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EAN : 9782330174248
208 pages
Actes Sud (04/01/2023)
3.09/5   44 notes
Résumé :
Naître sœur n’est pas inoffensif. Ainsi pour Vanessa Bell, peintre méconnue à l’aune de "la postérité de noyée" de sa cadette, Virginia Woolf. Ou pour Laura, romancière et aînée, qui veille sur les secrets, soustrait le poison des chagrins. Autant d’amours ennemies, de joies fébriles, de jalousies tristes, qui font les liens ambigus entre sœurs.

Portrait en diptyque à la grâce époustouflante, ce récit subjectif de la vie de Vanessa Bell, exprime l’in... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (12) Voir plus Ajouter une critique
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C'est par le truchement d'une photo que Laura Ulonati fait la connaissance des deux soeurs Stephen. On les voit jouer au cricket « simplement deux filles d'il y a presque cent trente ans. L'une en avait alors douze, l'autre quinze. » L'aînée restera dans l'ombre de l'autre qui deviendra célèbre sous le nom de Virginia Woolf. Pourtant, Vanessa Bell avait tout pour devenir une peintre célèbre mais sa renommée sera de courte durée avant de sombrer dans l'oubli. Sa destinée artistique suit celle de sa vie qui se dilue, se perd au contact de Virginia, cette soeur trop présente et d'une grande possessivité.
Avec une enfance piétinée par les abus sexuels subis par leurs demi-frères, elles resteront toujours très proches, même si la rancoeur, la jalousie parsèmeront leur relation. Dans une époque corsetée par les moeurs austères marquées par l'hypocrisie de la bourgeoisie Victorienne, les deux soeurs sauront s'inventer une vie indépendante et, au-delà de leurs mariages respectifs, vivront une sexualité très libre.
Virginia la passionnée, l'insolente, se jettera à corps perdu dans l'écriture, des tragédies qui seront l'autre face de sa folie, ses dépressions et ses insatisfactions. Possessive et excessive en tout, ses relations avec sa soeur seront assombries par la rivalité et la jalousie.
L'autrice a fait le choix de donner la parole à Vanessa, l'absente, la discrète qui tente de s'affranchir de l'amour possessif et destructeur de Virginia en se réalisant dans la peinture et la maternité. C'est un travail d'équilibriste que Laura Ulonati maitrise parfaitement en racontant le destin des deux soeurs empêtrées dans leurs sentiments contradictoires et c'est à travers les pensées intimes et l'oeuvre picturale de Vanessa que l'on découvre Virginia.

« Je voulais que ma victoire sur elle soit totale. Ma soeur adorée. Je ne l'aimais plus car, en elle, je m'étais trop reconnue. Je lui opposais la défense absolue de mon regard, moi qui étais assez téméraire pour ne pas voir la force de mon orgueil, de sa possession maligne. »

Roman magistral, envoûtant, mêlant biographie et romanesque avec aisance. L'écriture troublante et sensuelle de Laura Ulonati vogue entre passé et présent pour nous révéler une biographie romanesque exaltée et tumultueuse qui nous bouscule et nous bouleverse.

