Les adultes que nous sommes se plairont à imaginer que pour écrire cette histoire,
Marie-Sabine Roger s'est inspirée de notre société contemporaine où les livreurs de toute sorte sont sommés d'aller de plus en plus vite pour satisfaire des consommateurs qui veulent tout, tout de suite, et sans attendre… C'est écrit sur le camion du Grand GRRRRR en page de garde : « GRRREXPRESS, livraisons minute, colis vifs ! paquets véloces ! » Et l'histoire n'est même pas encore commencée !
Mais même si ce regard sur les conditions de travail des livreurs modernes échappe forcément au jeune lecteur, il n'en reste pas moins que cet album lui « parlera ». Il y est question des émotions qu'il faut tenter de gérer. de la colère et de l'impatience qui ne servent à rien et qu'il est bon d'apprendre à maîtriser.
le Grand GRRRRR va en faire l'éreintante expérience. Sa colère enfle tellement qu'elle va le dépasser et devenir destructrice : Il ne restera rien de la petite maison rose. Et
le Grand GRRRRR en sortira épuisé par son impuissance et l'inutilité de sa violence.
Face à ce monstre dont la colère démesurée finit par faire rire, arrive à petits pas « une mamie très très ancienne » qui va complètement changer l'ambiance. Elle est fragile, gentille, attentionnée. Elle désarme notre livreur qui n'en peut plus, et n'a d'yeux que pour le petit colis qui l'attend et que lui donne, tout penaud, un Grand GRRRRR qui fait profil bas…et se sent bien ridicule ! le contraste entre la colère destructrice de notre livreur et la gentillesse aveugle de la mamie est très drôle, et attendrissante : « C'est si rare, les gens patients » dit-elle. Elle ne se rend même pas compte qu'elle n'a plus de maison !
Nous avons aimé les fantaisies du texte, les verbes inventés qui nous parlent d'autant mieux : la pluie qui « plique-ploque » et « flotaille à grands sauts pleins », les pattes qui « pattotent », la maison qui « s'accordéonne » avant de s'écrouler, « rapetiboisée ». Et bien sûr, le jeu sur les sonorités qui donne doublement envie de lire cet album à haute voix, de le conter.
le Grand GRRRRR « groumasse », « grommelle », « grince », il « grrrrrule » en très grandes lettres avant de finir hors service, vidé, on n'entend plus alors qu'un minuscule « et grrrrru et grrrrru » écrit en tout petit !
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