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EAN : 9782246811305
240 pages
Grasset (08/01/2014)
2.78/5   30 notes
Résumé :
Le graffiti humiliant d’un élève aura suffi pour qu’Etienne Fusain, professeur de philosophie morose, décide de changer de vie. Il quitte travail, famille, mélancolie, et part retrouver son vieil ami d’enfance. Commence alors une errance réjouissante, cure de jouvence, d’immoralité, d’excès, de tendresse où la rencontre avec la sublime et irrésistible Lily lui donne une nouvelle chance d’être heureux.
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Critiques, Analyses et Avis (15) Voir plus Ajouter une critique
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La Feuille Volante n° 1353 – Juin 2019.

Étienne regrette – Antoine Sénanque – Grasset

Étienne Fusain, 54 ans, professeur hypocondriaque de philosophie à St Denis, a la désagréable surprise de voir graver sur son pupitre de la salle de cours « Fusain est un con ». Au vrai, c'est plutôt banal et qui n'a jamais été traité ainsi par ses semblables ? Sauf que lui le prend très mal parce que ça vient d'un de ses élèves, un anonyme qui le restera et, à force d'y réfléchir et de se torturer l'esprit, il constate finalement que la philosophie, que pourtant il enseigne et qui est censée être la science de la sagesse, ne lui sert à rien. Il ne peut s'en ouvrir à ses collègues parce qu'aucun n'est vraiment un ami digne de cette confidence et côté famille ce n'est guère mieux. Pourtant, avec le temps qui guérit tout, ce genre d'affront intime s'effacera après une parenthèse dans son quotidien convenu et ordinaire.

Son quotidien, et d'ailleurs celui de son ami d'enfance, Denis Larbeau, célibataire, plus épicurien que lui, médecin légiste et écrivain manqué (ce détail revient dans les deux romans que j'ai lus de cet auteur et d'ailleurs beaucoup de personnages plus furtifs, ont cette caractéristique), est bien morne alors pourquoi faire une fixation sur ce graffiti. Au vrai, c'est une insulte banale, sans recherche, et celui qui en est l'auteur manque cruellement d'imagination et d'originalité, pourtant c'est un signal que Fusain attendait depuis longtemps, sans même le savoir, pour changer de vie, une vie trop tranquille et insipide, faite de beaucoup de routine, de renoncements, de regrets. Il quitte donc sa femme, se fait porter pâle au collège… pour aller vivre chez Larbeau. Finalement il reste 43 jours absent de son domicile puis retrouve sa femme et ses secrets à elle aussi et bien entendu, il garde les siens. A bien y regarder, ce personnage est plus intéressant qu'il y paraît. Apparemment il a la famille en horreur, la sienne d'abord (il n'a apparemment avec sa femme et sa fille que des liens très distendus) et avec sa belle-famille c'est encore pire ( je ne sais pas qui a qualifié de « beau » ce lien juridique rarement affectif avec des gens avec qui on n'a souvent rien à voir). Il est capable de tomber amoureux d'une silhouette furtive de femme et de tout remettre en question pour Lily, une amourette d'adolescence non oubliée et retrouvée un peu par hasard, il attache à l'amitié et spécialement celle qui prend ses racines dans la jeunesse, une valeur qui dépasse le temps et l'efface peut-être… Au fil des pages il est devenu un personnage attachant.

Il est beaucoup question de mort et de suicide, mais sur un mode léger. Pour la mort c'est normal, nous sommes tous mortels et c'est présenté comme la fin normale de la vie. Il en parle sans plus de fioriture et hors des fantasmes et des peurs habituels, comme une fatalité incontournable mais pas larmoyante, sans regret pas vraiment heureuse mais en tout cas pas malheureuse. L'auteur s'en sert même d'une certaine façon pour arranger les choses de cette fiction à travers les propos de son ami Larbeau dont le métier de légiste la lui fait côtoyer. Pour le suicide c'est autre chose, c'est une décision qui en principe bouleverse le cours des choses et qui pose une multitude de questions, pour son auteur et pour ceux qui restent… Au cas particulier de Fusain on subodore un traumatisme trop présent et qui pourrit son quotidien.

L'auteur fait honneur à sa qualité de médecin, à son érudition et enveloppe tout cela dans un style enlevé, plein d'un humour subtil et pertinent ; cela justifie de nombreuses diversions qu'apparemment il affectionne. Dans ces courts chapitres j'ai ressenti une sorte de solitude individuelle de chacun des acteurs de ce roman, une sorte de malaise qui leur colle à la peau, mais que l'amitié et peut-être aussi cet intermède amoureux, parviennent cependant à cautériser.

