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Critiques de Alain Le Ninèze (77)
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Dans les yeux de Mona Lisa

" A travers La Joconde, quand l'Art nous sourit, la Beauté devient intemporelle". Serge Zeller.





-J'ai 20 000 admirateurs/trices par jour, et aujourd'hui personne, (à cause du confinement!). Se plaint Mona qui lisait la tristesse dans les yeux des gardiens du Louvre.





La Joconde avait vu bien des choses: Sandro Botticelli, et bien d'autres, en train d'admirer sa beauté, ce qui lui plaisait beaucoup! Quelle femme n'aime pas les hommages ?





-François 1er m'enleva à Maître Leonardo Da Vinci et ne cessait de contempler mon joli sourire énigmatique et ma façon de suivre des yeux, mes admirateurs... Je devins célèbre, grâce à un Roi!





Mais, je fus jalousée par nombre de femmes. Tenez, cette jolie rousse, Marie Gandin, la maîtresse de François 1er qui me fit décrocher du mur de la chambre du roi!





Tant mieux, je ne souriais plus en voyant leurs ébats passionnés!

Cachez, madame, ce sein que je ne saurais voir!





Ensuite, ce fut à cause des femmes, sans doute, que sous Louis XIV et le suivant, je fus reléguée dans un petit salon...





Que des rois ne veuillent pas de moi, me chagrinait. Et même une Impératrice, Joséphine de Beauharnais me traita de " concubine, et de libertine." Mes yeux se remplissent de larmes, à ce triste souvenir.





J'ai frissonné dans ce petit salon, car je me vis nue, dans un tableau, en face de moi...





Un tableau peint par Salaï un apprenti au visage d'ange, (le favori de Leonardo) qui m'avait peint dans la même posture, mais, sans mes vêtements...





Ah, le petit diable, comme le surnommait Leonardo! Je devais détourner le regard, quand le Maître commençait à le caresser. Je n'aimais pas ces amours entre deux hommes...





Je crus revoir Salaï, en 2020 mais c'était un sosie, qui se nomme Robert Alias (c'est drôle !) en train de me peintre.

Edgar, mon gardien au Louvre, surveille ce Robert, il craint qu'on ne me kidnappe encore une fois.





Je l'avais été le 21/08/1911, par un vitrier italien qui se nommait Enzo...





Mon coeur saigne, quand j'y repense, et mes yeux sont embués, par ces souvenirs...

Et mon sourire se fige, devant le regard enfiévré de ce Robert Alias...





Il y a un minuscule L et un S (pour Salaï) dans les yeux de La Joconde, selon Sylvano Vincenti. Et Salaï aurait servi de modèle, selon Sophie Herford...

Sur ce sujet, je préfère fermer... les yeux!
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Moi, Oedipe

L'autobiographie d'un mythe, pour revenir à sa source.



Tel est l'objectif intelligent, original et pédagogique, des Ateliers Henry Dougier qui lancent une nouvelle collection dans laquelle parole est donnée à des personnages mythiques, des Dieux, des héros au nom parfois galvaudé mais pourtant oublié par la plupart d'entre nous dans leurs détails, dans leur genèse et dans le message qui se profile en filigrane derrière leurs aventures. Les deux premiers ouvrages sont sortis et sont consacrés respectivement à Vénus et à Oedipe. D'autres devraient voir le jour et concerneront entre autres Icare, Eve, Judith, Orphée, Ulysse…Notons également, dans les autres collections des Ateliers Henry Dugier, « le roman d'un chef d'oeuvre » retraçant l'histoire d'un tableau ou d'une oeuvre d'art. De petits livres illustrés qui permettent une mémorisation aisée.



Si je vous dis Oedipe, aussitôt, pour la grande majorité d'entre vous, vous lui associez le mot complexe. le fameux complexe d'Oedipe utilisé par la psychanalyse qui s'est emparée de cet héros mythique pour désigner les enfants, surtout les petits garçons, amoureux de leur maman, jaloux de leur papa. Pour qualifier ces enfants attirés par l'un de leur parent.

Je vous invite à aller lire la riche critique de @Aquilon62 qui met en valeur le passage à l'origine de cette interprétation et explique comment la psychanalyse a pris le dessus sur le mythe lui-même. Oui, le « complexe d'Oedipe » est mieux connu que la vie du personnage que Sophocle a créé il y a vingt-cinq siècles, comme l'explique Alain le Ninèze, et c'est bien dommage car ce qui arrive à ce personnage est une tragédie incroyable digne d'être racontée autour d'un feu de cheminée…D'où ce livre !



Mais vous rappelez-vous de l'histoire de ce mythe ? Sans doute dans ses grandes lignes en vagues réminiscences scolaires, grandes lignes qui sont celles-ci : Oedipe, « l'enfant aux pieds blessés », est ce jeune prince Corinthien, fils unique de Polybe et Mérope, à qui une prophétie de la sibylle de Delphes le voue au parricide et à l'inceste. Afin de contrer cette malédiction des dieux, il fuit. Aux portes de Thèbes, il se trouve à devoir résoudre la fameuse énigme du Sphinx pour arrêter le massacre que le monstre fait subir à la ville. Quel superbe passage d'ailleurs où nous voyons cette créature incroyable mi animale, mi humaine, au corps de fauve surmonté de deux grandes ailes, doté de pattes puissantes et de griffes crochues, mais à la poitrine de femme et au visage aux traits délicats surmonté d'un diadème…deux tableaux magnifiques de Gustave Moreau complètent cette vivante description. La résolution de l'énigme, tuant par le même coup le Sphinx terrifiant, lui permet de devenir roi de Thèbes, et d'épouser Jocaste, la femme de Laïos, roi de Thèbes disparu mystérieusement depuis quelques temps déjà. de cette union naîtront deux garçons et deux filles dont Antigone.

Cette fuite pour échapper à son destin se révélera vaine : il apprendra avec stupeur, après un épisode de peste particulièrement virulent à Thèbes, qu'il est en réalité fils adopté de Polype et Mérope, et que sa femme depuis vingt-cinq ans est sa propre mère et l'homme arrogant qu'il a tué dans le désert dans sa jeunesse d'exil son propre père. Toutes les prophéties se sont réalisées, malgré les efforts pour les contrer. Il terminera, après s'être crevé les yeux, à errer et à mendier, détrôné, condamné à l'exil, chassé de Thèbes par un de ses fils, Polynice, seule Antigone l'accompagne sur ce chemin de malheur.