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Laura Ulonati signe avec « Double V » publié chez Actes Sud un roman proprement fascinant d'une écriture poétique et charnelle mais aussi âpre, rugueuse, sans compromission quand il s'agit de nous confier, tantôt comme un murmure soufflé au creux d'une oreille ou bien au contraire comme le cri de rage, de colère de deux soeurs : Virginia Woolf et Vanessa Bell. Il y a ce qui est écrit et ce qui se lit entre les lignes, un mélange de pudeur et d'effronterie, une histoire tragique concomitante d'un talent exceptionnel pour l'écriture de la cadette Virginia et d'une reconnaissance en pointillée pour Vanessa, la soeur aînée. Deux enfants marquées très tôt par la violence sexuelle de leurs deux ignobles demi-frères. Une tragédie qui hantera Virginia, qui accentuera sa sensibilité exacerbée, son mal-être, la dépression, les tentatives de suicide entrecoupées de séjour dans des asiles qui n'avaient de « psychiatrique » que le nom. Virginia est celle qui dira non et vivra sa bisexualité de façon libre et provocante aux yeux des bonnes consciences britanniques du premier tiers du XXème siècle. Une autrice exceptionnelle, une intellectuelle qui, dès la prime adolescence, dame le pion aux pédants et prétentieux savants des salons de la bonne société dont fait partie la famille Stephen. L'écriture est son bréviaire, son exutoire, le lieu où ses voix prennent une forme concrète débouchant sur des romans où la tragédie pointe toujours. L'écriture comme le prolongement de soi-même, une béquille pour soutenir, un manteau pour se réchauffer le coeur et les mains. Virginia et Vanessa, deux trajectoires intellectuelles et artistiques, deux caractères, deux visions mais une relation unique faite de braise et de souffre mais aussi de douces caresses et confidences, d'élan du coeur. Virginia Woolf connu un succès littéraire exceptionnel, une oeuvre d'une modernité incroyable faite de combats féministes précurseurs, d'une vie sexuelle librement vécue, d'une bisexualité assumée en femme libre qu'elle était. Les relations entre Vanessa, l'ainée et sa cadette Virginia vont évoluer avec le temps. Vanessa souffre d'être l'éternelle absente, celle qu'on oublie, celle qui doit demeurer dans l'ombre du succès fulgurant des romans de Virginia. Un roman sur les relations intra familiales, la jalousie, la rancoeur mais aussi l'amour et la tendresse. La rivière où s'écoule nos vies est rarement calme mais furieuse, en colère, tumultueuse et prête à l'insoumission dans une période de l'histoire britannique où le quand dira t'on et la bonne conscience, la bien-pensance, le patriarcat et la religion font offices de cloche recouvrant les aspirations émancipatrices des femmes. L'écriture sublime de Laura Ulonati se rapproche d'une autrice que j'apprécie beaucoup : Carole Martinez. Un roman poignant, envoûtant, c'est un des grands textes à découvrir en cette rentrée littéraire 2023 ! J'ai rarement lu un roman aussi puissamment évocateur, avec un souffle romanesque étourdissant.
Lien : https://thedude524.com/2023/..
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Virginia Woolf, oui, elle est célèbre. J'ai déjà lu quelques ouvrages qui, de près ou de loin évoquaient sa vie. Mais sa soeur, Vanessa Bell, qui est-elle ? A part son nom, je ne connais rien d'elle.
Parmi les livres proposés par Babelio, lors de son opération Masse critique, je repère celui de Laura Ulonati. Ce qui m'a tout d'abord attirée, c'est la photo de couverture. Elle me semble assez mystérieuse avec ces deux adolescentes très chic de la fin XIXe siècle, en train de jouer au cricket. A l'avant-plan, c'est l'aînée, Vanessa, très concentrée sur sa batte. Mais la balle, c'est Virginia qui la tient. N'est-ce pas la métaphore de leur vie ? Virginia attirera à elle toute l'attention. Vanessa restera dans l'ombre.
Le roman de Laura Ulonati retrace, de façon très particulière l'univers des deux soeurs et leur relation très compliquée d'amour-haine.
Leurs parents sont deux veufs et ils ont déjà chacun des enfants de leur première union. Ensemble, Julia et Leslie Stephen auront encore deux filles et deux fils.
Je ne peux pas dire que Leslie Stephen soit un père très sympathique, vu son attitude odieuse avec sa première fille, attardée mentale, puis, avec celle de Julia après la mort de son épouse. Les garçons seuls sont considérés comme importants. Ils pourront faire des études. Vanessa et Virginia n'auront qu'à se débrouiller comme elles le pourront.
L'auteure adopte un style très particulier. Tantôt narratrice extérieure, tantôt intérieure, son « Je » est ambigu. Elle fait en sorte que le lecteur ne sache pas très bien quand elle parle au nom de Vanessa et quand il s'agit d'elle-même. Je ne la connais pas, mais j'imagine qu'elle a (au moins) une soeur et que leur relation est également compliquée. Souvent, elle s'identifie à Vanessa. Celle-ci se montre tantôt protectrice, tantôt jalouse, tantôt pleine d'amour et d'admiration, tantôt excédée et en colère (on la voit effacer les visages des portraits de sa soeur qu'elle a peints.)
Ce qui frappe dans ce roman, c'est d'abord l'écriture, pleine de finesse et de délicatesse. L'auteure use d'images très justes et originales. Elle excelle dans l'évocation des écrits de Virginia et des tableaux de Vanessa. Comme je ne les connaissais pas, je les ai cherchés sur le Net, et, pour la plupart, ils m'ont beaucoup plu.
Le livre est rempli d'implicite, ce qui complique la tâche du lecteur et lui demande un effort. Très souvent, Laura Ulonati fait allusion à des épisodes qui ne sont pas expliqués précisément. Il faut donc les imaginer. de cette manière, je pense, elle traduit les habitudes de l'époque, qui veut que l'on taise certaines choses, même (surtout) si elles sont graves. Il faudra donc lire entre les lignes les rapports malsains des fils aînés de Julia avec leurs demi-soeurs ou de Leslie avec sa belle-fille.
De même l'amour sans espoir que voue Vanessa au jeune peintre Duncan, qui lui préfère « Bunny » ou les regrets de Virginia :  « Sur le pont de la carence, c'est là que nous nous rejoignons ; celui du déni de nos corps par deux hommes. »
C'est un livre très exigeant, mais intéressant que je ne regrette pas d'avoir lu.
Aussi j'exprime ici toute ma reconnaissance à Babelio qui m'a permis de le gagner et aux éditions Actes sud qui me l'ont envoyé, accompagné d'un petit message très aimable qui m'a fait bien plaisir.
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Le double V, c'est Vanessa Bell et Virginia Woolf.
Double portrait, deux existences et deux soeurs qui à l'aube des années 1900 jusqu'au début de la seconde guerre mondiale vont rejoindre
le cercle anglais "Bloomsbury", un groupe où tous les arts sont représentés.
L'ainée Vanessa est peintre et la plus jeune Virginia écrivaine en devenir.
Nous sommes au tournant de XXème siècle.
Les femmes artistes tentent de se faire une place dans la culture dominée par les hommes.
Les deux soeurs sont issues d'une famille de la haute société londonienne.
Un double décès va bouleverser leurs existences, la mère meurt en 1895 et le père en 1904.

