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EAN : 9782020237246
554 pages
Seuil (01/01/1998)
3.94/5   25 notes
Résumé :
Faire tenir le monde dans un livre, ou tout au moins une journée du monde, celle de l'équinoxe de printemps de l'année 1989 : telle est l'ambition de ce roman qui se veut à la fois réaliste et délirant.

Des milliers de personnages vivent et meurent dans ces pages, des centaines d'histoires et de lieux s'y croisent. Projet absurde, mégalomane ? Il se peut, mais l'auteur ne croit pas que la littérature soit faite pour être nécessairement raisonnable ou ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
En voilà un livre monde qui avait pour but de recueillir toutes les informations de la journée du... mais vous savez déjà tous ça puisque c'est relaté sur la 4e de couv.

Étonnante épopée imaginaire basée sur une unité de temps mais une totale ubiquité de la narration. Les faits s'enchaînent comme des énumérations sans fin, un vertige de liste dirait Mr Eco, mais ceux-ci s'habillent de la fantaisie d'un narrateur à l'imagination féconde et aux digressions sans bornes. Chaque épisode se concentre sur un groupe d'actualités (accidents, meurtres, évasions ...) mais semble aussi démarrer avec une tentative de séduction d'une partenaire imaginaire pourtant reliée à l'un des faits réels précités, tentative de séduction qui avorte le plus souvent du fait de l'enlisement de la narration dans les plus sordides faits-divers de cette journée du 21 mars 1989 et surtout à cause de l'arrivée d'une autre créature féminine tout aussi séduisante qui prend toute la place.

À noter enfin qu'à côté des divagations du narrateur et la litanie des faits-divers, le récit grouille d'allusions littéraires d'Homère à Cendrars en passant par Dante (pour les plus évidentes que j'ai pu noter) ainsi que de truculentes parodies - j'ai surtout apprécié celle de l'Ulysse de Joyce.

Un livre monde donc dont on comprend difficilement la finalité mais qui nous transporte dans une course folle où l'humain se contemple dans toute sa grandeur, sa diversité, sa couleur locale, ses turpitudes et surtout sa misère.
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L'un des plus étonnants, des plus poétiques et des plus exceptionnels romans contemporains qu'il m'ait été donné de lire.
Lorsque je l'ai découvert, à sa sortie, il y a de cela une vingtaine d'années, j'ai hésité à l'acheter, lui ai longtemps tourné autour, l'ouvrant, lisant quelques pages, le reposant sur la table du libraire.
Mais cette question lancinante me taraudait : comment un écrivain peut-il être aussi mégalo pour prétendre faire entrer le monde dans un livre ? Moi qui jusqu'alors ne lisais que des classiques, j'ai fini par céder à la curiosité. J'ai acheté le livre. Et je dois dire que cette lecture fait partie de celles qui ont changé ma vie.
Oui, cet écrivain réussissait le pari fou de donner à voir le monde ! Cette lecture est aujourd'hui ancienne pour moi, aussi aurais-je du mal à en faire un résumé. D'ailleurs, ce roman est-il "résumable" ? Je ne le crois pas.
Tout son intérêt réside dans sa démarche et dans son écriture : l'auteur a collecté d'innombrables articles de journaux du monde entier, il a aussi beaucoup bourlingué lui-même et a vu beaucoup de choses.
C'est par le biais d'un narrateur orchestrant les multiples événements - dramatiques ou heureux, grandioses ou anecdotiques - par le regard même qu'il pose dessus et au moyen d'une structure narrative d'une incroyable maîtrise que l'auteur parvient au miracle.
Les langues et les graphies s'entrecroisent, les différents niveaux de langue également. La langue est la matière même et la raison d'être du livre. le monde n'existe que par ce que l'on met des mots dessus : pour un habitant français lambda, l'horreur de l'incendie d'un atelier de confection faisant des centaines de victimes à l'autre bout du monde a-t-il une existence si le récit ne lui en est pas fait ? Ce sont les mots qui, finalement, font le monde. C'est ainsi qu'un auteur peut prétendre inventer le monde. Et avec quelle maestria.
Lien : http://delphine-olympe.blogs..
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Imaginez un matin, vous vous réveillez et dans votre boîte aux lettres 500 journaux !! Oui 500 différents journaux provenant de la planète entière. Grâce aux efforts des différents ambassades françaises à travers le monde, Olivier Rolin s'est vu envoyé 500 journaux d'une seule journée : le 21 juin 1989.
Ce roman est une synthèse en quelque sorte de cette journée vu par le monde entier, de la France jusqu'aux états unis en passant par l'Amérique latine et l'océan indien. Tout y est ! Et c'est présente d'une façon assez magnifique et très poétique.
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La journée de l'équinoxe de printemps 1989 comme somme démiurgique du monde, tragique, folle et hilarante.

