J'achète des livres.
Beaucoup de livres, souvent.
Trop pour mes déménagements, pas assez à mon goût, autant que le permettent mes finances.
Car oui, ma bibliothèque est un budget, elle a un coût (qui se multiplie avec la location d'un appartement pouvant la contenir). Je fais partie de ces personnes qui accumulent du papier (au pire ça fait isolant) tout autour d'eux.
L'argent et les mots nous parle du voyage de cet argent, du fonctionnement actuel du monde de l'édition, en une centaine de page, ce petit traité est clair et efficace ! Je vais essayer de vous en donner un aperçu mais il le fait TELLEMENT MIEUX que je vous conseille vraiment de foncer vous le procurer ! Il est paru chez La fabrique et s'il n'est pas en stock votre libraire devrait pouvoir le commander sans problème.
largent-et-les-mots.jpgCet argent part donc de mes poches et file dans les mains de mes libraires adorés… et surtout dans les poches de « l'éditeur ».
Dans cet ouvrage il n'est pas question du petit indé (coucou Matière grasse, désolée MicroLibrary) c'est pas de vous dont il est question) qui tourne à flux tendus. Ce modèle « familial » s'il est évoqué est vite abandonné pour nous parler des Groupes. Ces cétacés gigantesques qui concentrent depuis des années quasiment toutes les maisons entre les mêmes mains, celles de l'espagnol Planeta ou du français Hachette par exemple.
En soi, pourquoi pas, ainsi va le monde me direz-vous !
Moi, ça me chiffonne parce que je rêve de travailler comme éditrice-sérigraphe indépendante, mais ce n'est pas le cas de la majorité, et puis « il faut bien vivre ma bonne dame ! »…
OUI mais NON (et pas seulement parce que les livres c'est la vie)
Ces groupes ont des actionnaires, qui possèdent également d'autres types d'industries, qui rapportent plus que l'édition, ils aimeraient que tout ça s'aligne gentiment et que leur maisons rapportent les 10 à 15% exigés…
Sauf que :
on ne produit pas des godes mais des livres,
les auteurs sont lents,
le papier coute cher, que les collectionneurs le préfèrent épais, en accord avec le propos ou simplement improbable,
l'impression est un casse-tête entre offset à l'étranger, imprimerie française chère, tirages exceptionnels à la main,
les livres se vendent sur un LONG temps : n'avez-vous jamais acheté un ouvrage paru il y a des années, trouvé dans un recoin de librairie? Il n'a pas compté dans le chiffre d'affaire immédiat de la société et pourtant il a fait votre bonheur !
J'en passe, vous avez compris.
Pour atteindre ces chiffres ils se focalisent donc sur une production standardisée, consommable. On est ainsi inondé de « Young Adult » et de « polars de l'été ». Quand une petite maison, pour survivre, a besoin de se démarquer, une grosse a besoin de faire du chiffre (quantité, qualité, tout ça). Alors voir que même des éditeurs universitaires intègrent cette logique, ça fait mal au coeur. Au mien du moins.
Sur ce constat Schiffrin arrive à la rescousse : le bateau coule ? Sortez les canaux de sauvetage !
Le CNL aide à la traduction, les collectivité locales se mettent en quatre pour soutenir l'effort des petits, les gens reprennent les rotatives ! Aux encres Citoyens !
J'exagère mais il y a de ça : tout n'est pas perdu tant que le livre est une affaire de passionnés : il suffit de voir la scène florissante du fanzine. Nombre de Bibliothèques, malgré leurs impératifs de rentabilité (oui en bibliothèque, même là, ce concept moisi s'installe) relèvent les manches et achètent des livres « hors cadres » les proposent, les mettent en avant, organisent des événements…
Le gouvernement fera peut-être à son tour quelque chose, comme il a été capable de lever les boucliers pour protéger les libraires il y a quelques années ? après tout la ministre de la culture est éditrice…
J'ai lu ce livre sur les conseils de mes professeurs, messieurs, je ne vous connais pas encore, mais j'aime vos conseils !