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Critiques filtrées sur 4 étoiles  

Même s'il se teinte d'humour et de dérision, quelle tristesse infinie émane de ce recueil de nouvelles !

C'est le premier livre que je lis de cet auteur irlandais.Le point commun de tous les textes, c'est le manque, l'absence, le vide.Certaines de ces nouvelles m'ont davantage touchée que d'autres, notamment la première " The Wexford Girl", où un fils se souvient de l'été 1975, et du départ de sa mère, quittant un père désemparé.Le mélange de constatations désabusées, fatalistes et de notations, au détour d'une phrase, bouleversantes, est saisissant.

J'ai beaucoup aimé aussi " Couleur octobre" et son personnage si attachant, Maureen, qui sait qu'elle va bientôt mourir mais ne l'a pas encore annoncé à sa famille.Une rencontre de hasard va lui faire un bien fou.

La dernière partie du livre est particulière car elle présente des instantanés d'une même vie, celle de Cian Hanahoe, qui a noué un lien très fort mais complexe avec son père.

L'Irlande est omniprésente, même quand les personnages habitent loin d'elle, comme dans " Orchard Street, à l'aube". Elle s'impose à leurs souvenirs, comme un chant lancinant, qui ne cesse de les hanter.

Ces évocations de vie poignantes, dans leur vérité crue, m'ont marquée, le ton amer et tendre à la fois aussi.Il y a une grande puissance émotionnelle chez cet auteur.J'aimerais découvrir davantage son univers.
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Un recueil de huit nouvelles avec comme dénominateur commun l'Irlande, pas celle du Sud, du Ring of Kerry et de ses eaux cristallines, mais celle du Nord, toute emprunte de misère et de luttes passées. Même si ce n'est pas le thème central, cela transparait de loin en loin avec plus ou moins de présence, sans pour autant prétendre à être un ouvrage historique. Nous suivons à différentes époques des personnages attachants, bien brossés, pour de petits faits de vie où mélancolie et tristesse se disputent la primeur. Ainsi dans « Orchard street à l'aube » c'est Bridget Moore, immigrée avec son mari à New York suite aux famines du XIX ème siècle. Ils pleurent la perte de leur dernière enfant, à peine née et déjà morte de misère. « C'était le printemps à New York, seulement trois semaines après Pâques, les arbres bourgeonnaient. Son bébé se mourait ». le ton est un peu moins lourd dans « Couleur d'octobre ». de nos jours Maureen atteinte d'un cancer est allée à Dublin pour un rendez vous médical et, un incident ferroviaire différant son retour à Galway, elle se voit partager quelques heures avec un guide touristique américain qui est seul lui aussi dans l'hôtel où elle est descendue. Des instants d'intimité volés au temps qui bientôt s'arrêtera. Dans les premières pages d'« Un figurant sur la photo » nous accompagnons Sean Hyland qui va acheter un skate-board pour l'anniversaire de son fils, adolescent particulièrement « ado », mais rapidement l'espoir retombe, le récit s'écarte et devient plus tristounet et nostalgique.
La dernière, « Un garçon bien aimé », est très différente, au moins en apparence. D'abord elle est bien plus conséquente, se voyant répartie sur huit chapitres, et puis l'ambiance est tout autre, plus légère. C'est la rencontre entre Cian Hanahoe, responsable dans une banque à Dublin, divorcé et dépressif en rémission, et Catherine Dwyer, londonienne et chef décoratrice travaillant pour la télévision. Un plaisant marivaudage, et plus si affinité, tout en retenu et bonne humeur qui serait presque joyeux s'il n'y avait le père de Cian. Non que celui-ci soit pénible, tout au contraire, mais il est prétexte à maintenir un lien avec le passé dur et laborieux de l'Irlande, preuve en est la fin, pour le moins déroutante, voire décevante. Ce dernier récit reste en fin de compte homogène avec le reste de l'ouvrage. Mais avec un tel titre il fallait s'y attendre. Chassé le naturel et il revient au galop.
Une bonne lecture néanmoins, avec précaution toutefois si l'on a le moral en berne.


