AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
EAN : 9782259305013
480 pages
Plon (10/09/2020)
3.06/5   60 notes
Résumé :
« Le monsieur à toge et épitoge a déjà tourné les talons. Il semble à sec sur le contenu, alors il pallie par le ton. Il interroge à la mitraillette. Il veut du oui ou du non, pas un roman. Lui, Kerma, a envie d'expliquer, non, on ne vit pas tout un mois avec mille cent trente-six euros. Dès le dix-huit du mois, oui, on a besoin, et presque chaque jour, de ces quinze euros. L'essence, l'assurance, la nourriture, rester correctement vêtu et chaussé, après avoir payé ... >Voir plus
Que lire après Gran BalanVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (20) Voir plus Ajouter une critique
3,06

sur 60 notes
5
2 avis
4
8 avis
3
6 avis
2
1 avis
1
1 avis
Gran Balan est un texte écrit d'une plume magistrale. À travers un procès, Christiane Taubira nous fait découvrir la Guyane, son histoire, sa culture, sa société.
Une vision d'un pays qui ressemble à la France par sa langue, ses voitures, ses entrées de ville mais n'en a pas la mentalité. Un pays aux multiples cultures : bushningues, les amérindiens, les créoles. Où la jeunesse à du mal à trouver sa place et n'a que peu d'espoir.
J'ai beaucoup aimé tous ses mots : noms de lieux, plantes, fêtes qui m'ont bien dépaysée. Ces histoires incroyables ou amusantes. Ces coutumes : le paré-masqué, le tololo, le carnaval, les superstitions.
L'auteure nous offre une belle réflexion sur la justice. Un texte de qualité avec de nombreuses références littéraires, musicales, des citations, j'avoue que je n'en attendais pas moins de la part de cette passionnée de littérature. Mais Christiane Taubira nous offre aussi un plaidoyer pour un pays qui a subi l'esclavage, la colonisation et qui oscille entre une mondialisation dont il n'a pas les clés et ses racines.
Un voyage confiné que je conseille à tous.
Rentrée littéraire 2020 – Plon
#Gran Balan#NetGalleyFrance
Commenter  J’apprécie          505
« Gran Balan » Christiane Taubira (360 pages, Plon).
Quel dommage !
Voici pourtant une remarquable plaidoirie, enthousiaste, très éloquente, pleine d'empathie, d'une belle révolte et d'une saine colère, parfois bouleversante, généreuse et très engagée à laquelle on ne peut être insensible. Une plaidoirie pour ce D.O.M., la terre de Guyane ; pour sa forêt, ses fleuves, ses odeurs, ses couleurs, ses sons. Une plaidoirie de solidarité profonde avec une population pauvre, si souvent humiliée, avec une jeunesse condamnée au désoeuvrement, pour laquelle il est si difficile de s'imaginer un avenir. C'est aussi un hymne à la langue créole colorée, si chantante et dépaysante à laquelle Christiane Taubira fait une large place. Et lorsqu'elle n'use pas du créole, son écriture de femme cultivée, pleine de références est exigeante, protéiforme, gouleyante, très riche (parfois trop ?) Et puis c'est une belle galerie culturelle où défilent des coutumes, une cuisine, une flore et une faune, des poètes, des chanteurs (on peut sur internet découvrir des concerts de « la grande, belle et digne Josy Mass, reine indétrônable du lérol et du Kanmougwé »), des femmes courage, femmes de peu mais si fortes, si dignes.
Et c'est encore un plaidoyer contre les méfaits du colonialisme d'avant-hier et d'hier, un rappel de l'histoire régionale (qui dépasse la Guyane et englobe ses voisins), et de toutes ses horreurs. Mais aussi contre l'emprise coloniale d'aujourd'hui. Contre les jeux et les abus de pouvoir de l'administration et de la fonction publique et de leurs agents importés de métropole à grands frais, au mépris des locaux à qui l'on ne laisse entrevoir que des postes subalternes. L'avant dernier chapitre, centré sur la crise sociale qui secoua la Guyane au printemps 2017 est un vrai reportage, où l'auteure démonte les coulisses du conflit, comment l'Etat français a su, dans une pirouette, se débrouiller pour favoriser de puissants intérêts miniers bien peu légitimes (j'ai juste trouvé assez surprenant que les seuls responsables politiques qui trouvent grâce aux yeux de Christiane Taubira soient les deux jeunes et nouveaux ministres envoyés sur place en mars 2017... ministres d'un gouvernement dont elle faisait partie comme garde des sceaux un an plus tôt). Quant au compte-rendu de procès qui clôt le livre, Christiane Taubira fut assez longtemps aux premières loges pour témoigner avec réalisme d'un système judiciaire qui broie les plus humbles, (ah quelle scène finale poignante en pleine cour d'assise !)
Toutes ces qualités font que si un jour j'ai la chance d'aller là-bas, je glisserai certainement ce livre dans ma valise, pour mieux comprendre et m'approcher avec sensibilité de cette Guyane, de ce monde si proche, et si loin de la métropole.
Et alors, quel est donc le problème ? C'est que là-dedans, le roman, ou le projet même d'un roman est totalement absent. Il n'y a pas d'histoire (le scénario complet ne semble qu'un prétexte et tient en deux lignes), ni aucun rebond narratif. Les descriptions ethnologiques sont exhaustives (par exemple, le chapitre 2 supposément centré sur le personnage Hébert, compte 41 pages, dont 38 de pure description du carnaval local, mode «lonely planet» en plus sympathique et plus vivant). Pire, il n'y a en fait pas vraiment de personnages, ils sont totalement transparents, sans épaisseur, l'auteure ne leur laisse aucune place, elle s'impose, ou s'interpose partout, entre eux et le lecteur. Elle nous livre ses propres commentaires politiques, sociaux et culturels (très intéressants au demeurant), en les mettant maladroitement dans la tête des personnages, voire dans leur bouche, dans la bouche de jeunes qui n'ont pas son parcours, ce qui fait assez « décalé » ... Ils ne sont que les faire-valoir de l'auteure, qui surplombe en permanence le récit. La dimension romanesque est ainsi totalement diluée. Parler ici de roman tient de la publicité mensongère. « Gran Balan » propose en réalité une sorte d'excellente et longue soirée thématique de la chaine Arte. Quant au « premier roman de Christiane Taubira », le vrai premier roman, on espère le lire un de ces jours.
Commenter  J’apprécie          235
Le jeune Kerma se retrouve au tribunal accusé d'avoir transporté dans son taxi clandestin, des amis malfaiteurs pour les amener sur les lieux d'un braquage qui a mal tourné. Kerma aime simplement rendre service rien de plus et le voilà entraîner malgré lui dans une affaire de meurtre.

