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Critiques de Alfred Jarry (149)
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Ubu roi

Ubu Roi a marqué le théâtre, le vocabulaire, les esprits. Comme de nombreuses œuvres façonnées par l’empreinte d’un précurseur, cette pièce n’a guère rencontré de succès du vivant d’Alfred Jarry : une seule représentation, une adaptation et de nombreuses critiques. Elle a pourtant donné suite à de nombreux avatars ayant pour protagoniste le Père Ubu.

Lire cette œuvre aujourd’hui ne demande guère d’effort. Le récit est – forcément – court et tout simplement jouissif. L’on ressent assez facilement le plaisir prit à son écriture. Est-il nécessaire de rappeler qu’il s’agit d’une œuvre de lycéen ? Un lectorat prude pourra reprocher une généralisation des vulgarités, de références scatologiques et de situations où l’humour (et quelle forme d’humour) fait rage. Le plaisir est d’autant plus grand qu’il ne s’agit pas là d’un récit absurde. Bien au contraire l’histoire se suit avec intérêt.

Les ellipses, les nombreuses scènes d’action, le vocabulaire inventé et les échanges originaux accordent une modernité certaine à une œuvre écrite il y a plus d’un siècle déjà. La référence faite à la Pologne demande un instant de réflexion, mais la critique sous-jacente (fortement inspirée des tyrans antiques et modernes) reste d’actualité. Une bonne surprise qui réservera un fort agréable moment !


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Ubu roi

Je comprends que cette pièce ait choqué au moment de sa sortie ! C'est un véritable OVNI !

Je connaissais comme tout le monde l'adjectif ubuesque, mais je n'avais jamais eu la curiosité de lire la pièce, pensant qu'elle ne me plairait pas, ce qui s'est d'ailleurs confirmé....

Et puis, il est un peu surréaliste et inquiétant en ce moment de lire une pièce écrite il y a plus d'un siècle, mais où il est question d'une guerre, certes imaginaire, entre les polonais et les russes, dont une bataille se déroule en Ukraine.
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Ubu roi

A la trappe le Père Ubu ?

Pour moi, le Père Ubu est lié pour l'éternité à Jean-Christophe Averty. A l'époque, il n'y avait qu'une chaîne ou deux à la télé et les programmes étaient bien sages. Soudain, apparut cet O.V.N.I : Hourra ! Cornes au cul vive le père Ubu ! le père Ubu avec sa spirale ombilicale et son chapeau conique se goinfrait en gros plan. Et puis en haut et en bas de l'écran toute sa clique défilait. Il faisait tournicotter sa moulinette et ses victimes y passaient. C'était formidable, insolite, loufoque, farfelu...génial.

Qu'en est-il du texte ? Cela fait trois ou quatre fois que j'essaye de le trouver drôle... Sans succès. Alors certes, il y a les quelques gros mots truculents bien connus, la satire du pouvoir avide, la comédie de caractère, la parodie des grandes oeuvres classiques...mais bon ça ne me fait pas trop rigoler tout ça. C'est sage. Il manque les pancartes, les masques, les accessoires, tous les accoutrements bizarres, une mise en scène inspirée, créative. Il manque le côté zubverzif !

Bref: à voir pas à lire.
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Ubu roi

Ubu... quel personnage !! Dans beaucoup de magasins de livres usagés, je voyais cette pièce de théatre... chaque fois, je me disais que... sans jamais la prendre avec moi... Mais cette fois-ci... c'est la bonne !! Et je dois dire que je ne regrette aucune ma lecture !!! Voici une pièce qui donne le sourire, même si, il y aura beaucoup de personnages qui passeront à la trappe... c'est qu'il en veut à tout le monde ce cher Ubu... Devenu roi après une croisade sanglante contre son roi, Ubu n'a qu'un seul but : devenir le plus riche possible. Alors, il récupère tous les avoirs de ces Nobles, Financiers et tutti quanti. Il imposera même un impôt pour les gens qui meurent et forcera les jeunes âmes amoureuses à se marier pour récupérer un peu d'argent !!! Mais bon, il finira par soulever les foules qui en ont un peu marre !!! Les dialogues sont savoureux, surtout ceux entre Ubu et sa femme... ce qu'ils peuvent se dire comme vacheries... C'est succulent... Une pièce qui nous fait sourire, absurde, mais divertissante... Une bonne lecture !
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L'Autre Alceste

