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EAN : 9782709658829
155 pages
J.-C. Lattès (28/02/2018)
4.36/5   36 notes
Résumé :
C'est dans le Gaîté-Palace, un cinéma de banlieue laissé à l'abandon, que Mohamed, ébéniste au passage du Grand-Cerf, revisite sa vie, celle de ses parents et, surtout celle de son jeune frère, Lyes.Ses souvenirs se figent puis se glacent d'effroi lorsqu'Aïcha, la mère, décide de fêter les vingt ans de Lyes dans son village natal en Algérie, pendant les années barbares. Lyes ne fêtera jamais ses vingt ans. Le jour de son anniversaire, Mohamed et Lyes tombent dans un... >Voir plus
Que lire après La vérité attendra l'auroreVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (22) Voir plus Ajouter une critique
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Mohamed est un artiste ébeniste installé à Paris, passage du Grand-Cerf. Père et mère (des émigrés de la première heure... un père travaillant dur -et ne supportant pas sa «nouvelle colonisation»- dans une usine d'équarrissage de peaux et une mère passant son temps à dépenser l'argent amassé durement auprès des vendeurs de babioles) décédés. Il vit seul, célibataire, goûtant de temps au temps aux joies des amours passagères. Heureux en apparence mais malheureux comme pas possible. Car, il a eu deux vies... totalement contraires.

Une enfance et une jeunesse presque heureuses (à noter que sa maman vivait comme une malédiction d'avoir mis au monde un rejeton avec une tête à s'appeler Patrick... une tête de roumi et des yeux clairs), avec une scolarité en dents de scie, assez médiocre car plus porté sur l'art du travail sur bois... et, surtout, sur la jeune et belle Nelly (fille d'un «ancien d'Algérie» revenu en France «avec le dégoût de tous les Mohamed»), qu'il aimait et qui l‘aimait. Des pelles roulées à pleine bouche, en veux-tu en voilà ! En attendant bien plus et bien mieux quand ils seront grands... et, aussi, un jeune frère, Lyès, qu'il protège, le chouchou de maman, un «intello» qui a réussi sa scolarité les doigts dans le nez, bien plus porté sur la réflexion et le rêve que sur l'agir.

Un jour, c'est le départ en famille pour l'Algérie. Vacances d'été et visite au «bled». El Kseur... Cap Carbon... les joies de la mer... le retour tardif... la nuit... la panne de la voiture (le tacot du papa)... le drame... Tout va alors basculer. Ils avaient oublié que le pays était alors en pleine période de terrorisme.

le lecteur trouvera en lisant l'ouvrage un déroulé presque incroyable d'événements ainsi que les conséquences des faits survenus et qui bouleverseront les vies des uns et des autres, en Algérie et à Paris. D'autant que, bien plus tard, Mohamed va croiser, par hasard, Nelly sur les lieux mêmes de leurs premiers baisers (une salle de cinéma, of course !). Bien sûr, l'amour (de jeunesse) finira par triompher (ou presque). Mais la famille, elle, va subir un sort moins heureux... cassée par le terrorisme de la décennie noire qui, profitant des «bienfaits» de la loi d'amnistie de 1999, va se continuer, sous d'autres formes, dont le salafisme. Plus soft, pratiquant l'entrisme tous azimuts, et pernicieusement dangereux pour l'équilibre de la société.

C‘est pour cela que l'auteur (du roman) nous gratifie de passages consacrés à une description assez (sur-) réaliste (quelque peu déplacés à mon avis, car exagérés et se limitant aux propos et aux comportements «populaires» et «populistes» recueillis ou vus ça et là… à l'aéroport, à l'hôtel, en taxi, dans la rue...)... de la ville (Alger) et du pays, la «paix» retrouvée. Très compréhensible de la part d'un visiteur, simple passager venu d'un «autre monde» fait d'art et de libertés... d'un visiteur traumatisé par des «chocs» ayant mis à mal bien de ses certitudes.