Ainsi commence le livre de Christiane Taubira, tout le monde connaît la verve de l'ancienne ministre de la Justice, et dans son roman on retrouve toute cette éloquence, cette ardeur, cette chaleur pour nous parler de sa terre natale, un récit coloré, vivant, mais aussi un portrait sans concession de ce pays gangréné par le chômage, le racisme, le manque d'infrastructures et la violence. L'insécurité un véritable fléau, trafic d'armes de drogues, violences gratuites, l'emploi plus rare qu'un 30 février. L'occasion d'évoquer le faible attrait de l'école, l'échec des structures d'insertion professionnelle, de l'ennui, du manque de loisirs, l'attrait de faire la mule pour les trafiquants de drogue, l'argent facile.

Bienvenue au pays des mensonges de bonne foi, dont les rues se transforment pendant deux mois en une liesse païenne où le clergé en prend pour son grade et sa réputation avec des femmes qui le temps du carnaval prennent le pouvoir, elles envoûtent, toutes en séduction, elles sont sensuelles, voluptueuses, libertines, voir lubriques.

Accompagnés par un éducateur, des garçons et de filles, lors des veillées, parlent du passé, de l'esclavage, des ancêtres, des relations entre les familles créoles et les Amérindiens en provenance du Surinam ; la ruée vers l'or, des siècles de misère et de souffrance, du rôle discret, mais primordial des femmes qui ont tissé avec leurs mains le destin des grands hommes. Des mamans créoles qui aujourd'hui plus que jamais veulent faire de leurs enfants des adultes exemplaires.

Mais ces conversations se transforment vite en bavardage et je dois reconnaître que j'ai eu beaucoup de mal à m'immerger dans ce livre qui n'est pas vraiment un roman, entre traité historique et documentaire, les personnages sont secondaires et ils s'effacent rapidement au profit des idées qui foisonnent trop peut-être, c'est un peu fouillis. Reste une grande fresque sociale écrite avec le coeur.
Merci infiniment aux éditions Plon et à Babelio qui m'ont offert l'opportunité de lire ce livre.



