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Humain, trop humain tome 0 sur 3
EAN : 9782012790285
700 pages
Hachette Littérature (12/09/2001)
4.17/5   163 notes
Résumé :
"Par ce livre, je me suis débarrassé de ce qui était incompatible avec ma nature. Incompatible, par exemple, l'idéalisme. Le titre veut dire: "là où vous autres voyez des choses idéales, moi je vois des choses humaines, hélas, bien trop humaines!..."Et je connais l'homme mieux que vous." Friedrich Nietzsche, 1888.
Cet essai de Nietzsche, qui suit immédiatement sa rupture avec Wagner, est le premier où s'affirme la forme aphoristique de sa pensée. Publié en m... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (12) Voir plus Ajouter une critique
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Ce livre m'a permis de comprendre L'...."Humain, trop humain" !... Il m'a permis de relativiser l'homme.
Je vous préviens, c'est long, mais c'est un des trois livres qui m'a donné le plus de difficultés. Je l'ai donc épluché en long, en large et en travers...
Humain, trop humain », (1878), est un pavé de 680 pages en trois livres : 1) Humain, trop humain ; 2) Opinions et sentences mêlées ; 3)Le voyageur et son ombre.... Les trois livres sont présentés comme une suite d'aphorismes (réflexions). le sujet concerne tout ce qui freine l'avancée de la civilisation, tous les vices et aveuglements de la société. Nietzsche s'étonne que, depuis la brillante civilisation grecque, notamment depuis les penseurs du IVè siècle avant JC, nous ayons à peine avancé en philosophie. C'est qu'entre temps, il y a eu le christianisme, et sa foi aveugle, ses martyres et ses saints qui entretiennent la passion. Les chrétiens ont tenté de réprimé le mal (péché), les visages des croyants étaient tristes, ayant peur de l'enfer. Au contraire (II, 220), les Grecs ont fait des fêtes avec ce qui est humain, trop humain (passions et mauvais penchants). Ils considéraient cela comme quelque chose d'inévitable au lieu de le calomnier comme les chrétiens le firent plus tard. 


« Dieu est mort … Et c'est nous qui l'avons tué !» (Le Gai Savoir, 1882). Lire Nietzsche (1844-1900) est une expérience. 
Je suis arrivé à Nietzsche fasciné par sa moustache et certains aphorismes cinglants ou émouvants ! 
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MODELE : 
Nietzsche est un auteur difficile à comprendre, car il pose peu de questions. Il affirme et tranche, souvent sans argumenter ! Ce qui m'a interpellé dans le titre est le mot « trop ». Comment peut on être trop humain ? 
La réponse est dans le livre. 
J'ai construit un modèle au bout de 60 pages pour plus de facilité : 

A) L'humain, trop humain, c'est, selon Nietzsche, l'ensemble des croyances, défauts, fautes, malversations humains qui génèrent des contre-vérités. 
Celles-ci empêchent le progrès de la civilisation. 
En premier lieu, la croyance en la religion chrétienne, entretenue par les saints et les prêtres, est trompeuse : la promesse du paradis ? Tout est hypocrisie, et la guérison des vices humains par la contrition, la réparation de la faute, du péché, le fait de faire peur avec l'enfer, tout cela est est duperie et n'améliore pas la condition humaine . le martyr et la souffrance rend les gens tristes (Livre I). le christianisme est aussi une privation du libre-arbitre dont se réclame Nietzsche. Il crée des « esprits-serfs », soumis à la loi implacable du christianisme. 
Mais il y a aussi d'autres contraintes au progrès de la civilisation : une certaine forme morale, la vanité des hommes et une certaine forme de justice sont également des freins. 
Tout cela empêche la civilisation d'aller vers le progrès et la vérité. 
B) l''avancée humaine vers la vérité se fait par la connaissance : 
l'art, les lois, la psychologie (Sigmund Freud lui aurait été très utile, car Nietzsche s'approche du ça, moi, surmoi), les sciences, dans lesquelles il inclus la philosophie et L Histoire, sont des sources de progrès humain. 
C) le but visé par notre philosophe est la Vérité, c'est à dire « le tout », « le monde », la sagesse, les penseurs, le naturalisme. Il faut y arriver grâce aux savants et aux « hommes supérieurs ». Les sources de Nietzsche sont surtout les philosophes grecs, ceux des Lumières, et Schopenhauer

Mais tout au long du livre, je sens l'angoisse de Nietzsche à travers son livre, l'angoisse de vivre trop peu de temps pour voir son modèle émerger complètement. 