« Je marche dans des ténèbres qui sont déjà celles du royaume d'Hadès. C'est vers lui que j'avance à tâtons, comme si je n'appartenais déjà plus au monde des vivants. Mes yeux blessés ne reverront plus jamais la lumière du jour vibrer sous le soleil de midi, l'or éclatant des blés avant la moisson, le vert argenté des oliviers ou la blancheur des murs d'une maison de berger découverte au détour d'un chemin ».



Plonger dans ce livre c'est connaitre tous les détails de ce mythe, c'est imaginer les ressentis des protagonistes et mettre des images et des noms à cette histoire que vous n'oublierez pas aussitôt le livre refermé. C'est s'instruire tout en se divertissant. Car vous n'aurez pas lu une leçon froide et distante d'un simple livre d'exégètes, vous aurez lu une histoire romancée pleine de rebondissements, de suspense, de couleurs, d'humanité.



Pourquoi revenir à la mythologie me direz-vous ? Car au-delà de l'histoire, le message des mythes a une portée hautement philosophique qui invite à la sagesse, au lâcher prise, à l'acceptation. Les hommes ne peuvent contrer leur destin, destin imposé par les dieux. Les hommes sont les jouets des dieux et ne sont donc pas toujours responsables moralement. Puissance des dieux et faiblesse des mortels, nous résignant à accepter le destin sans rechercher à tout prix des responsables comme nous avons constamment tendance à le faire aujourd'hui. Cette leçon est transmise via ce mythe depuis la nuit des temps, celui-ci remontant à -430 avant J.C estime-t-on, mais comme l'explique l'auteur dans une note en post-face, « on trouve une allusion au personnage d'Oedipe chez Homère, donc plusieurs siècles avant Sophocle, ce qui montre que l'origine du mythe, comme presque toujours, se perd dans la nuit des temps ».



« Il n'y a ni origine ni source avérée, simplement un récit qui traverse les siècles et s'infléchit au gré Des circonstances et des époques ».



C'est remarquablement écrit, Alain le Ninèze rend le récit épique et passionnant en faisant en sorte que Oedipe se raconte, à la première personne du singulier, ce « je » employé rendant Oedipe si proche, si contemporain. Ainsi, la mythologie devient accessible.

Par ailleurs cette histoire est sertie de magnifiques reproductions d'oeuvre d'art, de Gustave Moreau déjà cité mais aussi de Michel-Ange, de Jean-Auguste-Dominique Ingres, d'Antoni Brodowski. Un bien bel ouvrage au papier brillant, un régal pour nos yeux curieux en plus de nous enrichir. J'ai vraiment hâte de me plonger dans les autres ouvrages de cette collection.



Je remercie chaleureusement @Aquilon62 de m'avoir donné envie de lire cet ouvrage et surtout d'élargir constamment mes horizons littéraires !

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Le dernier sommeil selon Caravage

C'est pendant ses années romaines que Caravage peint une grande partie de ses oeuvres les plus célèbres. Parmi ces oeuvres, La mort de la Vierge, un tableau commandé et refusé par les frères carmes qui estiment scandaleuse la représentation de Marie sous les traits d'une prostituée repêchée morte dans le Tibre. Néanmoins la toile est rapidement achetée par un collectionneur privé, le duc de Mantoue. Car si le réalisme, en quelque sorte la marque de fabrique de Caravage, ne convient pas aux frères carmes il séduit en revanche nombre d'admirateurs dont le jeune hollandais Petrus Paulus Rubens, qu'il inspire. Un réalisme, il faut bien le dire, en corrélation avec la vie de l'artiste au caractère bagarreur condamné plusieurs fois à la prison et s'aliénant un certain nombre d'ennemis irréductibles, tel le peintre Giovanni Baglione. Pour le sortir des situations inextricables heureusement Caravage peut compter sur le soutien de son protecteur et mécène le cardinal Francesco Maria del Monte. Mais celui-ci ne peut plus rien quand le peintre est jugé pour meurtre et contraint de s'exiler à Naples. Caravage ne reverra plus Rome. Quelques années plus tard sur le chemin du retour vers sa ville tant aimée, alors qu'il bénéficie d'une grâce papale, Caravage trouve la mort dans des conditions mystérieuses. Il avait 38 ans.



Alain le Ninèze avec ce Dernier sommeil selon Caravage raconte l'histoire passionnante d'une transgression dans le traitement d'un sujet religieux : la Dormition de la Vierge (son dernier sommeil en présence des apôtres avant sa glorieuse Assomption vers le ciel) transformé par Caravage en un dernier sommeil qui est celui de la mort (d'une prostituée) et non celui d'un prélude à la vie éternelle. le roman d'un chef d'oeuvre qui est également l'histoire de Caravage (tout aussi passionnante) à un moment où sa vie bascule vers le plus sombre, s'appuyant sur les écrits des deux premiers biographes contemporains de Caravage, Giovanni Baglione et Guilio Mancini, ainsi que sur des études récentes consacrées au peintre.



Merci à Babelio et aux Éditions ateliers henry dougier
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Le dernier sommeil selon Caravage

Lors de mon voyage à Rome, il y a quelques années, j’ai eu la chance de pouvoir admirer quelques œuvres du Caravage.

A la suite de ce voyage, je m’étais promis de lire sa biographie romancée « La course à l’abîme » de Dominique Fernandez qui se trouve dans ma PAL.

Ne dérogeant pas à ma réputation de lectrice super dispersée, je me suis tournée vers d’autres lectures et c’est finalement grâce à un autre auteur que je me suis retrouvée à lire un livre retraçant une partie de la vie de ce peintre.

Alain Le Ninèze nous fait rentrer dans l’entourage proche du Caravage puisque le narrateur n’est rien d’autre que Cecco del Carravagio, un de ses élèves.

Cecco, sous la forme d’un journal, va nous relater un des épisodes les plus marquants de la carrière du Caravage. En effet, une grande partie de cette histoire tourne autour du célèbre tableau intitulé « La mort de la Vierge » qui date de 1606. Ce tableau, que son créateur a voulu très réaliste, va se voir refuser par les religieux commanditaires du dit-tableau. En effet, une des raisons du refus est entre-autre que Caravage s’est inspiré du cadavre d’une prostitué pour représenter la vierge.

