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EAN : 9782764605394
Boréal (29/02/2008)
3.02/5   24 notes
Résumé :
Chicoutimi-Nord, les années 70. L’été sera long. Il y a bien Judith, la meilleure amie. Il y a aussi Claire, la sœur de Judith, la plus belle fille de la ville. Mais il y a surtout cette mère qui « explose » tout le temps, qui ne laissera pas sa fille épouser le premier venu et qui est prête à tout pour que ses enfants ne soient pas des ignorants.

Dans ce cinquième livre, Lise Tremblay brosse un tableau du Québec rural des années d’après la Révolution... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
J'ai découvert cette auteur au cours du festival América. Ce qui m'a attiré ? La couverture ! Elle me rappelait une certaine vision des années 60.
Nous y sommes presque, après tout. Les années 70 débutent, c'est la guerre au Vietnam, on en parlera, un peu, à la fin du roman. La narratrice, c'est Judith, une toute jeune adolescente qui va dans une école tenue par les soeurs – les soeurs partiront bientôt. Sa mère, qui « explose » fréquemment, veut le meilleur pour elle, la meilleure éducation qui soit pour qu'elle puisse choisir la vie qu'elle veut, épouser un homme qui ne soit pas un ouvrier – menace latente que l'on retrouve aussi dans La Place d'Annie Ernaux. En attendant, la narratrice vit par procuration le rêve De Claire, la grande soeur de Judith, qui participe à un concours pour devenir danseuse et accompagner un chanteur en tournée – la plus belle fille de la ville est en bonne place. Elle est fiancée au fils d'un médecin, et il n'est guère que la mère de la narratrice pour n'avoir aucune illusion sur les véritables projets matrimoniaux du jeune homme, et l'influence que sa famille peut avoir sur lui.
Ce que nous vivons à travers ce livre, c'est véritablement un moment de la vie de la narratrice, une transformation, pas seulement parce qu'elle change d'établissement scolaire, mais parce qu'elle perd une amitié, celle de Judith, qui s'éloigne peu à peu d'elle.
Au cours de cet été, chacun réorganise sa vie. le lecteur comprend, à mots couverts, ce qui se passe dans certaines maisons. La mère de la narratrice ne brode pas, non, elle dit la vérité au sujet de la vie de Lisette, son amie d'enfance, elle ne dit pas tout, parce que tout n'est pas dicible.
Oui, la modernité fait irruption dans ce Québec des années 70. La modernité, ce peut être des vêtements qui ne conviennent pas aux religieuses, parce qu'ils sont trop à la mode. Ce peut être un roman de Françoise Sagan. Ce peut être aussi un couple qui vit ensemble sans être marié – et non un couple qui se marie parce que la jeune femme est enceinte.
La soeur de Judith – ou une rafraîchissante tranche de vie.
Lien : https://deslivresetsharon.wo..
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Bien que j'adore les romans historiques, j'ai beaucoup de difficulté avec ceux qui ont la prétention de "brosser un tableau" d'une époque et d'un lieu. Je trouve que ce roman-ci n'est qu'une suite d'anecdotes auxquelles je n'ai pas réussi à m'intéresser, j'avais plutôt l'impression que l'auteure essayait de mettre le plus de détails historiques possibles sans penser à rendre l'histoire captivante.


Pistes d'exploration pédagogique


Commenter la transformation intérieure de la narratrice au fil du récit. Dresser son portrait psychologique en prenant en compte le dénouement et les diverses influences de ses pairs.

En s'appuyant sur des extraits du texte, juger de ce que représente la sœur de Judith pour la narratrice.

Mettre le roman en contexte en s'informant sur les transformations majeures qui se sont opérées au sein de la société québécoise lors de la Révolution tranquille.

Choisir des extraits du texte qui pourraient être adaptés pour le cinéma. Expliquer ses choix.

