Ce tome fait suite à Aristeia Rising ; il contient les 3 épisodes de la minisérie parue en 2010.
Après le coup d'éclat sur Vénus dans le tome précédent, Sam Vijaya se retrouve dans une position compliquée. Elle est identifiée comme étant la meneuse de la rébellion. Mais cette rébellion se limite à avoir repoussé l'omnipotente Alliance Solaire des Planètes, en dehors du sol vénusien. Il reste à consolider le gouvernement de Vénus, à assurer l'autonomie énergétique de la planète, à briser le blocus autour de la planète et à pérenniser l'indépendance de la colonie vénusienne. Vijaya doit donc concevoir une stratégie qui lui permettra de quitter Vénus, de mettre la main sur un moyen de financer l'effort de guerre et de trouver des alliés. Elle dispose de quelques dizaines de soldats et d'une bonne connaissance géopolitique du système solaire. de leur coté, les experts militaires et les experts en communication de l'Alliance Solaire des Planètes réfléchissent aux moyens de contenir cette insurrection, d'éviter qu'elle se propage à d'autres colonies, et de discréditer Vijaya.
Le scénario est à nouveau construit par
Nick Sagan qui est aidé cette fois par
Clinnette Minis pour le découpage et les dialogues. Les illustrations sont réalisées par un collectif dénommé
Concept Art House. La narration s'est fortement densifiée par rapport au premier tome.
Nick Sagan ne dispose que de 3 épisodes pour raconter une histoire des plus ambitieuses. le lecteur se retrouve immergé dans cet univers de science-fiction, fortement dosé en politique fiction. Il faut absolument avoir lu le premier tome avant de lire celui-ci. le premier niveau de lecture repose sur les agissements de Vijaya pour continuer de faire exister la liberté politique. D'un coté
Nick Sagan met en scène une démocratie basée sur une forme de discrimination. Il évite le cliché des hommes politiques corrompus pour laisser planer un flou artistique sur les dérives de cette gouvernance. le lecteur est amené à assumer que cette discrimination est la source de la dégénérescence de cette démocratie. Par contre, il montre quelques individus en train de perpétuer cette forme de pouvoir. Il y a un passage remarquable avec des manipulateurs d'opinions (spin doctors) réfléchissant aux angles d'attaque pour retourner l'opinion publique contre Vijaya, ainsi qu'une ou deux séquences dans un bureau présidentiel pour évoquer les différentes stratégies potentielles, de la récupération du mouvement au conflit armé ouvert.
Au delà de l'enjeu de la démocratie,
Nick Sagan intègre plusieurs réflexions politiques et sociales qui enrichissent d'autant la narration. Les projections d'anticipation sur les armes de guerre sont passées en arrière plan, mais la psychologue consultante informatisée refait une apparition saisissante, avec comme sous-entendu qu'une séance de psychothérapie assistée par ordinateur n'est pas si éloignée du réel que ça.
Nick Sagan n'hésite pas non plus à intégrer la ferveur religieuse comme moteur d'évolution de la société. Et sa réflexion sur la discrimination ne se limite pas à réaffirmer la nécessité d'accepter l'autre, mais aussi l'interdépendance des individus dans une société. Il démonte également les mécanismes par lesquels un simple individu (Vijaya) peut devenir l'emblème d'un mouvement, comment la nécessité fait loi en termes d'alliances politiques et militaires.
Sagan délaisse une opposition simpliste entre les méchants oppresseurs et les gentils défenseurs de la liberté pour montrer des individus convaincus de leur bon droit et les moyens qu'ils choisissent pour atteindre leurs fins à tous prix.
Les illustrations présentent la même caractéristique que dans le tome précédent : pour la moitié elles sont vraiment très sombres. Il faut disposer d'une forte luminosité pour distinguer les formes et les décors. Les illustrations sont réalisées à l'infographie avec quelques effets spéciaux à base d'images réelles (les explosions et les gerbes de feu par exemple), et avec un rendu général de peinture. Les individus restent distincts les uns des autres et reconnaissables, sauf quelques personnages féminins dans la deuxième moitié. La narration graphique est parfois supplantée par la nécessité d'insérer beaucoup de textes. Les illustrateurs rendent chaque scène de dialogues intéressante en les mettant en scène par des jeux de mouvement de caméra, ou en les intégrant dans des actions. La conception des décors et des tenues d'anticipation sont en cohérence avec le premier tome et relève d'une vision graphique construite et réfléchie. le style graphique change radicalement lors de 2 courtes scènes oniriques et d'un facsimilé de publicité, ce qui apporte un peu d'air frais dans des planches très sombres et chargées d'informations visuelles.
Ce deuxième tome nécessite une attention accrue par rapport au premier et souffre un peu de sa relative faible pagination. Beaucoup d'éléments sont sous-entendus et demandent au lecteur de compléter consciemment les informations délivrées.
Nick Sagan propose un récit de science-fiction ambitieux, à la fois intellectuel et viscéral.