J’ai beaucoup aimé cette histoire, fort courte, car ce petit livre (par la taille, mais non par le contenu), nous fait plonger dans une période fort intéressante de l’histoire de l’art.

Je vais replonger dans ma Pal pour repêcher « Au bord de l’abime », car clairement, j’ai envie de retrouver ce peintre génial, disparu prématurément, puisqu’il n’avait même pas quarante ans lors de son décès.

Encore merci à Babelio pour son opération masse Critique ainsi qu’aux éditions henry dougier pour l’envoi de ce livre.







Challenge ABC 2021/2022

Challenge Multi-Défis 2022

Challenge A travers l’Histoire 2022

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L'énigme Gerstein

J'avais adoré le film Amen, ce livre permet d'approfondir le sujet. L'auteur a su mettre a la suite différents témoignages, il se remet en question, s'interroge , c'est original et recherché. Très intéressant a lire .
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Libica : Michel-Ange et la Sibylle

Voilà où je me suis laissée embarquer lors du dernier "café culture" de ma médiathèque...

Libica est un bon petit roman historique très agréable à lire. Il nous emmène à Rome sous Auguste et à la Renaissance. C’est une histoire qui contient une histoire, procédé qui élargit l’espace et le temps, avec des maladresses dans la mise en œuvre toutefois, mais comme on veut savoir ce qui va advenir des personnages, on passe outre.

Michel Ange, le taciturne, est chargé par le pape Jules II de peindre les plafonds de La Chapelle Sixtine. Il écrit son journal. Il nous fait partager ses joies, ses peines et son amour pour Livio le secrétaire du pape. Lors de ses visites, ce dernier lui lit les traductions d’un mystérieux manuscrit qui raconte les mésaventures de Sphaerus, le précepteur grec, qu’Auguste a expédié à la recherche de la réponse à une vision qu’ils ont eu sur le capitole, celle d’une jeune femme portant un enfant dans ses bras. Par la même occasion, dans ses errances autour de la Méditerranée, Sphaerus pourra fuir la colère d’un mari jaloux contre laquelle Auguste refuse de le protéger.

Certes on comprend très vite la prophétie, mais le voyage initiatique avec un soupçon de magie est passionnant et parsemé d’embûches, tout comme les amours malchanceuses et les difficultés artistiques de Michel Ange dans un milieu plein de rivalités.

Pour nous c’est un voyage éclairé aux sources de notre culture, par un spécialiste dans deux époques qui dialoguent entre elles, et c’est assez savoureux. La fiction prend racine dans des textes historiques, auxquels l’auteur nous renvoie, pour ne pas alourdir le récit .



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Dans les yeux de Mona Lisa

Jusqu'à maintenant, quand je me rendais au musée du Louvre, je n'allais quasiment plus voir "La Joconde" ou alors juste en passant. Je me disais que je l'avais déjà vue à maintes reprises, qu'il était impossible de la regarder tranquillement et qu'il y avait bien d'autres oeuvres injustement ignorées des visiteurs et qui méritaient le détour.

Certes, il est impossible de rester au-delà de quelques secondes devant La Joconde, succès oblige, certes il y a d'autres oeuvres magnifiques dans ce musée, mais depuis que j'ai lu ce roman, mon regard sur "La Joconde" a changé. La prochaine fois que je me rendrai au musée du Louvre, j'irai lui faire un petit coucou comme à quelqu'un qu'on connaît bien, car grâce à ce roman ce tableau a littéralement pris vie pour moi ! "La Joconde" n'est plus seulement un tableau, ce n'est plus seulement l'être qui a posé pour Léonard de Vinci, c'est l'ensemble qui est vivant, la femme qui a posé et qui se trouve dans le tableau !

Il faut le reconnaître, "La Joconde" a beau attirer les touristes du monde entier, elle fait un peu partie des meubles, on la photographie, on fait un selfie et zou on part. En d'autres termes, on la voit, mais on ne la regarde pas, chacun de nous pensant bien la connaître. Pourtant, si on gratte un peu le vernis (au sens figuré !), elle a énormément de choses à nous raconter, ayant traversé par moins de cinq siècles d'histoire.





UN TABLEAU VIVANT !

Pour nous faire découvrir l'histoire fabuleuse de ce tableau, l'auteur a pris le parti ingénieux et original de donner la parole à la femme peinte dans ce tableau, à l'être humain vivant dans le tableau ! Ce mode de narration, attribué à un objet, est vraiment inattendu et l'effet est spectaculaire : en nous permettant d'approcher l'oeuvre d'une manière très sensible, il nous donne l'impression d'une très grande proximité avec le tableau qui s'humanise dès la première ligne, il devient vivant, et le demeure jusqu'à la fin... et je dirais même bien au-delà dans mon cas !





UN CARACTÈRE BIEN TREMPÉ

En prenant la parole, La Joconde nous précise de suite que ce récit, constitué de courts chapitres bien rythmés, est destiné à Edgar, son fidèle gardien qui selon elle "m'aime, et me comprend, et lit dans mes pensées", afin qu'il sache tout de son histoire, depuis sa création en 1503 dans l'atelier florentin de Léonard de Vinci jusqu'à ce mois de janvier 2019.

Entre ces deux dates, elle a vécu toutes sortes d'aventures au gré des événements de l'histoire de France et rencontré de nombreux personnages historiques : Léonard de Vinci, Salaï, Francesco Melzi, Sandro Botticelli, François Ier et ses différentes maîtresses (Marie Gaudin, Françoise de Châteaubriant, Anne de Pisseleu), Louis XIV et ses différentes maîtresses (La Vallière, Louis XIV, Madame de Montespan, Madame de Maintenon), Colbert, Louis XV, Le Bernin, Cambacérès, Talleyrand, Talma, Théophile Gautier, Delacroix, Manet, Baudelaire, George Sand, etc. C'est l'occasion pour elle de nous livrer quelques anecdotes et avis bien tranchés sur tel ou tel personnage, on peut dire qu'elle ne mâche pas ses mots et c'est vraiment drôle, car on découvre certains personnages sous un angle inédit ; on imagine ainsi sans peine La Joconde en train d'observer Louis XIV :



"Je fus, je dois l'avouer, aussi surprise que déçue par son aspect. Louis, qui était alors âgé d'environ vingt-cinq ans, était aussi petit que François avait été d'une taille et d'une stature imposantes. Il se haussait sur ses escarpins pour se grandir, et tout dans son maintien exprimait une sorte de morgue hautaine. Autant dire qu'il ne m'inspira aucune sympathie."



