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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Peut-être avez-vous déjà vu cette photographie d'Edith Wharton assise, sa maigre figure dévorée par deux grands yeux sombres. L'une de ces aristocrates nés dans la grandeur, élevés dans des rêves de grandeur, pour qui les parents firent de grands rêves… Et qu'un feu intérieur jeta soudain un jour sur les routes de Mongolie ou dans les bouges misérables où des artistes en loque caressent dans leur tête les idées qui révolutionnent un style. C'est à Paris qu'elle posa ses bagages et fréquenta les plus grands écrivains de son temps, mais c'est à New-York que sa jeunesse fut dorée sur tranche.

Ce New-York qui fut le sien, et que nous découvrons via les yeux de son héros, Newland Archer. Et ce n'est pas le New-York des buildings et de de Time Square des séries. C'est un monde totalement à part, isolé, constitué des quelques dizaines de familles les plus riches et les plus anciennes de New-York – et par extension, de l'Amérique. Leurs vies se déroulent entre leurs magnifiques demeures, l'opéra et les réceptions chez leurs paires. Ceux qui ne font pas partie de leur petit cercle n'existent tout simplement pas à leurs yeux. Cette minuscule société est régie par un nombre absurde de codes. Qui on fréquente, quelles réceptions on snobe ou on honore de sa présence, quels vêtements on met pour le dîner, comment on décore son intérieur, quelle fleur on pique à sa boutonnière… Tout est méticuleusement réglé.

Et ce qui est intéressant c'est que le héros, Newland, ne remet absolument pas tout cela en cause. S'il ne voit pas ce petit codex comme une liste de commandements sacrés et absolus, il les apprécie pour ce qu'ils sont : les liens invisibles qui maintiennent la cohérence d'une minuscule élite, le ciment de la puissante conscience de classe (au sens marxiste du terme) qui leur permet de se considérer comme non seulement supérieur au reste de la société américaine mais surtout à leurs homologues européens dont ils envient tant les particules. Newland aimerait parfois avoir plus de marges de liberté mais au fond, ces codes, c'est sa vie.

Mais son monde est chamboulé par le retour impromptu d'une des membres de cette petite société, la comtesse Olenska, qui n'est autre que la cousine de la fiancée de Newland. Que fuit - elle ? Pourquoi a-t-elle abandonné son mari et veut même – scandale !!! – en divorcer ? Personne ne sait. Personne ne demande. Sa famille resserre les rangs autours d'elle, mais doit bientôt se rendre à l'évidence : pour elle, les codes de la société new-yorkaise sont transparents. Choisit-elle délibérément de les ignorer en étant consciente de l'opprobre qui en retombera sur ses parents, ou est-elle simplement inconsciente de ces règles non écrites ? On ne le saura jamais.

Mais ce que sait Newman, c'est ce que représente pour lui ce beau visage un peu triste. Brusquement, quelque chose a fait irruption dans sa vie. Quelque chose qu'il ne trouvera jamais auprès de la beauté parfaite et du tempérament marmoréen de sa fiancée. Quelque chose qui remet en cause tous les codes de son monde, toutes les règles auxquelles il s'est conformé, tous les choix de vie qu'il a pu faire jusqu'à présent…

L'écriture, magnifique, sait souligner avec ironie le côté absurde de ce monde ultra-codifié que s'est construit une minuscule classe d'ultra-privilégiés, et où les sentiments humains peuvent brutalement – et pour peu de temps – reprendre la place qui leur a purement et simplement été refusée. Et pour autant, quelque chose transparait clairement dans la totalité du récit : aussi consciente qu'elle puisse l'être de ses travers c'est SON monde à elle, Edith Wharton, et elle l'assume.
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Nous sommes à la fin du XIXe siècle.
Le jeune Newland Archer est à l'Opéra, lieu où la haute bourgeoisie new-yorkaise se plaît à se rassembler.
Archer n'a de cesse de diriger son regard sur la loge de May Welland, sa promise, en qui il voit l'épouse parfaite celant ainsi l'alliance de deux familles honorables, lorsqu'une jeune femme y fait son entrée, semant un brouhaha d'indignation autour de lui. C'est la cousine de May, la comtesse Ellen Olenska, arrivée d'Europe, fraîchement séparée de son mari et recueillie par la famille de May.

Archer est embarrassé car il ne sied pas à une famille d'accueillir en son sein une femme séparée et qui fait l'objet de nombreux ragots.
Il suggère à May d'annoncer leurs fiançailles sans tarder pour garder l'honneur de la famille. Pourtant il tombe très rapidement amoureux de cette jeune comtesse qui n'a cure des conventions new-yorkaises.

