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EAN : 9782266310864
432 pages
Pocket (11/03/2021)
4.02/5   385 notes
Résumé :
Mers et océans ont disparu. L'eau s'est évaporée, tous les animaux marins sont morts. Des marées fantômes déferlent sur le monde et charrient des spectres avides de vengeance. Requins, dauphins, baleines…, arrachent l'âme des hommes et la dévorent. Seuls les exorcistes, protecteurs de l'humanité, peuvent les détruire.
Oural est l'un d'eux. Il est vénéré par les habitants de son bastion qu'il protège depuis la catastrophe. Jusqu'au jour où Bengale, un capitai... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (201) Voir plus Ajouter une critique
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sur 385 notes
« L'écosystème est comme une cathédrale qui s'effondre si on retire une pierre de voûte. En surexploitant la mer, nous avons transformé le monde en désert ».

Quelle épopée je viens de vivre ! « Mers mortes » est avant tout un roman écologique, une fable post-apocalyptique, qui ne peut laisser indifférent. La façon avec laquelle Aurélie Wellenstein aborde ces sujets, dans un style sans détour, sans concession, laisse à penser que cette auteure écrit avec son coeur, voire avec ses tripes, sur le réchauffement climatique, la pollution, la surpêche, la disparition des poissons et de toutes les espèces aquatiques.

« le réchauffement climatique, en réduisant l'oxygénation des océans, avait entraîné leur acidification. Les rejets d'engrais, d'hydrocarbures et de déchets dans les estuaires avaient pollué les eaux claires et les avaient changées en écume sale et huileuse. Les récifs coralliens étaient morts les premiers. Puis la banquise s'était amenuisée sans espoir de retour. le krill à la base de la chaîne alimentaire marine avait disparu, poursuivant parmi les espèces aquatiques la désastreuse réaction en chaîne qui les avait amenés jusqu'ici : dans un cimetière. »

Alors l'histoire peut dérouter et pourtant…Les mers sont mortes. Elles produisent cependant des marées fantômes qui se déversent sur les réfugiés climatiques emplies de spectres de poissons, de méduses, de requins, de baleines. Venus se venger. Seule la présence d'un exorciste peut protéger les humains grâce au déploiement d'un bouclier, d'un dôme protecteur, tenant à distance les spectres. Il peut aussi les désintégrer. le jeune Oural est précisément un exorciste protégeant une poignée d'hommes et de femmes au sein d'une citadelle. Cette protection lui procure pouvoir et respect auprès de sa communauté. Sa vie va complètement basculer lorsque une bande de pirates dirigée par le charismatique et sauvage Bengale vient le chercher, de force…Bengale a en effet une mission à accomplir. Une mission apportant le salut pour l'humanité….ou sa damnation éternelle.

Et nous voilà embarqués avec Oural sur un bateau pirate avançant au gré des marées montantes. Une épopée fantastique à travers des océans peuplés de fantômes, à collecter de grandes âmes, celles d'autres exorcistes pour les offrir au Léviathan, dernier animal marin vivant, dans ce qui reste de banquise.

L'écriture se veut poétique et prend des allures de contes gothiques par moment qui m'ont tenu en haleine : « La grande carcasse gémissait, grinçait, craquait pendant la métamorphose de l'épave en navire. Puis, les ongles des cadavres proliférèrent sur le bois jusqu'à y former une carapace jaunâtre. Les voiles reprirent leur apparence abominable, couleur chair. Dans les cages à oiseaux, les flammes vertes se mirent à brûler avec intensité. Un son aigu s'éleva, des cris à glacer le sang : les âmes hurlaient toutes en même temps ».

Alors dit comme ça, cette histoire de marées fantômes, de spectres, d'exorcistes, peut paraitre alambiquée, invraisemblable, notamment aux lecteurs peu habitués du genre, mais le talent de conteuse d'Aurélie Wellenstein est fascinant, je suis restée captivée par ce récit dans lequel, à chaque marée montante, aventures et évolutions des sentiments sont au rendez-vous. Son message, tel un cri, de ne pas laisser faire le génocide des océans, génocide produisant notre propre perte, d'avoir de l'empathie pour les animaux, est transmis avec une telle force…c'est certain, un certain nombre de scènes, dans lesquelles j'ai eu l'impression moi-même d'étouffer (la scène de la marée noire notamment est incroyable, j'ai respiré vraiment différemment durant ma lecture), vont me rester longtemps en tête tant ce livre est immersif.