Quant à Salaï, il a beau être le protégé de Léonard de Vinci, qui lui pardonne tout, La Joconde n'est pas dupe : "Menteur, paresseux, hypocrite, voleur, Salaï avait tous les défauts." Mais elle n'est pas en reste non plus avec les femmes, comme George Sand qui la compare à la Méduse : "Pour qui se prenait-elle, elle, avec ses yeux globuleux, ses joues épaisses et son menton fuyant ? Il est vrai qu'elle avait autrefois séduit Musset et Chopin, pour ne citer que ces deux-là parmi ses innombrables amants… Mais qu'avaient-ils pu lui trouver ?"



Ah, elle en a du caractère ! Et il en fallait pour supporter tout ce qu'elle a subi durant ces cinq siècles d'histoire. Car contrairement à ce qu'on pourrait croire, elle n'a pas toujours fait l'objet d'admiration, se retrouvant parfois reléguée dans des pièces ou des lieux peu fréquentés, tels "le triste et sombre" appartement des Bains de Fontainebleau ou le salon de l'hôtel de la Surintendance des Bâtiments royaux de Versailles, et c'est l'une des choses que j'ai apprise en lisant ce roman. Adulée par François Ier, elle a été peu à peu délaissée par les souverains suivants, notamment Louis XIV et Louis XV qu'elle n'apprécie pas du tout ! Napoléon lui trouvait du charme mais Joséphine de Beauharnais ne l'appréciait guère, lui trouvant le "sourire ironique". Ce n'est qu'au moment de son vol, en 1911, qu'elle a véritablement regagné son aura et bien au-delà. Elle est véritablement devenue une star internationale, voyageant à plusieurs reprises jusqu'en 1974, aux États-Unis où elle rencontre Jackie et John Kennedy, au Japon, en Russie où les foules se pressent pour l'admirer.





UNE VIE MOUVEMENTÉE

C'est donc avec beaucoup de curiosité et d'intérêt que j'ai découvert l'histoire de ce tableau, au-delà des deux grandes dates connues de tous, sa création (1503) et son vol (1911), et l'une des autres choses apprises en lisant ce roman c'est que La Joconde n'est pas allée directement d'Amboise au musée du Louvre, elle est passée par différents lieux : le château de Fontainebleau, le château de Versailles, le palais du Louvre, le palais des Tuileries, le musée du Louvre, l'Arsenal de Brest, l'église des Jacobins de Toulouse, Montauban, le château de Chambord, le musée Ingres à Montauban, divers châteaux du Lot et du Quercy dont le château de Montal, etc.

Son périple durant les deux conflits mondiaux a tout particulièrement attiré mon attention. Plus précisément, son parcours durant la Seconde Guerre mondiale m'a passionnée – je ne le connaissais que dans les grandes lignes –, car à travers le regard de La Joconde, on assiste à son "évacuation" en différents lieux et elle va finir par se retrouver au château de Montal sous la surveillance de René Huyghe, conservateur au Musée du Louvre et résistant. On assiste même à une rencontre entre ce dernier et René Jaujard, directeur du Louvre et résistant, au cours de laquelle ils évoquent le vol des oeuvres d'art par les Allemands, la mise en sécurité des oeuvres d'art du Musée du Louvre en province et l'action de Rose Valland, attachée de conservation au musée du Jeu de paume, pour lutter contre ce trafic d'oeuvres d'art.





UNE FEMME ÉMOUVANTE

Mais ne croyez pas que La Joconde ne soit qu'une cancanière, si tant est qu'elle le soit car son jugement me semble plutôt juste, elle fait preuve de beaucoup de sensibilité, aussi bien à l'égard de son créateur, Léonard de Vinci, que de François Ier. À travers son regard, on apprend beaucoup sur ces deux personnages, leurs caractères, leurs vies... Quand elle évoque la mort de Léonard de Vinci, on sent que la tristesse, difficilement retenue, l'étreint ; il en va de même pour François Ier :



"François s'éloigna pour monter à l'étage. Lorsqu'il passa devant moi, il me lança un rapide coup d'oeil et j'aperçus, l'espace d'un instant, son visage ravagé par le chagrin. Un chagrin que je partageais. S'il considérait Leonardo comme un père, ainsi qu'il l'avait dit, nous étions l'un et l'autre frappés par le deuil. À cette différence près que, pour moi, c'était vrai. Leonardo était réellement mon père."



"La disparition de François a été le plus grand chagrin de ma vie après le décès du Maître. Car si Leonardo avait été mon père, François m'avait adoptée comme une… disons une amie de coeur. J'eus la douloureuse impression, après sa mort, d'être seule au monde. Et ce n'était pas seulement une impression : pendant les temps qui suivirent, je ne vis pour ainsi dire personne. On ne s'intéressait plus à moi, on m'avait oubliée."





DEUX HISTOIRES MÊLÉES

L'autre point original de ce roman est l'insertion d'une histoire contemporaine, permettant de donner encore plus d'ampleur à ce roman, ne le laissant pas cantonné à l'histoire de ce tableau. J'ai été un peu dubitative en découvrant le premier chapitre consacré à cette histoire qui se déroule au XXIe siècle, me demandant où elle allait mener, mais l'alternance des chapitres courts, consacrés tantôt au passé, tantôt au présent, fonctionne parfaitement bien puisque la narration est en permanence conduite par La Joconde, le lien se fait donc tout naturellement entre les différents chapitres.



Cette histoire est basée sur trois personnages, un jeune homme étudiant à l'École des Beaux-Arts de Paris, Robert Alias, qui vient chaque jour travailler devant l'oeuvre, une jeune femme un peu paumée, Alexandra Baader, dont on ne comprend pas bien le but (jusqu'au dénouement final) et le gardien de la salle, Edgar, qui aime passionnément La Joconde. Là encore, cette dernière nous fait l'honneur de ses confidences et de ses opinions sur ses visiteurs et donc sur la société actuelle, un point de vue fort intéressant et parfois incisif !



