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EAN : 9782322487004
224 pages
Books on Demand (11/10/2023)
4.42/5   32 notes
Résumé :
Une prémonition ? : « Je voudrais faire des portraits qui un siècle plus tard aux gens d’alors apparussent comme des apparitions » En écrivant cette phrase à sa sœur Wil, le 5 juin 1890, Vincent Van Gogh pouvait-il se douter que son souhait se réaliserait ?
Je me suis rendu dans cette petite commune d’Auvers-sur-Oise où la présence de Vincent Van Gogh est toujours perceptible. Je l’ai rencontré. Il est devenu un ami. Je n’ai eu qu’à l’écouter.
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Que les blés sont beaux - L'ultime voyage de Vincent van Gogh.
Alain Yvars - Roman - Lu en mars 2020.

Jour 12 du confinement dû au Covid-19 - Bruxelles, le 29 mars 2020.

Je reviens à la réalité que j'ai quittée quelques heures, j'étais avec Vincent van Gogh, je l'ai accompagné du 17 mai 1890 au 29 juillet 1890.

Vincent,

130 années me séparent de votre dernier jour de vie, mais votre présence est toujours vibrante aujourd'hui, vos oeuvres que vous aviez tant de mal à vendre sont exposées dans bien des endroits du monde, témoins ô combien vivants de votre personnalité tourmentée.
Vos recherches picturales, vos rencontre avec d'autres grands peintres amis, votre attirance pour les estampes japonaises, tout cela a façonné votre talent si particulier.

Votre frère Théo et son épouse Jo très proches de vous n'ont cessé de vous porter aux nues et de vous encourager. Ils ont prénommé leur petit garçon comme vous, Vincent Willem dont vous fûtes le parrain.

Après avoir passé plusieurs mois en Provence où vous êtes allé découvrir d'autres lumières, d'autres paysages, d'autres couleurs et la souffrance, c'est Théo qui vous suggéra de vous rendre à Auvers-sur-Oise en Ile de France pour y rencontrer le Dr Gachet susceptible de vous guérir de vos démons intérieurs.

Et Théo a eu bien raison, les derniers mois de votre vie furent sans doute les plus beaux. Vous avez peint avec frénésie, un peu comme si vous saviez inconsciemment que le temps vous était compté. Ce fût une explosion de nature, de couleurs, le bleu, le jaune, le violet, l'orange, le rouge... du matin au soir vous parcouriez les routes et chemins avec votre chevalet et vos peintures à la recherche du paysage et de la lumière qui vous convenaient, vous étiez alors dans votre élément, seul au monde avec vos yeux pour voir et vos mains pour peindre.

C'est ainsi que j'ai vécu avec vous jour après jour, partant de l'auberge des Ravoux chaque matin pour partager votre vie de peintre, votre passion, vos moments de doutes, vos rencontres dans ce petit village de France, vos échanges épistolaires avec Théo et Jo.

Vous étiez heureux Vincent mais vos démons vous ont rattrapés et je vous ai perdu ce 29 juillet 1890.

"Vous êtes levé.
Vous vouliez être debout.
Fier.
Votre regard levé vers le ciel discernait d'infimes nuances de ce bleu cobalt que vous aimiez tant. Vous vous êtes tourné vers le champ face à vous.
"Pardonnez-moi Théo et Moe!" (la maman de Vincent et Théo)
Le bruit sourd de la balle qui traversa vos chairs vous surprit.
Que les blés sont beaux" pages 233-234 fût votre dernière pensée.
Je ne vous ai pas dit adieu Vincent, mais au-revoir car je vous retrouverai au détour d'une allée de musée et je m'arrêterai pour vous faire un petit clin d’œil et vous saurez que c'est moi.

Alain Yvars m'a offert son livre accompagné d'un petit mot que j'ai bien plié et que j'ai utilisé comme garde-page tout au long de ma lecture, livre qui a trouvé une belle place dans ma bibliothèque.
Alain Yvars, passionné de peinture, a mis des couleurs dans chaque mot, mais pas seulement, son cœur aussi est dans ce roman, Vincent est son ami. Il en parle si bien.
Bien que ce soit un roman, Alain Yvars s'est documenté dans quelques ouvrages dont une bibliographie se trouve en fin de livre.
Il a écrit un autre livre également : Conter la peinture.

