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Citations de Alex Taylor (II) (203)


L'ourse renversa la tête en arrière, renâcla et se leva en chancelant. Alors Reathel la sentit, une odeur musquée de terre et de terreau séché et les relents acres de la tanière, puis la douceur aigre du sang. Des flocons de neige parsemaient sa fourrure, de sorte que la créature paraissait empêtrée dans la lumière des astres, une bête qui aurait troqué son cuir contre les cieux étoilés, et elle laissa échapper un long hurlement en secouant sa tête hirsute, debout sur ses pattes arrière, son souffle brûlant et fumant dans l'intimité des arbres. Rampant à travers les poils enchevêtrés de son ventre, des sentiers erratiques de lait caillé fusaient comme des comètes.
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Emergeant des tourbillons de neige, sa femme s'avança vers lui, ses pieds nus crissant sur le verglas. Ses cheveux, toujours flamboyant d'un lustre auburn de son vivant, se teintaient à présent de reflets rouges d'or et de feu. Elle ne portait qu'une fine combinaison en lin immaculé, brodée de pervenches à l'ourlet, et ses jambes nues étaient empourprées par le froid.
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Le vent convoquait des fantômes.
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Il était venu en quête d'un endroit pour mourir, ou du moins d'un endroit qui pourrait le tuer, et quand son propre désir de vivre pulsa dans sa chair, il se sentit écoeuré par la ferveur du sang et du souffle en lui, un mouvement irrésistible, au-delà des pensées ou des humeurs, suivant un ordre arbitraire et aussi silencieux que les étoiles.
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Seuls les craquements et le murmure des conifères résonnaient dans le silence oppressant, des pins blancs et des tsugas qui poussaient en abondance le long des crêtes, leurs rangées s'étendant sur les versants des montagnes en hautes flèches hantées d'oiseaux qui déchiraient l'éther des toiles d'araignées des nuages. Leurs branches ceintes par les neiges ployaient lourdement vers le sol, et le peu de lumière qui perçait la canopée les enveloppait d'un suaire diaphane.
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Les yeux de la femme palpèrent l'obscurité pour se fixer sur lui. Avait-elle peur de lui? Il ne le pensait pas. Elle dégageait une trop grande dignité, comme s'il ne pouvait rien lui faire qui fût à la mesure de ce qu'elle avait déjà enduré, et il se demanda si ce n'était pas plutôt à lui d'avoir peur.
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Ce que fait un homme n'est toujours une surprise que pour lui-même, parce qu'il est convaincu d'être le premier et le dernier à le faire.
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L’ourse revint après le crépuscule .
Sous un ciel éperdu de couleurs -- des boursouflures cramoisies de froid striées de veines de cobalt --, elle émergea de la forêt dans une neige aveuglante pour venir secouer le mur ouest de la cabane, tamisant un nuage de poussière sur Reathel, allongé sur sa paillasse. Il sentait l’haleine de la bête à présent, la pestilence obscène et bouillonnante du sang.
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Mais quel est le lieu où un homme peut oublier celui qu'il était? Je n'ai jamais rien vu de tel. Les Français et les Britanniques ont traversé la mer en pensant le trouver. Mais qu'ont-ils trouvé? Seulement eux-mêmes et seulement une terre nouvelle. Et une terre fichtrement sanglante, avec ça.
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Elle n’était pas seulement lourde, mais massive, convulsée par les spasmes d’un arrière-train puissant et cartilagineux. Reathel ignorait que de tels ours existaient. Le spectacle le paralysa et il aurait pu rester planté là indéfiniment si le dogue n’avait pas foncé, traversant la clairière en deux bonds pour se fracasser contre la carcasse pesante de l’animal. Ils se heurtèrent dans de grands claquements de mâchoires, puis, d’un seul coup rasant, l’ourse ouvrit le flanc du chien et le sang gicla sur la neige.
L’ourse repoussa le dogue et, malgré ses blessures, celui-ci revint à la charge, sautant dans l’air piquant et brutal pour saisir la chair de l’ourse dans ses mâchoires, cherchant la veine, la veine brûlante où le sang flamboyait comme de l’or en fusion.
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Le dogue franchit le seuil d’un bond, saisit l’Allemand à la gorge et secoua violemment la tête. La jugulaire de l’homme projeta une gerbe de sang sur la poitrine de Reathel quand le chien le traîna sur le plancher, où ses bottes s’agitèrent dans un dernier spasme.