LE PROBLEME DES « DECHETS LITTERAIRES » DE L'AUTEUR . 
Dans ce livre, Nietzsche est un plaisantin, ou alors le début de sa folie pointe le bout de son nez. Longtemps, dans le livre, je me suis demandé si cet esprit brillant était sérieux quand il sortait une bêtise, un concept flou, qu'il défend ou fustige selon ses humeurs. 
Ce livre est une somme de réflexions et sentences, plus ou moins désordonnées.C'est parfois dû à mon incompréhension, ou à un manque de développement de l'auteur, une traduction inappropriée, des concepts flous, un passage du coq à l'âne, un manque de transitions. 
Il y a des opinions que je trouve fausses, ou niaises, ou floues. 
Sans ces déchets, Friedrich Nietzsche aurait pu faire un excellent livre de cent pages ! 
Mais il ne perd pas l'occasion de s'exprimer sur ces déchets, et s'insurge contre le lecteur « semi-aveugle » qui se met en colère contre le philosophe qui n'émet que 5 idées en 50 pages ! (III, 143). 
Tout cela n'est il pas un fait exprès, une stratégie ? 
Nietzsche dit que les esprits supérieurs ( je l'inclus) doivent noyer leurs idées dans des réflexions banales et médiocres pour se protéger et en plus, cela permet une certaine compassion avec le lecteur. Ils se fabriquent, dit il, « un masque de médiocrité » (III, 175). 
J'ai cru comprendre que c'était le premier livre qu'il écrivait sous cette forme d'aphorismes. C'est dommage. 
Autre hypothèse : il est dans sa phase de recherche, et « Humain » est encore un premier jet sur certains concepts ( c'est sa quatrième oeuvre sur 17 ). 
Enfin, le bric à brac d'aphorismes, souvent non contextualisés et non argumentés, ressemble à des notes éparses que Nietzsche aurait jetées sur un petit carnet au gré de ses promenades. Il y a même des recettes pour les malades, les trop enthousiastes, ou contre les vaniteux ! 
C'est un pince sans rire de l'écriture, capable d'auto-dérision ! 
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MON ALPHABET NIETZSCHEEN : 

Allemand : Nietzsche semble déçu par la pauvreté de la littérature allemande par rapport à celle de l'Antiquité grecque ou de la France des Lumières, mais croit en son renouveau avec Johann Von Goethe et Friedrich von Schiller
Âmes : terme utilisé plusieurs fois par Nietzsche, bien mal à propos, puisqu'il ne croit pas en Dieu ! Je pense qu'il veut dire « esprit humain » ou intelligence. 
But : le but de Nietzsche est d'amener le monde à « la direction et la surveillance de la civilisation universelle sur terre ». 
Classique : ce qui est oeuvre classique, c'est le sommet, et cela dure dans le temps. 
Compositeurs : Nietzsche est musicien. Il fait une belle analyse de ce qu'on appelle maintenant les musiciens classiques, mais bizarrement, il ne parle pas de son ami Richard Wagner ! 
Conscience : concept important chez Nietzsche, qui je crois, répond à la définition officielle : « . Elle est ce que l'on sent et ce que l'on sait de soi, d'autrui et du monde ». (Psychologies.com). 
Croyances : concept essentiel chez Nietzsche, qui, avec la Force autoritaire, empêche le progrès de la civilisation. . 
Demi-aveugles : ce sont les lecteurs qui, comme moi ( !), sont furieux d'un gaspillage-déchet « de cinquante pages pour faire part de cinq idées « !...Et puis j'ai compris sa tactique, exposée plus haut. 
Donner : rend plus riche que recevoir (III) ; c'est quand même très chrétien, ça ! 
ERREUR ; les erreurs, contrairement à Gaston Bachelard ou Fiodor Dostoïevski, ne sont pas, pour Nietzsche, source de progrès, mais des freins : par exemple, le christianisme est une contre-vérité, une erreur, qui a empêché l'humanité d'avancer dans la foulée des penseurs Grecs. 
Esprits-serfs : opposés aux esprits-libres, ils sont soumis à une dictature, ici celle de la loi chrétienne. 
Force : un des éléments essentiels de la philosophie nietzschéenne. Il se désole que la Force soit toujours supérieure à la Raison. 
Folie : Nietzsche parle assez souvent de la folie ; il en a peur ou la méprise, selon les pages. Il tombera dedans, comme pas mal d'artistes.
Génie ; Les génies sont pour lui, la perfection ; 
Goût : le bon goût est celui de la maturité. le mauvais goût, il appelle ça la vulgarité. 
Grecs de l'Antiquité : peuple qu'il admire. 
Histoire : secteur de recherche dont, à son avis, les gens éclairés n'ont pas assez tenu compte. 
Hypocrisie : va avec jalousie. 