Sur le blog Charybde 27 : https://charybde2.wordpress.com/2018/06/04/note-de-lecture-linvention-du-monde-olivier-rolin/
Lien : https://charybde2.wordpress...
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Citations et extraits (21) Voir plus Ajouter une citation
Le langage que nous aimons, maintenant, est celui de la communication! Des messages publicitaires! Des clips! Du marketing! Des sondages! Panels! Tout le monde y vient, les politiques, les hommes d'Église, les journalistes, les romanciers! Et on a raison! Efficacité, économie, rapidité! Des mots comme des missiles sol-air, standardisés, ultralégers, portables sur le dos, fonçant vers leur objectif à vitesse trisonique! Message délivré en un temps record! En plein dans le trou du cul de la tuyère! Dans le cœur de cible! Explosion d'images subliminales! Sublime! Une langue nouvelle, à la mesure athlétique de l'humanité sportive! Une langue saine et équilibrée, basses calories, pour un public aux performances sans cesse améliorées! Tenez, moi, par exemple, grâce à un entraînement raisonnable, jogging, club de gymnastique, à une diététique pensée, stricte mais sans excès, à des équipements conçus en fonction de concepts nouveaux, eh bien, sans être Carl Lewis, je cours tout de même plus vite que... que le soldat de Samothrace, par exemple! Beaucoup plus vite! Et je pense aussi plus vite! Donc! Normal! Mens sano! La pensée suit l'amélioration de l'espèce! Plus affûtée! Plus pointue! J'utilise la méthode de lecture du président Kennedy! Je balaie la page, je retiens l'essentiel! Et ça n'est pas grand-chose, souvent, croyez-moi! Suivez mon regard! Je programme mes connaissances! Je les formate et reformate! Constamment! A tous les niveaux! Je les articule en fonction du créneau! De la demande ! Suivi de marché! Il y a un marché des connaissances, et des mots aussi, señorita! Il y a des mots qu'on ne demande plus du tout! Personne n'en veut! D'autres qu'on s'arrache! Je les utilise en flux tendu, mes connaissances! Jamais plus de stocks! Rotations constantes, recyclages! Rentabilité maximum! Je n'ai peut-être pas un savoir, disons, encyclique, mais je le place mieux, je le vends mieux qu'un autre! Surtout qu'un poète! Un poète ! Faites-moi rire! Sombres blocs ils s'y croient! Sombres ploucs, oui! Vous connaissez, mademoiselle, je présume, Edward Allan Poe? Un désaxé! Un ivrogne, d'ailleurs soit dit en passant. Perdu d'alcool, comme monsieur! Un drunkard, un borracho, oui, un pochetron, comme on dit chez moi...
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Et désespérément loin de tout se sent aussi, dans une chambre du quatrième étage du bloc quarante-huit de l'hôpital universitaire de Singapour, M. Chia Chan Khee dont les poumons sont comme des sacs de papier de verre, tapissés de poussière minérale parce qu'il a passé toute sa vie à travailler comme ouvrier dans les carrières. La pierre contre laquelle il s'est épuisé, blessé maintes fois, qui l'enfermait dans son cachot énorme, l'empêchant de voir le jour et les robes des filles dans les rues, et le soleil brillant sur la mer à travers les longs cils des palmes, toutes ces belles choses, la pierre qu'il creusait non pour s'évader, même pas, mais pour vivre, parce que c'était la part de vie qui lui était allouée, maintenant c'est lui qui l'enferme et c'est elle qui le mine, voilà la part de mort qui lui a été donnée. Son existence, songe-t-il, n'aura eu d'autre sens que d'accomplir ce pathétique retournement, creusant / creusé, vivant / mourant.
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Sur le toit d'un ascenseur à Krasnoïarsk