Et puis, j'ai découvert qu'il était aussi un homme au grand coeur, les bénéfices de la vente de ce roman sont destinés intégralement à l'association RÊVES qui offre aux enfants gravement malades l'occasion de réaliser leurs rêves.

Un tout grand merci Alain pour cette belle découverte, pour votre plume qui m'a permis de découvrir d'une manière si lumineuse les derniers mois de votre ami Vincent.

Un livre à lire.


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Ce livre est pour ceux qui vont au musée pour y chercher de l'oxygène.
Vous n'allez pas le croire : on me l'a offert pour ma fête sans que je suggère quoi que ce soit ! Mais cette coïncidence se révèle moins rare quand on me connaît car j'adore lire sur les grands artistes et la peinture est pour moi une source d'émerveillement infini.
Donc je devais le lire, cela ne pouvait pas être autrement ! Je devais le lire pour son grand luxe de détails et parce que je suis très friande de belles descriptions. Et là, l'écriture d'Alain Yvars a quelque chose de magique : je ne sais pas par quelles associations d'idées les couleurs de Van Gogh défilaient constamment devant mes yeux pendant ma lecture. Le jaune, le violet, le bleu… Je me suis baignée, je me suis noyée dans cette beauté. J'ai particulièrement apprécié le réalisme du livre. La nature est là, on la respire, elle donne faim, le grand air, ça creuse ! Une grande toile, ça creuse…
C'est un Van Gogh intime avec ses hésitations, ses peurs, ses ivresses. Alain Yvars entre totalement dans le processus de création, il connaît bien plus de choses sur son héros que ce qu'il nous raconte. Il invente car il le faut pour aller toujours plus loin dans son amour pour ce génie. Humanité et divinité d'un artiste. C'est cela le thème de cette oeuvre pour moi.
C'est un livre si réussi que je me demandais qu'est-ce que ce serait s'il s'agissait non de Van Gogh mais de Vermeer, le peintre préféré d'Alain ? ! Mais Tracy Chevalier l'a devancé. Quoiqu'il n'est jamais trop tard si le romancier change le point de vue…
Pour résumer, c'est un livre où j'ai trouvé de l'oxygène et de l'inspiration. Un livre après lequel le pinceau est devenu encore plus vivant pour moi. C'est beau et triste à la fois, la fragilité de l'artiste, une sensation de perte d'un être cher qu'on éprouve à la fin. Un sentiment d'humanité qui monte en nous, une envie d'être plus attentifs à chaque instant de vie, aux êtres qui nous entourent. Ce livre, tout en étant un roman, fait étrangement vibrer l'instant comme un haïku.
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Que les blés sont beaux, L'ultime voyage de Vincent van Gogh, a été écrit par Alain Yvars, en 2018. Bien qu'étant un premier roman, il n'en est pas moins remarquable par son écriture toute en délicatesse.
La couverture reprenant un détail du « Champ de blés avec des cyprès » de 1889 est une excellente invitation à ce voyage et mon regard reviendra souvent à celle-ci lors de ma lecture, de même qu'à l'autoportrait (1889) de la page 4. La chanson de Jean Ferrat « Les tournesols » m'accompagnera aussi.
Il faut être doté d'une très grande sensibilité, d'une connaissance approfondie de l'art et d'un grand amour pour ce peintre qu'est Vincent van Gogh, cet homme au talent fou et avant-gardiste, pour écrire un roman aussi touchant, émouvant et très enrichissant.