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La nouvelle n'est pas mon format de prédilection – mais en fait je crois que c'est un peu comme pour les artichauts : quand j'en mange je me régale, mais spontanément je n'ai jamais envie d'en manger.

Du coup, lorsque les blogueuses Hop sous la couette ! et The flying Electra ont proposé un challenge « Mai en nouvelles » (#maiennouvelles sur instagram), j'ai sauté sur l'occasion. Bon, résultat, je publie ma première chronique le 4 juin… hum hum. Mon mois de mai ne m'a pas laissé faire exactement ce que je voulais.

Les âmes égarées comporte sept nouvelles et une novella. Je préfère le titre original, Where have you been ?, plus fidèle au contenu je trouve, moins pompeux peut-être, plus en prise avec l'autre, l'absence, le manque. L'Irlande est au coeur de chacun de ces textes. Plutôt Dublin, voire même le petit port de Dun Laoghaire. Si elles ne s'y situent pas, elles mettent en scène, à Londres (Le feu de la jeunesse) ou à New-York (le très émouvant Orchard Street, à l'aube), des émigrés irlandais. Certains des textes ont été publiés précédemment ailleurs, et retravaillés pour ce recueil-ci, par exemple Couleur octobre, dans laquelle j'ai immédiatement reconnu un des chapitres de Finbar's Hotel.

Autre constante, les personnages abîmés, les séparations, les pertes, les désillusions. Des morts aussi parfois, effectives, annoncées, programmées… Certes, il vaut mieux ne pas avoir trop le moral en berne pour plonger dans ce recueil, mais Joseph O'Connor ne tombe jamais à plat dans l'abîme. Avec ce style qu'il partage avec les plus grands, il pose habilement chaque histoire, le décor et les personnages, en seulement quelques coups de plume. Des êtres toujours ancrés dans un contexte humain précis, si ce n'est historique. Puis il raconte, le banquier interné en hôpital psychiatrique pour dépression aggravée pendant la crise financière (Un garçon bien-aimé), un match de foot mémorable entre Angleterre et Irlande commenté pendant un mariage anglo-irlandais (Le feu de la jeunesse), l'homme dont le grand-père a travaillé sur le chantier de construction de la digue de Dune Laoghaire (Wexford Girl). Souvent ces nouvelles ont même plusieurs axes qui s'articulent pour nous surprendre. du côté sombre, la maladie, la mort, l'exil, la crise. du côté de lumière, les même parfois (je pense à l'amour et la famille), d'autres aussi, l'espoir, l'amitié, le choix, la famille. Des histoires percutantes.

Deux seulement de ces nouvelles m'ont laissé sur le côté, je n'ai pas bien saisi où il voulait en venir, le figurant sur la photo et Deux petits nuages. Cette dernière étant écrite en miroir d'Un petit nuage de Joyce, il faudrait que je la relise peut-être pour comprendre.

Sinon, toutes m'ont plu. Je me souviendrai particulièrement du côté trash du feu de la jeunesse, dont j'ai trouvé intéressant le contraste des points de vue de la jeunesse irlandaise d'aujourd'hui sur la question de l'IRA. Mort d'un serviteur de l'état est admirablement construite et plutôt glaçante. Couleur octobre nous propose un très beau portrait de femme. Orchard Street, à l'aube, entre glas de la vie et des espoirs déçus. Wexford Girl, quand l'amour fait mal mais n'empêche pas de rire, et la novella Un garçon bien-aimé m'a agrippée jusqu'au bout.

Un recueil à découvrir !

