Les rendez-vous de Fausta /
Jean-Noël Schifano
Fausta est une femme de quarante ans, vétérinaire, femme libérée d'une beauté nitescente aux yeux volvoces, qui a connu de nombreuses expériences sentimentales et sexuelles, sans jamais connaître le bonheur de vivre à deux.
Nous sommes en mars 1986 dans la région de Strasbourg et depuis quelques temps lui vient l'envie de régler ses comptes avec quatre hommes qui l'ont particulièrement humiliée. Il lui faut préparer avec beaucoup de soins cette vengeance car le facteur temps est déterminant pour une raison que je vous laisse deviner. Elle fixe quatre rendez-vous et les dés sont jetés.
Dans une écriture étonnante rejoignant parfois l'exercice de style, l'auteur décrit aussi bien la beauté et le fonctionnement de l'horloge astronomique de la cathédrale de Strasbourg que les ébats sexuels des protagonistes d'une brutalité et d'une rage peu communes, sans oublier Justin le clochard ayant élu demeure sous le pont du Corbeau qui enjambe l'Ill dans le quartier de la Petite France. le vocabulaire est riche et la promenade nous faisant découvrir la Petite France est un moment de ravissement pour ceux qui connaissent cette belle ville qu'est Strasbourg. Et le bizutage à l'école vétérinaire de Lyon !! Un moment d'anthologie ! J.N. Schifano joue avec les mots et nous ménage un suspense intense jusqu'au dénouement final.
Extraits : « Impérieuse beauté aux yeux verts sillonnés de mélancolie, Fausta paraissait dix ans de moins lorsqu'elle était entrée dans la salle de l'université Louis-Pasteur où se tenait le colloque sur l'insémination artificielle : les coquelicots de sa robe légère ondulaient comme emportés par une chaude houle entre ses fines chevilles dansantes et le lourd balancement de ses cheveux de blé roux…Fausta se trouve belle : son maquillage abricot dore de fragilité fatale ses pommettes hautes et le vert de ses yeux élargis par des touches terre de Sienne fuyant des paupières vers les tempes, où se soulève en vagues sauvages la cascade de sa chevelure rousse. »
En attendant le TGV : « Dans le sourd brouhaha ferré et vitrifié qui s'étend et s'éteint tour à tour autour d'elle, ses pas martèlent, en un menu glas d'échos prolongés jusqu'à la voute arachnéenne, le quai noir et poussiéreux linceulé de néon. »
Un très bon roman, bien écrit avec un style très personnel, pour un bon moment de lecture.