Il faut préciser que l'auteur pour écrire cet ouvrage s'est plongé dans de nombreux documents et dans l'abondante correspondance de l'artiste, la majorité de ses lettres a été envoyée à son frère Théo, son plus grand soutien avec qui il a entretenu une relation assidue aussi bien sur le plan personnel que professionnel.
Alain Yvars s'est également rendu dans cette petite commune d'Auvers-sur-Oise où la présence de Vincent est, dit-il, toujours perceptible.
Le résultat est effectivement probant. Vincent est là, présent, se dévoile. Il raconte à Alain cet ultime voyage, depuis son arrivée à Paris, gare de Lyon, accueilli par son frère Théo le samedi 17 mai 1890, jusqu'au dimanche 27 juillet 1890, où il se suicide, à Auvers-sur-Oise en se tirant un coup de revolver dans la poitrine, à l'âge de 37 ans.
Ce sont deux mois et demi de sa courte vie qui sont retranscrites mais une vie tellement prolifique. Il a produit pas moins de deux mille oeuvres d'art et ce, sur dix ans de travail, et quelles oeuvres !
Il faut être peintre comme l'est l'auteur et avoir réussi à devenir l'ami de ce génie, pour réussir un ouvrage de cette qualité.
C'est donc en toute simplicité, que nous partageons les joies de Vincent, notamment lors de son arrivée à Paris, le plaisir qu'il éprouve en faisant connaissance avec sa petite belle-soeur Jo et avec son neveu et filleul, son petit homonyme de trois mois ! Il confie aussi son angoisse et ses craintes d'avoir de nouvelles crises comme dans les derniers mois écoulés, mais n'est-il pas venu justement à Auvers, pour rencontrer le docteur Gachet, sur les conseils de son ami Pissaro et de Théo, le médecin ayant répondu de sa guérison. Nous sommes en permanence à ses côtés dans ses promenades à courir la campagne en quête de motifs et de modèles. Et là, chose sublime, il nous dévoile très humblement sa technique de peinture et nous permet d'assister à la création de plusieurs de ses toiles. le récit dévoilant la manière dont l'artiste réalise ses peintures, que ce soit l'extraordinaire église d'Auvers, ou le portrait d'Adeline Ravoux, la fille de l'aubergiste ou de Marguerite Gachet, la fille du docteur ou d'autres encore m'a littéralement éblouie et subjuguée : je voyais l'artiste peindre et ressentais sa passion et en même temps la force incroyable de sa peinture. Quant à l'avis que porte le jeune Georges sur la toile de l'église, il est d'une pertinence absolue. Merci Monsieur Yvars pour ces émotions intenses.
Vincent évoque tout au long du roman, des bribes de sa vie, sa jeunesse en Hollande, son séjour en Provence, les grands maîtres qui l'ont inspiré et son aspiration à toujours progresser, à toujours aller plus loin, la sincérité et l'émotion face à la nature devant toujours guider son travail.
C'est une lettre de Théo qui lui confie son inquiétude pour son travail et pour le petit Vincent Willem, malade, qui va perturber Vincent lui rappelant un souvenir lointain qui le hante toujours. Une immense solitude l'étreint soudain, il se sent terriblement seul.…
Une lettre adressée à sa soeur Willemien le 5 juin 1890 apparaît comme prémonitoire : « Je voudrais faire des portraits qui un siècle plus tard aux gens d'alors apparussent comme des apparitions ».
Merci Vincent, merci Alain, vous m'avez, le temps d'un livre et plus encore, emmenée dans une intemporalité baignée de poésie, de couleurs, de fraîcheur et d'authenticité.
Objets inanimés, avez-vous donc une âme ?
Que les blés sont beaux en a une, je peux vous l'affirmer, je l'ai rencontrée.