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Du dehors parvenaient les bruits de succion de l’ourse en plein festin, qui s’infiltraient à travers le mortier entre les rondins dégrossis. Reathel aurait cru que la femme se boucherait les oreilles, qu’elle prendrait peur, mais elle avait les yeux rivés sur l’endroit du mur derrière lequel l’ourse devait se trouver, de sorte que son regard semblait percer à travers les rondins et le torchis pour contempler, plus brillante encore dans sa propre image de l’aube, la sauvagerie d’un ours mangeant un cheval.
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— Il n’y a rien à faire, dit-il. La jument est déjà morte et je n’ai ni poudre ni balles.
— Je n’ai jamais vu un ours sortir en hiver comme ça.
Reathel regarda l’haleine de la femme se dessiner dans la pénombre des flammes.
— Quelque chose l’a réveillée, dit-il.
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Mais voici qu’elle était de retour. Elle était revenue avec une ardeur plus impétueuse que le sang, plus terrible que la faim, qui la poussait à mordre sans relâche le cuir rugueux de la jument, et encore maintenant Reathel sentait au fond de sa gorge le goût âcre de la viande d’ourson.
— Vous n’allez quand même pas rester là à rien faire ? demanda la femme depuis sa couche sur le sol.
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À l’orée de la tanière, il n’avait trouvé qu’un ourson décharné, aveugle, qui feulait vainement. Reathel l’avait assommé d’un coup de crosse, le craquement sourd et humide de son crâne résonnant dans le froid hivernal.
Il l’avait dépecé, puis il avait cassé les os pour en sucer la moelle, au goût riche et beurré. Il avait fait rôtir le cuisseau et mis le reste de côté avant de suivre les traces de la mère, mais celles-ci s’étaient estompées presque immédiatement, comme si l’ourse avait été emportée dans les airs et miraculeusement délivrée de la lunette de son fusil Pennsylvania.
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Ce devait être une grosse femelle pour qu’elle l’ait achevée aussi vite et d’un seul élan, pensait Reathel, allongé sur une paillasse miteuse à côté de la veuve de l’Allemand, qui dormait par terre. Une grosse femelle, et sans doute pas aussi vieille qu’il l’avait cru d’abord en apercevant ses traces deux matins plus tôt. Il l’avait pistée jusqu’à sa tanière, franchissant un col enneigé des Crazy Jack Mountains, convaincu qu’elle était mourante et qu’un ultime appel du sang l’avait extirpée du sommeil.
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DANS LE GRIS vaporeux de l’aube, une vieille ourse descendit de la montagne et tua le cheval de l’Allemand mort. La pouliche, qui endurait l’hiver dans une remise délabrée, poussa un seul cri avant d’être réduite au silence par un puissant coup de patte.
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Mon peuple occupe ces terres depuis longtemps. Plus loin encore que remonte la mémoire. Nous n’avons aucun rêve d’être ailleurs qu’ici. Cette terre est à nous depuis si longtemps que nous avons oublié que posséder une chose signifie aussi qu’on peut nous la prendre. (…)
Aujourd’hui, nous la perdons au profit d’un peuple dont la soif de la prendre est plus forte que notre soif de la garder. (…)
Il ne suffit pas de croire, reprit-il, que nous perdons notre terre car les hommes blancs ont des fusils. Nous avons pris leurs fusils et nous tirons mieux qu’eux. Et il ne suffit pas de dire que nous perdons car l’homme blanc est nombreux et que nous sommes peu. Un homme prêt à mourir pour obtenir ce qu’il veut en vaut cent qui préfèrent vivre comme des lâches.
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— Ça vous dérange pas de porter les chaussures d’un mort ? demanda-t-elle.
Reathel lécha son pouce et frotta une tache sur le devant d’une botte.
— M’est avis qu’il n’en aura plus beaucoup usage.
— Elles vous emporteront peut-être sur le même chemin.
— C’est-à-dire ? Que je vais finir par y passer aussi ? ricana Reathel. C’est le lot de tous les hommes nés d’une femme et de l’adversité.
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Beam ne se considérait pas comme un enfant. Il avait dix-neuf ans, de la niaque à revendre et une bonne dose de malveillance tapie en lui, le genre de jeune qui montre les dents devant les vitrines, les miroirs de salle de bains, les enjoliveurs et l’argenterie volée, tout ce qui a le culot de lui faire voir sa tronche.
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