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EAN : 9782849509043
Syllepse (08/04/2021)
4.5/5   6 notes
Résumé :
Cette histoire de la boxe noire et des plus grands boxeurs noirs des 19ème et 20ème siècles s’ouvre sur les combats des esclaves contraints de s’affronter sous les yeux de leurs maîtres respectifs. Cette scène est le point de départ d’une généalogie dont l’en­ga­gement et la carrière de Muhammad Ali constitueront, quelque 150 ans plus tard, l’aboutissement.
De la période esclavagiste au mouvement des droits civiques des années 1960, en passant par l’entre-deu... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Une histoire politique du ring noir, un titre qui met sérieusement l'eau à la bouche. Si en plus ce livre sort dans la collection Radical America de chez Syllepse, ça devient – à titre personnel – un livre à posséder absolument. Alors quand la Masse Critique de juin l'a proposé, j'ai même pas regardé les autres titres en lice.
Tant que j'y suis, j'en profite d'ailleurs pour remercier Babelio et les admirables éditions Syllepse.

Une histoire politique du ring noir lance immédiatement les hostilités (car il s'agira bien de ça tout au long de l'ouvrage) en nous dressant le portrait de Tom Molineaux. Ancien esclave, il est affranchi par son « maître » grâce à la boxe qu'il va rapidement pratiquer en professionnel du côté de la Perfide Albion. On est à l'aube de 19e siècle et la boxe est un sport bien peu apprécié, décrié même. Quant aux pugilistes, ils sont encore loin d'être considérés au titre de sportifs professionnels, mais si en plus ils sont noirs, ça tourne vite à la tentative d'interdiction de tout combat.
Et puis finalement, Angleterre, États-Unis, Australie, France... les matches plus ou moins légaux se poursuivent un peu partout alors on édite de nouvelles règles, officielles cette fois : les rounds auront une durée bien délimitées et puis terminées les « victoires à la 45ème reprise », la réglementation devient plus carrée pour en arriver à celle qu'on connait aujourd'hui. Par contre, ce qui va mettre du temps à changer, c'est l'idée qu'un noir puisse être champion du monde et encore plus dans la catégorie reine que sont les poids lourds. Et là, le credo est d'airain : que les champions blancs (Jack Dempsey, James Jeffries, Tommy Burns...) refusent systématiquement de remettre leur titre en jeu face à un adversaire noir (la fameuse color line, une frontière nauséabonde à ne pas franchir, officiellement pour ne pas s'abaisser à partager le ring avec « la race inférieure », officieusement sous peine d'humiliation sévère en cas de défaite). Nombreux seront les boxeurs noirs qui se casseront le protège-dents à réclamer malgré tout des rencontres qui resteront ring mort.
Méprisés et diffamés, la plupart de ces boxeurs, empêchés dans leur art, connaîtront tous un parcours difficile avec une conclusion souvent tragique comme nous le raconte Chafik Sayari en nous brossant entre autres les portraits de Peter Jackson, Jack Johnson, Joe Louis... et bien sûr, Muhammad Ali !

De sa victoire olympique à Rome en 1960 qu'il dédiera à sa chère patrie, son pays, sa nation qu'il aime tant : l'Amérique (!!) avant de prendre en pleine figure toute l'idéologie ségrégationniste que même un champion olympique ne peut espérer dépasser au légendaire Rumble in the Jungle, son mythique combat contre George Foreman à Kinshasa en 1974.
Avec tout ce que l'on sait des évènements séparant ces 14 années mais dont le plaisir à (re)lire est toujours aussi vif : sa rencontre avec Malcolm X puis le désamour après son entrée à la Nation of Islam, le refus de d'aller se battre au Vietnam, ses combats sur le ring et en dehors... On passe peut-être un peu plus de temps avec Muhammad Ali qu'avec les autres grands noms noirs de la boxe mais il est le Greatest of all Time ou pas ?

Au delà du sport, c'est le racisme ordinaire des Jack London, de Coubertin, Churchill... à la recherche perpétuelle du great white hope (ce boxeur blanc qui pourrait récupérer le titre dont un noir aurait réussi à s'emparer malgré la color line, les arbitres racistes et autres embûches condamnant toute potentielle victoire) ainsi que toute l'injustice dont ils étaient victimes que, chacun à leur manière, ces boxeurs ont tenté de dénoncer.
L'Histoire des États-Unis d'Amérique est une histoire complexe, souvent émaillée par la haine de son prochain (pour une nation aussi croyante, quel paradoxe !), mais l'opiniâtreté de ces sportifs que Chafik Sayari nous dépeint à travers des portraits fouillées et minutieusement documentés a apporté une pierre à l'édifice d'une nation plus égalitaire. Il reste encore beaucoup à construire mais nul doute qu'ils ont largement participé à ce chantier sans fin.

