J'ai pour principe de laisser sa chance au produit. Ce qui- dans le domaine cinématographique- me conduit quelquefois à pousser le sacrifice jusqu'à la fin de la séance, d'aucuns y voyant un respect poussé à l'extrême! Dans le domaine littéraire, ce phénomène est plus rare: nul témoin de mon manque de ténacité, de mon peu d'inclination pour l'effort, ni de mon abandon précoce! Pour la MASSE CRITIQUE j'avais sélectionné «
la vie sauve » ayant pour seul critère de bons –et anciens- souvenirs de lecture aux éditions « des femmes ».Ma déception est à la hauteur de ma nostalgie, et rien n'a pu sauver ce livre que je qualifierais spontanément de navet.
Pourtant, dans les premières pages je tentais d'y trouver le charme d'un récit intimiste, la pudeur de l'auteur effleurant son sujet. Je lui concédais de vagues accointances avec la
Duras de ma jeunesse, voire la contemplation excessive des toiles d'
Edward Hopper. Or, si ce peintre de l'ennui est tout sauf ennuyeux, Mme
Weinzaepflen nous donne envie de nous sauver au plus vite de ce petit opus soporifique et prétentieux. Il ne suffit pas de livrer en vrac des fragments de rêves pour faire un livre (« ce que personne ne sait c'est que cette image est une image de rêve. Jim souvent s'appuie sur ses rêves [un trésor, se dit-il chaque fois qu'un tel cadeau lui est fait, inopinément]) ; moi mes rêves je me contente de les raconter à mon psychanalyste ! Ni d'introduire 3 rockers dans une station balnéaire normande pour
écrire un livre rock'n roll ! Pourtant, page 62 , Ileana répond modestement à Jef qui lui conseillait d'utiliser un fait divers comme matériau de pièce de théâtre : « ces histoires me nourrissent , ça me suffit ». Pourquoi ne pas avoir cédé à cet éclair de lucidité et continué à noter dans son journal intime de belles envolées lyriques et inoubliables telles que : « Que feras-tu dans 3 ans ? lui demandait Tom dont la vie est prévue pour longtemps. Impensable interrogation. Ileana se demande en bêchant son jardin au son du rock pourquoi sa vie est à ce point en marge des chemins convenus » ou « Une nuit heureuse. Une nuit dont on se dit après coup, parfois des années plus tard, qu'elle fut exceptionnelle. » ?
Passé la trentième page j'avoue que le courage m'a fait défaut et que je me suis lassée de ce « roman » sans histoire, de cette énumération monotone de faits décrits sans style, sur un ton sec, désincarné .Même l'assassinat d'un inconnu et la mort de Jonathan ne réussissent pas à ranimer le livre puisque ces deux incidents ne donnent pas lieu à un début d'intrigue. L'auteur elle-même donne l'impression de s'en désintéresser. Et si l'on reste à la surface de ce texte…c'est qu'il n'a aucune profondeur. Ce livre est plat, désespérément plat et aurait du rester dans un tiroir, car même ses maladresses ne m'ont pas fait sourire : comment peut –on parler sérieusement de « la canopée de deux grands pins parasols » ? Heureusement que le ridicule ne tue pas ! J'ai poussé un ouf de soulagement à la page 140, mon calvaire étant terminé. ..mais mon devoir scrupuleusement accompli !