Avis : Pour un conteur, c'est un conteur. Un très bon conteur même qui arrive à vous garder «scotché» à un récit à rebondissements, souvenirs d'enfance et de jeunesse, vie d'émigrés (en France), art, amour... et terrorisme mêlés... et beaucoup (un peu trop ?) d'Algérie. Se lit d'un trait.
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Akli Tadjer, livre après livre, ne cesse de me toucher. Empathie immédiate pour ses personnages, savant dosage d'humour, de mélancolie et de sensibilité. L'air de rien, il parvient avec justesse à dire beaucoup de choses sur notre époque, tiraillé entre deux cultures. J'ai eu le plaisir de discuter avec l'auteur, ses romans sont à son image chaleureux et attachants.
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Coup de coeur pour un très bon bouquin. Et pas parce qu'Akli est un ami mais parce qu'il le vaut bien.
Sa vérité n'a pas attendu mon aurore, j'ai terminé avec délectation son dernier roman dans la nuit. C'est d'ailleurs toujours un peu son truc, il prend son lecteur par la main et ne la lâche plus. Une insistance qui n'a rien de déplacé puisqu'elle nous donne le plaisir de voir du pays. Ou de ses pays, plus exactement. Alger me manque. Je ne la reconnaîtrais pas.
Une autre habitude que l'on prend à lire (ou à relire) Akli Tadjer: cette confirmation si besoin était que l'art du récit ne s'accommode jamais des pesanteurs du style, lourdement vêtu de vains effets. Ça semble d'ailleurs si naturel chez lui cette manière de mettre à nu les mots. La narration est limpide, le sentiment précis, la vérité juste et fragile, même si l'auteur trouve toujours les chemins les plus poétiques pour nous y conduire, de surprises en surprises.
L'histoire… Et quelle histoire partagée entre les deux rives de notre Méditerranée, quels rebondissements entre violences et répits, avec ses parenthèses, ses accélérations, ses ruptures et ses destins mêlés. Ses reniements, ses silences, ses oublis, ses mensonges et, toujours, pour un temps, ses réconciliations. Comme une histoire de famille. Comme une histoire de roman, ou de « mentir-vrai » comme nommait Aragon le fondement du récit.
La « schizophrénie normale » de Tadjer qui fait obstinément le pont entre nos deux cultures algérienne et française fait tilt à chaque fois. Ses personnages écartelés, le brillant Lyes, modèle d'intégration qui chute dans l'extrême, Mohamed, ce rejeton dont les questionnements incessants soulignent une exigence morale bien souvent douloureuse, Houria la rebelle qui ne cherche qu'un vrai père, la Juliette de passage, la Nelly à jamais pour toujours.
Toute vérité est bonne à lire, jugez-en par vous-même.
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Mohamed est ébéniste au passage du Grand –Cerf à Paris .Il n'a pu résoudre l'énigme, la grande douleur de la disparition de son frère Lyes. Celle-ci est intervenue pendant les années de la guerre civile qui opposa les Islamistes du GIA à l'armée algérienne, causant la mort de plusieurs centaines de milliers d'Algériens .Le roman débute par la description d'une photo prise le 11 août 19993 au Cap Carbon, station balnéaire située sur la corniche kabyle .Mohamed a nourri, on l'apprend par la suite, de grands espoirs pour son frère, promis à une carrière brillante en préparant une grande école , un modèle d'intégration réussie …C'est leur mère, Aicha, qui a décidé de célébrer l'anniversaire de Lyes dans son village natal à Kseur . Vingt-cinq ans plus tard, Mohamed reçoit sur son compte Facebook un message d'une certaine Houria, dont on apprendra plus tard à la fin du roman, ; qu'elle a des liens de parenté avec Mohamed : il est son oncle .Pourtant, ce qui est décrit dans ce tendre roman, c'est le pouvoir de la nostalgie : celle de l'enfance de Mohamed à Gentilly, dont le cinéma le Gaîté-Palace est le coeur des souvenirs, des filmes vus avec Nelly, une amie de l'époque dont Mohamed est toujours resté très amoureux . Nous nous construisons avec nos souvenirs d'enfance, et ne pouvons nous permettre le luxe de les évacuer : « Longtemps, j'ai déserté mes souvenirs d'enfance parce que je les savais maussades comme un ciel de banlieue. Maintenant que Nelly m'est revenue, il me semble que ma petite vie ordinaire avait quelque chose d'insouciant de léger, d'heureux, presque. » Ce bonheur familial, Mohamed y a difficilement accès : il ne parvient pas à aimer sa mère qu'il appelle d'une manière froidement distanciée « la mère ».