On peut s'attendre à tout de la part d'un homme capable d'exiger un cure-dent en dernière volonté. Et, en effet, le poète et dramaturge Alfred Jarry, principalement connu pour son cycle "Ubu", nous livre ici un récit ne ressemblant à aucun autre.



Troublant cantique onirique, ce long poème est constitué de cinq récits : ceux du roi Salomon, de sa femme Balkis, reine de Saba, de son fils Roboam, de son vizir et du mystérieux "Doublemain".



De ce que j'en ai compris - pour autant qu'on puisse comprendre un récit semblant tout droit sorti des vapeurs d'une fumerie d'opium - la reine de Saba offre son âme aux anges de la mort, Nakir et Mounkir, afin de permettre à son royal époux d'achever son fameux Temple de cristal devant ancrer son règne dans la Tradition. Un voyage assimilable à une lente descente aux Enfers commence donc pour la souveraine, conduite par Doublemain, un mystérieux passeur aux allures de coléoptère.



Inutile de vouloir aborder rationnellement ce poème dans lequel le récit biblique rencontre une fantasmagorie faite pour inspirer plus tard des auteurs de la trempe d'un Lovecraft. Mieux vaut se laisser sombrer dans l'absurde cher à l'auteur qui, c'est bien connu, consommait plus d'absinthe que d'eau.





Challenge PETITS PLAISIRS 2014 - 2015

Challenge XIXème siècle 2015

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Le Surmâle (BD)

Dans ma quête de la découverte des œuvres de mon compatriote lavallois, Alfred Jarry, j'ai décidé de tenter Le Surmâle, très bien noté sur Livraddict et surtout très court (il ne faut pas abuser des bonnes choses non plus !).

Eh bien, je dois dire que je ne sais pas trop quoi penser de ce texte.



En effet, je l'ai trouvé très déstabilisant, finalement pas tant par le texte que j'imagine très provocateur pour l'époque, mais plutôt par l'écriture très séductrice vis à vis du lecteur. Habituellement, dans les romans, même très engagés, le lecture à plutôt une place de spectateur, mais là, je me suis sentie sans cesse "stimulée" comme si à chaque phrase écrite, Alfred Jarry se retournait vers moi pour voir ma réaction... J'ai eu l'impression qu'il cherchait un peu trop à me plaire et ça m'a un peu dérangée. Un peu comme si, du coup, je me sentais obligée d'être d'accord avec lui.

Bon, cela n'empêche pas que l'auteur à une écriture très agréable et que le roman se lit très facilement et rapidement, que le vocabulaire est plutôt simple et que le texte s'avère assez drôle.



Je trouve le texte du Surmâle assez culotté en soit : il est assez futuriste en soit et plutôt philosophique. Je dis ça car, par certains de ses aspects et notamment ses références aux machines et sa foi en le progrès, j'ai entraperçu pas mal de brides d'idées sur la science et le rapport de l'homme aux machines que j'ai pu étudier en cours de philo' au lycée... Ne connaissant pas du tout l'univers de Jarry, j'ai été assez étonnée, mais la surprise se révèle très bonne.

Je ne m'attendais également pas du tout à retrouver tant de référence à la sexualité dans ce texte. Ça m'a rappelé un truc que dit l'un des personnages de La vie d'Adèle (je suis allée le voir hier soir aussi) comme quoi, les femmes n'ont pas besoin des hommes pour connaitre l'extase, mais qu'un homme ne pourra pas la connaitre sans l'intermédiaire d'une femme. Même si les idées défendues ne sont pas les mêmes dans ce texte, j'ai trouvé qu'il y a pas mal de similitude dans ces réflexions. Je ne pourrais pas dire que je suis d'accord avec toutes les idées que défend Alfred Jarry, mais elles ne sont certainement pas dénuées d'intérêt.