"… dans la foule de ces touristes qui, eux, me fatiguent de plus en plus avec leurs manies, dont la dernière est de se photographier eux-mêmes avec mon image en arrière-plan. Cette mode étrange est apparue il y a quelques années. Les premières fois, c'est avec stupeur que j'ai vu les gens me tourner le dos, tendre leur appareil à bout de bras et cadrer leur propre visage dans l'objectif de façon que l'on m'aperçoive de loin derrière eux… Maintenant, je sais pourquoi ils font cela. Ils veulent pouvoir prouver, une fois rentés chez eux, qu'ils m'ont bien vue, qu'ils sont réellement allés dans cette salle du Louvre qui m'est consacrée. Je ne les condamne pas, c'est la rançon de ma célébrité. Mais quand même ! M'utiliser comme arrière-plan de leur autoportrait, moi, la Joconde... Quelle imprudence !"



"Rien à voir avec le regard vide des touristes qui ne fait que glisser sur moi comme il a glissé, ce regard, sur les divers monuments qu'il est d'usage de visiter quand on vient à Paris. Ces gens pourront dire en rentrant dans leur pays qu'ils m'ont vue, oui, comme ils ont vu Notre-Dame et la tour Eiffel. Ils m'ont vue, mais ils ne m'ont pas regardée."



Jonglant avec habileté entre le passé et le présent, ce roman se termine d'ailleurs par une jolie pirouette surréaliste, assez étonnante, associant justement passé et présent ! Rempli d'anecdotes et de détails historiques qui nous permettent d'apprendre plein de petites choses sans s'en apercevoir, ce roman n'est pas seulement original, il est à la fois pétillant, fin, drôle, joyeux, léger. Mon seul regret ? L'avoir terminé !
Lien : http://romans-historiques.bl..
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Un martyr de la révolution selon David

David et Marat



Un petit opuscule historique de 116 pages.



Présenté comme le roman d'un chef-d'oeuvre, il s'agit plutôt d'un ouvrage court de vulgarisation historique.



Ici est retracé, à grands traits, la biographie du peintre Jacques-Louis David, peintre de la Révolution française et du Premier Empire de 1793 à 1800.



C'est intéressant, car rédigé simplement, en la forme d'un journal fictif d'un des élèves de David.

La période de la Révolution est bien décrite, malgré certaines erreurs.



Un ouvrage original de vulgarisation historique garni de repères biographiques, d'une bibliographie et un index des oeuvres citées.



J'ai regretté que cet ouvrage ne soit pas plus centré sur l'oeuvre de David et ne soit pas plus empli d'émotions…



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L'énigme Gerstein

Voici une livre pour lequel l'autre, Alain Le Ninèze a effectué de nombreuses recherches, car le cas Gerstein est comme le nom du roman l'indique une véritable énigme, un mystère.

Que penser de ce catholique allemand qui pour venger et dénoncer l'assassinat de sa belle-soeur, internée à la clinique de Hadamar, infiltre la Waffen-SS? Ce livre va bien-sûr vous permettre de vous faire une opinion, mais malgré tout, le doute subsiste et reste présent.

En infiltrant ceux qu'ils souhaitent dénoncer aux yeux du monde, Gerstein va se retrouver mêler aux horreurs perpétrées.

Alain Le Ninèze, nous donne les faits, ils utilisent tous les documents disponibles afin de donner aux lecteurs la possibilité de se faire un avis, car la justice elle-même n'a pas pu statuer sur le cas de cet homme. Ce qui explique qu'il reste aux yeux du monde une énigme.
Lien : https://livresque78.wordpres..
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L'énigme Gerstein

Je reste, comme l'auteur de ce récit, entre deux opinions concernant Kurt Gerstein; un homme débordé par ses sentiments, allant au bout de ses idéaux mais en même temps faisant les mauvais choix, prenant les mauvaise décisions tout en se défendant de les faire pour la bonne cause.



Des témoignages de l'époque mais aussi à postériori pour étayer et tenter de cerner cet homme, mi héros, mi criminel de guerre.



L'histoire débute sur un cas personnel de l'entourage de Gerstein, qui va lui donner l'idée de vouloir comprendre, au plus près du pouvoir, comment les choses ont pu en arriver là.

Dans cette première partie, le récit nous ramène à un autre livre sorti il y a quelques mois:" l'heure des spécialistes".

Dans un second temps, les écrits sur la seconde guerre mondiale nous donne matière à comparer et compléter celui-ci.

Des livres ainsi que des films ont été inspirés par la vie de K. Gerstein et en tout premier "Amen" de Costa Gavras.
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Dans les yeux de Mona Lisa

Un récit sympa pour amateurs d'art ou d'Histoire de France. C'est la Joconde elle-même (le tableau, pas le modèle) qui est la narratrice.



A travers ses yeux on prend une leçon d'histoire. Tout d'abord sur Leonardo Da Vinci et François 1er, puis au grès des déplacements du tableau, on surprend les maitresses des rois s'envoyer des piques et Napoléeon discuter avec sa femme. le travail préparatoire est intéressant : l'auteur a recherché quelles étaient les scènes mémorables auxquelles la Joconde aurait pu assister. Ensuite il nous livre la suite d'anecdotes. L'écueil principal auquel il s'est confronté est celui de l'unité du texte.



Il parvient à garder un fil directeur grâce à deux options. Tout d'abord une thématique commune : celle de l'histoire de l'art et de la conservation des oeuvres. On s'amuse de voir la Joconde tour à tour modeste (quand on l'encense) puis déçue (quand on l'ignore). Qu'est-ce que le beau ? Est-ce que cela dépend de l'époque ? La Joconde pourrait sembler être justement le tableau qui fait consensus. Mais l'auteur nous dévoile que c'est suite à son vol et aux protections dont elle est entourée qu'elle est devenu le pinacle du Louvre...



Deuxième technique pour accrocher le lecteur : le fil rouge des chapitres qui se passent au "présent" (présent de l'édition s'entend, soit 2019).



Un livre pour se cultiver et se détendre, que je conseille aux amateurs de miscellanées.
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L'énigme Gerstein

Froid et implacable roman, ou devrais-je dire biographie, docu-roman, récit personnel, essai historique, hagiographique, pamphlet, quoi, tout cela à la fois ?! C'est fort probable amis lecteurs.



