Tout le monde a vu «
Nous ne vieillirons pas ensemble » de Maurice Pialat. Mais c'était un roman autobiographique avant de devenir un film. Publié aux Éditions l'Archipel, je l'ai lu il y a quelques jours dans le cadre d'une opération Masse Critique. Je remercie Babelio et l'éditeur pour cette opportunité.
Lire le seul roman écrit par le réalisateur m'intriguait. Ma curiosité n'a pas été déçue. Il est des livres qui sont de réels coups de poing. «
Nous ne vieillirons pas ensemble » met en scène la faiblesse masculine. L'histoire est très simple : Jean a quarante ans, un boulot de cinéaste sans trop de succès. Il est loser, il gueule souvent, devient violent parfois et mène une double vie entre Françoise, son épouse depuis quinze ans, et Colette, sa maîtresse depuis six ans. Jean prend conscience qu'il aime Colette quand celle-ci fatigue de ses abus et commence à l'aimer moins, puis le quitte.
« J'aurais donc été le type du parfait goujat si je n'avais caché le meilleur de moi-même. »
Je dis souvent que l'amour est une corde constituée de filins qui se cassent petit-à-petit, à force de méchancetés. Lorsque le dernier se rompt, il n'est plus possible de rabibocher le tout. «
Nous ne vieillirons pas ensemble » illustre parfaitement cette image personnelle et en cela a résonné en moi.
Un véritable coup de poing, je disais. Pialat dépeint son personnage sans aucune complaisance. Son portrait est totalement antipathique. Un homme pitoyable et raté, tant qu'il en devient odieux et violent envers son entourage. Il pense avoir suffisamment d'emprise sur les gens, au point d'avoir le droit de les malmener à sa guise. Colette en fait les frais, subit ruptures et réconciliations, violences et insultes, sans jamais rien dire.
« Non seulement t'es vulgaire mais t'es ordinaire en plus. »
L'écriture est puissante, les dialogues sont ciselés à la perfection. Les sentiments sont extrêmement bien rendus, au travers d'une écriture simple. On vit la souffrance de cet homme dont on ne connaissait finalement qu'un personnage public bien différent. On ressent la douleur de ses femmes. Les épisodes de vie, très courts et elliptiques, s'enchaînent comme autant de séquences de film et donnent un rythme haché au tout. Un choix de structure qui convient à merveille à la langue cassante et se met totalement au service de l'histoire, des personnages, de l'humanité qui se dégage d'eux, de la réalité ; et du malheur de Jean.
Un roman ancré dans la réalité.