Au travers de cette romance, le temps de l'innocence nous dresse le portrait de la haute société new-yorkaise de l'époque, une communauté fermée dans laquelle il convient de respecter des conventions et des règles parfois absurdes au risque d'être méprisé. le jeune et naïf Archer qui « par sa culture intellectuelle et artistique se sentait nettement supérieur à ces spécimens choisis dans le gratin du vieux New-York » se verra pourtant habilement manipuler par ses pairs, ses espoirs d'une vie libre et heureuse seront réduits à néant. La jeune comtesse s'en tirera finalement mieux que lui. Son respect, son audace et son courage en font un personnage féminin progressiste et exquis.
« Lui, il avait vécu avec son souvenir ; mais autour d'elle il y avait eu toute une société, toute une vie ».

C'est un roman poignant qui a suscité chez moi une empathie débordante pour ce jeune homme sensible et rêveur tiraillé entre liberté et convenance et dont le destin sera dirigé sournoisement par un monde aristocratique qui lui échappe, piégé par ceux qu'il critique pourtant sévèrement et par sa propre innocence.



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Première femme à obtenir le #prixpulitzer en 1921, #EdithWharton est une des grandes romancières américaines du début du 20ème siècle et je me félicite de l'avoir enfin découverte!!

C'est Newland Archer, jeune, beau, élégant représentant de la haute bourgeoisie new-yorkaise qui nous introduit dans ce monde, levant le rideau de sa loge sur le "brillant auditoire" réuni en cette soirée d'opéra dans l'Académie de Musique. Digne héritier des convenances et des traditions de son milieu, il doit bientôt annoncer ses fiançailles avec la jeune et innocente May Welland. Un futur mariage qui satisfait aussi bien l'orgueil d'Archer que le conservatisme de ce milieu.

Mais l'entrée en scène de la cousine de May, la troublante Ellen Olenska, tout juste débarquée de la vieille Europe sans son mari, va faire l'effet d'une bombe dans ce milieu hyper codifié et, évidemment, dans le coeur et les certitudes de Newland.

E. Wharton propose une description minutieuse et absolument délicieuse de la fin d'une époque et d'un milieu sclérosé qui tente par tous les moyens d'absorber l'irrégularité et la menace pour l'ordre établi que représente Ellen. le tempérament passionné, le charme envoûtant de l'esprit libre de cette femme séduisent pourtant Newland qui ne peut dès lors plus revenir aux principes figés qui régissaient sa vie.

Il y a de l'ironie bien sûr chez l'autrice américaine, mais aussi beaucoup de tendresse et de mélancolie dans la façon dont elle dépeint les sentiments de ses personnages. J'ai vraiment adoré cette étude de moeurs qui se déploie avec subtilité dans une histoire d'amour parfaitement exquise.

"... il lui avait érigé dans son coeur un sanctuaire qui bientôt était devenu le seul théâtre de sa vie réelle ; là aboutissaient toutes ses idées, tous ses sentiments. Hors de là, sa vie ordinaire lui semblait de plus en plus irréelle."

Un Pulitzer et une autrice a découvrir absolument!
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J'avais adoré Ethan Frome de la même écrivaine, lu l'hiver dernier et j'ai retrouvé la même magie des mots pour décrire la société aristocratique de New York à la fin du 19ème siècle. Et ce même thème de gens qui passent à côté de leur vie en sacrifiant leur amour aux exigences de leur société
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Sans le moindre doute, le sommet de l'oeuvre de la grande auteure américaine.

Sous une plume éminemment élégante, classique et moderne à la fois (si, si, c'est possible !), on y trouve tous les thèmes qui lui sont chers.

Edith Wharton y développe le portrait de l'Amérique de la Nouvelle Angleterre, alors en pleine transformation, ainsi qu'une critique acide - mais subtile ! - de l'aristocratie puritaine.

Elle y dépeint avec lucidité le poids de l'argent tout puissant, mais aussi la difficulté des femmes de son époque à s'affranchir de siècles de domination masculine.

L'adaptation cinématographique, avec Scorsese à la réalisation, Daniel Day-Lewis et Michel Pfeiffer dans les principaux rôles, est une pure merveille.

Enfin, il est essentiel d'ajouter que ce bijou est un des plus jolis romans d'amour que j'ai eu l'occasion de lire au cours de ma riche vie de lecteur !
Lien : https://www.letournepage.com..
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Attention, chef d'oeuvre !

J'avais eu une période de lecture de livres d'Edith Wharton, mais je m'étais refusée à lire le temps de l'innocence alors que le film de Martin Scorsese venait de sortir sur les écrans. Ecrit en 1920, il nous parle du New York des années 187.., où du moins des quelques familles dont la richesse "ancienne" en fait une sorte d'aristocratie du nouveau monde, avec ses codes et ses conventions, aussi contraignantes que les corsets des dames.










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Tout arrive. le Pulitzer du mois sera dans les temps (🥳) et ce sera une relecture d'un roman que j'ai beaucoup aimé lorsque je l'ai lu il y a très longtemps.