Lien : https://notre-jardin-des-liv..
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Écrire la peinture. Retranscrire avec les mots une façon de peindre, elle-même reflet d'une âme, d'un caractère, d'une façon d'être à la vie, à une époque particulière, à un endroit bien précis.
Tel est le pari réussi d'Alain Yvars (@jvermeer), conteur de peinture, cueilleur empathique de couleurs et de lumières. Se mettant « à la place de », en l'occurrence ici à la place de Vincent van Gogh, Alain Yvars m'a projeté avec émotion à Auvers-sur-Oise en juin-juillet 1890, dernière commune du peintre dont il donne une vision romancée, mais au plus près du réel (sur la base de courriers, de documents, et de la correspondance du peintre), de ses dernières semaines de vie.

« Un sentiment d'infini…En cette fin d'après-midi, le soleil déclinant léchait de citron vert le champ bordant l'horizon, juste sous les nuages moutonneux qui avançaient lentement sur la gauche ».

Cette lecture a été une jolie et agréable parenthèse bucolique. Je fus littéralement avec Vincent van Gogh, je l'ai vu vivre dans cette petite ville au charme suranné, l'ai imaginé arpenter les bords de l'Oise avec son carnet de croquis ou son chevalet. Assise à ses côtés lorsqu'il peignait, j'ai ressenti sa singularité, sa rage créative, sa façon très visionnaire de manier le pinceau.
Certains de ses tableaux, dans ce roman, naissent, éclosent, avancent, se terminent, sèchent sous nos yeux, et je profitais du tableau d'ensemble transmis avec brio par les mots d'Alain Yvars pour aller voir ensuite le véritable tableau sur internet. Je me surprenais à grossir les images, pour voir de plus près la technique expliquée par le peintre lui-même. La superbe église d'Auvers-sur-Oise, ses pittoresques chaumières, les ciels dont il fait sa prédilection, aux différentes tonalités de bleu et parfois dentelés d'arbres dressés, les champs de blé melliflus parsemés de coquelicots en petites touches sanglantes, ses multiples portraits de femme…Je les ai tous retrouvés, les ai appréhendés selon une approche nouvelle. Ces traits de couleurs en bâtonnets épais donnent une telle énergie à la représentation, un mouvement, un tourment, une âme, ne faisant pas de ces tableaux de simples reproductions, transformant « cette végétation pacifique en un brasier agressif".

« Les teintes bleues et orangées, accolées, s'harmonisaient parfaitement. Ce n'était pas une simple copie de la nature, j'y voyais une force, un rythme, une vie…Je ressentais l'avancement des nuages, la progression en zigzag des oiseaux, le ploiement des blés sous le vent. Les chemins ondulaient vers un lointain mystérieux ».

Ces explications sensibles et vivantes m'ont émue. Je n'admirerai plus les tableaux de Vincent van Gogh de la même manière désormais. En cela je remercie chaleureusement Alain Yvars, de m'avoir éclairée et, à la différence d'un simple essai ou manuel sur la peinture, la forme romancée convoque également le coeur et pas seulement l'esprit. Il nous dit en 4ème de couverture qu'il est allé à Auvers-sur-Oise où il n'a eu qu'à écouter le peintre. Cela parait si simple et pourtant, pour arriver à une telle empathie, quel travail de recherche (la bibliographie nous le montre), quelle sensibilité, quel amour pour ce peintre et quelle plume ! Oui, il en faut du talent pour arriver ainsi à nous mettre dans la peau de Vincent van Gogh d'une façon si naturelle. L'auteur réussit vraiment à imaginer ce que voyait le peintre. Cela donne un style poétique immersif au centre duquel la nature est omniprésente, où les couleurs règnent en maitre. le bleu, le violet, le jaune, le rouge, des couleurs brutes, intenses, sans mélange, à la cohabitation surprenante. Des couleurs pour ressentir à moins que ce ne soit les sensations mises en couleur, sentiments impétueux, fougueux, explosifs, dont les couleurs seraient les messagères. Influence de l'un sur l'autre et de l'une sur l'autre, la nature guide Van Gogh et semble même être en phase à ses changements d'humeur, étranges prémonitions.

« Avec le mauve restant sur la palette, additionné de vert, je couvris de virgules le devant ombré de l'église qui parut envahi de larves rampantes, grouillantes, s'élançant à l'assaut des murs. Un court instant un nuage rosé surprit mon attention. Il s'accrocha bizarrement au clocher puis s'effilocha dans l'azur. Je changeai de brosse pour les parties claires. J'ensoleillai le pré devant l'église et alignai ensuite verticalement des bâtonnets ocres sur les deux chemins sinueux qui l'encerclaient. le contour des toits fut souligné de lignes claires irrégulières, contrastant avec le ciel sombre ».

Quelques mots sur la présence du peintre dans cette commune. Vincent van Gogh y est venu pour oublier son mal qui l'a tant fait souffrir dans le Sud, mal psychologique, et pour se soigner grâce aux bons soins d'un certain docteur Gachet. Nous voyons un Vincent van Gogh plein d'élans, d'optimisme, volontaire, souvent joyeux, doutant parfois, sensible, passionné par son art, très proche de son frère Théo qui croit en lui et subvient à ses besoins, le peintre n'arrivant pour le moment pas à percer, sa peinture étant très, trop, visionnaire. Mais Théo et sa femme Jo en sont certains : c'est le plus grand peintre du moment, la reconnaissance de son talent ne saurait tarder. Une dispute au sein du couple qui rencontre des soucis financiers va venir saper la confiance fragile retrouvée. Fragile car depuis sa naissance, le petit Vincent traine une blessure originelle : son arrivée au monde est marquée par le deuil d'un frère ainé mort une année plus tôt qu'il va venir remplacer en naissant le même jour que lui et en portant le même prénom. Héritage tragique. Se sentant être devenu un fardeau pour son frère et un peintre raté, il mettra fin à cette situation en se donnant la mort en pleine nature, en plein jour.