Jésus : Nietzsche a un sentiment ambivalent envers lui, car il fut relativement bon, sage, et quand même assez proche des idées du philosophe, mais c'est quand même le père du christianisme ! 
Justice : concept ambivalent pour lui, selon que l'homme est responsable ou irresponsable : ceci est encore confus. Peut être qu'il le précisera dans ses livres ultérieurs. 
.K 
Liberté, libre-arbitre : notions essentielles pour l'auteur qui se réclame des libre penseurs. 
Morale : terme ambivalent selon qu'il s'agit de la morale chrétienne, ou de celle qui permet de préserver la société. Ce concept de morale, moralité sera mieux étudié dans le livre suivant (Aurore, 1881). 
Lumières : mot essentiel pour Nietzsche. Premièrement, il définit ce qui éclaire, par opposition à l'obscurité de la croyance chrétienne. Cependant, on sait que l'Eglise catholique utilise aussi la lumière pour appeler les croyants vers Dieu. le pape Jean Paul II, à La Réunion, prononça une homélie et quelques mots en créole dont les Réunionnais présents à l'époque se rappellent encore : "rest pas dan fé noir". Deuxièmement, cette notion rappelle les philosophes de Lumières, les premiers à se passer de la métaphysique, et à mettre l'Homme au centre de la recherche. 
Maturité : comme le bon vin ! Les hommes non matures, trop humains, sont dans la colère, la violence, la croyance. 
Métaphores : souvent utilisées dans ce livre, elles servent pour convaincre, non pour démontrer. 

Opinion : c'est pour lui la meilleure sentence, entre croyance et jugement, à vérifier. 
Peuple : pour Nietzsche, il ya le peuple, les gens cultivés, et puis les génies. 
Philosophes (III, 171) : « employés de la science », comme les savants, souvent désagréables, qui construisent des systèmes épistémiques, et croient ainsi avoir bouclé la boucle. 

Raison : Nietzsche compte sur la raison pour faire « avancer » la civilisation, mais ce chemin est « contraint par la Force et les Croyances. 
RESPONSABILITE : c'est sans réponse : l'homme est il responsable ? Ca le tracasse, car la responsabilité est liée à la justice. Notre philosophe donne des pistes à creuser ! 
Socrate : sentiment nuancé de Nietzsche vis à vis de ce philosophe, car intelligent, mais, d'après lui, à l'origine du crépuscule de la pensée grecque. 
Supérieur : Nietzsche compare tout. le génie est l'homme supérieur. ; Socrate a une intelligence supérieure à celle de Jésus. 
Transition (est) inutile pour lui (III, 106) : NON ! Je ne suis pas d'accord : elle permet de meilleures explicitations, dont on a bien besoin dans ce livre composé d'aphorismes. 
Trop humain : « Mais enfin le vent s'élève de nouveau dans les arbres, midi est passé, et la vie l'attire encore vers elle, la vie aux yeux aveugles, suivie de son cortège impétueux : les désirs et les duperies, l'oubli et les jouissances, l'anéantissement et la fragilité. » (III) 

Vanité : Nietzsche parle de l'homme vain, celui qui est vaniteux. Il peut être dangereux car rusé et dissimulé (III, 181). 
Vengeance : Nietzsche y fait souvent allusion comme d'un fait négatif, ou d'un fait de justice. 
VERITE : but suprême de Nietzsche