Comparer la réalité québécoise telle qu'elle est présentée dans le roman à celle de la vie quotidienne d'aujourd'hui; relever les différences et les similitudes.
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Personnage sympathique, la narratrice de 12 ans nous permet de se plonger dans le Québec en transformation des années 60. La jeunesse de celle-ci donne au texte un belle naïveté, sans exagération ni clichés, donnant ainsi une certaine fraîcheur à l'histoire.
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Citations et extraits (9) Voir plus Ajouter une citation
Je suis rentrée vers trois heures parce que je voulais
mettre mes culottes courtes et mes sandales. Ma
mère était dehors avec madame Bolduc. Je les voyais de
loin parce que madame Bolduc montrait un tissu
rouge à paillettes à ma mère. Cela devait être pour son
spectacle de danse. Madame Bolduc est une championne
de danse sociale et c’est ma mère qui fait ses
robes. Lorsque je m’approche, je vois que la vieille robe
de ma mère est maculée de boue et qu’elle ne touche
pas aux tissus. Elle devait être en train de travailler
dans le jardin. À la fin mai, elle prépare la terre pour
ses semences. Ma mère examine le patron Vogue que
madame Bolduc tient devant elle. Je m’approche et
regarde le modèle. Ma mère explique à madame Bolduc
qu’elle ne pourra pas faire la petite traîne aussi
longue parce qu’elle risque de piler dessus en dansant.
Madame Bolduc est d’accord, elle n’y avait pas pensé.
Ma mère dit que la secrétaire de l’école a téléphoné.