C'est le deuxième roman que je lis de cet auteur et si le premier (« Salut Marie ») m'avait laissé une impression plutôt insipide, celui-là, au contraire m'a paru plein d'intérêt. Je crois même que je l'ai apprécié nonobstant la fin, un peu trop en forme de « happy end » mais finalement pas si invraisemblable que cela. Ce fut pour moi un bon moment de lecture. Quant aux regrets d'Étienne je les imagine...

©Hervé Gautier.http://hervegautier.e-monsite.com
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Voilà une histoire qui débute de manière assez banale : un professeur de philosophie, un graffiti, une insulte envers lui. Pas quoi casser trois pattes à un canard. Cependant, c'est ce petit rien qui déclenche le reste. Comme quoi, il en faut peu.

Si je suis pinailleuse sur certains détails, c'est que ma lecture se veut approfondie. Par exemple, Condillac le proviseur ne peut pas être en poste depuis 15 ans. C'est 9 ans maximum sauf parfois en fin de carrière avec une ou deux années de plus possible histoire d'aller au bout.
Autre détails, les phares jaunes ne sont plus si nombreux sur nos routes. On en croise encore, mais de loin en loin...
Et les cheveux ne poussent plus quand nous sommes morts. C'est une bêtise d'autant plus grande que de mettre cette affirmation dans la bouche d'un médecin, même (ou surtout) légiste. Car c'est encore l'une de ces légendes modernes ! Une rumeur qui a su se faire accepter comme un fait, la même persiste à propos des ongles… Pourtant, ni l'une ni l'autre ne sont vraies. Il faut bien comprendre que les follicules ont besoin d'être approvisionnés par le sang pour produire des cheveux. Et dès que celui-ci s'arrête de circuler, la pousse des cheveux et des poils s'arrête net. Même chose pour les ongles. Ce qui est vrai en revanche, c'est qu'après la mort, le corps commence à perdre de l'eau. Il se déshydrate. Résultat, la peau se rétracte. Au premier coup d'oeil, on a l'impression que poils, cheveux et ongles se mettent à pousser. Mais c'est seulement la peau qui s'est déshydratée.

Étienne est un personnage qui m'a fait passer par beaucoup de sentiments à son égart. Il est agaçant, stressant, gavant, touchant, énervant, antipathique, attachant... Peut-être un peu plus de négatif que de positif, mais en réalité c'était un peu plus equlibré.
Larbeau son ami m'a paru plus vivant bien qu'il travaille avec les morts. Il est étrange, mais à peine plus que cela. Sa façon de voir les choses est rationnelle, enfin presque. Il détonne sans trop se faire remarquer. Il est hétéroclite comme son intérieur.
En fait, ce roman est truffé de personnages. Souvent secondaires, mais non sans valeurs. Ils sont tous particuliers. On les croisent plus ou moins sommairement, cependant ils marquent nos esprits.

Le style d'Antoine Sénanque n'est pas complexe, mais sa lecture requiert un minimum d'attention, d'adaptation à son rythme. Chaque auteur écrit comme sur une partition. Il faut juste lire les mots, les phrases avec le bon tempo.
Pour le reste, une fois qu'on est bien installé dans le récit, tout va de soit. L'histoire n'est pas palpitante, ce n'est pas ce genre de lecture. C'est plus une ballade tranquille sur un rythme modéré, mais qui mine de rien nous en fait découvrir des choses...

Lien : http://espace-temps-libre.bl..
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Sixième livre d'Antoine Sénanque, à nouveau édité chez Grasset dans lequel on retrouve la griffe de l'écrivain : la médecine, toujours traitée indirectement mais toujours présente, il faut rappeler qu'Antoine Sénanque est neurologue et la médecine est ce qu'il connait le mieux. Denis Larbeau, l'ami d'Etienne Fusain, le personnage principal, est médecin légiste.
L'histoire débute par une crise existentielle du personnage principal, Etienne Fusain, professeur de philosophie dans un lycée à St Denis. Ce dernier touché émotionnellement par un graffiti : « Fusain est un con » remet en question toute sa vie. Il retrouve Denis Larbeau, son ami, chez qui il va vivre, qui tente de l'égayer. Ce dernier va mettre en relation Etienne et Lily, leur amour de jeunesse. Par les « précautionneuses attentions » de Lily, Etienne, peu à peu, reprend goût. Les deux hommes vont partir en errance sur les routes avec elle. de fil en aiguille, celle-ci prendra une grande place dans le coeur des deux hommes jusqu'à…enfreindre la loi. Et quelle infraction ! On ne sait par quel truculent tour de passe-passe, ils arrivent à leur fin Un peu cocasse la scène mais ce n'est qu'un roman, après tout !
Une nouvelle fois, Sénanque aborde le thème de la crise existentielle qui induit des changements de vie. Etienne regrette est peut-être le corollaire de L'ami de jeunesse dans lequel Sénanque traita du même sujet.
Une histoire simple, facile à lire, qui prête à sourire et une fin pimentée qui donne un plus au livre.

