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EAN : 9782358877541
192 pages
La manufacture de livres (06/05/2021)
3.23/5   28 notes
Résumé :
Anicette était la petite dernière, la jolie poupée choyée par sa famille. Jusqu'au jour où on la surprend en train de commettre le plus indicible des péchés : poser la main sur son corps, se caresser. Petite fille devenue fille perdue, voici l'enfant chassée de sa famille et condamnée à grandir entre les murs de «l'institution». C'est là que des religieuses tentent de chasser le vice du corps et des esprits de ces filles de rien. Celles dont les mères se prostituent... >Voir plus
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"Le monde haïrait-il tant les filles ?"
Celui dirigé par les émissaires d'un dieu, assurément. Les religieux n'ont jamais été très détendus de l'entrejambe (pour les autres).
Aujourd'hui chez les islamistes - l'actualité en Afghanistan en est un sinistre exemple -, il y a moins d'un siècle en France, quelques décennies en Irlande (Magdalene Sisters). J'en passe.
Exorcisme, lapidation, procès en sorcellerie & bûcher. Combien de filles/femmes victimes ?
Parenthèse : ce monde-là hait ouvertement les homosexuels aussi. Mais les voit-il comme des hommes ?
.
Anicette a eu l'honneur et le bonheur de découvrir les délices onanistes dès douze ans. Un voisin l'a surprise et s'est amusé à raconter à tous cet événement intime. Pauvre c** !
Horreur, malheur, salsa du démon !
Ce doux geste jette l'opprobre sur sa famille de quincailliers prospère et bien en vue. Tant pis si le grand-père fréquente les bordels, ça n'a rien à voir. Les hommes ont des besoins irrépressibles.
Anicette, elle, est une 'fille perdue', une 'vicieuse', certainement 'folle à lier', cette 'insanité morale' en est la preuve criante. Nous sommes à la fin du XIXe siècle.
La 'jolie poupée' innocente jusqu'alors exhibée près du comptoir de la boutique pour attendrir les clients sera mise à l'écart. Au grenier, dans un premier temps, où son arrière grand-mère va la choyer en douce, puis dans un pensionnat de 'seconde zone' où elle côtoie des filles de prostituées. On est affamées et on prie, prie, prie, même avant le petit déjeuner. Il lui en faut, à ce dieu des bonnes soeurs et autres gens d'église, pour pardonner un truc pareil.
.
Le ton est elliptique, s'apprivoise. On se concentre pour suivre les méandres de la pensée de la jeune fille, ses souvenirs, et son présent entre brimades et moments de répit.
L'effort en vaut la peine.
Cette douloureuse histoire montre que la société occidentale a progressé sur la sexualité féminine. Mais l'on sait, l'on voit, que nous ne sommes jamais à l'abri de retours en arrière brutaux et radicaux.
.
Un récit poignant et révoltant qui témoigne du sort de nos aïeules corsetées, (f)rigidifiées - sort qui nous a laissé des stigmates et me fait rejeter de plus en plus cette institution-là, pour tous ses dégâts sur les femmes, de son emprise morale culpabilisatrice à d'autres violences, directes, physiques, sur enfants et autres personnes non consentantes...
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• Merci au libraire des FdO pour l'idée.
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J'ai lu « le bal des Folles » de Victoria Maas et « La salle de bal » d'Anna Hope dans lesquelles les femmes se trouvent emprisonnées à l'asile pour non-conformité aux exigences du XIXème siècle. J'ai lu divers essais sur la place des femmes dans la société, sur les douloureux jugements que l'on a portés sur elles, sur l'internement en hôpital ou en prison, sur le poids du patriarcat et de la religion, sur les rôles qu'elles avaient à tenir sans droit à l'indépendance… mais jamais je n'avais lu d'écrit sur les mascarades médicales visant à détruire les organes du plaisir.

Dans les médias, de nombreux témoignages nous alertent sur des pratiques barbares faites aux femmes qui perdurent : on entend parler de l'excision imaginant sans doute que cette pratique se limite à certains pays ou à certaines cultures. Pourtant, cette pratique sous couvert d'une justification médicale fut réalisée, en France, sur des jeunes filles.

Anicette, petite fille ordinaire d'une famille ordinaire, petite chérie que l'on couve, se voit un jour réduite à l'état de dépravée pour avoir exploré son corps. de l'institution religieuse dans laquelle on la place à l'hôpital où l'on espère la traiter de son hystérie, ce roman relate son terrible quotidien.