« de nouveau, l'impitoyable crochet le souleva par la bouche. Son corps franchit le bastingage. Il s'arqua en arrière, sans pouvoir résister à la traction. Il heurta le sol où il convulsa, frappant désespérément le pont du navire de la queue et de la tête. Des formes indistinctes se dressaient autour de lui. Il claqua des mâchoires. Ses forces le quittaient. Il se noyait dans l'air. La douleur le ranima. Une douleur atroce, au niveau de son aileron. Suivie immédiatement de la même brûlure aux nageoires. On lui arrachait les membres, on le découpait vivant. La gueule béante, il poussa un hurlement muet. Seuls des rires lui répondirent. Son sang giclait de ses blessures. L'odeur de son propre sang l'amena au bord du vertige. Les ombres finirent de lui trancher les membres. Déjà on le saisissait. Il se retrouva en l'air, bascula par-dessus bord et claqua les flots en une gifle monstrueuse. L'eau. L'eau. L'eau. Il voulut plonger, mais il était incapable de bouger. Son corps se tordait en vain. On lui avait coupé l'aileron, les nageoires. Et maintenant, impuissant, il coulait comme une pierre ».

« Mers mortes » a été pour moi une expérience de lecture tant le message écologique est transmis de façon singulière et haletante, comme si l'auteure avait voulu nous faire sentir, ressentir, véritablement, la souffrance des animaux et les conséquences de ce que nous faisons. Un livre dont l'aura verte va vibrer longtemps en moi.

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Merci Babelio, merci Masse Critique, Merci Scrinéo ! Dans "Mers Mortes" d'Aurélie Wellenstein la civilisation humaine n'est plus… La doxa de la croissance infinie, la religion du consumérisme et le cancer productiviste ont logiquement conduit à son autodestruction quand les océans ont fini par s'assécher, ne laissant que des terres désolées, polluées et surchauffées, et quand les nations submergées par des centaines de millions de réfugiés. Mais ce n'était que le début du cauchemar… Car les mers sont revenues, sous la formes de marées fantômes porteuses de millions de spectres vengeurs. L'humanité en voie d'extinction ne doit ses dernières heures qu'à des mutants psioniques capable d'émettre un champ protecteur tenant à distance les spectres vengeurs : on les appelle exorcistes, Oural avec sa delphine fantôme est l'un d'entre eux, et sa vie bascule quand Bengale le Nécromancien, capitaine du navire pirate Naglfar, met sa communauté à feu et à sang pour s'emparer de lui… C'est parti pour une odyssée post-apo aux allures de catabase, un voyage fantastique à travers des mers et océans fantômes peuplées de démons et de merveilles, et tout est prétexte à raconter l'histoire du Capitaine Bengale qui collecte les grandes âmes pour les offrir au Léviathan qui dort et rêve sous les reliquats de la banquise arctique (Lovecraft Power !) : c'est celle de la fin du monde, mais aussi celle de sa potentielle rédemption ou de son éternelle damnation...