Bref, Le Surmâle est un texte déstabilisant mais sympathique.
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Ubu roi

J'en vois tant, autour de moi, des choses "ubuesques", que je me suis dit qu'il était quand même temps que je lise le grand classique qui est à l'origine de cet adjectif.

D'autant que c'est court.

J'ai quasiment tout lu, y compris l'introduction qui explique le contexte, les notes de bas de page qui précisent le sens parfois sibyllin de certains mots et répliques, mais rien ne m'a permis d'y trouver un quelconque intérêt.

Si j'ai bien compris, il s'agit en fait d'une farce grossière écrit par quelques ados de 15 ans un peu facétieux et doués pour les lettres.

Alors, pour des ados de 15 ans, c'est sans doute une performance, je n'en disconviens point, mais en valeur absolue, ben ça va pas péter bien haut, et je peux me permettre d'user de termes un peu vulgaires puisque "l’œuvre" en use et en abuse elle-même à foison.

C'est absurde, OK. D'ailleurs, à mettre en scène, ça ne doit pas être une sinécure ! L'humour absurde, j'y suis habituellement sensible, mais là, pas une réplique n'a réussi à me dérider les zygomatiques.

Qu'est-ce qui est censé être drôle ? de dire "merdre" toutes les deux lignes, à chaque fois qu'il a envie de dire merde ? Pliant, en effet.

Je veux bien croire que les gens du XIXe siècle ne riaient pas des mêmes choses que nous, mais bon sang de bonsoir, lisez du Alphonse Allais ou même du Edmond Rostand, c'est quand même autre chose que ce foutoir !
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Ubu roi

Du spectacle de marionnettes populaires ; Ubu étant un pantin, un autre Guignol. Qui tire les ficelles ? La mère Ubu ? Elle porte la culotte en tout cas, c'est sûr. J'ai vu une représentation de la pièce dernièrement : elle portait une culotte et lui, un string. J'étais au premier rang et les fesses se trouvaient pile, face à moi. C'était une bonne représentation. Dès la première scène, ils se vautraient l'un sur l'autre, ils jouaient, par terre. Ubu, satisfait de lui-même, se laisse séduire par les propos de la mère Ubu. Elle a ses techniques la mère Ubu ! Elle se fait caressante : "Faisons la gentille" qu'elle dit ! Tout commence dans le lit conjugal (ou à même le sol, parce que l'amour se fait bestial), juste après le coït, peut-être ? Ubu se laisse séduire. Il se gonfle d'envie, le père Ubu, c'est l'air du temps, et il gonfle, il gonfle, encore et encore, et il est gonflé à bloc, et il se dégonfle. C'est un drôle de roi ce pantin.
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Ubu sur la butte

Ubu sur la butte trompe. On croit découvrir un nouveau volet des aventures de celui qui fut roi, cocu et esclave, se demandant quel autre tourment aura été jugé bon de lui infliger, et on se retrouve finalement avec une version accélérée d'Ubu Roi. La notice coupe court à nos rêveries sadiques : "Cette "réduction en deux actes d'Ubu Roi" est bien une nouvelle version, pour Guignol, des cinq actes de 1896 puisque Jarry réemploie ici, avec de notables variantes, les scènes suivantes du texte complet d'Ubu Roi : I, VI; II, V; III, II et VIII, IV, III, IV, V et VI; V, I et IV".





Certes, quelques changements notables sont à relever puisque la condensation exige des raccourcis, l'élimination de nombreux personnages et donc des dialogues coupés ou résumés. Voilà qui est flatteur pour les acteurs: messieurs, une marionnette n'arrivera jamais à votre hauteur, ce pourquoi Alfred Jarry a cru bon de devoir couper en long, en large et en travers. Voilà qui est déstabilisant pour le monarque : un roi passant en accéléré ne serait-il donc rien d'autre qu'un Ubu sur la butte ? Et la butte, à cette vitesse-là, aura tôt fait de s'effondrer.





