« J'ai grandi au milieu des copines prostituées de ma mère. Entre Stefania, Anita, Maria, toutes Russes, toutes incapables de rentrer chez elles, puisque de toute façon chez elles, c'était pire. »
Hannah est
une fille de pute. Très jeune elle comprend que la profession de sa mère la rend différente, à l'adolescence, on lui fait comprendre que cela fait d'elle une paria. Une honte à la bonne morale, un tabou social qu'on préfère ne pas voir.
Voir cette face-là de l'humanité rend Hannah agressive et désabusée. Et pourtant, elle pourrait elle aussi être une fille presque comme les autres.
A qui la faute ?
Dans ce monologue coup de poing,
Jo Witek fait parlée une ado qui a la haine (comme beaucoup d'ados) et qui a plus d'une bonne raison pour être en colère !
C'est avec des mots percutants et très affutés que
Jo Witek évoque le sort d'Olga, la mère, une pauvre malheureuse à la vie chaotique et cabossée qui l'a menée sur le trottoir et non soulève le coeur.
L'auteure s'attaque à un phénomène peu évoquée en littérature jeunesse (en dehors du génialissime Big Easy ! mais dans un ton bien différent). Plus que sur la prostitution elle-même, elle amène ses lecteurs à porter un regard différent sur les clichés et stéréotypes qu'on véhicule dans l'éducation sur les filles et les garçons - et comme la déviance de la "norme" est réprimée socialement !
Avec la petite histoire d'amour , qui permet d'abord d'alléger le ton de l'histoire,
Jo Witek nous amène aussi à réfléchir à tous ces ados qui basculent parce qu'ils grandissent trop vite en étant mis face à des épreuves de la vie qu'ils n'étaient pas assez matures pour affronter.
Un roman très court mais d'autant plus percutant par la violence qu'il évoque. A lire.
(La vision utopiste de la fin permettra sans doute une discussion intéressante avec des ados)