De cette sororité omniprésente, l'autrice L.Ulonati évoque des mots, des émotions qui construisent ce récit.
C'est un sujet qui traverse le temps et les générations, la proximité et la difficulté d'être soeurs.
Des secrets, des non-dits, un pacte inévitable entre deux femmes de la même famille.

On connaît le déroulé et la trajectoire de ces deux V.
La cadette Virginia va se plonger dans une eau froide, disparaître et éclipser
son aînée Vanessa.
C'est un roman, pas une biographie.
Profonde réflexion au sein d'une fratrie.
Dans l'ère victorienne, deux soeurs presque siamoise ambitionnent un art
d'émancipation.

Dans ce contexte existe des rivalités, des jalousies et des liens tendus.
Vanessa, déjà reconnue pour sa peinture réaliste et abstraite devra laisser sa place à sa soeur Virginia qui va connaître un succès grandissant par son style littéraire.

L.Ulonati y met sa touche personnelle, celle de sa propre intimité de soeur ainée.
Curiosité incontournable.
Très belle écriture.
Lisez-le et allez voir les peintures de Vanessa Bell.


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"Je ne vois plus qu'une nécessité, raconter Vanessa et Virginia."

Vanessa. Virginia. le double V de ce titre.
L'une peint, l'autre écrit. L'une connaitra d'abord le succès puis sa soeur, plus tard, l'éclipsera.

Ce roman, car c'est un roman et non une biographie, est centrée sur Vanessa, la peintre, la soeur ainée, sur sa difficulté à se faire et à conserver une place auprès de Virginia Woolf qui va connaitre un succès grandissant.
C'est cette ambivalence amour/haine qui est au coeur du roman, cette rivalité féminine qui débute dans l'enfance, quand deux soeurs se disputent l'attention d'un père.

Laura Ulonati met en perspective sa propre histoire et ce bruit de fond fait résonner l'histoire de Vanessa et Virginia. On passe de Vanessa à Laura sans que l'intensité ne se perde. Les portraits de femmes, de soeurs, se confondent puis se définissent à nouveau.

Pour avoir moi aussi des soeurs, et des filles, je me suis souvent retrouvée dans ces sentiments ambigus, dans ce duel quasi-inévitable, ce besoin de se déterminer par rapport à l'autre.
La langue est riche, le texte est intense, et ce roman m'a beaucoup émue.

