J'adore !
J'aime le style authentique de maître Parot, son sens profond de l'Histoire, ses personnages si humains et profondément attachants, ses promenades culturelles dans le Paris du XVIIIème siècle si bien documentées, ses intrigues toujours si proches de la vérité historique et ses interrogations qui dans le cas de ce roman rejoignent celles de notre époque où le peuple gronde quand la sphère politique se complaît dans sa bulle.
Chaque rencontre avec cet auteur est un véritable coup de coeur. le choix d'écrire en vieux français m'enchante, les mots sont alors tellement plus vivants, plus gourmands, plus riants que ceux que l'on usent de nos jours. L'humour omniprésent est un plus qui me fait rire aux moments les plus critiques parfois. Et ses personnages, que l'on retrouve à chaque fois avec grand plaisir, sont pétris de l'amour que l'auteur leur porte et cela transparaît d'une si belle manière tout au long des différents romans.
C'est, en prime, un véritable régal pour qui aime les bonnes recettes de terroir :-) Ainsi, juste pour vous faire saliver une petite mijotée de légumes qui m'a fait de l'oeil :
« Nicolas la regarda, intéressé, préparer de petites pommes de terre, racine qu'elle lui avait fait connaître et qui commençait à se populariser, des carottes, des navets et des oignons. Elle jeta un peu de saindoux dans un poêlon, y fit légèrement prendre couleur les légumes, y coupa de longs morceaux de lard, les fit revenir et assaisonna le tout. Peu après elle y ajouta une laitue entière soigneusement lavée et couvrit le tout des petits pois. Enfin, une légère jetée de sucre acheva la préparation. Trois quarts d'heure de petit feu sur le potager et Nicolas s'attablait et se délectait du plat, sous le regard ému de Catherine. »
Cerise sur le gâteau, la toile de fond ! Une ambiance lourde de brouillards secs et teintés qui ne se dissipent pas, d'orages foudroyants qui se multiplient et tuent. Ambiance encore épaissie par cette odeur soufrée, pestilentielle, collante et mortelle pour les plus faibles qu'aucun courant d'air n'arrive à éliminer. Ambiance de fin du monde, de fin d'un monde ; annonce apocalyptique d'une société de plus en plus pressurée, annonce d'une révolution attendue…
Et pourtant, rien que de plus naturel ici, juste l'entrée en éruption d'une chaîne volcanique, le Lakagigar le 8 juin 1783 en Islande. Éruption qui va durer jusqu'en février 1784 et qui va provoquer l'étouffement d'une partie de l'Europe dont la France ; asphyxie liée aux nuages de cendres et aux 122 millions de tonnes de dioxyde de soufre émis dans l'atmosphère. Cette situation entraînera non seulement une surmortalité animale et humaine mais sera suivie d'une mini aire glaciaire qui aura raison des récoltes et provoquera de ce fait une période de famine, famine qui pour certains sera le déclencheur de la révolution française.
Je n'ai pas encore épuisé mes ressources, il me reste quelques enquêtes de Nicolas le Floch à découvrir et j'en salive déjà ;-)
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C'est à mon avis le meilleur de la série, pour ceux que j'ai lu jusqu'ici.
On est à une époque charnière et on pressent que le régime va basculer sous peu.
Les divergences entre tenants des privilèges et tenants de l'égalité sont pas mal exposées et constiuent une excellente tooile de fond à lhistoire : assassinats, fausses monnaies.
Et comme toujours des descriptions de Paris du XVIIIème, pléthore de recettes culinaires et details sur la mode vestimentaire.
C'est un bon moment
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Très bon roman historique avec l'enquêteur Nicolas le Floch. Il est utile d'avoir déjà lu des épisodes précédents, surtout les premiers pour apprécier les relations entre les très nombreux personnages. le Paris et la vie en France durant la fin du règne de Louis XVI y sont décrits avec la bonne plume de l'auteur JF Parot. L'enquête à partir du premier meurtre va se compliquer avec plusieurs aboutissants pouvant mettre en péril le roi, la reine, la France. Des personnages réels de l'époque sont en scène avec ceux du roman, et, comme toujours, des repas bien goûteux qui donnent l'eau à la bouche sont décrits avec force détails.
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Remettre en cause une justice imparfaite, c'était reconnaître qu'elle manquait son but et que, chargée de régler la société, elle en aggravait les travers.
Une fois de plus, et avec une sensibilité que sa maturité aiguisait, la cité lui apparaissait comme un Moloch destructeur d’existences, divinité dont le brillant faux-semblant dissimulait de bien ténébreux et redoutables mystères. Sans doute sa récente retraite dans sa Bretagne natale, dont pourtant la misère paysanne n’était pas absente, mais où elle revêtait des aspects moins effroyables, accentuait-elle encore ce sentiment.
La Paulet leur tournait le dos, masse énorme comme accroupie devant son miroir. Leurs regards butaient sur l’édifice pyramidal d’une sorte de houppelande de satin rougeâtre ornée de fleurs blanches. Son extrémité supportait une tête mafflue d’où pendaient flasques, bajoues et fanons. Ils pouvaient voir son reflet alors qu’armée d’une petite truelle, elle s’appliquait à parer son visage d’une épaisse couche de céruse qui, en séchant, se craquelait avant même que le rouge fût mis.
- Elle a encore épaissi ! souffla Bourdeau. Regarde ses pieds, le cuir de ses mules a été tranché pour permettre aux membres de s’y insinuer.
Les ayant entendus, elle s’empara d’un geste vif de la perruque blonde aux flots bouclés qu’elle enfonça d’un coup de poing rageur sur sa tête chauve protégée d’une coiffe de dentelle.
Le visage du ministre s’adoucit soudain ; le masque de l’homme de pouvoir laissa paraître un sentiment étrange que Nicolas devina. C’était sans doute une sorte de retour sur lui-même, un attendrissement de l’homme que la vieillesse et la maladie battaient comme la falaise les vagues quotidiennes de la marée. Peut-être aussi la volonté non avouée d’exprimer à Nicolas une sympathie que ses fonctions et la nature de son être l’empêchaient de manifester de plus évidente manière.
(…)
Par ce propos de traverse, Vergennes n’exprimait-il pas sa propre émotion ? Il (Nicolas) sut gré au ministre de cette espèce de faveur qu’il lui offrait.
La mort est une attente. C’est un chemin difficile sur lequel on avance à reculons. La distance qui nous en sépare est toujours trop courte. Il faut s'y résigner.
Booktrailer - Nicolas le Floch - L'énigme du code noir