En complément à Ubu Roi, cette pièce n'est toutefois pas négligeable. L'accélération même du rythme donne lieu à des scènes grotesques qui finissent de déstructurer le fil ténu de la logique qui sous-tendait la pièce dans sa version longue. On s'emporte, on se bat, on tue et on meurt comme s'il le fallait à tout prix, pour respecter les nécessités d'une intrigue épique. Les marionnettes représentent le degré zéro de la liberté et tuent en Ubu les derniers relents d'une conscience vive dont nous avions déjà commencé à douter dans les pièces précédentes.





"LES MEMES. Entre l'OURS.

LASCY: Oh! Monsieur Ubu!

PERE UBU: Oh! Tiens, regarde donc le petit toutou. Il est gentil, ma foi.

LASCY: Prenez garde! Ah! Quel énorme ours.

PERE UBU: Un ours! Ah! L'atroce bête. Oh! Pauvre homme, me voilà mangé. Que Dieu me protège."





Ubu en marionnette serait une caricature parfaite de nos terreurs et de nos erreurs humaines -s'il ne passait pas aussi fugacement dans le paysage.
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Ubu roi



Avant de la lire je ne connaissais la pièce que de nom. Ce titre de Père Ubu, évoquait pour moi plutôt une farce familiale qu’une satire sur le pouvoir. Sans me faire franchement rire cette pièce m’a fait parfois sourire. Comme lorsque le père Ubu proposte la mère Ubu pour incarner le prêtre dans une prestation de serment. Ou l’expression Combat des voraces contre les coriaces.



Tenté par son épouse, l’horrible Mère Ubu, le Père Ubu veut devenir “calife à la place du calife”. Il est redevable au Roi mais qu’importe. Il est doué de tous les défauts ou presque, avide, peureux mais vantard, goinfre, médiocre....Ainsi lorsque se voulant tyran implacable seulement soucieux de s’enrichir, il se résout à offrir “le don de joyeux avènement” sous forme d'or et de viandes, ce qui lui permettra ensuite de recouvrer les impôts et cela d’autant plus volontiers que des cent cinquante bœufs et moutons, il aura sa part.



Lorsque l'on sait qu'elle fut écrite par un adolescent, on ne peut qu'être épaté. Il semble qu’elle ait eu une influence sur le théâtre, je ne saurai dire. Mais je suis contente de l’avoir lue.



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Ubu cocu

Pourquoi rendre Ubu Cocu ? Après l'avoir rendu Roi, terrassant sans vergogne la famille royale de Pologne, ses nobles et ses moins nobles, sa comptabilité et sa phynance, Ubu, imbu de lui-même, s'aveuglait de sa propre gloire. Un roi rendu cocu, ce n'est pas seulement une histoire d'adultère qui finit mal; c'est aussi l'égocentrisme d'un homme-gidouille incapable de voir ce qui se passe au-delà de sa sphère, plus noblement assimilée au "tonneau" qui radie du "corps hyperphysique". Ubu, déjà cocu, continue de se complaire dans la duplicité de sa personne : "Nous, son isomorphe, sommes beau", cocufiant lui-aussi la mère Ubu, avec un être toutefois trop méprisable pour être relevé: lui-même. L'amour-propre exacerbé peut-il être un crime adultère ?





Ubu Cocu représente le pouvoir borné d'oeillères : incapable de remarquer les évidences, sa colère ne commence à se déchaîner qu'à l'instant où, passant, de rumeurs en chuchoteries malavisées, il se met à lorgner sur le drôle d'enfant dont a accouché la Mère Ubu. Pourrait-il donc être le père d'un Archéoptéryx ? Cette étrange filiation apparaît surtout dans les premières versions de la pièce, lorsque celle-ci s'appelait encore Les tribulations de Priou et L'archéoptéryx. La version achevée d'Ubu Cocu se veut plus concise. L'animal préhistorique devient secondaire et les personnages des frères religieux -le frère Primor en tête-, se volatisent pour notre plus grand regret. La conscience d'Ubu, ce pauvre personnage "couvert de toiles d'araignées", prend en revanche une place plus importante dans les adultères de la famille royale.