C'était ma première lecture de l'année, j'espère qu'elle augure bien des suivantes.
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critiques presse (2)
LeDevoir
27 février 2023
Fascinante réflexion sur la sororité et l’émancipation féminine par l’art, Double V trace le destin de la peintre Vanessa Bell dans l’ombre de sa soeur puînée, la romancière Virginia Woolf.
Lire la critique sur le site : LeDevoir
LeMonde
09 janvier 2023
Après deux premiers romans hantés par l’exil, Laura Ulonati brouille les frontières de la narration, mélangeant fiction ­historique et vertige autobiographique.
Lire la critique sur le site : LeMonde
Citations et extraits (20) Voir plus Ajouter une citation
Observer le monde, c'est aussi y participer ; ce n'est pas réservé qu'aux agités, aux enragés. Aux pessimistes de la raison, aux optimistes de la volonté. Il faut aussi des gens en retrait pour témoigner depuis le bas-côté. Pour essayer de nommer, de donner une forme à la réalité. (p 185)
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Il ne peut y avoir qu'un seul génie dans cette famille et c'est Virginia.
On ne sait pas pourquoi ça naît, pourquoi certains y ont droit et d'autres pas. Pourquoi je suis lente dans l'existence quand ma sœur est vive de couleurs ? Pourquoi celles que j'ajoute à mes dessins ne réparent rien ? Quoi que je fasse, je suis moins. Moins intelligente, moins effrontée. Moins masculine comme père aime à répéter. Mon menton moins décidé, ma silhouette moins affûtée, mes cheveux et mes yeux moins profonds. Moi son pâle brouillon, elle ma flamboyante copie. (p 25)
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Des couleurs qui disent la renaissance, qu'il n'y a pas de survie possible sans comprendre l'origine de la beauté. Une éclipse de nos blessures singulières ; de cette souffrance, lancinante et destructrice, que nous décidons de transcender. Cette ivresse à la lecture d'un livre ou d'une peinture bute soudain sur le réel d'une signature. Encore un nom d'homme. Toujours un nom d'homme qui parle de désir à une fille modèle ou à sa muse. La brûlure. Nous sommes capables de la faire sentir. Nous sommes capables d'en faire autant. (p 76)
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Le divan, le fauteuil, la fenêtre fermée mais les rideaux ouverts, la porte dérobée, les fleurs presque au centre, rangées dans le vase posé sur le guéridon. Je réinterprète les détails, les éléments de la scène avec l'inexorabilité confuse d'un rêve. Avec la maniaquerie irrationnelle de celle qui reste. Pour empêcher l'oubli, ou bien pour réussir à l'accomplir. Pour essayer de m'y retrouver, de me raconter comment ça s'est passé. L'anéantissement de mon univers. (p 183)
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D'abord l'eau transperce, puis se fait douce comme un berceau. La mort doit prendre comme ça. Une image, rien qu'une image. Une illusion qu'il faut sentir pour la croire enfin réelle. Pareille à la mer qui, autour de nous, s'étend telle une forêt autour d'un château fort. (p 38)
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Videos de Laura Ulonati (4) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Laura Ulonati
« **Double V**, c'est un roman qui est né de l'envie d'écrire sur une relation entre deux soeurs, de suivre cette relation sur le voyage d'une vie. Il y avait aussi l'envie chez moi depuis longtemps d'écrire sur une peintre. » Laura Ulonati
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**Double V** de Laura Ulonati
Naître soeur n'est pas inoffensif. Ainsi pour Vanessa Bell, peintre méconnue à l'aune de « la postérité de noyée » de sa cadette, Virginia Woolf. Ou pour Laura, romancière et aînée, qui veille sur les secrets, soustrait le poison des chagrins. Autant d'amours ennemies, de joies fébriles, de jalousies tristes, qui font les liens ambigus entre soeurs. Portrait en diptyque à la grâce époustouflante, ce récit subjectif de la vie de Vanessa Bell, exprime l'inquiétude d'exister et ce qui, parfois, permet de la conjurer : l'amour d'une soeur.
https://www.actes-sud.fr/catalogue/litterature/double-v
--- #litteraturefrancaise #rentréedhiver
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