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EAN : 9782901161288
395 pages
Société d'Ethnologie (01/01/1986)
5/5   1 notes
Résumé :
Cet ouvrage reconstitue et situe dans son contexte culturel et politique la biographie d’un personnage tibétain fort controversé. Gedün Chöpel (Gedun Ch’omp‘el,1905-1951) fut, pour les uns, un religieux éminent, un savant distingué, un historien innovateur ; pour les autres, un moine qui rompit ses vœux, un agitateur politique, un agent du communisme international. L’auteur a utilisé des sources très diverses : archives diplomatiques britanniques conservées à Londre... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Cet ouvrage exceptionnel sur le Tibet de la première moitié du XXe siècle, est incontournable pour qui veut prétendre comprendre quelque peu l'histoire contemporaine de la tragédie de ces peuples.
Il est composé de deux parties différentes mais qui s'imbriquent. L'une est un historique géo-politique des années charnières de 1895 à 1951, l'autre de 1905 à 1951 couvrant la vie de Gedün Chöpel, un personnage truculent et haut en couleur. Sa vie durant, à la fin pathétique, tragique et prématurée, il tenta d'induire un trouble salvateur pour son pays, parfois avec élégance, tantôt avec provocations, dans une théocratie féodale complètement renfermée et crispée sur elle-même, souvent des plus crasseuse, dogmatique et réactionnaire, voire intégriste et fanatique, sombrant par bien des côtés dans la superstition la plus sombre. .
Le compagnon d'Heather Stoddard, Samten Karmay s'exprimait ainsi dans le documentaire radiophonique de France Culture fin août 87 "Tibet 1987", d'André Velter et Marie-José Lamothe avec la participation de Patrick Carré :
Dans les monastères nous étudions pendant des années la question de "l'impermanence", c'était vraiment n'importe quoi ! Voilà, maintenant le Tibet, c'est l'impermanence !
- Cette réplique était une réponse à l'attitude d'un moine âgé, errant dans les ruines de son monastère passé, qu'il continuait à "voir" et à décrire comme si il ne s'était rien passé, le "Tibet éternel" ! C'était lors de leur voyage en 1987.
Cette étude ethnographique nous explique comment le Tibet aurait pu faire l'économie de l'invasion des "Han", la perte de son indépendance, si il avait été vraiment habité de l'esprit d'ouverture de la tradition de celui dont il se réclame, Gautama Sakyamuni !
Le cocasse dans cette histoire, c'est qu'ils sont venus ces "lamaïste" en Occident, nous enseigner et vendre surtout ! "l'art du bonheur"* ! J'avoue pour ma part, que nous avions déjà bien assez de notre propre tradition judéo-chrétienne bien mal en point dans ses propres égarements institutionnels ! le pire de l'un et de l'autre en notre pays de France a donné de leur "copulation" ce que nous en savons**, du moins pour certain(e)s ...
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* (mais pour "d'autres vies" sans doute ! où quelque autre "paradis" !)
** voir : « le Maître dans la diffusion et la transmission du Bouddhisme tibétain en France » de Cécile Campergue
https://www.babelio.com/livres/Campergue-Le-maitre-dans-la-diffusion-et-la-transmission-du-/644762/critiques/648122
et ...
https://www.babelio.com/livres/Campergue-Le-tantrisme-tibetain-en-France/1389781/critiques/3062885
Lien : http://camisard.hautetfort.c..
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Citations et extraits (1) Ajouter une citation
Cependant, le suicide de Gedun Ch’omp’el, comme sa vie, semble s’écarter du contexte traditionnel. La cause directe de sa mort est sans équivoque l'alcoolisme. À partir de sa libération, son comportement suggère une volonté d'autodestruction. Selon J. Baechler, « l'alcool agit sur des personnalités déjà fragiles. Il a pu précipiter une évolution, il ne l’a certainement pas déterminée ». Dans le cas de Gedun Ch’omp’el, il s’agit d’un suicide tendanciel, d’une destruction progressive du sujet. Suivant toujours J. Baechler, le suicide est « un comportement plutôt qu’un acte limité », une « affaire personnelle et individuelle par excellence : exprimant toute personnalité affrontée à une situation particulière », qui produit « une réponse logique à un problème ».
Où résidait donc la fragilité du « mendiant amdowa » ? Réhabilité, courtisé par les grands du « Pays des Neiges », entouré de disciples, de jeunes nobles progressistes, il n’avait plus de soucis matériels. Comme le dit Rahul, le moment était venu pour lui de commencer à concrétiser son engagement. Mais il avait servi de bouc émissaire, subi des sévices humiliants, constaté la disparition injuste de ses précieux documents, élément central dans sa conception du nouveau Tibet. Tout cela, après s'être forgé, au long des douze années d’exil en Inde, l'image de « quelqu’un qui serait utile pour le Tibet », un Tibet moderne, mais profondément tibétain, dont il rêvait sans pouvoir communiquer son rêve à ses compatriotes.
p. 288

Dans la société bouddhiste, le désespoir, le dégoût de la vie sont canalisés, ils deviennent un puissant instrument d’éveil spirituel. L'objectif de Gedun Ch’omp’el était en revanche l’éveil politique des Tibétains. Il se rendit finalement compte que ceux-ci n’étaient pas prêts, que la majorité d’entre eux était foncièrement opposée à tout changement et ignorait le danger imminent. Parmi les élites, ceux qui tentèrent d’améliorer les perspectives politiques du pays cherchaient à se servir de lui pour se maintenir au pouvoir. Ses rapports avec sa société, dont il était l'otage, devinrent insupportables. Par-delà le rôle de lama érudit et vénéré qui lui fut imposé, il tenta de communiquer son message. Seuls quelques-uns étaient capables, de par leur expérience personnelle du monde, de l’écouter, mais ils ne détenaient aucun moyen d’agir face à l’imposant édifice religieux, face à l'égoïsme de la noblesse. Il vécut l’effondrement, l'un après l'autre, des projets de changement politique, élaborés par ses amis devant l’aveugle résistance du gouvernement.
Il avait consacré sa vie à la transformation de la société. La société le méconnut, le refusa. Le rêve du révolutionnaire s’effrita autour de lui. Il était isolé, peut-être de par sa naissance, de par sa naïve franchise et la grandeur même de son esprit, de par sa triple identité : de savant profondément versé dans sa tradition, de « saint fou » détaché du monde, et d’esprit moderne et critique. Il était « ivre d’avoir bu tout l’univers ».

7. L’homme Gedun Ch'omp ’el.

Dans la perspective de situer Gedun Ch’omp’el à l'intérieur du contexte tibétain, doivent être pris en considération la richesse de sa personnalité, les divers rôles qu’il joua et les périodes successives de sa vie. Si les descriptions et les récits contradictoires abondent à son sujet, cela tient tout autant aux milieux culturels différents auxquels appartiennent les témoins qu’à la complexité même de l'individu et à sa capacité d’adapter son discours aux besoins et aux intérêts de son interlocuteur.
Parmi les traditionalistes, on distingue deux groupes : les disciples religieux, qui le considèrent surtout comme un maître illuminé, non soumis aux considérations politiques et mondaines, et les gelugpa orthodoxes, qui réfutent sa position philosophique et se sentent offensés par sa critique de la tradition. Ces derniers sont par définition hostiles à. la laïcisation du système politique, ainsi qu’à la forte tendance à l'individualisme qu’il manifestait.
p. 289
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