« Je me prenais pour un visionnaire, je n'étais qu'un halluciné. Ma peinture n'intéressait personne, à part quelques fous comme moi. Une faillite… ».

Ce livre est également l'occasion de comprendre les influences de van Gogh, ses maîtres à penser, ses affinités dans la peinture mais aussi en littérature en ce 18ème siècle culturellement très riche. Toulouse-Lautrec, Paul Signac, Pissarro, Monet, Degas, Renoir, Seurat…Impressionnistes et néo-impressionnistes, mais aussi estampes japonaises, les maîtres à penser sont là, évoqués, convoqués, Alain Yvars montrant parfois l'influence de l'un d'entre eux sur tel ou tel tableau. C'est très intéressant.


Alain Yvars réussit avec délicatesse à conter la peinture de van Gogh, peinture mystérieuse et tourmentée à l'image du peintre, à nous expliquer de façon passionnante son mouvement, son énergie, sa fougue, au travers un style pictural novateur et singulier. En plus de nous présenter un peintre à la fois passionné et fragile dans les dernières semaines de sa vie, il nous offre avec un naturel déconcertant le regard sensible et poétique du peintre d'origine hollandaise. Il le resitue dans son contexte historique mettant en valeur ses influences et mêle à la grande Histoire culturelle, l'histoire intime du peintre. En convoquant le coeur et la raison, ce livre nous permet une immersion culturelle d'une grande richesse et d'une grande poésie.

« La peinture est un combat dont le peintre ne sort pas toujours vainqueur ».

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Ce livre de notre ami sur Babelio Alain Yvars ( jvermeer) est un hommage à Vincent van Gogh. Il tient la plume mais c'est Vincent qui dicte. Il se transforme, le temps d'un ouvrage, en passeur d'idées. Non, pas tout à fait un passeur d'idées, beaucoup plus fort. En diseur de passion, de désespoir, de travail et d'émotions. Nous sommes à Auvers sur Oise en 1890.

Un texte baigné de couleurs qui claquent, des tons purs "qui excitent les yeux", des verts bleutés accrochés au feuillage des arbres, des rouges vermillon "écrasés sur la toile et étalés avec délectation" "le bleu qui lacère la toile". Une explosion en somme!

Alain nous offre un texte débordant de sensibilité où la nature, plus vivante que jamais, accompagne le geste du peintre et lui impose ses changements d'humeur, ses nuances à peine perceptibles et ses exigences souvent difficiles à interpréter. Et van Gogh, sous la plume soumise fidèle et autorisée de l'auteur, adopte sous nos yeux une technique qui, loin d'être reposante, "transforme cette végétation pacifique en un brasier agressif".

Alain dans ses habiles commentaires, dans ses billets évoque souvent les ciels dans la peinture en général. Boudin, Ravier et tant d'autres. Il en parle bien. Il en parle souvent. Et ici il demande à son ami Vincent van Gogh de les évoquer: "les ciels mouvants et lourds" reflétant son émotion intérieure. Une émotion mouvante lourde, immense et sans limite........

L'auteur fait une promesse au lecteur. Promesse de vivre tout près de Vincent. Promesse de mieux cerner ce que fût, la dernière année de sa courte vie, la vie amicale, sentimentale et familiale d'un peintre de génie et surtout promesse de mieux comprendre qu'on ne peut donner à l'art une oeuvre unique, grandiose, avant-gardiste, que si le talent s'accompagne d'un don de soi entier, sans concessions, sans restrictions et avec dommages. "La spontanéité est le seul chemin que je m'autorisais" souligne Vincent. Nous le comprenons au fil des pages.

Je pense à une phrase de Christian Bobin:" Quelle que soit la personne que tu regardes sache qu'elle a déjà plusieurs fois traversé l'enfer".