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NIETZSCHE ET HITLER. 
« Nietzsche a souvent été présenté comme étant un précurseur du nazisme. « (Curiositas). 
Pour moi, au vu de ce livre, c'est archi-faux. 
Il déteste la force autoritaire. 
La soeur de Friedrich, Elizabeth, est amoureuse de son frère (Wikipédia). Lors de la folie de celui-ci (1889-1900), elle organisa une campagne de promotion pour son oeuvre. Elle fut à l'origine de la falsification de son livre posthume « La volonté de puissance ». En 1930, elle adhère au parti nazi. En 1935, Hitler fait le déplacement aux funérailles d'Elizabeth pour récupérer la pensée du philosophe, et on sait qu'Adolf est un maître en manipulation. 
Nietzsche a admiré le siècle des Lumières français : il n'aurait jamais pu s'attaquer à ce pays qu'il respecte car il prolonge la Grèce Antique par la pensée. 
Dans « Humain, trop humain », Nietzsche admire les Juifs. 
Le philosophe n'aurait jamais pu suivre le führer : dans l'aphorisme (I, 458), il fustige les dictateurs. Dans un autre (II, 133), il accuse tous les fanatiques car ils n'ont aucune conscience artistique. Ailleurs ( III, 181), il dénigre et méprise les vaniteux, convaincus de leur puissance : il les traite de rusés et dissimulés. 
De plus, les manipulations rusées d'un Etat pour s'attaquer à un autre sans en porter la responsabilité sont dénoncées par Nietzsche : 
« L'Etat accuse l'autre qui, de même que notre Etat, nie l'intention d'attaquer et n'entretient, lui aussi, son armée que pour des raisons de défense, pour les mêmes motifs que nous, on l'accuse, dis-je, d'être un hypocrite et un criminel rusé qui voudrait se jeter, sans aucune espèce de lutte, sur une victime inoffensive et maladroite. « (III, 284) 
Ce que décrit Nietzsche est exactement ce qu'a fait Hitler quelques dizaines d'années plus tard. Par cette simple phrase, alambiquée, j'en conviens, Nietzsche n'aurait jamais pu être pro-Hitler comme on l'en a accusé post-mortem. 
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EN CONCLUSION : 

Pour répondre à mes e-cops de Babelio, voici mon opinion sur cette phrase du livre : 

« Si le Christ a vraiment eu l'intention de sauver le monde, n'a-t-il pas manqué son entreprise ? 

Je pense, comme Junie que le Christ et Dieu ne sont pas là pour sauver le CAC 40. L'objectif de Jésus en venant sur Terre fut de faire comprendre le Bien et le Mal aux hommes. Mais ils ont le coco dur ! Donc, pour ceux qui sont dans le mal, surtout s'ils passent entre les mailles de la justice humaine, ils seront jugés le jour du jugement dernier : en montant au ciel, ils reçoivent des claques, les entités, personnes aimées décédées, leur font comprendre leurs mauvaises actions. En général, ils changent d'attitude. Ceux qui persistent deviennent des âmes errantes et essayent d'attirer des vivants vers le mal. 
Je suis déiste. Je pense que Nietzsche s'est trompé de cible. Au lieu d'attaquer Dieu, il aurait été plus cohérent, pour moi, qu'il s'en s'en prenne à l'institution, le Système Chrétien et l'Église, ce que j'appelle « la liturgie », et le « système des robes » : pape, cardinaux, évêques, qui ont imposé tout un tas de restrictions à l'humain en s'enrichissant, tout du moins au Vatican. Dieu et Jésus n'ont jamais voulu tous ces rites sectaires que l'Église a imposés à ses fidèles. D'ailleurs, Nietzsche a un jugement modéré envers Jésus, bien que toute sa vie, il règle ses comptes avec la chrétienté. 
…......... 
….......... 
Et voilà ! 

Nonobstant son fouillis de pensées, le philologue Nietzsche est un grand écrivain, et je trouve qu'un certain nombre de ses aphorismes sont des fulgurances.
Parmi les dizaines de citations que j'ai repérées de lui, voici les deux plus belles, pour moi : 

« Laissez-moi hurler et gémir et ramper comme une bête : pourvu que j'obtienne la foi en moi-même ! le doute me dévore, j'ai tué la loi. « (Aurore, 1881) 


« Il faut encore porter en soi un chaos, pour pouvoir mettre au monde une étoile dansante. « (Zarathoustra, 1885) 
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Nietzsche a laissé des traces dans mon petit cerveau, et je pense que je vais bientôt l'utiliser.
Il fallait que je découvre Nietzsche. Ce fut une expérience !....Désolé pour la longueur de la critique. Et maintenant, je vais lire celle de Colimasson : )
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Trop humain d'écrire une connerie supplémentaire sur ce bouquin. A l'intérieur : opinions et sentences mêlées de l'homme le mieux schizophréniquement établi du monde, mi-ombre et mi-voyageur, monsieur Nietzsche.