« Un mot peut vous transpercer le coeur comme une balle. Mais une balle vous traverse, alors que le mot reste. Il demeure dans votre coeur jusqu'à le faire tourner à l'aigre. »

(et au fait, il y a aussi de l'humour, dans ce recueil !
« — Comment dit-on « espèce de gros connard », en gaélique ?
— Oh ça, c'est facile : « Anglais » »)
Lien : https://lettresdirlandeetdai..
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Depuis Muse, nous n'avions pas de news de Joseph O'Connor, en France. Et puis, le revoici, avec, cette fois, non pas un roman, mais un recueil de nouvelles (le deuxième après Les Bons Chrétiens publié en 2010), dédié à Dermot Bogler, qui n'est pas tout à fait étranger à ce volume. Les textes ont été publiés sur divers supports, remaniés, puis enfin réunis dans ce livre, sous le titre original de Where have you been ?. Il faut lire la page des remerciements, située à la fin du recueil, avant de commencer à le lire : on y apprend notamment que "Deux petits nuages" est un écho à "Un petit nuage", nouvelle de James Joyce. On apprend aussi que Joseph O'Connor s'est amusé avec les textes antérieurs et même les chansons irlandaises qu'il fait chanter à ses personnages. Il en fait revenir certains, qui étaient dans Les Bons Chrétiens ou reprend des phrases de Muse... Il s'est aussi inspiré de la réalité, comme l'ont fait ses prédécesseurs...

La majorité des nouvelles du recueil se déroulent dans l'Irlande de la crise économique, à Dublin et dans sa région. Parfois aussi avant : "The Wexford Girl", se situe en 1975 ; "Le Feu de la jeunesse" et "Orchad Steet, à l'aube" nous propulsent respectivement à Londres en 1988, lors d'un match de foot historique entre l'Irlande et l'Angleterre et à à New York en 1869.

Toutes ces nouvelles néanmoins mettent en scène des hommes et des femmes tourmentés, en proie à une souffrance qui conduit parfois à la mort. La crise économique contemporaine y est pour quelque chose, évidemment, mais les crises antérieures qu'a connu l'Irlande aussi. Celle qui a vu s'expatrier les Irlandais vers les Etats-Unis et New York en particulier, très bien évoquée dans le poignant "Orchad Street, à l'aube", qui donne des frissons jusqu'à la chair de poule. Cette nouvelle est inspirée de la vie d'une famille ayant réellement existé. Dans la novella "Un garçon bien-aimé", Cian Hanahoe, qui dirige "le département des prêts immobiliers auprès d'une banque d'investissement irlandaise", démissionne après avoir passé cinq semaines en hôpital psychiatrique pour ce que son médecin excentrique nomme "un épisode".

Tout cela n'a pas l'air très joyeux. Effectivement, ça ne l'est pas toujours, mais cependant O'Connor ne se morfond pas non plus dans le pathos à se pendre. Son recueil recèle également une bonne dose d'humour ! C'est même ce qui ouvre le recueil. Dans "The Wexford Girl", le narrateur, qui s'appelle Patrick (comme son père, son grand-père, son arrière grand-père et son arrière arrière grand-père), explique le "craic" préféré de son paternel :
"Mon père disait que la mer ça fait du bien aux gens. Il disait que plus on se rapproche de la mer, plus on est sain d'esprit. D'après lui, c'est pour ça que les gens de Dublin sont vraiment des gens bien, dans l'ensemble. Et c'est pour ça aussi qu'ils sont tous dingues à l'intérieur des terres. Ils sont trop loin de la mer. C'est pas bon pour le cerveau."
Et son père mourra de rire (du moins c'est ce qui se dit) et dans sa vie, il rêvait d'être comique. Sachez qu'en Afrique, "tu sues tellement que tu te ramènes chez toi dans une bouteille".

Les pères ou du moins les hommes, sont la mémoire de la métamorphose de l'Irlande dans ce recueil. Patrick raconte la construction de la jetée de Dun Laoghaire : son arrière arrière grand-père a participé à la construction alors qu'il venait habiter dans le coin en 1848, depuis les Liberties, le quartier miséreux de Dublin. Il y a laissé sa sueur, avec tous les hommes venus extraire la roche des carrières de Dalkey. Et c'est en 1852, l'année de la construction du phare de Dun Laoghaire qu'il épousa l'arrière arrière grand-mère du narrateur. le père du narrateur rencontra sa mère au pied du phare un jour de 1962. Plus tard, l'explosion immobilière et les bobos sont passés par là... La petite ville de la banlieue de Dublin occupe d'ailleurs une place importante dans le recueil. C'est la ville d'enfance du personnage de "Un figurant sur la photo", qui habite le Dublin de 2010; c'est là que cette même année, dans "Un garçon bien-aimé", Cian Hanahoe donne rendez-vous à sa nouvelle amie, "à l'ancien hôtel Elphin de Dun Laoghaire, transformé en pub gastronomique, avec terrasse chauffée", une manière de prendre un nouveau départ.