Une Histoire politique du ring noir est une lecture riche et passionnante qui fait patiemment attendre octobre* et la sortie du prochain Radical America : l'autobiographie d'Elaine Brown !! J'en tremble des doigts rien qu'à l'écrire... Vivement !

*Sortie repoussée au 27 janvier 2022, patience, patience...
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De la période esclavagiste au mouvement des droits civiques, la figure du boxeur noir n'a cessé de cristalliser les espoirs de la population afro-américaine, autant que la haine et le désir de vengeance du pouvoir et de ses alliés. En faisant revivre les parcours de l'ancien esclave Tom Molineaux, de Peter Jackson, victime de « la barrière de couleur » tracée pour préserver la suprématie blanche, de Jack Johnson, premier champion du monde noir des poids-lourds en 1908, de Muhammad Ali et de quelques autres, Chafik Sayari montre comment le ring, aux États-Unis, a toujours été le théâtre de la domination raciale et de sa contestation.
(...)
En proposant d'aborder l'histoire de la domination raciale aux États-Unis depuis le ring Chafik Sayari ne pouvait être plus… percutant ! Essai absolument passionnant.

Article complet sur le blog :
Lien : https://bibliothequefahrenhe..
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Un livre très intéressant qui parle de la boxe de sa naissance à Muhammad Ali, tout en mettant en perspective l'utilisation de ce sport à des fins politiques et parfois religieuses.

Si l'on résume : des blancs qui refusent de combattre contre des boxeurs noirs, sous prétexte qu'on ne mélange pas les races, la réalité étant plutôt la peur de la défaite et donc la mise à mal de la suprématie blanche. Des boxeurs noirs qui rêvent de combattre les blancs pour prouver qu'ils ne sont pas des êtres inférieurs. Des matchs qui auront parfois lieu et qui se termineront très souvent par la victoire du boxeur noir, lui-même finalement doublement honni : par les blancs qui lui reprocheront un match truqué et par les élites noires qui s'affichent contre le franchissement de la color line. En effet, leur stratégie d'assimilation est la discrétion et le respect du blanc, entendez la soumission totale.

La beauté du sport est complétement ignorée, quelle tristesse. Il s'agit de politique : on refuse de combattre ou alors on combat pour conforter une position acquise pour les uns ou en devenir pour les autres ou encore pour prouver qu'on existe, tout simplement.

Sur ces bases, des carrières ont été faites et défaites au gré d'hommes blancs ou noirs, sans considération aucune pour les joueurs ; des vies de boxeurs noirs ont été détruites, des réputations aussi, certaines carrières n'ont pas été lancées, notamment celles des sportifs noirs qui ont respecté la color line ou n'ont pas pu affronter un boxeur blanc, faute de volontaires.

Un livre qui m'a permis de toucher du doigt un monde que je méconnais, la boxe et le parcours de certains de ses champions. Mais il laisse un goût amer, le sport ne devrait pas être politique, c'est ici le cas concernant la ségrégation et le racisme. D'autres exemples peuvent être cités, l'Histoire en recèle une multitude.

Merci à Babelio pour cette opération masse critique et aux Editions Syllepse pour cette lecture très instructive.
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Citations et extraits (6) Voir plus Ajouter une citation
« J'ai été si grand dans la boxe qu'ils ont dû créer une image comme Rocky, une image blanche à l'écran pour contrer mon image sur le ring. L'Amérique a besoin d'icônes blanches et peu importe où elle va les chercher : Jésus, Wonder Woman, Tarzan, Rocky. »
Muhammad Ali.
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Plus que tout autre sport, et comme en attestent les productions culturelles auxquelles elle a donné lieu et continue de donner lieu, les enjeux de certains combats et la personnalité de certains protagonistes, la boxe permet de suivre quelques-uns des épisodes de l’histoire des relations raciales aux États-Unis et le combat, mené, de manière plus ou moins affirmée, par quelques boxers noirs contre les frontières tracées en vue de préserver la suprématie blanche.
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En l'espace de 124 secondes, Louis administra une quarantaine de coups au visage de son adversaire (Schmeling), alors que ce dernier ne put lancer son poing dans le vide qu'à deux reprises.
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Le sportif noir se devait d'être le produit-modèle exemplaire pour tout consommateur, quelles que soient sa classe, son origine ou sa religion. Tout comme l'argent n'a pas d'odeur, le sportif, en théorie, n’avait plus de couleurs.
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La folie furieuse qui s’empara aussitôt du pays fera dire à l’historien Randy Roberts que “rien jusqu’à l’assassinat de Martin Luther King en 1968 ne déclencha autant de haine raciale aux États-Unis que la victoire de Johnson sur Jeffries“.
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