Pour qui le connaît déjà, rien de surprenant dans ce recueil. C'est toujours le même homme qui affirme son besoin d'un surhomme. « Qu'il suffit de peu de plaisir à la plupart pour trouver la vie bonne, que l'homme est modeste ! » Nietzsche a sans doute été tué par son besoin d'une vie pleine et inépuisable. Mais la vie ne lui offre pas souvent l'occasion de se répandre et d'inonder les terres stériles qui l'entourent. Là où il attend le courage d'existences qui s'affirment, joyeuses et sûres d'elles, il ne découvre que des simulacres timides et lâches, qui bafouillent leur veulerie en pervertissant les mots de « pitié » ou d' « amour ». Important de distinguer la vertu de celui qui ne commet pas le mauvais acte parce qu'il n'en a pas la capacité, de la vertu de celui qui ne commet pas le mauvais acte parce qu'il n'en ressent pas le besoin, bien qu'il en ait la capacité. Dans le premier cas, l'homme vertueux sera triste et déprimé : s'il s'exprime il contaminera ses prochains par la suie de ses pensées. Dans le deuxième cas, l'homme vertueux sera serein et souriant, comme Epicure dont l'opulence se contentait d' « un petit jardin, des figues, du fromage et, avec cela, trois ou quatre bons amis ».

L'humanité peut donc se classer –entre autres catégories cliniques- en deux types : ceux qui sont au-deçà de leurs pulsions (qu'ils les assouvissent ou qu'ils se restreignent dans le malheur) et ceux qui les ont dépassées, intégrées, assimilées à leur personne si bien qu'ils en acceptent la puissance, ou qu'ils la regardent déferler de loin, souriant de voir cette fureur ample et puissante, vitale jusqu'aux crocs.


Les frigides de la vie, ceux qui conspuent Nietzsche de loin, sans l'avoir lu, parce qu'ils savent que ses pensées risqueraient de mettre en branle tout un édifice sécuritaire de convictions, trouveraient pourtant de quoi réviser leurs jugements dans cet opuscule qui brasse plus d'idées que la plupart de ses autres écrits. Qu'il suffise de lire les considérations suivantes pour qu'on élimine définitivement le préjugé selon lequel Nietzsche serait un homme cruel qui rêvait d'empaler l'humanité sur le sommet des clochers :


« le meilleur moyen de bien commencer chaque journée est : à son réveil, de réfléchir si l'on ne peut pas ce jour-là faire plaisir au moins à un homme. Si cela pouvait être admis pour remplacer l'habitude religieuse de la prière, les autres hommes auraient un avantage à ce changement. »


« Ce n'est pas la lutte des opinions qui a rendu l'histoire si violente, mais bien la lutte de la foi dans les opinions, c'est-à-dire des convictions. Si pourtant tous ceux qui se faisaient de leur conviction une idée si grande, qui lui offraient des sacrifices de toute nature et n'épargnaient à son service ni leur honneur, ni leur vie, avaient consacré seulement la moitié de leur force à rechercher de quel droit ils s'attachaient à cette conviction plutôt qu'à cette autre, par quelle voie ils y étaient arrivés : quel aspect pacifique aurait pris l'histoire de l'humanité ! »


« Chaque fois que l'on utilise et sacrifie l'être humain comme un moyen servant aux fins de la société, c'est toute l'humanité supérieure qui s'en afflige. »


Et pour en finir une bonne fois pour toutes avec son prétendu antisémitisme :


« Tout le problème des Juifs n'existe que dans les limites des États nationaux, en ce sens que là, leur activité et leur intelligence supérieure, le capital d'esprit et de volonté qu'ils ont longuement amassé de génération en génération à l'école du malheur, doit arriver à prédominer généralement dans une mesure qui éveille l'envie et la haine, si bien que dans presque toutes les nations d'à présent — et cela d'autant plus qu'elles se donnent plus des airs de nationalisme — se propage cette impertinence de la presse qui consiste à mener les Juifs à l'abattoir comme les boucs émissaires de tous les maux possibles publics et privés. »