Vous pouvez le croire à cette histoire : un officier SS, responsable de l’approvisionnement en zyklon B de toute l'industrie de la mort nazie, ce serviteur zélé du régime, chimiste reconnu et réputé, cadre loyal et père de famille, serait en réalité un infiltré, un farouche opposant politique ? Kurt Gerstein, un bon chrétien à la foi intense, serait volontairement entré dans les SS pour faire la lumière sur les horreurs commises par les Nazis sur les plus faibles, les handicapés en 1e lieu puis sur le peuple juif par la suite. Dingue comme histoire et pourtant, récit foutrement véridique, « d'après une histoire vraie » comme on dit.



Alain Le Ninèze s'empare d'un des mystères que renferme cette sombre période et nous livre sa vision de ce personnage, ambigu à l'extrême, dont on ne sait encore à l'heure actuelle s'il fut sincère et profondément révolté par la barbarie nazie, déterminé à dénoncer ces atrocités au monde entier ou un affabulateur, un illuminé sans doute convaincu de sa mission biblique, néanmoins artisan grotesque d'un génocide honteux.



A travers un travail minutieux d'enquêtes, des comptes-rendus sinistres aux témoignages des pires ordures du régime, de ceux des témoins et proches de Kurt Gerstein, en passant par les thèses sur sa personne ou encore des rapports rédigés par la main même de notre officier SS qui tentera de se justifier jusqu'au bord du gouffre, Alain Le Ninèze retranscrit de manière lapidaire, concise et effroyablement précise, cette ambiguïté fascinante, il n'y a pas d'autres mots. Gerstein fut-il un monstre ou une victime collatérale d'un destin hors contrôle ?



L'énigme Gerstein m'a fait froid dans le dos et vous choquera, forcément. Rien ne nous sera épargné de toute la barbarie nazie, rien. Pires encore les passages d'un horrible cynisme pendant lesquels les plus hauts gradés aborderont les chambres à gaz d'un point de vue purement industriel : comment tuer le plus de juifs possibles de manière la plus efficace, comparant les mérites du monoxyde de carbone à ceux du zyklon B. Bref.



Et pris dans cette tourmente, l'auteur, qui jusqu'au bout ne saura déchiffrer cette énigme et nous laisse, lecteurs, nous forger notre propre opinion sur cet homme qui aura tenté d'alerter les plus hautes autorités de l'Eglise, le pape Pie XII et même les Alliés. Et faire face, impuissants, à la fatalité, à cette indifférence générale. D'une tristesse sans nom...



Merci à Babelio et aux éditions Atelier Henry Dougier pour cette opération Masse critique qui m'a bien bouleversée, je l'avoue.


Lien : http://www.livreetcompagnie...
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Moi, Psyché

Dans la mythologie on parle de catabase, plus clairement la descente aux Enfers, qui généralement se solde par une anabase, le remontée des Enfers.



Dans le corpus de la mythologie grecque peu, peuvent se targuer d'avoir effectuer ce "voyage"

Il y a Orphée descendu pour aller y chercher Euridyce, mais il ne réussira son anabase qu'à la seule condition de ne pas se retourner sur bien-aimée. Peine perdue, son empressement dans certaines versions ou le silence de son épouse dans d'autres lui a coûté la perte définitive d'Euridyce.... Pour certains cela symbolise aussi la nature imparfaite de l’Homme et ses difficultés à résister à la tentation de braver des interdits, causant ainsi ultimement sa perte.



Il y a Heraclès qui lui se voit attribuer, dans le cadre de ses 12 travaux, le fait de capturer Cerbère. Il réussira. Certains verront dans le fait qu'un demi-dieu soit capable de cet exploit, prouve qu'il a le pouvoir sur la mort et la vie...



Il y a Persephone, fille de Demeter (déesse des moissons). Elle, y est allé de son plein gré pour épouser Hadès. Zeus décidera qu'elle y séjournera la moitié de l'année. C'est ainsi que naîtra le cycle des saisons.



Il y a Ulysse, qui lui se retrouve aux Enfers, mais suite à un rite mystique qui lui est enseigné par Circé, pour invoquer les spectres des disparus. Il y rencontre le devin Tirésias, qui lui indique les épreuves qu’il aura à affronter après son départ de l’île de la magicienne, et aussi les spectres de tous ceux qu’il a connus et qui sont morts : Elpénor (son compagnon de voyage), sa mère Anticlée, Achille qui lui avoue qu’il aurait préféré être un berger misérable mais vivant plutôt que de croupir ici parmi les ombres....



Et enfin Psyché  qui effectuera ce voyage pour aller y récupérer un



Née dans Les Métamorphoses d’Apulée, un romancier philosophe du IIe siècle (123-170 après J.-C.) qui écrit en latin. Son ouvrage, fut surnommé « L’âne d’or » par saint Augustin :

Psyché est si belle, qu'elle effraie ses prétendants, ses parents se rendent à l'oracle qui leur annonce qu'elle épousera un monstre



Voilà ce qu'en dit Apulée, lui-même :

"Psyché, avec toute son éclatante beauté, ne recueille aucun avantage de son charme. Chacun la contemple, chacun lui décerne des éloges, mais personne, ni roi, ni prince, ni même simple bourgeois ne s’avance, plein de désir, pour prétendre à sa main… Psyché, vierge, sans mari, reste à la maison et pleure la solitude où elle est abandonnée, malade, profondément malheureuse, et des nations entières ont beau être unanimes à vanter sa beauté, elle, elle la déteste. Aussi le malheureux père de cette fille infortunée, soupçonnant quelque malédiction céleste et redoutant la colère des dieux, va interroger le très ancien oracle du dieu de Millet (il s’agit bien entendu d’Apollon, qui disposait aussi d’un temple à Millet) et demande à ce dieu si puissant, avec des prières et des sacrifices, de faire à la pauvre fille dédaignée la grâce de la marier et de lui donner un époux. Mais Apollon, bien que Grec et même Ionien, répondit, pour faire plaisir à l’auteur de notre histoire milésienne, par un oracle en latin : « Sur un rocher, tout au sommet du mont, va, roi, exposer ta fille soigneusement parée pour un hymen funèbre. N’espère pas un gendre né d’une race humaine, mais un monstre cruel, féroce et serpentin, qui vole sur des ailes plus haut que l’éther et qui bouleverse tout, s’en prend à chacun par le feu et le fer, fait trembler Jupiter même, terrifie tous les dieux et frappe de terreur les fleuves et les ténèbres du Styx. » Le roi, autrefois heureux, après avoir reçu la révélation de l’oracle sacré, rentre chez lui, désolé, plein de chagrin et raconte à sa femme ce qu’ordonne cette prophétie de malheur".