Commenter  J’apprécie          253
Hasard du calendrier, je lisais le premier "roman" (je m'expliquerai des guillemets plus loin) de Christiane Taubira au moment où elle a fait son intervention pour ouvrir la porte au statut de présidentiable que lui prêtent beaucoup de ses partisans depuis des années.
Autre hasard du calendrier, je disais justement à mon fils l'autre jour : "tu sais, il faut se méfier des livres écrits par des gens célèbres. Souvent, les éditeurs les publient non pas parce qu'ils sont bons (même si ça peut arriver), mais parce qu'ils ont été écrits par des gens célèbres, et qu'ils attendent - non sans raison - beaucoup de ventes pour ce motif."
Avant tout, je précise une chose importante : je ne suis pas là pour "me faire" Christiane Taubira. C'est une dame intelligente, cultivée et courageuse, elle est de mon bord politique et si d'aventure elle se présentait à la présidentielle, il se pourrait bien que je vote pour elle. D'ailleurs, son amour du peuple et des petites gens (critère numéro un en ce qui me concerne pour une personnalité politique) ne transparaît que trop clairement dans son livre.
Et pourtant, je ne l'ai pas aimé, mais alors pas du tout. Revenons déjà sur l'escroquerie principale, constituée des 5 lettres du mot roman, inscrites en lettres italiques et en tout petit sur la couverture, comme si on en avait un peu honte.
Non, ce livre n'est pas un roman.
C'est au mieux un assemblage de nouvelles très politisées avec bien peu de liens narratifs entre elles et de nombreuses digressions politiques et d'opinion, au pire un essai déguisé avec des éléments de narration.
Dans toute cette soupe bien confuse, par ailleurs fort bien écrite (mais ça, ce n'est pas surprenant, c'est précisément par une capacité hors-normes à élever le débat par son niveau d'expression bien au-dessus de la pâle moyenne des personnalités politiques que Mme Taubira s'est forgée un statut de présidentiable), il surnage quelques passages très intéressants, comme la visite de l'éducateur Pol-Alex Hossi dans un établissement pénitentiaire pour mineurs en pleine brousse, ou la plaidoirie de l'avocat de la défense tout à la fin... Des moments trop rares hélas pour donner un intérêt réel à cet ouvrage décousu, dont j'ai dû sauter de nombreux passages et en lire bien d'autres en diagonale, tant c'était rempli de défauts rédhibitoires en ce qui me concerne : passages du coq à l'âne, digressions politiques décrochées de la narration, dialogues dénués d'intérêt, personnages non incarnés.
On sent bien entendu l'amour de sa Guyane, on comprend les injustices coloniales dont certaines perdurent jusqu'à aujourd'hui, le manque de perspectives, le désespoir de cette jeune population, tout cela aurait pu être passionnant, si seulement elle n'avait pas cherché à en faire autre chose qu'un essai.
Mme Taubira est une femme brillante, mais ce n'est pas une écrivaine de romans.
Et le pire, c'est que je soupçonne qu'elle est parfaitement consciente de tout cela, j'en veux pour preuve sa dédicace finale à l'adresse de son éditeur - je suppose -, dont elle loue "l'enthousiasme déraisonnable."
Commenter  J’apprécie          132
Quelle écriture, mais quelle écriture !!!

On est immergé dans la Guyane d'aujourd'hui et d'hier, au travers de ses coutumes et de son histoire.
Moi, je suis de métropole, et cela m'a passionnée d'en apprendre plus sur mes compatriotes guyanais. Pourquoi n'apprend-on pas l'histoire des colonies françaises? Parce qu'il faudrait aussi expliquer l'esclavage ?

C'est un cri de colère aussi, celui de la jeunesse abandonnée par le pouvoir central parisien... au travers de l'histoire de Kerma, on navigue entre son histoire personnelle et celle de cette province lointaine.

J'ai beaucoup aimé, le seul bémol, c'est que je me suis un peu perdue par moment, mais franchement aucun regret, Christiane Taubira m'a embarquée en Guyane et c'était magique !
Commenter  J’apprécie          200