Maintenant, à nous de subir l'examen de conscience…
Sommes-nous gentils par défaut de puissance ou par excès de puissance ? si tu sens la vie qui bouillonne en toi…on pourrait crever des mondes avec ce Nietzsche.
Lien : http://colimasson.blogspot.f..
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La pensée de Nietzsche est dévastatrice. Elle procède par petites touches successives, par maximes, par accumulation d'idées neuves. Son but? Déconstruire l'homme tel qu'il s'imagine qu'il est, prendre le contre-pied de ce qu'on ne réfléchit pas. Tout est remis à plat. La morale n'est pas là où on croit qu'elle est, dans le bien et le mal, que Nietzsche fait s'entrechoquer à tel point qu'ils se confondent. La religion est balayée au profit de la science. L'art, la société, la politique, tout est sans cesse interrogé, pour former un portrait de l'humain sans gloire et sans mépris, d'un humain qui a la conscience de n'être - hélas - qu'humain, trop humain, mais qui se cherche dans le noir un esprit libre.
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Nietzsche, ici, prétend s'être débarrassé de certaines choses qui lui paraissaient incompatibles avec sa nature tel que son idéalisme, ce qu'il s'est empressé de remplacer par une vision humaine, trop humaine.

On sent énormément l'influence, dans la forme aphoristique surtout, des moralistes français La Rochefoucauld, La Bruyère etc... Ce qui pourrait nous donner l'impression que le livre est désordonné, or, il n'en est rien. Il nous parle autant de l'esprit libre, de musique, de littérature, de l'état, de ce qu'il nomme la décadence allemande, des femmes et des enfants, du christianisme etc...

Nietzsche, parfois, se laisse aller à un lyrisme flamboyant, ce qui fit sa célébrité par-delà le monde et ce qui fit de lui l'un des meilleurs prosateurs de langue allemande.
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Une nouvelle critique d'une des oeuvres majeures de Nietzsche ? Non ! Mais l'éternel retour du "plaisir" d'apprendre qu'il est lu et aimé "malgré"... ses sidérantes visions et les assassines considérations de lecteurs maugréant. Non pas mécréants, mais pour le moins masochistes ! S'infligeant la lecture de ses livres, insupportables ou pénibles, comme on le ferait à coups de martinet au point de saigner jusqu'au... non-sens.

Il me semble que Babelio n'est alors qu'un défouloir pour fouler au pied les auteurs ( et hauteurs) qu'on ne supporte pas. En invitant d'autres lecteurs à nous suivre dans notre voie, jusqu'à celle de nos indigestions et nos "degueuladis" et dits. Ingérés ou géniaux, ou les deux à la fois... (peu importe !)
À quoi BON ces plaintes hargneuses qui sont autre chose que de simples appétits déçus mais signalent de sombres rancunes de jaloux spirituels ou de noceurs frustrés... Se répandant en obsessions nietzscheHaines renouvelées.
À quoi sert de LIRE, enfin, si c'est pour chasser et tuer avec préméditation tout écrit ou cri pouvant se risquer à lever le doigt devant ces " maîtres en Critique" pour désigner ( par exemple) le soleil et dire que sa lumière n'en a "rien à cirer" des bougies brûlant par les deux bouts leur mépris du Vivant. Sans oser ausculter leur méprise.
Elles sont humaines. Trop humaines !
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Citations et extraits (222) Voir plus Ajouter une citation
Qui est parvenu ne serait ce que dans une certaine mesure à la liberté de la raison, ne peut rien se sentir d'autre sur terre que Voyageur. Pour un voyage toutefois qui ne tend pas vers un but dernier car il n'y en a pas. Mais enfin, il regardera les yeux ouverts à tout ce qui se passe en vérité dans le monde. Aussi ne devra-t-il pas attacher trop fortement son coeur à rien de particulier. Il faut qu'il y ait aussi en lui une part vagabonde dont le plaisir soit dans le changement et le passage.

Sans doute, cet homme connaîtra les nuits mauvaises où prit de lassitude, il trouvera fermée la porte de la ville qui devait lui offrir le repos. Peut être qu'en outre, comme en Orient, le désert s'étendra jusqu'à cette porte, que des bêtes de proie y feront entendre leur hurlement, tantôt lointain, tantôt rapproché, qu'un vent violent se lèvera, que des brigands lui déroberont ses bêtes de somme. Alors, sans doute, la nuit terrifiante sera pour lui un autre désert, tombant sur le désert, et il se sentira le coeur las de tous les voyages.

Dès que le soleil matinal se lève, ardent comme une divinité polaire, que la ville s'ouvre, il verra peut-être sur les visages de ses habitants plus de désert encore, plus de saleté et de fourberie et d'insécurité que devant les portes. Et le jour, à quelque chose près, sera pire que la nuit. Il se peut bien que tel soit à quelque moment le sort du Voyageur.