Première remarque cela ressemble initialement beaucoup au film "Final Fantasy : les créatures de l'esprit", dans lequel une humanité réfugiée dans des îlots bunkerisés affrontait sans le savoir les fantômes de tout un monde alien (visuellement cela m'a aussi fait penser à un chouette concept utilisé par la mangaka française VanRah dans son "Strag Dog", où des créatures marines fantômes hantent les rues d'une métropole moderne construite sur les ruines d'une cité engloutie)... Deuxième remarque c'est la forte présence des éléments horrifique : les créatures marines fantômes tuent les survivants humaines en volant leur âme, mais en volant une partie de leur âme seulement ils les transforment en zombies, en les volant petit à petit ils officient comme des vampires, et s'ils possèdent les humains ils les transforment en monstres hybrides dignes du "Devilman" de Go Nagai… Troisième remarque, post-apo oblige il y a pas mal de scènes qui ne dépareilleraient pas dans un opus de la saga "Mad Max", mais nous sommes à la fois dans la science-fiction car Bengale officie comme comme émule du Capitaine Nemo, mais aussi dans le fantastique car Bengale officie comme émule du Hollandais Volant. Il y a donc une démarche vernienne complètement assumée avec ce voyage de la France vers le Groënland dans lequel Bengale le Nécromancien qui a voyagé dans le monde entier montre à Oural l'Exorciste qui n'a jamais quitté sa communauté les horreurs des mers mortes de la même manière que la Capitaine Nemo expliquait au Professeur Pierre Aronnax les merveilles des océans vivants. Mais il y a sans doute plus encore une démarche moorcockienne avec l'antihéros maudit, les références au romantisme noir, le mélange entre théâtre élisabéthain et philosophie existentialiste sur fond de péripéties pulpiennes (remember la naissance de la fantasy française avec Fabrice Colin et Mathieu Gaborit), et une multitude d'éléments que les fins connaisseurs se feront une grande joie de lister par le menu (ainsi si le Naglfar est dans la mythologie viking le vaisseau de la fin des temps, il ressemble ici très fortement au vaisseau de la terre et de la mer présent dans le premier opus de la saga d'"Elric le Nécromancien"). Quatrième remarque, tout cela nous amène tout naturellement vers une dimension psychologique : Bengale, le Nafgar et tout son équipage lié par le désespoir vivant par procuration le rêve de leur capitaine, sont quasiment un détournement grimdark donc post TINA d'"Albator" / "Harlock", de l'Arcadia et de tout son équipage lié par l'espoir qui vivant par procuration le rêve de leur capitaine. Oural apprend à connaître Amazone et Congo, Nil et Arctique, Rio Grande et Oued Medjerbah, Escaut et Tamise, et à travers eux il apprend à connaître Bengale avant de rallier son rêve qui pourrait bien tourner au cauchemar (et si Léviathan l'avait recruté pour hâter la fin de l'humanité au lieu de tenter de la sauver ?). Jusqu'où peut-on aller par amour ? Jusqu'où peut-on aller par ambition ? La relation Oural / Bengale emprunte à la relation Guts / Griffith du "Berserk" de Kentaro Miura à un point parfois confondant ! (qui elle-même emprunte à la relation Isht van / Guin racontée par Kaoru Kurimoto dans sa saga fleuve qui voulait associer/opposer les héros solaires de R.E. Howard aux héros lunaires de Michael Moorcock : c'est Tristan et Yseult version homoérotique, et nous sommes aux frontières des romances lgbt !). Jusqu'à la qu'à la dernière page j'ai craint une nouvelle Eclipse / une nouvelle Occultation (ceux qui savent sont déjà dans leur bunker avec un arsenal et une capsule de cyanure), mais au final la fin est ouverte et chacun se l'appropria comme il l'entendra...

L'auteure est également ce qu'on pourrait appeler une écologiste radicale, et c'est très crûment et souvent vues de l'intérieur qu'elle dépeint les horreurs que les homines crevarices infligent aux gens et à l'environnement en sachant pertinemment que le mal se tapit dans le coeur de chaque homme. Personnellement je n'ai pas envie de mettre dans le même panier ceux qui les moyens de changer les choses mais qui le font pas parce qu'ils s'en foutent (suivez mon regard vers celui qui prétend parler et agir écologie mais qui dans le même temps relancent les industries les plus polluantes qui soient dans les zones naturelles de Guyane), et ceux qui essayent de changer les choses mais dont l'impact est si faible qu'il en devient décourageant (genre à la moindre sécheresse on demande aux gens de faire des efforts, mais même si on se laissait tous mourir de soif cela ne ferait que 10% d'économie alors que dans le même temps on ne demande strictement aucun effort à l'agriculture et l'industrie qui dépensent sans compter les 90% restants).
Au final beaucoup d'ingrédients bigrement intéressants pour un résultat qui n'est pas si éloigné de "Merfer". Mais si China Miéville péchait par un excès de littéralité au point d'oublier ses personnages et son histoire, Aurélie Wellenstein pécherait plutôt elle par un manque de littéralité : le ton résolument Young Adult n'est pas à la hauteur du propos, et il y a beaucoup de familiarités et de facilités dans les dialogues qui tirent carrément l'ensemble vers le bas… On a fait le choix d'un stand alone et d'un roman court, tant mieux ou tant pis, mais si on avait trouvé le bon ton et le bon style, le bon format, la bonne longueur et le bon rythme pour conter cette nouvelle Odyssée, on aurait eu tout simplement un chef d'oeuvre ! Pour tout le reste les éditions Scrinéo ont fait du bon boulot avec une mise en page aérée qui se lit facilement, rapidement et agréablement (ça fait du bien un éditeur qui pense aux lecteurs avant de rogner sur le papier pour augmenter la marge bénéficiaire), et la chouette illustration de couverture du désormais bien connu Aurélien Police...