Bien qu'il soit mort très jeune, Vincent van Gogh, a essayé désespérément d'être heureux. Il n'a réussi de son vivant ni a aider les autres, ni à s'aider lui-même. Est-ce le destin des artistes incompris? A la lumière de ce texte le lecteur ressent l'urgence. L'urgence de s'engager à fond avec une force venue d'on ne sait où. L'urgence de nourrir un puissant désir de progresser et d'atteindre un but indéfinissable fait de lumière et d'harmonie. L'urgence d'arrêter la progression du décalage avec les fonctions et les attitudes plus conformes? L'urgence d'en finir parce que tout devient trop compliqué?

Je viens de passer quelques heures dans l'intimité d'un très grand peintre, dôté d'un immense talent . J'ai évité de bousculer ce "vrai bazar" constitué de dizaines de toiles amassées dans sa petite chambre d'Auvers sur Oise,(classée monument historique depuis) je l'ai suivi scrupuleusement dans ce qu'il appelait "ce nid à punaises", en compagnie de son frère adoré Théo, de sa belle-soeur lucide Jo, de Madame Ravoux la serveuse un peu trop aimable, de Mr Ravoux un tantinet jaloux, de M. Martinez son compagnon de table. Je suis allée dans "le repère" des Gachet, le docteur qu'il juge aussi fou que lui et qui était aussi roux que lui, Marguerite et Paul ses enfants. J'ai senti ses émois amoureux, ses battements de coeur, ses déceptions, sa culpabilité et sa souffrance infinie. Grâce à lui J'ai approché Gauguin, Monticelli, Toulouse Lautrec. La dernière page tournée Il a bien fallu que j'atterrisse dans la réalité de ma vie quotidienne. Pas facile après un voyage pareil!

Van Gogh est autodidacte. Bien qu'ayant pris quelques cours son talent est inné avant d'être acquis. Un instinct, une sensibilité à fleur de peau, mais plus encore lorsque l'on parle de van Gogh, un don du ciel, un génie sans égal. Une peinture qui souffre, qui jaillit. Une peinture en mouvement exaltée et tellement vivante!

Van Gogh a, en son temps, réinventé la peinture, laissant aux peintres académiques le soin de reproduire fidèlement ce qu'ils voyaient. Autodidacte en grande partie tout comme d'autres artistes célèbres ( Suzanne Valadon, Utrillo, Gauguin, Frida Kahlo, et dans d'autres domaines, Beethoven, Mozart en grande partie, Richard Wagner, Louis Amstrong, David Bowie, Elton John). Alors une question me taraude. L"apprentissage académique, véritable technique avec ses lois, ses règles et ses obligations, ses limites laisse t-il suffisamment de liberté aux artistes pour exprimer, expulser (j'ose) ce qui vit déjà en eux et qui ne demande qu'à éclore spontanément? Bousculer les codes sans le savoir est une belle entrée en matière à la création je trouve! N'est-ce pas le moment propice à une âme sensible et bouillonnante d' inventer une nouvelle expression libre de toute enchaînement, un nouveau langage?

Dans le cas de van Gogh c'est une nouvelle peinture, alimentée certes par de nombreuses influences mais qui sort du cadre. Vaste sujet.....

J'ai aimé cette compagnie insolite et précieuse. Je remercie chaleureusement Alain de m'avoir adressé ce livre. Un cadeau d'une grande valeur à mes yeux. Un beau travail mais de cela je ne doutais pas un seul instant!

Au fait Alain, selon vous Van Gogh s'est-il suicidé ou bien a t-il été tué accidentellement par les deux garnements qu'étaient René et Gaston Secrétan?

Cet ouvrage de grande qualité ouvre un autre chapitre de la merveilleuse histoire de l' art qui malgré certaines tragédies n'aura jamais fini de nous surprendre et de nous faire rêver.














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Citations et extraits (162) Voir plus Ajouter une citation
Je marchai lentement, impressionné par le spectacle d'ombre et de lumière. En Provence, il m'arrivait de ressentir des émotions devant la nature qui me rendaient proche de l'évanouissement. Petit à petit, le soleil s'élevait dans un ciel azur déserté de nuages. Les brumes sur l'eau disparaissaient. Dans un renfoncement de la rive, des barques et de nombreuses yoles longues et minces, de toutes couleurs, étaient amarrées.