Mais pour le dédommager viennent ensuite les matins délicieux d'autres contrées, nés des mystères du premier matin. Il songe à ce qui peut donner au jour entre le 10ème et le 12ème coup de l'horloge, un visage si pur, si pénétré de lumière, de sereine clarté qui le transfigure.

Il cherche la philosophie d'avant midi.
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En passant : tout le problème des Juifs n’existe que dans les limites des États nationaux, en ce sens que là, leur activité et leur intelligence supérieure, le capital d’esprit et de volonté qu’ils ont longuement amassé de génération en génération à l’école du malheur, doit arriver à prédominer généralement dans une mesure qui éveille l’envie et la haine, si bien que dans presque toutes les nations d’à présent — et cela d’autant plus qu’elles se donnent plus des airs de nationalisme — se propage cette impertinence de la presse qui consiste à mener les Juifs à l’abattoir comme les boucs émissaires de tous les maux possibles publics et privés. Dès qu’il n’est plus question de conserver ou d’établir des nations, mais de produire et d’élever une race mêlée d’Européens aussi forte que possible, le Juif est un ingrédient aussi utile et aussi désirable qu’aucun autre reste national.

Toute nation, tout homme a des traits déplaisants, même dangereux : c’est barbarie de vouloir que le Juif fasse une exception. Il se peut même que ces traits présentent chez lui un degré particulier de danger et d’horreur ; et peut-être le jeune boursicotier juif est-il en somme l’invention la plus répugnante de la race humaine.

Malgré tout, je voudrais, savoir combien, dans une récapitulation totale, on doit pardonner à un peuple qui, non sans notre faute à tous, a parmi tous les peuples eu l’histoire la plus pénible, et à qui l’on doit l’homme le plus digne d’amour (le Christ), le sage le plus intègre (Spinoza), le livre le plus puissant et la loi morale la plus influente du monde.