Elle raconte l’histoire à madame Bolduc et elles rient
ensemble. Je savais que ma mère n’exploserait pas, pas
sur les soeurs. Elle fait partie du comité qui réclame leur
départ. D’ailleurs, c’est décidé, elles vont partir. La nouvelle
va être officielle la semaine prochaine. Ma mère
doit se rendre à l’école avec les autres parents pour l’affaire
des bas golf. Selon elle, les soeurs sont trop vieilles:
elles ont fait leur temps. L’Église aussi. Ma mère ne va
pas à la messe la plupart du temps et, quand elle y va,
c’est parce que mon père a insisté. Elle a inventé pour
les voisins une vague histoire de ménopause et d’étourdissements.
Elle n’en dit pas plus mais je sais que ma
mère trouve que les soeurs et l’Église c’est dépassé et
que de toute façon lorsqu’on meurt, il n’y a rien. Nous
sommes des animaux comme les autres et le mieux
qu’on puisse faire, c’est d’engraisser la terre. Toutes ces
histoires de religion sont fausses et la plupart des curés
sont malhonnêtes et voleurs. Elle le sait, elle a deux cousins
qui ont volé le monde en Abitibi. Lorsqu’elle
explose là-dessus, mon père la fait taire et lui répète:
«Voyons, Simone, là tu vas trop loin.» D’ailleurs, mon
père, on dirait qu’il a deux phrases: une pour ma mère
et une pour moi. Lorsque je tiens tête à ma mère et
qu’elle fait semblant de tomber malade et n’en finit pas
de pleurer de rage dans son lit, mon père finit par venir
me voir et me demander d’être raisonnable. «Il faut
que tu sois raisonnable.» Il me répète cette phrase à
tout bout de champ, à croire qu’il n’a que cela à me dire.
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Le lundi, j’ai remis des bas golf. Les parents avaient
fait savoir aux soeurs qu’ils nous appuyaient et la commission
scolaire aussi. Notre titulaire, soeur Thérèse,
nous a boudées toute la journée. Elle avait préparé des
piles de feuilles polycopiées remplies d’exercices que
nous devions faire jusqu’à la fin de l’année. Au tableau,
elle avait écrit qu’elle avait décidé de ne plus nous
adresser la parole. Je me suis demandé combien de
temps elle allait tenir. La directrice avait dû lui faire
la vie dure. Soeur Thérèse est son souffre-douleur, il y a
longtemps que nous le savons. C’est pour ça qu’on peut
tout faire dans la classe et qu’elle ne nous envoie jamais
la voir. Soeur Thérèse est en pleine ménopause et elle
est tout le temps épuisée. Elle est grosse et des perles
de sueur coulent continuellement sur son front. Elle
enseigne avec un ventilateur ouvert à pleine capacité.
Elle doit parler plus fort pour couvrir le son du moteur
et cela l’épuise encore davantage. Tout ce qu’elle fait
tombe à l’eau. Au début de l’année, nous devions faire
une prière toutes les heures. Une de nous avait la garde
de la cloche et devait la sonner pour nous avertir. Mais
c’est vite devenu intenable. La cloche tombait par terre,
on oubliait l’heure, Roxanne Rondeau la faisait sonner
à tout bout de champ, pour rien, pour irriter la soeur.
Soeur Thérèse, un avant-midi où une grosse tempête de
neige devait nous exciter, s’était précipitée sur la cloche
qui venait de tomber par terre et l’avait lancée au fond
d’un de ses tiroirs. Finies les invocations à la Vierge et à
notre Ange gardien. Elle avait aussi instauré un système
de points consistant à souligner notre bonne conduite.
Soeur Thérèse avait fabriqué un énorme carton où
étaient accrochées des colombes portant nos noms et
qui pouvaient glisser sur une ficelle. Le soir, soeur Thérèse
montait ou descendait la colombe qui nous représentait.
Évidemment, Roxanne s’est mise à donner de
petites poussées à sa colombe en cachette. Un vendredi,
sa colombe était rendue au ciel. La soeur était tellement
fâchée qu’elle est partie et nous sommes restées dans
la classe seules une grande partie de l’après-midi à
dessiner et à fouiller dans son bureau. Le tableau des
colombes a passé l’année derrière la porte. À la fin, il
était si détérioré que des oiseaux pendaient dans le vide
au bout de leur ficelle.
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J’ai feuilleté le journal et j’ai pensé que je pourrais
arracher la page de la photo de Claire avant que ma
mère la voie, mais j’ai eu peur qu’elle fasse des histoires
et je l’ai laissée dans le journal. Ma mère explose. Elle
peut exploser à tout moment sans qu’on s’y attende.
Pour la photo de Claire, je me suis dit qu’elle ne la verrait
peut-être pas, mais le dimanche elle passe une partie
de la journée à scruter chaque ligne du journal. J’ai
avalé trois toasts de suite en pensant à ce qu’elle allait
dire. Une fois, je ne sais pas ce qui m’a pris mais je lui ai
raconté que Claire sortait avec le fils du docteur Blackburn
et que, lorsqu’il reviendrait de l’université, ils se
marieraient. Toute la famille de Claire ne parlait que de
ce prochain mariage. En attendant qu’il revienne, elle
continuait de travailler au comptoir cosmétique de la
pharmacie Duquesne. D’ailleurs, monsieur Duquesne
lui apprenait beaucoup de choses sur les médicaments
et parfois, lorsqu’il était parti manger, c’est elle qui remplissait
les prescriptions. Mais elle ne faisait ça qu’en
attendant. J’avais eu le malheur de rajouter que, lorsque
Claire serait mariée, elle ne pourrait plus se permettre
de parler au monde de la rue Mésy parce que toutes ses