On discerne aussi dans ce roman une chronique des rapports familiaux : le père de Mohamed, tanneur, s'épuise au travail. Souvent en conflit avec Aïcha, il s'irrite de ses achats excessifs, ce qui provoque la haine de Mohamed pour sa mère .Ce père souffre, aussi, du sort des travailleurs algériens : contraints de « gagner sa croûte par-delà les mers, chez les anciens maîtres (…) En quelques mois, mon père était passé du statut d'ancien colonisé à celui de nouvel immigré. » Ainsi, Takli Tadjer évoque-t-il en fait cette situation de la double culture, de la double appartenance qui impacte, qu'ils le veuillent ou non, qu'ils le revendiquent ou non, « cette schizophrénie normale «, selon le juste mot de l'auteur .On ne dévoilera pas la fin du roman, si ce n'est pour indiquer qu'elle laisse la porte ouverte au principe de l'espérance
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Le narrateur, Mohammed, vend la maison de ses parents. A cette occasion, les souvenirs remontent, accompagnés d'une enveloppe de photos. Son père, ouvrier dans une tannerie, a quitté l'Algérie colonisée pour venir être exploité en France. Qui n'a d'yeux que pour Lyès le fils ainé, Nelly, Ines, les amis…
Et puis, dans les années 90, Lyes allait avoir 20 ans. Mais il ne fêtera jamais son anniversaire….Mohammed reste hanté par les souvenirs de ce qui leur arrivera ce jour-là, à lui et à son frère. Il y a un avant, et un après. Il faut se reconstruire, laisser le temps faire son oeuvre, mais la faille est toujours là, sous la carapace.
Le temps, il en est souvent question, des souvenirs, de la mémoire, du travail pour oublier ou pardonner. Mais le temps n'efface pas la douleur et la culpabilité.
Vingt cinq ans plus tard, les souvenirs ressurgissent avec d'autant plus de force que des indices le mettent en contact avec un(e) inconnu/e semblant les connaitre, lui et son frère…
Que va-t-il retrouver sur les traces de son passé ?

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Citations et extraits (27) Voir plus Ajouter une citation
Tout était à refaire.Nous avions essayé de rempiler le lendemain soir, mais sans le whisky et sans les mots qu’il faut pour s’aimer nos corps avaient refusé de s’aimanter. Il était sage de ne plus poursuivre.Le garçon dépose le verre devant moi. Je bois une gorgée puis tout le reste d’un trait. Passé minuit, le whisky n’a rien d’euphorisant ni d’anesthésiant, il fait mal à la nuque et vous renvoie au point de départ. Nelly.Hier, elle n’était qu’une ombre perdue aux confins de nos sentiments inachevés. Il a suffi d’un regard pour que tout s’embrase à nouveau.« Un autre, monsieur ? »J’ai les tempes qui battent, la bouche pâteuse, je renonce. Je suis dans mon lit, mon ordinateur calé sur mon oreiller. Les yeux brûlés de fatigue, je poursuis inlassablement mes recherches. Il faut que je la retrouve sinon elle va alimenter mes insomnies pour des mois. Facebook. Je réveille mon compte que j’avais désactivé car, avec quinze amis – des commerçants du passage –, ma solitude m’apparaissait d’autant plus cruelle.