Pour que l'oracle se réalise, Vénus envoya Cupidon. Sauf que celui-ci tomba amoureux de Psyché, la rejoignait la nuit, pour vivre leur amour. Il interdisait à Psyché de voir son visage, pour qu’elle ne sache pas qui il était réellement.

Mais trop curieuse, Psyché alluma une lampe une nuit, et découvrit son bel amant endormi. Maladroite, elle fait couler une goutte d’huile brûlante sur lui, le réveillant. Cupidon, en colère qu’elle n’ait pas respecté sa demande, quitta la jeune femme et avoua à sa mère sa trahison.

Vénus décida de l'envoyer aux Enfers récupérer une boîte avec interdiction de l'ouvrir, mais.... La curiosité est un vilain défaut et c'est la deuxième fois....



”Puis, après avoir encore hésité un instant, je soulevai le couvercle. Et j'eus la surprise de voir qu'elle contenait... rien ! Non, rien du tout. Une vapeur âcre montait cependant de l'intérieur, et cette vapeur m'étourdissait, elle me donnait le vertige. Un voile de brume grise se tendit derrière mes paupières, le murmure du vent et des vagues s'éteignit, je me sentis sombrer dans des ténèbres opaques. La dernière pensée qui me vint était que j'allais mourir, que j'étais déjà morte.”



Pour la suite je vous renvoie à la magnifique sculpture de Canova "Psyché ranimée par le baiser de l'Amour" visible au Louvre....



De ses malheurs, de ses épreuves Psyché se livre à nous au travers de la plume de l'auteur, il lui donne une voix pour qu'elle nous livre ses états d'âme. Mot, oh combien important, psyché, en grec, signifie « l’âme ».

Toutes ces épreuves la feront s'échapper à la fascination de la beauté des corps pour parvenir à l’amour vrai, celui qui unit les âmes.

Et qui sait Psyché, continuera quand même à survivre, quand chacun de nous se mirera dans une psyché...et que nous renvoie la psyché notre image ou l'image de notre âme, de quoi ne plus regarder ce miroir de la même manière...

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L'empereur des alchimistes selon Arcimboldo

Le peintre des plaisanteries sérieuses....



Les peintures d’Arcimboldo étaient des plaisanteries sérieuses, selon une idée largement répandue et bien connue grâce aux écrits d’Érasme, et explicitement mentionnée par François Rabelais dans le prologue de Gargantua comme un modèle pour son propre livre, où comme dans le poème de Gregorio Commanini repris dans cet ouvrage et qui sera publié dans son traité sur la peinture Il Figino.



"Les auteurs traitant d'Arcimboldo abondent dans ce sens. Comanini évoque clairement la notion de « plaisanteries sérieuses » dans son poème sur le Vertumne d'Arcimboldo. Il en suggère aussi une signification ultérieure lorsqu'il explique pourquoi l'observateur doit réfréner son envie de rire pour prendre conscience du contenu sérieux du tableau. Après avoir mentionné le côté ridicule, Comanini avertit immédiatement l'observateur que cette monstruosité contient quelque chose de plus. Lorsqu'il révèle que « l'image d'un roi » est un portrait de Rodolphe II, il nous fait savoir que la source du concept est l'idée, implicite chez les antiques silènes, qu'un aspect extérieur laid, monstrueux ou risible peut cacher quelque chose de beau ou de divin."





On pourrait dire au sujet d'Arcimboldo que le diable se cache dans les détails, je lui préfère cette citation que l'on attribue à De Vinci "Les détails font la perfection et la perfection n’est pas un détail." Voilà qui correspond bien à son œuvre



Car il y a 2 manières de voir ou de regarder un tableau d'Arcimboldo

Soit s'en éloigner... partir de cette cerise ou de cette mûre qui nous fait de l'œil, ou fait tout simplement l'œil, encore un peu de recul et se dire que ce Rodolphe est une bonne pomme, ou plutôt que sa joue est faite d'un belle pomme, encore un peu de recul cette châtaigne qui s'accroche au menton, à moins que ce soit pour donner plus de piquant au portrait, encore quelques pas et découvrir ce melon en guise de front, faut-il y voir matière à sous-entendu, et finalement un ultime pas en arrière et là se dire que ce portrait, qui est considéré aujourd'hui comme son chef-d’œuvre, prend toute sa dimension ou plutôt toute sa majesté.



Vertumne dieu des jardins et des vergers, est-ce lui que nous avons devant nous mais déguisé en Rodolphe II ?

À moins que ce ne soit Rodolphe II déguisé en Vertumne ?



Soit s'en rapprocher.... partir de ce portrait tel un amoncellement de fruits et de légumes, un peu comme ce que l'on retrouvait dans ce Kunstammer de Rodolphe, ("La première salle était celle des pierres précieuses. Je demeurai muet d'étonnement à la vue des innombrables joyaux qui brillaient derrière les vitrines. Diamants de toutes tailles, rubis, agates, lapis-lazulis, topazes, saphirs, perles de Golconde, obsidiennes d'Egypte, émeraudes de Perse, toutes ces pierreries scintillaient d'éclats multicolores sous les lustres à girandoles de cristal qui descendaient du plafond, déversant une faible lumière dans la pénombre. C'était une véritable caverne d'Ali Baba."), s'approcher encore et y découvrir un chou pour un épaule, des poireaux pour l'autre bref une symétrie dissymétrique, encore un effort et plonger dans ce regard qui nous fixe fait d'une cerise et d'une mûre.



Voilà ce que sont ces détails qui font toute la différence, et qui créent toute cette alchimie car d'alchimie il est question également.



Sont-ce des natures mortes qui prennent vie sous nos yeux ?

À moins que ce ne soient des vies devenues, sous le pinceau de l'artiste, natures mortes ?

Sont-ce des cabinets de curiosités devenus peintures ?

À moins que ce ne soient des peintures propres à rejoindre un cabinet de curiosités ?



