifs.
Le dernier chapitre est consacré à l'âme, celle de l'homme de proie, avec la volonté de puissance, et, à l'opposé, l'âme d'esclave. Dans cette partie, pour comprendre, on peut remplacer plusieurs termes de Nietzsche par les trois instances que Freud conceptualisera 38 ans plus tard.
.
Que m'apporte ce livre ?
J'ai d'abord la joie d'avoir été au bout.
Ensuite, je n'ai pas lu la biographie de l'auteur, mais je me pose la question : pourquoi avance-t-il masqué, ce qui nuit considérablement à la lecture et à l'interprétation ? L'Eglise est beaucoup moins redoutable qu'au XVIIè siècle.
Enfin, je me dis qu'il y a plein de bonnes idées, comme la morale en tant qu'illusion de vérité, la pluralité des morales, la naïveté de suivre la morale ecclésiastique, la peur des étoffes rouges, les cardinaux, l'analyse de la naissance d'une civilisation par sa barbarie "noble" et dure, sa décadence par sa démocratie amorphe et son socialisme, l'opposition : esprits libres vs troupeaux, la hiérarchie de Nietzsche : théologie < science < philosophie, etc...
.
... et que c'est dommage qu'une fois de plus, les philosophes ne soient pas plus clairs et mieux diffusés :)


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L'essence de Nietzsche
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Face à Nietzsche, qui suis-je pour me prononcer, pour juger, pour comprendre seulement l'essence même de la philosophie qu'il défend ? Si rien n'est Bien et, tout en même temps, rien n'est Mal, comment dois-je me sentir au terme de cette lecture? Par-delà le Bien et le Mal, puis-je m'autoriser à être envieux de ce pouvoir qui appartient à la caste des êtres avides de puissances que Nietzche décrit comme moteur du monde ou dois-je plutôt accepter de me reconnaître oppressé par ces derniers, ces aristocratiques, et me ranger du côté des esclaves ?
‘Libre penseur', je peux aussi refuser de suivre Nietzche dans sa définition d'une philosophie qui refuse toute morale classant et structurant la vie en un affrontement permanent de ces forces du Bien qu'on appellerait vertus et celles du Mal qui ne seraient que défauts. Néanmoins, je découvre un Nietzche qui m'invite à poursuivre inlassablement ma quête de vérité en posant la question de l'origine de la réalité et celle des fondements du pouvoir, le tout sans a priori. Entrer dans le monde des esprits libres, c'est refuser la catégorisation dichotomique proposée par les morales teintées de religiosité ou d'enseignements civiques qui portent à croire que le Bien est du côté de la vertu, non du péché, que la force s'oppose à la faiblesse, que la solitude est le déni de l'altruisme ou que l'ignorance est de l'anti savoir. En toute chose, le philosophe, digne de ce nom, le nouveau philosophe veillera toujours à se poser la question de savoir qui définit les valeurs comme positives ou non, et pourquoi.
Fort de cette idée, il remet en cause le principe de démocratie qui semble vouloir mettre tout le monde sur un même pied et donc empêcher les puissants de se réaliser au bénéfice des plus faibles qui freinent le développement du Monde. Il égratigne aussi la notion même de vérité scientifique, rien n'étant définitif, tout étant lié à l'instant, il ne peut y avoir de vérité établie !
Si cette philosophie joyeuse du doute permanent est séduisante, Nietzche n'en est pas moins parfois imbuvable dans sa critique des autres philosophes dont aucun ne trouve grâce à ses yeux et qu'il traite de vieux Kant, de crétin de Schopenhauer ou encore de Spinoza menteur. Sa propension à dénigrer ce qui n'est pas lui, au plus profond de sa recherche, le porte aussi à se montrer très dur pour une série de peuple, dont le sien, dont il dresse un tableau critique à coups – le mot est faible – de caricatures réductrices et peu flatteuses. Mais la cible de prédilection de Nietzche m'apparaît, dans ce livre, être la femme à qui il ne reconnaît pas le droit de se revendiquer à l'égal de l'homme.
Quelques positions prises par l'auteur dans ce livre écrit en 1885 :
« La femme veut s'émanciper … c'est là un des progrès les plus déplorables de l'enlaidissement général de l'Europe. Car que peuvent produire ces gauches essais d'érudition féminine et de dépouillement de soi ! La femme a tant de motifs d'être pudique. Elle cache tant de choses pédantes, superficielles, scolastiques, tant de présomption mesquine, de petitesse immodeste et effrénée… Malheur à nous si jamais les qualités ‘éternellement ennuyeuses de la femme' – dont elle est si riche – osent se donner carrière ! »
« N'est-ce pas une preuve de suprême mauvais goût que cette furie de la femme à vouloir devenir scientifique ! Jusqu'à présent, Dieu merci, l'explication était l'affaire des hommes, un don masculin… »
« Mais elle (la femme) ne veut pas la vérité. Qu'importe la vérité à la femme ? Rien n'est dès l'origine plus étranger, plus antipathique, plus odieux à la femme que la vérité. Son grand art est le mensonge, sa plus haute préoccupation est l'apparence et la beauté. »
« Il (l'Homme) devra considérer la femme comme propriété, comme objet qu'on peut enfermer, comme quelque chose de prédestiné à la domesticité et qui y accomplit sa mission. »
« … la femme dégénère. C'est ce qui arrive aujourd'hui, ne nous y trompons pas ! »
« En comparant, dans leur ensemble, l'homme et la femme, on peut dire : la femme n'aurait pas le génie de la parure, si elle ne savait pas par instinct qu'elle joue le second rôle. »
Et je pourrais encore en citer maintes fois. Même si l'auteur, dès l'entame de son jugement de la femme, prend la précaution de demander la permission au lecteur et de fixer la limite de ses propos : « … on me permettra peut-être ici de formuler ici quelques vérités sur ‘la femme en soi' : en admettant que l'on sache au préalable jusqu'à quel point ce ne sont là que mes propres vérités. », ses propos restent, pour moi inacceptables et réducteurs tant pour la femme que pour l'homme capable de penser ainsi.

C'est certain, il écrit en 1885 et même si, à plus d'un point de vue, il se montre en avance sur son temps, sa perception de la femme me heurte, me révolte, me crispe et m'empêche probablement, de tirer toute la substantifique moelle de se enseignements.
Il me restera l'invitation à quitter le confort d'une classification Bien/Mal trop souvent issue du ‘politiquement correct' inculqué au nom d'une éducation partisane et à m'aventurer dans une recherche de vérité qui me convienne après moult réflexions, analyses, expérimentations et lecture de la vie… Tout un programme pour lequel je ne dispose sans doute pas de toutes les compétences nécessaires. Capter et m'approprier le Monde avec ma vision filtrante, prudente et réinitialisée à tout moment pour tenter de capter la vérité in situ … et en vivre !
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