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J'attendais quelque chose de plus intéressant de l'auteur de "Blouse".C'est un sujet au départ qui semble intéressant mais ne débouche nul part.Tout est banal et impersonnel ,le. sujet,les personnages,le style.
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Quand il écrit que « les nuages sont des crachats noirs », Antoine Sénanque, dont le pseudonyme est inspiré par l'abbaye que l'on sait, trahit son statut de médecin, mais aussi son goût pour le langage.

Son premier livre « Blouse », inspiré par son métier, était fulgurant.

Depuis, Antoine Sénanque s'est essayé au roman avec un certain succès. Dans « Étienne regrette », il fait le portrait d'une crise de la « middle-life ». Étienne Fusain, professeur de philosophie, plaque tout après avoir lu le graffiti gravé sur son bureau par un élève : « Fusain est un con ».

Il retrouve alors un ami de toujours, Larbeau (voir une allusion au poète Larbaud…), un médecin légiste cynique qui va l'accompagner dans cette crise et lui présenter la lumineuse Lily, antithèse de Viviane, « la pas fée », épouse d'Étienne.

Ensuite, aventures, péripéties, réflexions sur la vie et la philosophie (qui ne sert à rien…) s'enchaînent.

Peu importe la trame du roman. Ce qui compte pour l'auteur c'est de projeter ses propres inquiétudes dans certains de ses personnages, en forçant le trait, jusqu'à la comédie féroce, voire à l'impertinence, le tout dans un style vif. Dans une interview, Sénanque parle de « mélancolie revigorante ». On ne peut mieux dire.

Le roman est dédié aux hirondelles, à la légèreté espérée, même si les personnages principaux semblent avoir raté leur envol et être devenus lourds albatros.


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Citations et extraits (28) Voir plus Ajouter une citation
Le soir, quand il franchit les portes de l’hôpital, la nuit lui sembla coagulée et les rues de Creil injectées comme des veines. Il haussa les épaules devant le spectacle particulièrement sinistre de l’Oise livide dont il devait longer le quai pour rentrer chez lui. Le fleuve n’avançait pas sous la pluie. Et d’ailleurs rien n’avançait. Les parapluies couvraient des passants raides et marchaient sans eux. Il entra dans un café et commanda un double cognac. Le patron le servit avec un « docteur » au bout. Tout le monde se connaissait dans cette ville qui lui apparut comme la salle d ‘attente d’une gare d’où les traine ne partaient pas. Il regarda les têtes autour, rougeaudes, devant les écrans où des chiffres défilaient : loto, tiercé, Euromillions… Des chèques encadrés commémoraient des victoires. Larbeau contempla toutes ces bouches à qui il manquait des mégots. Les paquets étaient ouverts sur les tables, les cigarettes grillées dehors dans les courants d’air.
Les hommes lui parurent épais et mortels.
Retour au pays des viandes vivantes, se dit-il
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Il avait depuis longtemps constaté que la philosophie ne servait à rien dans les difficultés. elle était juste inopérante. On pourrait se référer aux leçons les plus pertinentes des uns et des autres, tous siècles confondus, la souffrance était juste la limite que les principes ne franchissaient pas. La philosophie était une consolation pour homme heureux. (p. 20)
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Il recevait les notables et organisait des séances culturelles avec, parfois, lectures de ses œuvres. Il avait écrit deux ou trois recueils de poèmes somnolents sur le temps qu'il avait découvert passant, sur l'usure des jours, la patine des minutes, tout un tas de sucreries nostalgiques pour carier les dents des lecteurs et les empêcher de mordre. Comme on ne savait pas quoi lui dire, on lui disait qu'il avait du talent.
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Il avait depuis longtemps constaté que la philosophie ne servait à rien dans les difficultés. Elle était juste inopérante. On pouvait se référer aux leçons les plus pertinentes des uns et des autres, tous siècles confondus, la souffrance était juste la limite que les principes ne franchissaient pas. La philosophie était une consolation pour homme heureux.
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Combes, la linguiste, avait été la première à passer sa tête triangulaire dans la salle de classe, curiosité inhabituelle de sa part et confirmation que le flair des êtres humains surpasse celui des chiens, quand il s'agit de renifler les défaillances. (p.18-19)
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