Texte à la langue particulière – à la fois vive, rude et complexe, « Fille perdue » nous plonge dans la spirale de l'intolérance et de la peur face au désir féminin.
Une lecture intéressante.
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« La petite monte les trois marches de pierre du bureau de la quincaillerie. »
Poignant, « Fille perdue » est une page arrachée du cahier des désespérances. Ce roman social, engagé, lève le voile sur un XIXème siècle encerclé par les aprioris, les conventions. Les femmes dans ces années austères avaient par obligation la posture du silence, les désirs renfloués, le corps effacé. Ne jamais frôler des yeux l'annonce d'une gestuelle déplacée dans cette époque muselière. Mais voilà Anicette (prénom de l'enfant) ressent les prémices d'un printemps en son corps. Elle est vue, montrée du doigt, dénoncée à son père. L'enfance vole en éclat. Anicette est la seule fille dans une fratrie masculine. La quincaillerie familiale est gérée d'une main de fer par son père. Gâtée, heureuse, choyée, Anicette est jusqu'alors bercée par ses peintures, ses dessins, les loisirs d'une fillette épanouie. La famille est aisée, mais la parole des femmes est enfouie sous terre. Mutisme.
« Dans la maison Bru, toutes les voix ont changé. -Ainsi soit-il. Une voiture te conduira demain à l'institution des soeurs. Adieu. »
Son arrière-grand-mère, pour le dernier soir lui implore un ultime dessin. L'enfant ressent l'ombre à venir subrepticement. le dessin est exutoire, cendres retenues par une arrière-grand-mère avant-gardiste et brillante. Aimante et féministe, le mystère caché dans cette maisonnée pétrie de faux-semblants.
« Et il y a la terrifiante découverte, ceux qui aimaient haïssent. Ceux qui aiment mènent à l'échafaud. Elle avait lu ça dans les livres d'histoire. Des familles soudain déchirées. Fauchées par on ne sait quoi. Par la faute de l'un. La poupée et la vicieuse. »
Anicette et les écritures, la lecture, la peinture, bandeau sur sa mémoire. La voici dans l'antre des Soeurs, vingt fillettes auprès d'elle. La rigueur, la froideur, le spartiate, l'abolition de la libre-pensée, son corps en arrêt de vie. Elle va se lier avec Vinciane. Affronter les affres, l'institution muraille.
« Jure-moi de ne pas m'abandonner. -Je te l'ai juré déjà, Vinciane. -Quoi que tu découvres, jures-moi. »
Vinciane, sa fidèle, cache aussi un lourd secret. Comment ces deux enfants grandissantes peuvent-elles se métamorphoser ? Devenir des femmes, lorsque les aspirations sont reflouées, boue sale devenue. Les religiosités, les mesquines croyances et les tabous trop prégnants effacent tout espoir. « Fille perdue » est un témoignage. Superbement écrit par Adeline Yzac, son olympien apaise les drames. Ces femmes mutilées dans leur chair, le corps caché, linge sale. Anicette est un symbole. Lisez ce grand livre qui rend hommage aux femmes meurtrissures. Mémoriel, douloureux car véridique. La morale bien-pensante, la science aux abois, les femmes au fronton de la parole brisée en mille morceaux. « Fille perdue » est une urgence de lecture. Publié par les majeures Éditions La Manufacture des livres.
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Anicette, la poupée, la petite, la nouvelle, la demoiselle, mademoiselle... Autant de termes pour désigner cette enfant, puis jeune adolescente fin XIXe début XXe siècle, que les adultes malmènent par la parole. Elle devient la perfide, celle qu'on doit éloigner au couvent, puis l'hystérique que l'on doit remettre entre les mains de chirurgiens parisiens pour avoir découvert son corps de femme et le plaisir qu'il peut ressentir, à une époque où être une femme est presque un crime.
L'autrice raconte la vie de cette Anicette, jeune Montpelliéraine, fille de quincaillers. D'abord les femmes de sa famille, puis les nonnes, aucune bienveillance envers l'enfant. Aucune sororité à une époque pour la parole des hommes et celle du dogme font loi. En témoigne le passage d'Anicette à Paris, parmi les médecins qui ont tous les droits sur les patientes, ils les exibent comme des bêtes, les scarifient sans consentement.