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 Whisky. »Il obtempère.Ça fait une éternité que je n’en ai pas bu. La dernière fois, c’était une nuit mouillée comme celle-ci. J’étais avec Juliette dans sa boutique de luminaires. Elle m’avait invité à prendre un verre parce qu’elle avait le gros bourdon. Son homme avec qui elle n’entretenait plus qu’une relation à temps partiel avait décidé de rompre sans préavis. Nous avions bu, beaucoup, dit des bêtises, beaucoup. Possible qu’une fois que l’alcool nous eût grisés, on ait dit qu’on ferait un bout de chemin ensemble et qu’avec un peu de chance nous pourrions pousser l’aventure, voire finir par nous aimer. Puis je l’avais entraînée dans mon atelier, nous avions basculé sur le divan qu’un psychanalyste m’avait abandonné après avoir pris la poudre d’escampette avec une de ses patientes, et ç’avait été de furieuses chevauchées jusqu’à épuisement de nos corps.
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Je me souviens qu’une jeune femme me soignait une blessure près de l’oreille avec une compresse imbibée d’eau de Javel. Elle s’appelait Safia. Je me souviens de ses mèches rousses échappées de son foulard noir. Je me souviens de sa peau cannelle, de ses yeux clairs comme le ciel, de son nez de Cléopâtre, et de ses longs doigts faits pour jouer Mozart. Je me souviens de nos sourires complices échangés furtivement et j’entends encore sa voix de jeunesse chanter des complaintes tristes. Je me souviens qu’elle m’avait confié avoir été enlevée dans son village, à Bousoulem, pendant qu’elle gardait ses moutons ; on l’avait offerte à un Combattant de l’Islam qui l’avait rejetée sitôt violée. Je me souviens qu’elle préférait rester à faire la bonniche ici plutôt que d’affronter l’opprobre de son père et de ses frères maintenant qu’elle n’était plus vierge.
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Je prends sa main. J’enlève son manteau lentement. Elle baisse les yeux. Je l’attire à moi. Elle ne résiste pas. Je sens la chaleur de sa peau contre ma peau, et ses doigts se posent doucement sur mes joues mal rasées. J’effleure sa bouche de mes lèvres avant de l’embrasser tendrement comme au jour de notre premier baiser. Elle dit qu’il ne faut pas. Je prends son visage à deux mains et l’embrasse encore, les yeux fermés, pour mieux sentir le goût de ses lèvres. Elle répond avec le même feu. Je caresse ses cheveux, sa nuque, ses seins – ils sont lourds comme il y a vingt ans. Je déboutonne son chemisier, et continue d’explorer son corps à l’aveugle. Elle dégrafe sa jupe. Je la plaque contre le mur. Je caresse ses cuisses et ses fesses qu’elle m’offre. Un frisson parcourt le creux de ses reins. Je la retourne, la pénètre, je suis en elle.
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J’essaie de deviner ce qu’aurait donné notre histoire si la vie avait été douce et généreuse avec nous. Je n’y arrive pas. La vie n’est ni douce ni généreuse. Il y a des instants de bonheur ou de chance qu’il faut savoir saisir et c’est déjà beaucoup. Le reste n’est que débrouille pour la bouffe, pour la baise, débrouille pour oublier les fantômes qui vous hantent, débrouille pour survivre aux nuits blanches, débrouille pour s’occuper l’esprit avant le point final.« Tu ne dis rien, Mohamed. Ça ne va pas ? »Je réponds d’un ton faussement enjoué que je vais bien puis je demande si sa vie va et si elle a des enfants.Sa vie va. Elle achète et retape des vieux bâtiments industriels qu’elle revend avec de belles marges de bénéfice. C’est son premier mari, marchand de biens, qui l’a initiée au métier.
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Vidéo de Akli Tadjer

Rencontre avec Akli Tadjer au Furet de Lille - 19/01/2012
Akli TADJER « La meilleure façon de s'aimer » Ed. Jean-Claude Lattès L'auteur parisien revient vers son public, après Le Porteur de cartable, avec La meilleure façon de s'aimer. Akli Tadjer mélange encore une fois l'humour et la tendresse pour nous servir une histoire poignante, celle de Fatima et de Saïd, son fils, jeune parisien vif et malicieux, qui n'ont jamais su se dire « Je t'aime ».
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