Challenge défis de l'imaginaire (SFFF) 2019
Lien : http://www.portesdumultivers..
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C'est la première fois que j'achète un roman sans même lire le résumé. Lorsque j'ai lu le titre et le nom de l'auteure, ma passion pour la nature et l'océan m'a incité à le choisir sans hésitation.

Aurélie Wellenstein est une jeune autrice française que je suis depuis plusieurs années. En explorant des thématiques variées autour de l'animalité et de notre identité, elle propose des univers imaginaires foisonnants et riches, mais également sombres et inquiétants.
A mi-chemin entre la Fantasy et le récit post-apocalyptique, l'autrice nous incite à nous pencher sur la problématique autour des océans et des mers, et de notre responsabilité quant à sa bonne santé.

Pour les lecteurs qui aiment la bande dessinée, Aurélie Wellenstein a sorti en septembre 2021 « La baleine blanche des mers mortes », un prélude à ce roman. La magnifique couverture laisse entrevoir un univers emprunt de poésie et de tristesse.

*
Aurélie Wellenstein nous projette dans une histoire assez effrayante, évoquant la souffrance des océans et la disparition de toute vie si l'homme continue à la surexploiter dans l'indifférence la plus totale.

Le monde est à bout de souffle, la vie est en sursit, l'air se raréfie.
Le réchauffement climatique a provoqué la disparition des mers et des océans. Ces vastes étendues d'eau salée se sont asséchées et transformées en déserts de sable. Les animaux qui les peuplaient ont disparu par la faute des hommes et sont devenus des hordes de créatures fantomatiques assoiffées de vengeance.
A chaque marée montante, ces cadavres vaporeux profitent de la houle pour attaquer les hommes et se repaître de leur âme.

« Sauvagement assassinés, les mers et les océans charriaient au creux de leurs vagues monstrueuses le souvenir de leur supplice, et à chaque fracas, chaque dégorgement d'écume dans le monde des humains, ils paraissaient hurler « vengeance ! ». »

La quasi-totalité de l'espèce humaine a également disparu. Ceux qui ont survécu se sont retranchés derrière les hautes murailles de bastions, attendant dans la terreur, les résurgences des marées hautes charriant les spectres des animaux marins, requins, baleines, méduses, … qui viennent se faire justice après avoir été massacrés par les hommes.

Heureusement, pour contrer ces marées fantômes, certains survivants ont développé des pouvoirs psychiques qui leur permettent de repousser les fantômes des créatures sous-marines jusqu'à la marée suivante.
Oural fait parti de ces rares individus dont les talents d'exorciste l'ont hissé à un rang élevé dans sa communauté, jusqu'au jour où le jeune homme va être enlevé par une bande de pirates menée par Bengale.
C'est le début d'une longue quête que je vous laisse découvrir à bord d'un navire fantôme qui prend vie à chaque marée spectrale. Il m'a rappelé le Hollandais Volant dans « Pirates des Caraïbes », à la fois majestueux et terriblement effrayant.

*
L'idée de départ consistant à mélanger piraterie, message écologique, évolution du monde vivant, anticipation, fantastique, spiritisme et dérèglement climatique est vraiment originale.
Ce récit sombre et cruel m'a captivée, mais il a été aussi pour moi qui aime l'océan, source de peine.

Les talents de conteuse de l'auteure, son imagination débordante sont indéniables pour raconter l'asphyxie de notre monde, l'esprit justicier des océans peuplés de spectres, le froid glacial et humide qui enveloppe le lecteur à chaque marée.
Les descriptions de ces animaux décharnés arborant les blessures infligées par les hommes sont pénibles. On ressent de plein fouet leur odeur de mort et de putréfaction, leur douleur, leur désespoir et leur colère vorace.