Citations et extraits (35) Voir plus Ajouter une citation
Il s'avisa que ce qui lui manquait le plus douloureusement, c'était de ne pas être pris dans le halo d'énergie et de vibration d'un corps, d'autres corps, amis ou inconnus, de ne plus toucher personne, même dans un accrochage, ne prendre personne dans ses bras, ne plus s'attarder sur un pied nu, des orteils irréguliers, ne plus limer et couper les ongles d'une femme, ne plus croiser des yeux inquiets même lorsqu'une bouche sourit, ne plus voir sourire cette bouche, ne plus repousser
l'arrête d'un coude dans ses côtes, ne plus sentir
s'estomper le souvenir de la sensation d'une langue humide, savoir le monde peuplé de milliards de personnes et se sentir seul parce que les huit ou mille merveilles du monde, ses monuments et ses lacs, ses jardins et ses soucoupes volantes, ses tours et ses cimes, ses cités antiques et ses musées futuristes, ses pyramides et ses stations spatiales, n'enjolivent ni n'adoucissent les orphelinats, pas plus qu'elles ne vaudront l'odeur brute d'un homme, moins encore la fragrance d'une femme et qu'elles ne feront pas chanter la pierre car l'oiseau n'atteint à sa note divine que parce que s'y prête une oreille humaine.
Commenter  J’apprécie          110
_ Il ne s'agit pas de trafiquer la vérité. Il s'agit de comprendre qu'une situation peut être perçue diiféremment, selon la position ou parfois simplement selon les règles qu'on s'est données dans la vie.
__ Facile, quand même. Y a plus de raison, y a plus de tort.
C'est une autre fille qui venait à la rescousse.
_ Vous le prenez pour une facilité, asséna Hossi, ce n'est pas une facilité, c'est au contraire une difficulté. Cela remet d'abord en question vos propres vérités. Cela vous oblige à entendre que quelqu'un d'autre, que ce soit un adversaire ou un simple observateur, quelqu'un d'autre peut voir une situation autrement que vous. C'est justement cette possibilité d'un autre point de vue sur la même chose qui fait que la vie sociale est possible, que la confrontation n'empêche pas la relation.
_ Dans ce cas, on ne tranche jamais, tout le monde a raison ou ses raisons, insista la première déléguée.
_ Tout le monde peut avoir un avis, mais tout le monde ne peut avoir raison, rectifia l'éducateur.
_ Bon courage, messieurs les juges ! ironisa une troisième fille.
Commenter  J’apprécie          80
Restituant les images évoquées, il précisa que, dans le langage de l'Obiaman, la longue tirade qui avait fait œuvre de conclusion ouvrait une belle part à l'influence des esprits dans l'infortune de son peuple, les esprits étant inquiets de la déperdition des connaissances et pratiques traditionnelles : "Tu vois, si tu coupes les branches de l'arbre, elles vont repousser, plus vaillantes, mais si tu déracines l'arbre pour le replanter plus loin, il faut du temps pour qu'il reconnaisse la terre et que la terre le reconnaisse ; en attendant il maigrit, il voit sortir des tâches sur ses côtes, parmi ses branches y en a qui se tordent, ses fruits deviennent surs un temps, car quand tu n'es pas fort, tu es faible ; alors il faut changer ses habitudes, arrêter de courir après les fantômes des whiteys, les Blancs, et après leurs maladies, l'argent, l'or, la bauxite ; il faut se reprendre et attendre le moment où Dieu Masa Gadu va juger que tes repentirs sont sincères et suffisants et va décider de ramener la victoire chez toi."
Commenter  J’apprécie          71
Ce sont ces femmes, souvent soumises aux abus d'autorité, au harcèlement, aux violences à une époque et dans des endroits où l'on considérait toutes ces choses comme allant de soi, ce sont elles qui décident. Elles décident qui danse et qui fait tapisserie toute la nuit. Elles décident avec qui elles dansent. Lascivement ou prudemment. Voluptueusement ou sagement. Le cavalier choisi ne peut que trébucher dans l'embuscade. Elles l'appâtent à leur guise, le séduisent ou simplement l'embrasent. Elles conquièrent ou aguichent. Elles sont reines. Elles sont sorcières. Elles leur damnent l'âme. Elles peuvent faire mijoter un homme toute la nuit, en alternant une danse pour lui, une autre à l'autre bout de la piste avec un autre, avec d'autres. Ce sont elles qui réservent la dernière danse. Et la suite. Si, et seulement si, elles veulent qu'il y en ait une.
Commenter  J’apprécie          82
On l'a su bien après : cette fin-finale-fatale du maître ne serait due ni au hasard ni à son consentement, mais à l'énervement du Diable qui déteste passer pour un âne. Or, la dernière fois qu'il était venu chercher son tribut, l'enfant esclave, que le maître avait voué au sacrifice en lui remettant un livre et en l'assignant à attendre une dame imaginaire, était bien là assis sur le banc, mais il tenait, à la place du livre, un crucifix en fer qu'il brandit face à l'étrange créature qui l'approcha, en psalmodiant :
_ Baka la main, baka mon crucifix ! comme le lui avait indiqué sa maman qui avait procédé à la substitution.
C'est le seul enfant esclave qui était revenu de ces sinistres expéditions nocturnes où l'épaisse obscurité avait englouti tous les autres. Le maître ne s'en était pas rendu compte, confondant les enfants esclaves entre eux. Il n'était donc pas sur ses gardes.
Commenter  J’apprécie          70

Videos de Christiane Taubira (12) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Christiane Taubira
Christiane Taubira - Ces morceaux de vie comme carreaux cassés
autres livres classés : guyaneVoir plus
Les plus populaires : Littérature française Voir plus


Lecteurs (190) Voir plus



Quiz Voir plus

Retrouvez le bon adjectif dans le titre - (2 - littérature francophone )

Françoise Sagan : "Le miroir ***"

brisé
fendu
égaré
perdu

20 questions
3668 lecteurs ont répondu
Thèmes : littérature , littérature française , littérature francophoneCréer un quiz sur ce livre

{* *} .._..