Enfin, passé et présent se rejoignent aussi parce que les nouvelles sont pétries de références littéraires, hantées par Beckett, Joyce, Patrick Kavanagh, Synge, Sean O'Casey et j'en oublie sûrement !

Il y aurait encore beaucoup à dire sur ce livre, parce que Joseph O'Connor, monument national de la littérature irlandaise est un écrivain complexe. Je me suis régalée à cette lecture.

Je déplore juste une édition française pétrie de coquilles ou de faute de grammaire, à tel point que je me demande si l'éditeur ne m'a pas envoyé une version non corrigée. J'en ai trouvé quatre... ça commence à faire beaucoup !
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Quel plaisir de retrouver Joseph O'Connor, la musicalité de ses textes, ce ton tout en pudeur, cette finesse dans l'analyse des émotions !

La première impression que l'on retire de la lecture de ce recueil, c'est celle d'une profonde mélancolie.

Ce qui, ici, égare les âmes, est le lot inévitable de toute existence, ces mauvaises surprises ou ces malheurs attendus qui viennent bouleverser un bonheur, ou tout au moins une certaine forme de tranquillité, que l'on considérait comme acquis. La perte d'un proche, occasionnée par la mort ou la séparation, la maladie, la vieillesse, les désillusions face au constat que la vie n'a pas été à la hauteur de leurs attentes, plombent les personnages d'une tristesse silencieuse, voire d'une irrépressible détresse, qui rongent et détruisent, mais que ceux qui l'éprouvent s'interdisent d'exprimer, par humilité et discrétion, parfois par fierté.

L'auteur ne s'attarde pas sur les événements à l'origine de ces désespoirs. Ce qui l'intéresse, c'est la façon dont survivent -ou pas- ceux qui ont subi la blessure, ce sont les résonances des tragédies sur la psychologie et le comportement de ses héros, les subterfuges auxquels ils ont recours pour dissimuler leurs peines. Des subterfuges qui peuvent prêter à pleurer comme à rire, la mélancolie de l'ensemble n'empêchant pas quelques pointes -bienvenues- d'humour...

Pour autant, Joseph O'Connor ne se contente pas de l'auscultation de destins personnels. Ses textes sont certes des histoires d'hommes et de femmes touchés par le malheur, mais ce sont aussi des histoires d'irlandais. Élément qui prend à plusieurs reprises toute son importance, l'auteur abordant notamment les clivages intergénérationnels qui opposent les pères et les grands-pères à une jeunesse oublieuse d'un passé pourtant récent, et souvent étrangère à tout engagement politique. Lors d'une incursion dans le passé, retraçant la misérable existence d'une famille installée à New York au début du XXème siècle, il rappelle aussi qu'être irlandais, c'est souvent être immigrant, avec toutes les vexations, et le mépris que cela peut supposer.

L'héritage, la filiation sont ainsi d'autres notions régulièrement évoquées dans "Les âmes égarées", d'un point de vue individuel aussi bien que sociétal. Il y est question des difficultés qui président parfois aux relations entre enfants et parents mais aussi de leurs manifestations les plus émouvantes, tout comme de l'influence que peut avoir l'histoire d'un pays et de vos ascendants sur votre propre façon d'appréhender le monde.

En une parfaite osmose entre l'anecdotique et le sociologique, l'auteur du sublime "Muse" démontre une fois de plus sa capacité à "rendre le laid joli" -pour reprendre l'expression qu'un de ses personnages emprunte lui-même à la culture française-, son écriture parant d'un écrin de poésie et d'humanité un propos a priori déprimant. Sous sa plume, ses personnages, dépeints à la fois avec lucidité et une bienveillante tendresse, acquièrent une dimension complexe et fortement touchante.
Lien : http://bookin-ingannmic.blog..
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