J'aime bien
Sylvain Tesson, j'aime ses recueils de nouvelles qui tantôt sont d'amères critiques de la modernité, tantôt la défendent aussi en en montrant les aspects positifs. Son histoire personnelle et ses voyages sont un vrai dépaysement, il écrit admirablement bien avec un vocabulaire riche sans être trop littéraire. Avec cet ouvrage on a tout d'abord une critique amère de notre époque moderne et de son allure qui nous entraîne malgré nous à 100 à l'heure dans son labyrinthe de complexité sans fin, et on aurait presque envie de partager l'enthousiasme de l'auteur pour ce retour à la Terre qu'il prône, vers une vie plus simple et plus naturelle, façon "Petite maison dans la prairie" en ne vivant que de l'essentiel, oui, mais... Personnellement, après avoir bien apprécié une bonne moitié de ce petit livre, je me suis essoufflé à le suivre dans ses pérégrinations, plus d'envie de lire car le partage de ses valeurs ne me convenait plus, je passe sous silence ses escalades nocturnes de monuments, et ses escapades dans la Nature au fins fonds des forêts du continent russe ou sur les bords du lac Baïkal, ses impressions ne peuvent émouvoir que lui car on ne s'y identifie pas : en tout cas, pour ma part c'est impossible, je n'ai jamais vécu cela et cela ne m'attire pas de retourner à l'âge des cabanes en pleine forêt (enfin ça me plaisait quand j'avais 8 ans, mais j'ai grandi depuis), par ailleurs j'émets quelques doutes - ou plutôt quelques réserves - sur l'authenticité des valeurs qui sont véhiculées dans ces pages : Monsieur Tesson aime et apprécie aussi la modernité et la vie citadine lorsqu'il s'agit de faire la promotion de ses oeuvres et de ses chroniques radio sur les plateaux télé ou dans les foires littéraires de France et de Navarre, par ailleurs, qu'adviendrait-il si tout le monde décidait du jour au lendemain de s'exiler au fins fonds des forêts pour se nourrir de chasse et de pêche ? Je ne suis pas sûr que cela serait une solution intéressante pour l'Humanité...Alors, j'aurais préféré un livre plus nuancé sur les valeurs qui sont celles de son auteur.
Le progrès a ses revers, certes, mais il aussi du bon et ce n'est pas en prônant une involution et un retour aux valeurs primaires qui excluent aussi en grande partie la vie de l'esprit et la solidarité sociale et sociétale par les valeurs de survie et de contemplation béate que l'on arrivera à améliorer l'existant.
Pour finir, j'ai malgré tout bien aimé ce petit livre, il comporte beaucoup de passages très justes et remarquables sur la beauté du monde, les affres de la modernité, le nomadisme y est décrit et brillamment analysé, incluant le voyage du ''wanderer'' et son état d'esprit aussi, le passage sur la géographie est remarquable de justesse sur cette science humaine, les valeurs de la marche à pieds tout comme celle du déplacement à cheval sont brillamment exposées... Tout cela m'a impressionné agréablement, et ce livre étant avant tout un livre contemplatif, il n'a pas manqué de m'intéresser en ce sens, mais je n'adhère simplement pas aux valeurs exposées dans la deuxième moitié du livre, pour les voir érigées comme l'a fait son auteur, en nouvelles habitudes de vie en vue d'un renouveau salvateur au plan individuel, et encore moins au plan collectif.