Ce qu'est l'amour d'abord, c'est une complicité.
Une complicité et un secret. Parler d'un amour, c'est peut-être déjà le trahir. L'amour ne se passe qu'entre deux êtres; tout ce qu'on y introduit d'étranger lui fait perdre de sa force et de sa pureté, le menace de mort.
Rien n’occupe autant les jeunes gens dignes d’estime que les espoirs insensés et le chagrin de leur perte.
Car si avoir mal fait pleurer, si l’amour rend gai, ces larmes et cette gaieté à leur tour rendent plus profonds la douleur et l’amour qui leur ont donné naissance : tant l’âme est chevillée au corps, tant le corps est l’âme même. Ce que cherche toujours la passion, c’est d’aller jusqu’au bout d’elle-même ; et elle trouve dans ses manifestations de quoi s’approfondir encore : ainsi les amours se nourrissent-elles en nous des larmes qu’elles y provoquent.
L’amitié, chacun le sait, naît des silences autant que des paroles.
Il est difficile de décider où commencent les histoires et aussi où elles se terminent: leur point de départ est toujours un peu arbitraire; leur fin, même quand elle est brutale, traîne inlassablement dans les fanges des souvenirs, des amertumes de l'oubli qui veut se faire et ne veut pas se faire.
Je me reproche encore de n'avoir sans doute pas tout essayé. Par lâcheté, par faiblesse. Oui, c'est vrai, j'avais trop peur. J'avais trop souffert, je ne sais pas si c'est du bien ou du mal que me fait cette idée qu'en Béatrice peut-être quelque chose attendait un geste que je n'ai pas fait, une parole que je n'ai pas dite...J'aime mieux m'imaginer que nos destins étaient écrits. Rien n'est plus horrible que de se représenter un bonheur ou un malheur né tout entier du fortuit, de l'accident, du hasard, d'une faiblesse passagère, d'une occasion prise ou échappée.
Un soir d’été, sur une colline de Rome, devant une vieille église, j’aurai embrassé Béatrice. Les empires pourraient s’écrouler, les siècles allaient passer, tout allait changer dans le monde, jamais ce baiser ne serait aboli. Le pouvoir de l’homme est une chose admirable et qui ne connaît pas de limites – il choisit tout à coup des gestes insignifiants qui s’inscrivent dans l’éternité.
C'était encore un de ces moments vides où rien ne se passe et où tout se décide.
On ne raconte jamais le passé qu'en se souvenant d'avance du sens qu'il aura enfin pris, lourd de tout un avenir qui n'existait pas encore.
Ah! J'étais épatant. Il allait faire très beau et très chaud. Grâce à Dieu, je n'aimais personne. Je me sentais très capable de faire souffrir n'importe qui. J'étais très jeune : c'était charmant.