Dans le genre impulsif et désordonné, le père Ubu se surpasse. Dans une caisse, dans une chambre ou en Egypte, les lieux se superposent dans le désordre le plus complet. Les personnages secondaires, peu différenciés, se confondent et brouillent l'adultère de la mère Ubu. On se souvient d'Achras et de son traité sur les moeurs de polyèdres, ou encore de Scytotomille et de ses écrase-merdres, mais au-delà de ces apparitions burlesques, leur contribution au cocufiage d'Ubu reste parfois floue. Ubu Cocu se révèle onirique, plus évanescent qu'Ubu Roi mais tout aussi grotesque et sophistiqué à la fois. On se prend à rêver, à la lecture de didascalies surréalistes ("Sans mot dire, il prend siège. Tout s'effondre. Il ressort en vertu du principe d'Archimède. Alors, très simple et digne, en costume devenu plus sombre..."), dont la simplicité n'a d'égale la force de suggestion ("On entend sonner comme pour annoncer un train, puis le Crocodile, soufflant, traverse la scène").





On écoute chanter les trois Palotins : "Ce tonneau qui s'avance, neau qui s'avance, neau qui s'avance, c'est le Père Ubu. Et sa gidouille immense, gidouille immense, gidouille imense, est telle qu'un..." et on se rassure : la gidouille du père Ubu aura peu à pâtir d'une paternité préhistorique.
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Ubu roi

Merdre !! de par ma chandelle verte, voilà commence l'année 2024 pour moi sur le plan des lectures : Grand fan de théâtre de l'absurde depuis l'adolescence et l'étude de Beckett, j'avais envie de m'y replonger, et de lire cette pièce par laquelle tout a commencé... On peut dire que je me suis bien amusé, même si j'ai trouvé que ça s'essoufflait au fur et à mesure, après un démarrage tonitruant et un déroulé à la fois imprévisible, prometteur (tout semble pouvoir arriver) et très (trop ?) rapide. Cette pièce ressemble à un crossover entre Rabelais et Ionesco (soixante ans avant), une réécriture délirante et absurde de Macbeth (ce que Ionesco avait aussi tenté avec Macbett !) placée sous le signe du corps, du ventre et du caprice enfantin, et aussi à un écrit de jeunesse d'Alfred Jarry, notoirement inspiré par un de ses enseignants folkloriques, le professeur Hébert.



On démarre donc la pièce par le fameux "Merdre !" éructé par le Père Ubu, personnage corporel par excellence, lâche, enfantin, que la Mère Ubu va convaincre d'assassiner le Roi Venceslas pour prendre sa place, d'où l'aspect réécriture de Macbeth sauce absurde, avec même certaines répliques détournées à l'occasion. Au fil de ma lecture de la pièce, je me suis dit que le Père Ubu aurait été un rôle parfait pour Louis de Funès : le personnage n'est même pas réellement intéressé par le pouvoir, l'idée germe en lui par sa femme, mais il se laisse constamment aller à ses pulsions puériles qui changent au gré du vent, ayant surtout à coeur en réalité sa propre survie, son absence de douleur physique, sa pleutrerie... Pensée donc à notre génie comique du cinéma français, qui aurait excellé s'il avait eu l'occasion de le jouer sur scène. C'était un personnage taillé pour lui, qu'il aurait sans doute même transcendé, comme il en avait le talent.