En tout cas ce vingtième volume de cette collection admirable, nous permet de mieux connaître la peinture d'Arcimboldo, artiste atypique peu prolifique car de son œuvre on ne compte que 17 tableaux si l'on fait exception des reprises, et qui est considéré comme un maître quand on songe que la version de 1573 des Saisons qui est aujourd’hui exposée au Louvre dormait encore dans les réserves du musée en 1977....
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Le dernier sommeil selon Caravage

Vers 1601, Caravage avait reçu la commande d'un tableau représentant "La Mort de la Vierge" pour l'autel de la chapelle dans l'église de Santa Maria della Scala au Transtevere. Le tableau aurait dû être livré avant la fin de l'année, mais cinq années s'écoulèrent..



Dans une Rome en perpétuel mouvement, Caravage livre enfin "La Mort de la Vierge" en 1606. Hélas, dès le tableau installé dans son autel, celui-ci fait scandale. Le prieur des pères carmélite le fait enlever à cause du soi-disant "scandale" : Caravage aurait utilisé comme modèle pour sa Vierge une prostituée retrouvée morte dans le Tigre.



Comme souvent chez le Caravage la lumière est vraie, la lumière délivre la vérité sur la vraie vie, le clair obscur est omniprésent. La lumière ici exhale la mort physique du seul personnage entièrement éclairé, la Vierge, en rien cela renvoie au rituel funèbre comme l'Eglise l'entend.



Alain Le Ninèze a travers ce très court roman, et le traitement du scandale nous fait revivre les dernières année du Caravage, les rouages de l'art de la ville Eternelle. Caravage étant déjà un artiste célèbre dans les années 1600, se fait confier de nombreuses commandes. Mais, il est aussi un bagarreur, ce qui fait des dernières années de sa vie un vrai roman d'aventure.



"Le dernier sommeil selon Caravage" est un roman d'art, d'aventure, très rythmé, addictif en tout point, où l'on apprend énormément sur l'art en Italie mais sur la vie et les techniques du Caravage. L'épilogue avec les lettres et les regards croisés sont absolument exquis.



Un petit roman extrêmement bien exécuté, idéal pour ceux qui s'intéresse et veulent découvrir une petite part de la vie du Caravage et de l'un de ses tableaux les plus connus au monde (à découvrir au musée du Louvre) !
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Sator : L'énigme du carré magique

Ce roman plonge le lecteur dans la Judée sous domination romaine. le personnage principal tente de résoudre une énigme, celle du carré magique, et est amené à enquêter sur la passion de Jésus.

L'auteur évoque l'exécution de Jésus, la Rome de Néron, l'histoire des premiers Chrétiens et les troubles de Judée.



Le livre se lit très facilement, le contexte historique est très bien rendu et la langue est claire (presque trop scolaire).

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Agla : Le premier évangile

Roman historique s’appuyant sur des faits, des événements réels, et, qui se lit comme un roman policier.



L’auteur entraine ses lecteurs, à la suite de Guillaume Postel dans sa quête des manuscrits anciens, des évangiles apocryphes. Cette recherche le ménera de Constantinoble à Rome, en passant par Vienne, Londres et Venise.



Alain Le Ninèze en profite, par l’intermédiaire de la figure emblématique de l’érudit Guillaume Postel, pour brosser le portrait de la société française et européenne à l’époque de la Renaissance, et, pour développér les idées, la philosophie humaniste avec la découverte des auteurs anciens par les intellectuels de toutes nationnalités ainsi que de la médecine, l’astronomie, etc.



C’est aussi le moyen de découvrir tout le petit monde des libraires imprimeurs, qui - parfois au péril de leur vie, pour les livres « mis à l’index » - accèptèrent d’imprimer les ouvrages des écrivains, des savants, des astrologues, des alchimistes, et, autres illuminés en tout genre.



En ce qui me concerne, j’épprouve toujours un peu de mal à lire des ouvrages (documentaires et / ou romans) traitant de l’humanisme car c’est un domaine pas facile d’accès, mais dans le cas présent, j’avoue avoir littéralement dévoré le roman d’Alain Le Ninèze.



En effet, c’est écrit dans un style simple, limpide, clair, et, l’auteur se met à la portée de ses lecteurs afin d’expliquer des théories,des idées pas évidentes du tout, tout en réussissant à captiver ses lecteurs, et, en donnant envie d’en savoir plus sur la Renaissance et l’humanisme qui a brillé en France et en Europe.



Je ne peux que conseiller ce roman qui devrait plaire au plus grande nombre, même si l’on n’est pas très fort en histoire.
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Moi, Oedipe

Quel bonheur de retourner dans les histoires de la mythologie. Cette collection est superbement mise en page. Un format allongé ou les vides et les beaux tirages des peintures nous apportent tous les mystères, les tragédies et l’aventure des destinées.

Ici on côtoie la vie d’Oedipe, on commence par ce vieil homme aveugle qui contera sa folle aventure. C’est beau, fluide et bien illustré.

La vue de philosophe et d’écrits croisés sont un plus en fin de roman.

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La femme moderne selon Manet

Moderne et convoitée !



Une superbe analyse d’un tableau, les critères de beauté de l’époque nous surprennent et font de cette époque prenant le chemin de la modernité, une nouvelle passerelle à l’art sur le réalisme et bien avant l’engouement controversé des impressionnistes …

Raconté par son modèle une partie de la vie de Manet, ses habitudes, ses amis peintres et littéraires, ses amours, ses envies, son coup de pinceau depuis le déjeuner sur l’herbe et ses choix de sujet mettent en lumière son histoire forte d’un siècle en pleine effervescence…



Un petit livre subtil, une partie critique et journalistique d’une époque, un bon moment d’art.
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Le dernier sommeil selon Caravage

Amoureux des œuvres du Caravage,j'ai été attiré par cet ouvrage qui met en forme de récit la période cruciale de la vie du peintre où il réalisa "La mort de la Vierge"dont la reproduction accompagne le texte. Basé sur des biographies de qualité ,il raconte ces jours par l'intermédiaire de proches de l'artiste (Francesco Buoneri principalement) ,ses échecs et ses succès artistiques mais aussi ses frasques . Si du point de vue documentaire le texte est intéressant ,du point de vue romanesque il m'a paru plat ,trop désireux de fournir des éléments d'information pour donner vie aux personnages et aux dialogues
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