amies seraient les autres femmes de docteur. C’est là que
ma mère a explosé. Elle s’est mise à crier que Claire
aurait dû entreprendre son cours commercial comme
elle lui avait conseillé et qu’il fallait qu’elle soit complètement
folle pour croire qu’un fils de docteur du quartier
Murdock allait se marier avec une fille de réparateur
de tondeuses. Et là, elle est repartie sur son histoire
d’instruction qui est la chose la plus importante pour
une femme parce qu’avec les hommes on ne sait jamais
et que dans la vie il faut être en mesure de se faire vivre.
Et surtout, j’avais besoin de me mettre dans la tête
qu’elle ne voulait pas entendre parler de garçons parce
que j’allais avoir affaire à elle. Lorsqu’elle s’emporte
comme ça, je finis par aller dans ma chambre pour lire
ou pour penser à Bruce. Ma mère me faisait peur. À
chaque fois, je me disais que j’aurais dû me taire, que si
j’avais fait attention cela ne serait pas arrivé mais, je ne
sais pas comment, ça arrivait tout le temps. Pour Claire,
ma mère ne comprenait pas qu’elle était la plus belle fille
de la ville, que tous les gars de La Pilule voulaient sortir
avec elle. Claire allait partir à Montréal et peut-être
devenir une vedette ou un mannequin. On allait la voir
à la télévision et dans le journal de vedettes que ma mère
achète parfois lorsqu’elle pique ses crises et qu’elle dit
qu’elle va partir pour toujours et que nous ne la reverrons
plus jamais. Ces fois-là, elle met son manteau pardessus
sa vieille robe et elle va au Casse-Croûte boire un
coke et parler avec madame Ménard, la propriétaire.
Elle passe une heure ou deux à lire son Échos Vedettes au
comptoir et elle revient avec un gros Saguenay Dry et
nous prépare notre repas favori: des hot-chickens avec
de la sauce brune en boîte et des frites. L’Échos Vedettes
est toujours au fond du sac et je me dépêche de le
prendre pour aller le lire dans ma chambre. Après, ma
mère le donne à madame Bolduc parce qu’elle ramasse
les journaux pour le camp de pêche de son mari.
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Le camelot a jeté le journal du dimanche à moitié mouillé sur le tapis de l’entrée. Dès que je l’ai entendu fermer la porte, je me suis levée en courant. Je voulais être la première à voir la photo de Claire. J’ai pris le journal et j’ai commencé à chercher. La photo était à la page 22 et on voyait Claire encadrée de ses deux parents. Monsieur Lavallée portait un complet. L’article racontait l’histoire de Claire, comment elle était passée du quart de finale, à la demi-finale et à la finale du concours de danse. Si elle gagnait, elle allait passer l’année comme danseuse à gogo dans le spectacle d’adieu que Bruce et les Sultans allaient donner partout dans la province. Je n’en revenais pas, si elle gagnait, la soeur de ma meilleure amie allait voir Bruce en personne et peut-être qu’elle allait l’inviter à jouer au mini-putt dans leur cour arrière et peut-être qu’on pourrait le voir. Judith et moi on ne parlait que de ça et on passait une grande partie de notre temps à aider son père à finir le mini-putt avant le début de l’été. Ils avaient un grand terrain et leur père avait décidé de construire son propre mini-putt. Judith et moi, nous l’aidions à bien étendre le tapis vert sur les formes de ciment pour que la surface soit bien lisse. Le plus dur, ça avait été le chameau. Le tapis avait gardé un pli entre les deux bosses et même si on avait forcé le plus qu’on pouvait, il n’y avait rien eu à faire. Son père s’était résigné. Il avait dit qu’au mini-golf de Jonquière, ils avaient une machine spéciale qui coûtait très cher et lui ne pouvait pas se l’acheter. Le chameau allait rester plissé, il n’y pouvait rien.
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Le mini-putt était pratiquement fini. Il ne restait
que la fabrication des panneaux indiquant le nom des
trous. Le père de Judith était en train de les peindre
dans son atelier qu’on appelait la boutique. Tous les
Lavallée étaient fiers de leur mini-putt. Ils possédaient
la plus belle cour. Il y avait des chaises de parterre, des
tables, un foyer, une Sainte Vierge, une balançoire. C’est
là que nous passions la plus grande partie de notre
temps. Parfois, sans trop qu’on sache pourquoi, le père
de Judith sortait sur la galerie et nous renvoyait tous
chez nous en nous menaçant de nous botter le cul, mais
ça n’arrivait pas souvent et il ne s’était vraiment exécuté
qu’une fois. C’est Martial Turcotte qui avait écopé. Il
faut dire qu’il avait volé le gant de baseball de Régis, le
frère infirme de Judith, sous prétexte que, de toute
façon, il ne savait pas jouer et qu’il ne jouerait jamais.
Régis passait sa vie à traîner avec lui une boîte de carton
remplie de fils de couleurs de toutes sortes et de son
gant de baseball. Il avait aussi un vieux portefeuille de
cuir bourré de cartes de joueurs de hockey et de baseball
qu’il baptisait de noms invraisemblables qui sonnaient
un peu comme des noms anglais. Judith disait
que Régis était ainsi parce que, lorsqu’il était bébé, il
avait eu une méningite. À l’hôpital, on lui avait donné
des médicaments trop forts et cela lui avait brûlé des
cellules du cerveau. Avant ça, il était normal.
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