Deux skifs effilés passèrent à grande vitesse sous les encouragements des barreurs qui imprimaient la cadence. Les hommes, habillés de maillots rayés, brassant l'eau à grands coups de pelles, grimaçaient dans l'effort avec "han" retentissants. Les skifs disparurent derrière une rangée d'arbres. Des vaguelettes agressives s'écrasèrent bruyamment sur les bateaux immobilisés, soulevant les coques de secousses ondulantes. Dans l'eau, les reflets colorés des embarcations s'effacèrent un court instant, puis le calme revint.

Pages 127/128
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J'allais me lever de table lorsque madame Ravoux vint vers moi, joyeuse, portant sa fille Germaine dans ses bras. Comme tous les soirs, elle l’avait faite manger et me l’apportait. Il ne fallait pas que je monte à ma chambre avant d’avoir accompli le rituel quotidien : dessiner « Le Marchand de sable ». La fillette grimpa prestement sur mes genoux et attendit. J’attrapai l’ardoise et la craie que madame Ravoux laissait toujours derrière ma chaise, par terre, le long du mur, et entrepris de dessiner la carriole attelée d’un cheval. Attentive, la fillette attendait la suite. A la vision du marchand jetant du sable aux alentours à pleines poignées, elle se mit à battre des mains et à pousser des cris de joie aigus que seule sa sœur Adeline était capable d’arrêter. Celle-ci accourait déjà de la cuisine. Elle agrippa fermement la gamine, lui fit faire une bise à tout le monde dans la salle et l’emmena prestement se coucher. J’étais heureux de sentir sa petite bouche humide sur ma joue.



« J’ai une autre belle histoire à vous raconter :
Le soir de Noël le « Marchand de sable » est passé chez moi car je me suis endormi rapidement. Au réveil, un fabuleux cadeau m’attendait : Une critique de mon roman QUE LES BLÉS SONT BEAUX écrite pendant mon sommeil par mon amie Babeliote MIMIMELIE. La fin de la critique m’avait profondément touchée : « Que ce livre est beau ». J’en suis encore bouleversé. "
J'espère que tous ceux qui verront cette citation auront la gentillesse d'aller voir la critique de MIMIMELIE sur mon livre. Du grand art...
***
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- La tranquillité de mon existence a été bouleversée lorsque j'ai quitté les Établissements Goupil.
15 ans déjà..
J'ai exercé ensuite diverses activités : libraire, professeur dans un collège en Angleterre.Je faillis même devenir pasteur, comme mon père...
Évangéliste, Martinez!
Durant six mois, j' ai été évangéliste dans le borinage du sud de la Belgique! Aujourd'hui encore il m'arrive de faire des cauchemars en repensant à cette population de mineurs vivant dans des conditions de misère et de souffrance inimaginables. Un monde de ténèbres...
Je m'interrompis un instant à cette évocation émouvante.
- Finalement, la religion n'a pas voulu de moi.L'art me rattrapa à nouveau pour ne plus me lâcher...Artiste peintre : ma véritable vocation était trouvée!
Si j'étais resté chez Goupil, un avenir professionnel prometteur s'offrait à moi dans le commerce de l'art.Mais aurais- je connu le bonheur de triturer la pâte fraîche et de l'étaler sur la toile pour transformer la réalité ?

( p.40)
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Je peins la vie comme je la ressens. Ma méthode: peindre en une seule fois en se donnant tout entier; exagérer l'essentiel et laisser dans le vague, exprès, le banal. Un tableau doit être autre chose qu'un reflet de la nature dans un miroir, une copie, une imitation. J'ai compris qu'il ne fallait pas dessiner une main, mais un geste, pas une tête parfaitement exacte mais l'expression profonde qui s'en dégage, comme celle d'un bêcheur reniflant le vent quand il se redresse fatigué...


( L'auteur Alain Yvars, donne ici la parole à Van Gogh)
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Je mélangeai sur la palette le jaune de cadmium avec un soupçon de rouge, puis balayai la chevelure avec la pâte ocre obtenue. J’étalai ensuite un mauve moyen sur l’ensemble de la robe et couvrit de jaune mixé d’une pointe de vert le visage, les avant-bras et les mains. Des bâtonnets bleu cobalt lacérèrent la robe. Les volumes étaient suggérés uniquement par l’inflexion de ces bâtonnets : verticaux dans l’épaisseur de la jupe, incurvés sur la pliure du bras, courbés sur la poitrine. Des traits arrondis terminèrent l’ondulation des cheveux.
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