Je vais t'offrir toutes les fleurs et tous les champagnes, et aussi tous les fleuves et toutes les campagnes... les arabesques bleues du Brahmapoutre, les deltas arborescents des cours d'eau tropicaux, la dentelle des mangroves pour t'en faire une voilette... les méandres de l'Amazone scintillants au milieu des choux-fleurs géants... les miroirs brisės des rizières pour que tu t'y contemples mille fois, ô jeune pousse, les plages de blé pâle du Saskatchewan... les sillages de café-crème des trains de barges sur le Zaïre... te faire peur avec les crocodiles...
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Cela veut dire, repris-je sur un ton plus égal, lui prenant une main qu'elle m'abandonna volontiers, que Lucifer, le grand attracteur étrange, est potentiellement partout, de façon absolument imprévisible. Non pas au centre, mais n'importe où sur la surface de la terre, que sa course démente suscite et imprime d'un incompréhensible tatouage. En toi, sur toi peut-être en cet instant, cette marque, ou sur moi, et une seconde plus tard sur la cime d'une montagne d'Asie, sur le quai d'une gare bulgare, sur une piste rouge de Bougainville où fuit la bande d'émeutiers qui s'est emparée de cinq fusils à l'armurerie de Buin... ou bien quelques kilomètres plus loin, Sur le chemin des quinze soldats papous qui les poursuivent... Et repassant parfois l'instant d'après par le même point, ou des millions d'années après, ou jamais! L'enfer est un gouffre tournoyant dont le bord et le fond sont partout! Mais le bord beaucoup plus que le fond! Mais ce qui n'est pas l'enfer est également partout ! Est beaucoup plus partout! Ah, elle est salée, celle-là! l'enfer est partout et nulle part, en un sens!
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Certes, les singes dactylographes très évolués qui avaient accouché de cette fiction tordue n'imaginaient pas à quel point ils étaient proches de l'éblouissante simplicité d'une découverte que certains vieux mythes religieux dissimulaient-désignaient depuis toujours : le Verbe se faisait chair, et la chair Verbe !). Je compris que 1'antimatière, I'antigravité, l'autre univers fabuleux dans lequel on pouvait remonter le temps et se livrer à toutes sortes de contorsions logiques, c'était le Verbe, que le cyclone de gaz ardent qui, avant de s'anéantir derrière l'horizon de toutes choses, à trois cents millions d'années-lumière, avait émis un rayonnement frappant aujourd'hui mes yeux de phosphore et de chlorures, allait se perdre, sur l'autre face de tout, dans les spirales infinies du Verbe, dont une partie aussi concevablement minuscule au regard de ce monde-là que l'air que je respirais au regard du cosmos physique allait à son tour, à travers mes mots, s'anéantir en matière: et cela, cet engendrement et cette destruction, ce rotor primordial, éternellement.
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Videos de Olivier Rolin (40) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Olivier Rolin
Rencontre avec Olivier Rolin autour de Jusqu'à ce que mort s'ensuive paru aux éditions Gallimard.


Olivier Rolin, né en 1947 à Boulogne-Billancourt, est un écrivain français, lauréat notamment du prix Femina en 1994 pour Port-Soudan et du prix France Culture en 2002 pour Tigre en papier. Il a publié entre autres: Circus 1 (Éditions du Seuil, 2011), Bric et broc (Verdier, 2011), Circus 2 (Seuil, 2012), Veracruz (Verdier, 2015), Extérieur monde (Gallimard, 2019) et Vider les lieux (Gallimard, 2022).
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