Un récit très fort. Qui cependant pour moi, se perd parfois dans une narration qui au départ n'est pas très claire. C'est dommage.
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Bien que cette histoire était intéressante il me manquait un petit quelque chose pour vraiment appréciée ma lecture. Ce roman me donnait vraiment envie mais malheureusement il n'a pas matché avec moi. Au moins grâce à ce roman j'aurais appris qu'au 19ème siècle la France pratiquait l'excision sur les femmes. J'ai trouvé l'écriture complexe et je ne suis pas arrivée à m'attacher aux personnages.
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Citations et extraits (18) Voir plus Ajouter une citation
'Nous allons nous écrire'. Irina, souriante, en rien navrée de son départ. S'écrire ? Chez les Bru, nul n'écrit. La sotte idée que de s'envoyer des lettres. On vit ensemble, on parle ou on se tait. Plus précisément, on aligne les sous-entendus et les demi-mots. Et puis, des lettres pour se dire quelles affaires ? Celles de l'âme ? On les apporte à confesse. Celles du coeur ? On les cache. Celles du corps ? Veut-on seulement les voir ?
Chez les Bru, on n'écrit pas et on ne lit pas de livres, encore moins d'ouvrages savants, sauf Maman Joséphine, ses contes à la mode en feuilleton dans le journal. On ne lit pas, non. Pour la bonne et simple raison que tout est écrit d'avance et ne doit point bouger.
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Le train, son battement de coeur, son tempo. Compter sur le temps du train. En profiter pour apercevoir des bribes de raisonnement. Les attraper. Compter sur le train. Croire qu'il entraîne vers du bon. Dieu, les siens, les nonnes et les curés, du pipeau. Les médecins, mystère. Et une phrase, soudain : le monde haïrait-il tant les filles ?
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Aux filles, l'on apprend la patience, à attendre à perpétuité, mises au bord du monde, en grand retrait. A la boucler. De manière à contempler la grande comédie humaine sans en être. Cruelle place.
[ bourgeoisie de la fin du 19e siècle ]
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Pardonner serait ouvrir la voie à la joie. Elle est entrée comme si elle n’y était pas. Il faut avoir la légèreté de qui s’élève dans la prière, doublée de la nitescence du pur esprit, sans quoi, si sœur Hortense pressent le moindre faux pas, c’est le retour au triage de la laine dans le froid des filles, voire pire. Pire, c’est être poussée chez le drac. L’homme à tout faire de ces dames. Un soldat de l’Empire, un monstre de foire, tatoué, un saligaud qui s’en croque une de temps en temps. Avec la bénédiction de Dieu et de ses tenancières. La Miquète en a une peur bleue, elle qui n’a peur de rien.
La douceur de la pièce et les senteurs du genévrier se confondent.
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L’âme voudrait se rendre libre. On dit que le corps l’entrave, que le nabot l’embarrasse. Que celui-là, c’est un méchant, un impie, un malhonnête, et qui plus est un scabreux, il a le diable dans la peau. Il faut lui couper la chique illico. De la grande Nana, il s’est dit qu’elle s’entaillait du côté de l’entrejambe avec un tesson de toupine. Et si c’était bien plutôt l’âme qui entrave l’âme ? Et qui mène la danse. Il s’est dit que, si la grande Nana s’était donné un bon coup en se plantant la lame, c’était mieux que de se découper salement par menus morceaux.
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Video de Adeline Yzac (1) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Adeline Yzac
Interview d'Adeline YZAC à l'occasion de la sortie de son nouveau roman Fille perdue aux éditions La Manufacture de Livres.
À propos : Anicette était la petite dernière, la jolie poupée choyée par sa famille. Jusqu'au jour où on la surprend en train de commettre le plus indicible des péchés : poser la main sur son corps, se caresser. Petite fille devenue fille perdue, voici l'enfant chassée de sa famille et condamnée à grandir entre les murs de «l'institution». C'est là que des religieuses tentent de chasser le vice du corps et des esprits de ces filles de rien. Celles dont les mères se prostituent, celles qui sont nées de pères inconnus, celles dont le corps ne ressemble pas à ce que l'on attend d'une femme... Et si la foi ne suffit pas, c'est peut-être à Paris, entre les mains des médecins que ces enfants devront être conduites. Roman construit sur un fond historique passé sous silence, Fille perdue nous parle d'une époque où la morale et la science conjuguaient leurs efforts pour maintenir le joug pesant sur le corps des femmes.
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