Un livre assez déroutant qui aborde la mort et accessoirement l'amour voir l'exacerbation de la libido pour certains dans un espace assez mal défini, réalité, rêves et cauchemars ou bien souvenirs mais plus sûrement un emmêlement de tous ces états.
le monde des vivants et celui des morts se côtoient, s'interfèrent sans qu'on sache si c'est un vivant qui parle dans un monde des morts ou un fantôme mort depuis belle lurette qui parle aux vivants. A moins qu'il ne s'agisse d'un ou plusieurs rêves; difficile à dire... Mais... Il est possible aussi que cela soient des souvenirs de vivants … Ou de morts…Ou seulement un monologue d'une conscience… Ou folie du lieu.
Toujours est-il que l'histoire se tient malgré sa sophistication et on la prend réellement pour le récit de Juan, fils de la morte, à la recherche de son géniteur, personnage qui paraît seul vivant du moins à son arrivée au village .
Parfois cette narration rappelle «je suis une légende» le narrateur Juan perdu dans les limbes d'un village de morts qui l'observent de l'intérieur de maisons inhabitées de jour comme de nuit mais peuplées de spectres qui chuchotent et de rumeurs. Ceci pour l'arrivée mystérieuse de Juan dans le village déserté
Parfois c'est une ambiance à la fois glauque et écrasée de chaleur qui est évoquée et un narrateur empêtré dans un cauchemar poisseux, véritable antichambre de la mort comme « le désert des tartares » de Buzzati
Parfois cela fait songer à «
La porte des enfers » de
Laurent Gaudé, quête pour amadouer la mort ou encore «
Tombé hors du temps : Récit pour voix » de
David Grossman un plaidoyer contre la mort avec évocations des souvenirs pour la repousser
Des états superposés dans ce village, état qui ressemble étrangement à celui de
Schrödinger: personnage mort et personnage vivant et la vie si proche de la mort qu'il en faut peu pour passer de l'une à l'autre.
Pedro Páramo est un petit despote local, comme savent en fabriquer les états du sud de l'Amérique du Nord, régnant par la force sur des êtres guère plus évolués que leurs ânes ( Toutes mes excuses à Jean-Pierre Hutin oui je sais les ânes sont très intelligents mais je fais avec les expressions du cru). Assassin, Voleur, violent, violeur et titulaire du droit de cuissage sur le cheptel féminin du coin, père d'un grande progéniture indifférenciée et d'un vaurien prometteur reconnu celui-là et amant d'une folle.
Un Pedro qui peut s' imaginer sous les traits de Anthony Quin pour le physique, l'aspect intraitable et le regard mauvais.
Un padre en pleine déroute qui absout sans être lui-même purifié par la confession, qui refuse pardon ou l'accorde du bout des lèvres tant le mal est omniprésent même en lui
Des personnages qui retracent l'histoire des vicissitudes et méfaits du diablito Pedro Paramo
Un livre déroutant et morbide qui prend aux tripes et colle aux doigts. On peu en apprécier le petit coté "grecs anciens" avec ces personnages vivants qui côtoient les morts et cela semble tout naturel qu'un dialogue s'instaure entre eux dans ce pays abandonné de Dieu.
Un coté chamanique amérindien. Méphistophélès aurait pu naître au Mexique!