Et en fin de compte

« Enfin de compte, on sait bien peu de chose », eh oui en fin de compte on sait bien peu des choses de la vie. C'est ce qu'effectivement constate le héros de Shabtai, Meir, qui à quarante-deux ans apprend qu'il souffre d'hypertension. Alors que sa femme considère l'hypertension comme un fait déplorable mais auquel il faut faire face sans amertume et sans s'abandonner au sentiment d'avoir subi un préjudice vu que cela ne servirait de toute façon à rien, Meier lui voit chaque difficulté et chaque ennui une erreur qui aurait pu être évitée ou une tentative arbitraire de la vie de le maltraiter. C'est le début de la fin pour cet homme qui va commencer à perdre pied dans l'existence, alors que pour nous lecteurs et lectrices ce n'est que le début d'un roman émotionnellement dense, qui va nous entraîner dans les tréfonds de l'âme humaine, avec ses sentiments de peur, de jalousie, de culpabilité, de remord,….Un puits sans fond, où le sens de l'existence est fortement mise en doute par un homme qui vit dans l'angoisse et la panique face aux réalités de la vie. Son ami Posner pourtant lui en donne une approche claire et simple , « la vie était , au bout du compte, ce que l'on décidait qu'elle devait être, c'est-à-dire que de toute façon, elle était l'expression de la volonté ou de la conception singulière de chacun….la vie en soi n'avait aucun contenu moral ni aucun but qui lui fût propre,….elle était une matière organique qui se mouvait dans l'espace et se transformait dans le temps, et même à supposer, qu'elle eût un contenu ou un but propres, nous n'aurions pu le connaître , car aucun homme n'est capable de sortir de soi et de savoir ce qui se trouve en dehors de lui, ce pourquoi la seule raison est sa raison, et la seule vérité, sa vérité…. ».

Shabtai met en scène un homme qui malgré un travail apparemment satisfaisant , un bon ami proche , une belle femme forte, intelligente, avec beaucoup plus de bon sens que lui, et deux fils, est uniquement concentré sur sa petite personne. Il est obsédé par sa santé , crève de jalousie à l'idée d'une petite infidélité commise par sa femme, alors que lui chaud lapin est constamment à l'affût de comment satisfaire sa propre libido sans grands résultats . Un bonhomme répugnant pour ma part. S'il n'est pas au boulot, chez le médecin, ou chez sa mère à bouffer , ou à reluquer les jambes ou la poitrine d'une femme quelconque, il est au cinéma ou au café. de sa maison, sa femme et ses fils il a l'air de s'en ficher royalement. Même ses parents l'énervent, pourtant quand sa mère disparaîtra dans un très court délai, les choses changeront radicalement pour lui…..

Je ne sais quoi penser de ce livre, vu que j'avais beaucoup apprécié ses nouvelles et m'attendais à une espèce de chef-d'oeuvre. Déjà le personnage principal est très antipathique . Son égocentrisme et sa recherche et ses fantasmes érotiques effrénés deviennent après un moment lassant. Même si dans l'ensemble le récit est relativement profond et analytique, la personnalité du personnage choisi qui domine toute l'histoire efface le reste. Cette insatisfaction de l'existence que porte en lui Meier, son errance dans un vide total surtout après la mort de la mère, les théories existentielles de Posner, au début intéressant s'étirent dans la seconde moitié du livre, si bien que j'ai peiné à le terminer.
J'ai trouvé certains passages longs et sans intérêt ,comme le voyage à l'étranger et ses obsessions sexuelles. Quand à la dernière partie et la fin m'ont laissée dubitative. C'est le dernier roman publié posthume de Yaakov Shabtai, considèré comme un des plus grands auteurs israéliens. J'ai encore son troisième livre à lire. Je déciderais pour mon compte de sa grandeur après cette dernière lecture.
Dommage de terminer l'année avec déception après tant de livres excellents lus cette année.
Souhaite à toute la communauté babeliote une nouvelle année heureuse, en bonne santé , foisonnante de belles lectures.