Newland Archer vient de se fiancer avec May Welland lorsqu'il est troublé par l'arrivée de la cousine de cette dernière, la comtesse Olenska.
Celle-ci, séparée d'un mari qui a fait de sa vie un enfer, et après avoir vécu avec lui en Europe, rentre à peine à New-York et n'est pas très respectueuse des usages en vigueur dans la haute société.
Newland va se retrouver tiraillé entre son attirance et son attachement pour cette femme et la loyauté qui le lie à sa fiancée.

Qu'Edith Wharton est brillante lorsqu'il s'agit de dépeindre cette société complexe, quelles nuances elle apporte à son tableau !
Mon roman préféré d'elle est Chez les heureux du monde, mais je dois avouer avoir terminé le temps de l'innocence, les yeux gonflés de larmes et le coeur serré, la peinture était si belle.

Maintenant, je vais pouvoir regarder le film de Scorsese (et râler si je ne le trouve pas à la hauteur 😁).
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J'avais adoré ce roman à ma 1ère lecture lorsque j'étais étudiante. Je viens de le relire et il me plaît toujours autant.
Newland Archer, jeune homme de la haute (voire très haute) bourgeoisie new-yorkaise est toute à son affaire suite à ses fiançailles avec la jolie et très bien éduquée May. Tout est codifié, organisé et planifié pour aller vers LE mariage (de l'année ?) sauf le grain de sable incarné par....le retour de la Comtesse Olanska, cousine de May, mariée à un Polonais, un Européen donc issu d'une société plus ouverte, façon de dire, plus viciée, dépravée.
E. Wharton nous a offert un roman d'une hautissime valeur littéraire : le style, le ton, le vocabulaire, l'histoire maîtrisée avec de la profondeur et une réelle beauté. Sans compter cette étude fine que lui envieraient tous les sociologues de la terre tant son roman nous livre avec une précision nette un portrait de cette bourgeoisie du XIXème siècle de la côte est américaine.
Sincèrement c'est beau, c'est intéressant. Et j'ai toujours trouvé la fin poignante.
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Il y a parfois des oeuvres qui nous dépassent, et quand c'est le cas, il est difficile d'en parler et de leur rendre le juste hommage. le temps de l'innocence fait partie de ces oeuvres-là !

Le temps de l'innocence est le roman du raffinement, un roman tout en subtilité, en sous-entendus et en non–dits, loin des sentiments superficiels et ostentatoires que l'on retrouve souvent dans les romans d'amour. Et pour cause, selon moi, il ne s'agit pas d'un roman d'amour mais d'un roman de moeurs, un roman sociologique et psychologique, qui place au coeur de son intrigue un triangle amoureux et nous donne à lire la plus belle histoire d'amour qu'il m'ait jamais été donné de lire.

Ce roman est un bijou d'émotions, de délicatesse et d'élégance. La plume d'Edith Wharton est précise et raffinée, ses personnages sont profonds, attachants, loin de tout manichéisme. L'autrice retranscrit parfaitement le déchirement que vit Newland Archer, tiraillé entre le confort rassurant de ce qu'il a toujours connu, de sa caste, avec May Welland et l'attrait de la liberté et de l'originalité que représente la Comtesse Olenska. Il oscille sans cesse entre ses sentiments grandissants pour l'indépendante Ellen et son respect pour la douce May, se heurtant constamment à son incapacité à sortir de son milieu corseté. La machine sociale pèse sur Newland et semble ne jamais laisser à l'individu la place de s'exprimer : « Chez nous, il n'y a ni personnalité, ni caractère, ni variété. Nous sommes ennuyeux à mourir. »
Newland choisira-t-il le coeur, au risque de devoir renoncer à une brillante carrière et à la bienséance, ou choisira-t-il la prudence et son quotidien familier, au risque de se sentir comme un usurpateur dans une vie rongée par le regret ?

En toile de fond, une fresque impitoyable et ironique de la haute bourgeoisie new-yorkaise du XIXème, son hypocrisie, sa morale étriquée, son conservatisme, qu'Edith Wharton critique, sans non plus en faire un pamphlet vindicatif. Il y a de la nuance dans ce récit, et j'aime la nuance !

Ce roman vaudra à Edith Wharton d'être la première femme à obtenir le Prix Pulitzer en 1921. Un prix amplement mérité qui vient souligner un immense talent que je ne peux que vous encourager à découvrir.
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je ne connais pas du tout cette auteure avant de commencer la collection les romans éternels. Et comme entre deux romans contemporains j'aime bien lire des classiques, j'ai choisi celui ci dès que j'en ai eu dans les mains. Ce fut une grande et belle découverte. Bon j' avoue je me suis un peu perdue dans les prénoms et les noms de famille 🤣 mais je n 'ai pas perdu le fil de l'histoire de Archer , May et Ellen. Belle lecture
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