J'ai été particulièrement sensible aux rêves d'Oural qui décrivent la violence des hommes, l'agonie des animaux. Ces moments particulièrement forts sont d'autant plus marquants que l'auteure rend ces scènes très visuelles. Voici un extrait de l'agonie du requin découpé vivant, mais ce n'est pas le seul.

« de nouveau, l'impitoyable crochet le souleva par la bouche. Son corps franchit le bastingage. Il s'arqua en arrière, sans pouvoir résister à la traction. Il heurta le sol où il convulsa, frappant désespérément le pont du navire de la queue et de la tête. Des formes indistinctes se dressaient autour de lui. Il claqua des mâchoires. Ses forces le quittaient. Il se noyait dans l'air.
La douleur le ranima. Une douleur atroce, au niveau de son aileron. Suivie immédiatement de la même brûlure aux nageoires.
On lui arrachait les membres, on le découpait vivant.
La gueule béante, il poussa un hurlement muet.
Seuls des rires lui répondirent. »

*
A cela s'ajoute des personnages tous moralement complexes qui dévoilent lentement leurs forces et leurs faiblesses. Je regrette toutefois leur manque d'empathie qui me les a rendus assez peu sympathiques.
Bengale est un personnage charismatique mais assez opaque et inaccessible. La mission qu'il s'est fixé le rend particulièrement froid et violent. le lecteur ne comprend ses intentions que tardivement dans le récit.
Oural, quant à lui, m'a un peu agacée par ses indécisions, ses atermoiements continuels. Animé par des motivations superficielles et égoïstes, il va toutefois évoluer de manière cohérente avec son personnage.

La seule que j'ai aimé retrouver tout au long du récit est Trellia, la petite Delphine fantôme, qui est la seule à faire preuve d'empathie, de bonté, et surtout de pardon.

*
En me promenant sur la plage, encore imprégnée par cette lecture, j'ai imaginé le monde sans océans. Mes yeux se sont promenés sur cette immensité bleutée, belle et sauvage. Mes souvenirs m'ont ramenée aux magnifiques paysages sous-marins vus lors de mes plongées, à cette flore et cette faune abondantes, pleines de vie et de couleurs.
A ces images, se sont superposées celles d'une mer de sable jonchée de cadavres d'animaux marins. Au cri des oiseaux marins et au déferlement du ressac se sont substitués la mort et le silence. Et cela m'a remplie de tristesse et de découragement face à ce futur possible si les hommes ne changent pas leur mentalité et leur façon de vivre.

« On aurait pu sauver ce monde ... Mais non. On était trop paresseux, trop égoïstes. Dix milliards d'êtres humains qui dévorent les océans. Aucune limite à la croissance, l'humanité qui dépouille des millions d'espèces dans une expansion surréaliste. Et ne va pas croire qu'on ne savait pas ce qu'on faisait ! »

Portée par des images très fortes et une écriture à la fois poétique et cruelle, ce récit m'a remuée par la force de son engagement. J'ai été pilonnée par les nombreuses vagues fantômes qui accompagnent ce récit. Je suis ressortie de ce voyage incroyablement troublée, mais également avec une envie irrésistible de retourner me promener au bord de l'océan, pour l'admirer et respirer ses embruns salés.
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Dans un futur, proche ou lointain. La fin du monde n'a pas eu lieu. Mais les mers et les océans ont totalement disparu, emportant avec eux les animaux marins qui les peuplaient. Tous ont péri. Déserts de sable arides, chaleur suffocante, terre rocailleuse et craquelée, c'est le paysage qu'Oural l'exorciste, 21 ans, voit tous les jours du haut de son bastion. Là, à l'abri d'une citadelle, quelques êtres humains survivent, placé sous la protection du jeune homme. Lui seul a le pouvoir de repousser les hordes spectrales d'animaux marins qui viennent se venger des hommes lors des marées fantômes. Avides de vengeance, ils dévorent les âmes de ces humains responsables de leur disparition. Oural, vénéré comme un jeune dieu, n'a connu que cette vie. Jusqu'au jour où une bande de pirates, dirigée par Bengale, attaque le bastion et le capture. Oural, contraint et forcé, va partir pour un long voyage au bout duquel le mystérieux Bengale lui promet le salut. Fou ou prophète ? Oural trouvera peut-être le sens de sa propre destinée à l'orée de son périple.

