Le Temps de l'Innocence ...Je ne comprends pas le titre...Innocence de qui, de quoi ? Innocence, en latin, c'est ce qui ne peut pas faire mal (nocere)...Mais dans ce livre tout fait mal ! Il n' y a pas d'innocents. May ? la jeune fiancée ? Mais elle est nuisible, c'est une machine de guerre aux grands yeux bleus et vides, toute dévouée à son clan de patriciens new-yorkais, sans l'ombre d'une idée personnelle. Newland ? D'abord machine,puis être humain par l'expérience du doute, il a déjà trahi May avant même le début du roman, en lui mentant sur sa vie de jeune homme, puis en tombant amoureux de sa cousine Ellen, double inversé de May. Ellen ? Scandaleuse (enfin, pour eux...), mais ayant connu la violence et la perversité d'un comte polonais qu'on lui a fait épouser, elle en sait bien plus sur la vie que sa famille américaine. Quant à tous les autres c'est masques et hypocrisie à tous les niveaux. Alors expliquez-moi le titre. C'est peut-être un rêve d'innocence, celle que les jeunes générations que l'on trouve à la fin du livre attribue à leurs parents et grands-parents, comme si le silence assourdissant où leurs aînés ont souffert n'était pour eux qu'un silence paisible...
Bref, en tout cas, un roman archétypal d'
Edith Wharton, à la perfection triangulaire, où la société broie les êtres, tous, les forts et les faibles. Où l'on est condamné à rater sa vie. Où nulle fuite n'est possible. D'une tristesse infinie. Avec le vrai visage de l'amour dans
les yeux d'Ellen. Avec Newland qui s'approche de la liberté jusqu'à en sentir le souffle ...Avec May qui le retient, ses deux bras frêles gonflés de la force surhumaine que lui procure le soutien de toute une culture...Ce ne sont pas les hommes qui dominent le monde, leur cors
et est aussi serré que celui des femmes...C'est un principe de soumission à un ordre supérieur qui ne supporte aucune forme de chaos, qui se construit et se reconstruit à chaque génération, dans le sang de ses victimes sacrificielles, et qui change toujours de visage, pour que jamais les contemporains ne le reconnaissent. Quel est le nôtre, madame Wharton ? -Lis donc les grands auteurs de ta génération, Agathe, et tu apercevras le visage de la b
ête...