[MA COME SIAMO, POI, NOI ?]
15.
Ma come siamo, poi, noi (gli italiani)?
la questione fu presa di petto, e strenuamente
sviscerata, una sera, a una cena, al Montefiore del Mishkenot, con alcuni opulenti
semibulgari (e con semibulgaressa, o bulgaressa proprio, solidissima):
(es.:
siamo sensuali? sessuali? sensibili?): (siamo sessuatamente sensati?): (sensatamente
sessuati?): (tutto dipende, alla fine, dalla lingua che ti sei scelto): (dalla lingua
che ti sei subito, sopratutto): (e qui, come da tanti squisiti fumi passavi, sei stato
violentato da scariche di implacabili fotografie (e di implacabili lingue) passive):
(e la lingua passiva, lo vedi, anzi lo senti (sensibilmente lo senti, se lo senti):
(se la senti): la lingua è già, da sola, un’ansiogena anfibologia: sessualmente
sensata, per l’appunto):
tale mi fu l’ultima sera, che mi fu l’ultima cena, e che fu,
come da programma, intiera, un sexy-booze and –schmooze:
(gaio usque ad mortem):
[MAIS COMMENT SOMMES-NOUS, SOMME TOUTE, NOUS ?]
15.
Mais comment sommes-nous, somme toute, nous (les italiens ?)
la question fut prise de front, et vaillamment
disséquée, un soir, à un dîner, au Montefiore du Mishkenot, avec quelques opulents
semi-bulgares (et avec une semi-bulgaresse, ou véritable bulgaresse, solidissime) :
(par ex . :
sommes-nous sensuels ? sexuels ? sensibles ?) : (sommes-nous sexuellement sensés ?) : (sexués
de manière sensée ?) : (tout dépend, en fin de compte, de la langue que tu t’es choisie) : ( de la langue
que tu as subie, surtout) : (et ici, comme par tant d’exquises fumées passives, tu as été
violé par les décharges d’implacables photographies (et d’implacables langues) passives) :
(et la langue passive, tu le vois, ou plutôt tu le sens (sensiblement tu le sens, si tu le sens) :
(si tu la sens) : la langue est déjà, à elle seule, une anxiogène amphibologie : sexuellement
sensée, précisément) :
telle fut pour moi la dernière soirée, qui fut pour moi le dernier dîner, et qui fut,
comme prévu, tout un sexy-booze and -schmooze :
(gaio usque ad mortem) :
P
pisciano a pioggia piovre & pipistrelli,
pace promulgo a paggi & a pazzarelli:
pace proclamo, perché porto pena,
porto palpebre & pinne di polena:
poppano i porci pozzi & pescicani,
piegano i ponti porri & pellicani:
poesia prosaica, pratica permessa,
penna mi sei, sei piuma, & pia promessa:
P
pissent en pluie pieuvres & pipistrelles,
paix je promulgue pour pages & patraques :
paix je proclame, parce que j’apporte la peine,
des paupières j’apporte & des palmes de proue :
pompent les porcins puits & poissonnailles,
poésie prosaïque, permise pratique,
plume tu m’es, tu es plume & pieuse promesse :
C
cascato è il cavo cielo & la cometa
cresta è di cotte croste & cruda creta:
celibe è il cosmo in chiara crisi cronica,
cubo cilindro & circumsfera conica:
crocida il corvo, cuculia il cuculo,
chiucchiurla il chiurlo& crepita col culo:
cecato mi è il colòn, cacato ho il cazzo,
chiudi ’sta cantilena, can cagnazzo:
C
chu est le ciel creux & la comète
crête est de cuite croûtes & de craie crue :
célibataire est le cosmos, en criante crise chronique,
cube, cylindre & circumsphère conique :
le corbeau croasse, coucou coucoute,
le courlis courlotte & avec son cul crépite :
clos cette cantilène, clebs d’un clébard :
à la fin (comme madrigalaient ces presque aurorales voix mixtes d’Antioquia),
c’est la tristesse qui est la muerte lenta :
je laisse de côté les choses simples (las pequeñas, las queridas) :
et j’en viens au point qu’elles recommandaient (tout comme Mercedes) : muchacho, no partas ahora :
(entonces, c’est vrai que je ne peux pas le rêver, vieillard, el regreso) : mais c’est encore plus vrai, et bien
plus effrayant, que l’amour est simple : (y las cosas simples las devora el tiempo) :
(si la transcription Juan Diego est correcte) :
c’est vrai, enfin, c’est vraiment vrai, que j’ai aimé
ma vie : (la vie) : c’est ainsi, dans cette luz major, qu’aujourd’hui, les filles, je me meurs :
Au bout du compte, même le mea culpa du poète « épouvantable encyclopédie de conneries encouillonnées, de semi-criminelles/supergaffes » se clôt dans la tendresse :
ce que j’ai eu, je le garde ainsi : (pourvu que je te garde, moi je me garde, à l’identique) :
acrobate (n.m.) est celui qui marche tout en pointe (de pieds) : (tel, du moins,
pour l’étymon) : mais ensuite il procède, naturellement, tout en pointe de doigts, aussi,
de mains (et en pointe de fourchette) : et sur sa tête : (et sur les clous,
en fakirant et funambulant) : (et sur les fils tendus entre deux maisons, par les rues
et les places : dans un trapèze, un cirque, un cercle, sur un ciel) :
il voltige sur deux cannes, flexiblement, enfilée dans deux verres, deux chaussures,
deux gants : (dans la fumée, dans l’air) : pneumatique et somatique, dans le vide
pneumatique : (dans de pneumatiques plastiques, dans des fûts et bouteilles) : et il saute mortellement :
et mortellement (et moralement) il tourne :
(ainsi je me tourne et saute, moi, dans ton cœur) :
Soirée hommage à Edoardo Sanguineti à La Libreria à Paris