Il ne faut jamais se fier à sa première impression. N'étant pas forcément une adepte de la littérature fantasy, j'ai parcouru la quatrième de couverture de manière assez sceptique. Des poissons aux allures de morts vivants qui se mettent à dévorer les âmes des hommes lors de marées fantômes... cela faisait beaucoup de choses à imaginer pour mon pauvre cerveau. Puis finalement, le talent de conteuse d'Aurélie Wellenstein, très souvent récompensé pour ses romans, a opéré.

Il y a tout d'abord un thème majeur dans ce roman d'anticipation glaçant, qui , par les temps qui courent, ne peut que nous interpeller : l'écologie. La surpêche, le réchauffement climatique, la pollution des mers, la disparition progressive des espèces aquatiques, tout est abordé. C'est dans un style sans détour que l'auteur nous décrit la souffrance des animaux, éprouvante pour le lecteur, traqués par les pêcheurs ou suffocant lors d'une marée noire. Les visions du jeune Oural sont terrifiantes, tout comme les paysages et personnages qui peuplent ce monde post-apocalyptique. Car les hommes subissent ce qu'ils ont engendré et leur vie est en sursis. Si les animaux ont disparu, eux ne tarderont pas à les rejoindre. Aujourd'hui survivants, ils ont connu le sort des réfugiés climatiques, vivant dans des camps où la loi de plus fort régnait. La violence, très présente dans le roman, n'épargne pas le lecteur. A coup de Kalachnikov ou d'âmes arrachées, l'hémoglobine coule à flot et certaines scènes sont vraiment glauques. Les personnages ne nous sont pas ainsi rendus forcément très attachants : en proie à leur angoisse et à leur désespoir, nous ne souhaitons pas les accompagner dans leur mission. Nous sommes un peu comme Oural, contraints et forcés. le seul rai de lumière apparaît sous la forme de Trellia, une jeune dauphine fantôme, gaie et courageuse, qui accompagne Oural dans ses combats.

Si l'auteur a voulu frapper fort avec ce roman qui plaira aux adeptes du genre, elle a réussi. Le rythme est haletant du début à la fin, réservant des rebondissements à chaque nouvelle marée haute. Glaçant, désespéré, inhospitalier, le monde d'Oural est un cauchemar que l'on ne souhaiterait pour rien au monde connaître, où les sacrifices seront nombreux pour tenter un sauvetage des mers. C'est un message écologique choc : si nous ne faisons rien pour arrêter ce mouvement destructeur, notre monde ressemblera-t-il un jour à celui du jeune héros ? Terrifiant !

Merci aux éditions Scrinéo et à Babelio pour l'envoi de ce roman.
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Mers mortes est un roman de science-fiction post-apocalyptique.

« le réchauffement climatique, en réduisant l'oxygénation des océans, avait entraîné leur acidification. Les rejets d'engrais, d'hydrocarbures et de déchets dans les estuaires avaient pollué les eaux claires et les avaient changées en écume sale et huileuse. Les récifs coralliens étaient morts les premiers. Puis la banquise s'était amenuisée sans espoir de retour. le krill à la base de la chaîne alimentaire marine avait disparu, poursuivant parmi les espèces aquatiques la désastreuse réaction en chaîne qui les avait amenés jusqu'ici : dans un cimetière. »

Ces mers mortes produisent des marées fantômes qui se déversent sur les réfugiés climatiques en spectres de poissons, baleines, requins… venues se venger de leur agonie.
Oural est un exorciste, il peut émettre un bouclier et désintégrer les spectres vengeurs. Bengale est un pirate, mi- sauvage et déterminé. À bord de son vaisseau fantôme, avançant au gré de ces marées étranges, la mission de cet équipage insolite se dessine. Le temps est compté, l'air se raréfie et bientôt la vie disparaîtra de la surface de la planète.