En outre : aux temps les plus sombres du moyen-âge, quand le rideau des nuages asiatiques pesait lourdement sur l’Europe, ce furent des libres-penseurs, des savants, des médecins juifs qui maintinrent le drapeau des lumières et de l’indépendance d’esprit sous la contrainte personnelle la plus dure, et qui défendirent l’Europe contre l’Asie ; c’est à leurs efforts que nous devons en grande partie qu’une explication du monde plus naturelle, plus raisonnable, et en tout cas affranchie du mythe, ait enfin pu ressaisir là victoire, et que la chaîne de la civilisation, qui nous rattache maintenant aux lumières de l’antiquité gréco-romaine, soit restée ininterrompue. Si le christianisme a tout fait pour orientaliser l’Occident, c’est le judaïsme qui a surtout contribué à l’occidentaliser de nouveau : ce qui revient à dire en un certain sens, à rendre la mission et l’histoire de l’Europe une continuation de l’histoire grecque. (#405, pp. 307-308)
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Celui qui veut seulement dans une certaine mesure arriver à la liberté de la raison n’a pas le droit pendant longtemps de se sentir sur terre autrement qu’en voyageur, — et non pas même pour un voyage vers un but final : car il n’y en a point. Mais il se proposera de bien observer et d’avoir les yeux ouverts pour tout ce qui se passe réellement dans le monde ; c’est, pourquoi il ne peut attacher trop fortement son cœur à rien de particulier ; il faut qu’il y ait toujours en lui quelque chose du voyageur, qui trouve son plaisir au changement et au passage. Sans doute un pareil homme aura des nuits mauvaises, où il sera las et trouvera fermée la porte de la ville qui devait lui offrir un repos ; peut-être qu’en outre, comme en Orient, le désert s’étendra jusqu’à cette porte, que les bêtes de proie hurleront tantôt loin, tantôt près, qu’un vent violent se lèvera, que des brigands lui raviront ses bêtes de somme. Alors peut-être l’épouvantable nuit descendra pour lui comme un second désert sur le désert, et son cœur sera-t-il las de voyager. Qu’alors l’aube se lève pour lui, brûlante comme une divinité de colère, que la ville s’ouvre, il y verra peut-être sur les visages des habitants plus encore de désert, de saleté, de fourbe, d’insécurité que devant les portes — et le jour sera pire presque que la nuit. Ainsi peut-il en arriver parfois au voyageur ; mais ensuite viennent, en compensation, les matins délicieux d’autres régions et d’autres journées, où dès le point du jour il voit dans le brouillard des monts les chœurs des Muses s’avancer en dansant à sa rencontre, où plus tard, lorsque paisible, dans l’équilibre de l’âme des matinées, il se promène sous des arbres, verra-t-il de leurs cimes et de leurs frondaisons tomber à ses pieds une foison de choses bonnes et claires, les présents de tous les libres esprits qui sont chez eux dans la montagne, la forêt et la solitude, et qui, tout comme lui, à leur manière tantôt joyeuse et tantôt réfléchie, sont voyageurs et philosophes. Nés des mystères du matin, ils songent à ce qui peut donner au jour, entre le dixième et le douzième coup de cloche, un visage si pur, si pénétré de lumière, si joyeux de clarté, — ils cherchent la philosophie d’avant-midi.
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Une espèce importante de plaisir, et par là source de la moralité, provient de l'habitude. On fait l'habituel plus aisément, mieux, partant plus volontiers, on en ressent un plaisir, et l'on sait par l'expérience que l'habituel a fait ses preuves, qu'il a donc une utilité; une coutume avec laquelle on peut vivre est démontrée salutaire, profitable, en opposition à toutes les tentatives neuves, non encore éprouvées. La coutume est, par suite, l'union de l'agréable et de l'utile, en outre elle n'exige aucune réflexion. Sitôt que l'homme peut exercer une contrainte, il l'exerce pour conserver et propager ses coutumes, car à ses yeux elles sont la sagesse garantie. De même une communauté d'individus contraint chaque élément isolé à une même coutume. On commet là cette faute de raisonnement : parce qu'on se trouve bien d'une coutume, ou du moins parce que par par son moyen on conserve son existence, cette coutume est nécessaire, car elle passe pour la possibilité unique dont on peut bien se trouver; le bien-être de la vie semble ne provenir que d'elle. Cette conception de l'habituel comme condition de l'existence est poussée jusqu'au plus détails de la coutume : comme l'intelligence de la causalité véritable est très réduite chez es peuples et les civilisations de niveau peu élevé, on aspire avec une crainte superstitieuse à ce que tout aille de même pas que soi; même là où la coutume est pénible, dure, lourde, elle est conservée en vue de son utilité supérieure apparente. On ne sait pas que le même degré de bien-être peut exister avec d'autres coutumes, et que même on peut atteindre des degrés plus élevés. Mais ce dont on se rend bien compte, c'est que toutes les coutumes, fût-ce les plus dures, deviennent avec le temps plus agréables et plus douces, et que le régime le plus sévère peut se tourner en habitude et par là en plaisir.
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"Les apologistes du travail. - Dans la glorification du "travail", dans les infatigables discours sur la "bénédiction du travail", je vois la même arrière-pensée que dans les louanges des actes impersonnels et conformes à l'intérêt général : la crainte de tout ce qui est individuel. On se rend maintenant très bien compte, à l'aspect du travail - c'est-à-dire de ce dur labeur du matin au soir - que c'est là la meilleure police, qu'elle tient chacun en bride et qu'elle s'entend vigoureusement à entraver le développement de la raison, des désirs, du goût de l'indépendance. Car le travail use la force nerveuse dans des proportions extraordinaires, et la soustrait à la réflexion, à la méditation, aux rêves, aux soucis, à l'amour et à la haine, il place toujours devant les yeux un but minime et accorde des satisfactions faciles et régulières. Ainsi une société, où l'on travaille sans cesse durement, jouira d'une plus grande sécurité : et c'est la sécurité que l'on adore maintenant comme divinité suprême.
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Fabrice Midal vous présente "La théorie du bourgeon", son nouveau livre, disponible en livre audio !
Résumé : Le découragement est le problème majeur de notre temps. Là où nous pourrions avancer, nous baissons les bras. Là où nous pourrions être victorieux, nous partons perdants. On nous a fait croire que nous devions être dans le contrôle permanent, dans l'efficacité absolue. Mais la vie ne se contrôle pas, elle ne se gère pas. Comment inverser le mouvement ? Comment retrouver l'élan pour sortir de la paralysie qui nous guette, pour rejoindre enfin le monde et essayer de le réparer ? Se fondant sur les enseignements de philosophes qui, comme Nietzsche, Bergson ou Hannah Arendt, ont affronté ce péril majeur avec lucidité, Fabrice Midal nous amène à reprendre confiance en nous et en l'humanité. Avec La théorie du bourgeon, il nous apprend à cultiver la vie dans son surgissement, ce bourgeon qui réside en nous et qui ne demande qu'à croître pour donner des fleurs, pour donner des fruits. C'est ce remède anti-découragement que je vous invite à découvrir.
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