Dans un style simple, accessible et concis, l'auteur aborde en mettant en scène ses personnages, des sujets variés et graves pour certains.
Les chapitres sont bien découpés, ce qui en rend la lecture aisée et agréable.
Il s'agit certes d'un roman, mais que sait-on en fin de compte de la naissance de la psychothérapie ? (Je ne spécifie pas:
psychanalyse, dont on voit l'embryon se développer dans les échanges entre
Freud et Breuer).
Qui a inspiré qui ? Il est bien décrit que
Nietzsche s'est vraisemblablement intéressé dans ses écrits à la « compréhension de soi ».
A travers le dialogue entre le philosophe et le médecin, nous découvrons d'abord la part humaine (trop humaine...) de chacun d'eux et nous nous rendons compte de la complexité de la relation médecin-patient. Cette par humaine m'a d'ailleurs beaucoup touchée.
Nietzsche auquel la notion de pouvoir dans la relation est chère, a du mal à demander de l'aide. Ce n'est qu'en se voyant octroyer le rôle de soignant qu'il pourra s'ouvrir petit à petit à son thérapeute.
Il est de notoriété que dans une relation psychothérapeutique chacun est soignant et soigné en même temps.
Le passage où l'on discute de l'opportunité ou pas de dire toute la « vérité » au patient m'a particulièrement intéressée. Les médecins y sont régulièrement confrontés et il n'est pas facile de dire ce qu'il convient de faire ou pas.
Et le symptôme que révèle-t-il ? Choisit-on inconsciemment sa maladie ? Ceci est bien admis dans les situations où le patient en souffrance psychologique, développe des symptômes physiques.
Parfois, la difficulté de l'élaboration psychique fait que le mal être s'exprime via le corps.
« le symptôme n'est rien d'autre qu'un messager, chargé d'annoncer que l'angoisse est en train de monter depuis les tréfonds de l'âme » p.373.
Notez d'ailleurs ce qui déclenche la dernière crise de migraine de
Nietzsche dans le livre...
La notion d'angoisse utile, abordée par
Nietzsche est également très intéressante. Certains peuvent être paralysés par l'angoisse et d'autres peuvent en faire un moteur. Faut-il donc toujours combattre l'angoisse qui de toute façon quel qu'en soit la forme est inhérente à notre nature humaine ?
L'avidité pour certains plaisirs permet-elle de « sédater » nos angoisses métaphysiques ?
Une bonne partie du roman est consacrée à une analyse des relations amoureuses, de l'attirance sexuelle et du libre choix de son existence.
A noter l'idée de
Nietzsche qui veut que l'on ne songe à faire des enfants que quand on est prêt à être créateur. C'est à dire à créer une version améliorée de soi et non pas une copie conforme. Ceci pourrait faire l'objet d'un long débat !
Par ailleurs, il souligne également la nécessité de se connaître soi-même avant de se mettre en couple. Il faudrait veiller à être un "je" avant de penser à être un "nous"...
L'attirance de Breuer pour Bertha est admirablement décortiquée et démontre à quel point, alors que nous nous arrêtons souvent à une explication superficielle de l'attirance physique, celle-ci est beaucoup plus complexe et fait référence à beaucoup d'événements inconscients.
Son soulagement après la séance d'hypnose qui peut sembler très rapide, me fait penser que les entrevues avec
Nietzsche ont quand même été très bénéfiques et ont permis de mieux cerner la problématique.
C'est en définitive la combinaison des deux thérapies qui a permis à Breuer de retrouver un peu de sérénité.
Sans oublier l'effet valorisant de ces séances sur la personne de
Nietzsche qui résistera longtemps avant de confier ce qu'il porte comme souffrance.
Quant à la répétition des événements, je crois que nous avons tendance à répéter certains comportements dans certaines situations particulières car nous obéissons à des schémas inconscients, mais la façon dont cela est présenté par
Nietzsche dans le roman reste un peu vague et peu saisissable pour moi.
A mon avis, chaque lecteur peut se sentir concerné de près ou de loin par certains aspects de ce livre. Certains pourraient même vivre cette lecture comme une véritable thérapie.
Ce roman, que je quitte à regret, m'a donné envie de me pencher plus sérieusement sur la pensée de
Nietzsche qui me semble être plus que digne d'intérêt.
Je lirai prochainement «
mensonges sur le divan » !