Un roman fascinant dans un futur cauchemardesque où les hommes ont laissé faire le génocide des océans, fabriquant eux-mêmes leur propre perte. Il reste un infime espoir de sauver la vie sous la forme d'une quête, d'un pardon, d'un lien à renouer avec la nature.

Je remercie Babelio et les Éditions Scrineo pour ce récit écologique. Il nous met face à nos erreurs, notre manque de réaction, notre insouciance, notre bêtise et notre violence envers les êtres vivants. La couverture est magnifique, couleur d'essence de vie mêlée au spectre de l'océan. Au bord du gouffre, subsiste malgré tout l'élan dessiné par la dauphine Trellia, son lien d'amitié avec l'homme.

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critiques presse (1)
Elbakin.net
25 février 2019
Au final, le récit est rapide, sans temps morts. Le mélange des genres déstabilise un peu, peut également paraître maladroit mais le roman remplit son but de (sombre) conte et de fable étrange avec pour morale de prêter un peu plus attention à ce qui se passe au niveau écologique et surtout, dans les océans.
Lire la critique sur le site : Elbakin.net
Citations et extraits (48) Voir plus Ajouter une citation
Oural s’accouda aux créneaux de la forteresse, ses avant-bras tatoués appuyés contre la pierre ocre et rugueuse, chaude de soleil. Le désert s’étalait depuis les remparts jusqu’à l’horizon tremblotant de chaleur. Difficile d’imaginer qu’il y a encore quinze ans de cela, une mosaïque de prés salés et de prairies inondées bordées de roseaux entourait la citadelle. La disparition des mers et des océans, par ricochets climatiques, avait métamorphosé cette région marécageuse en un chaos de roches basses, strié de crevasses, de sable fauve parfois vitrifié en coulures noires, et d’éboulis de terre rouge.
(incipit)
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La succession des petites dunes sous leurs pieds, pareilles à des vagues immobiles, évoquait la mer disparue. Les arêtes de milliers de poissons luisaient dans les derniers rayons de soleil et face à eux, le crépuscule jouait sur les falaises, les colorant d’innombrables nuances de violet, mauve, ocre, fauve et blond. Au sommet des murailles de calcaire, un peu d’herbe jaunie bruissait à chaque coup de vent.
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Une raie manta.
Elle flottait, immobile, à l'envers. Sa cage thoracique décharnée, blanche, était gonflée par les gaz. Ses grandes ailes noires ondulaient mollement dans les courants marins. Ses yeux étaient pochés, morts. Elle faisait deux fois sa taille.
Comme toujours Oural fut giflé par l'horreur de ses blessures. Les branchies de l'animal dégorgeaient en silence un liquide noir et son torse éthéré, trouvé par un harpon, se décomposait en bouts de chair filandreuse.
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Les camps où l'on parquait les réfugiés climatiques étaient de vastes prisons à ciel ouvert qui s'étendaient sur des kilomètres, jonchées de boue séchée, de détritus et de cadavres d'humains et d'animaux. Les migrants construisaient eux-mêmes leurs abris de fortune, des tentes, des appentis, des cabanes surmontées de toile cirée ou de tôles ondulées pour les plus "riches". Les faisceaux des miradors balayaient nuit et jour ces baraquements insalubres. Ils vivaient tous pieds nus sur la terre craquelée par la chaleur, couverts de poussière, vêtus de chiffons. Aidé par son talent de cuisinier, Congo évoqua avec une redoutable efficacité les remugles du camp : fumée, charbon, de bois, pisse et merde exacerbés par la canicule. Et là-dedans, chaque jour les viols, chaque jour les passage à tabac et les meurtres.
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Le réchauffement climatique, en réduisant l’oxygénation des océans, avait entraîné leur acidification. Les rejets d’engrais, d’hydrocarbures et de déchets dans les estuaires avaient pollué les eaux claires et les avaient changées en écume sale et huileuse. Les récifs coralliens étaient morts les premiers. Puis la banquise s’était amenuisée sans espoir de retour. Le krill à la base de la chaîne alimentaire marine avait disparu, poursuivant parmi les espèces aquatiques la désastreuse réaction en chaîne qui les avait amenés jusqu’ici : dans un cimetière.
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