Le début, les 2-3 premiers actes, sont les meilleurs passages. le couple Ubu fomente l'assassinat de Venceslas, invite à un dîner rabelaisien des co-conspirateurs dont le Capitaine Bordure (impossible de ne pas penser à Tintin...). On se régale des ruptures de ton et de langage constantes de Jarry : Tantôt les personnages parlent avec la plus grande solennité médiévale, tantôt ils sombrent dans le langage familier et le corporel. Les conventions théâtrales sont aussi constamment bousculées, avec les répliques d'exposition en permanence ridicules... On peine à ancrer précisément la pièce dans une époque et un lieu, même si l'imaginaire médiéval et la Pologne sont évoqués, puisqu'Ubu fait référence à moult objets, créatures ou entités qui sont des délires de Jarry en référence à ce fameux professeur Hébert ("le cheval à phynances", "la machine à décerveler", "le bâton à physique") et qui mêlent donc les temporalités. le réalisme géographique sera lui aussi mis à mal plus tard dans la pièce. Vient ensuite le fameux assassinat de Venceslas, qui est d'une drôlerie absolue, tant tout se passe très vite, et tant toute grandeur épique est constamment désamorcée, par le comportement peureux de personnages censés être valeureux et leur mort extrêmement rapide. Ubu qui s'obstine à marcher sur les pieds du roi en lui déclarant "Merdre !" résume bien l'éthos de la pièce, du personnage, et je dois dire que c'est un des gags les plus mémorables... Seul survit de la famille royale Bougrelas, dont on devine qu'il sera le Macduff de la pièce.



Arrive donc l'acte III avec le Père Ubu au pouvoir... Et la chute est encore plus rapide que ce que l'on pouvait imaginer, l'apaisement sous son règne ne dure peut-être qu'une poignée de minutes. Assoiffé d'argent tel un oncle Picsou hystérique, il taxe les paysans, fait exécuter les notables et les financiers qui auraient pu le soutenir, incarner des voix de la raison... Et provoque ainsi sa propre chute à peine installé sur le trône. S'ensuivra une guerre déclenchée également par sa trahison de son fidèle Capitaine Bordure, et on assistera à l'écroulement pathétique (dans le sens le moins noble) d'un règne coup d'état à peine concrétisé ! La pièce s'essouffle, je trouve, dans ses derniers actes. Il est certes drôle d'assister à la couardise totale d'Ubu sur le champ de bataille, creusant une fois de plus sa défaite, abandonnant volontiers un pouvoir qui n'était au départ qu'un caprice insufflé par la mère Ubu... Mais la pièce se finit en chanson chorale rabelaisienne sur les flots tempêtueux, et l'on ne peut s'empêcher d'être un peu déçu tant la folie totale du début semble être retombée progressivement. Mais au final, ce fut une découverte plaisante et fondamentale dans la génèse du théâtre de l'absurde. Moi qui adore Ionesco et qui n'ai plus lu Rabelais depuis très longtemps mais apprécie toujours ses thématiques, le mélange des deux, avec en plus de la parodie de Shakespeare et une sorte de délire adolescent de l'auteur, livre un mélange baroque fort appréciable, même si Jarry pouvait aller encore plus loin dans l'humour gras et le lâcher-prise.



Que vais-je lire ensuite ? J'hésite entre moult directions...





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Ubu roi

« Je n'ai plus peur, mais j'ai encore la fuite. »

Il me fallait de l'absurde aujourd'hui et une multitude de gros mots pour me défouler. Merdre !!
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L'amour en visites

Je poursuis ma découverte des œuvres d'Alfred Jarry par L'amour en visites, un court roman d'une centaine de pages montrant les tentatives de séduction (plus ou moins réussies) de Lucien.

J'ai trouvé ce texte assez déroutant et du coup, j'ai un peu peur de vous en parlez, sachant très bien que je n'ai surement pas vu toutes les subtilités de ce texte. D'un autre côté je l'ai lu par curiosité et plaisir et non pas pour l'étudier ! D'autant plus que je n'ai trouvé que très peu d'informations sur ce texte sur internet pouvant me guider dans la compréhension de cette lecture plutôt déroutante...



Il regroupe 11 petites histoires courtes, très différentes les unes des autres dans lesquelles on voit bien Lucien évoluer. J'ai été plutôt étonnée d'apprendre que L'amour en visites avait été édité pour la première fois chez un éditeur érotique : les envies de Lucien ne sont certainement pas les plus louables, mais il n'empêche que le texte reste des plus chastes. Rien ne se passe sous nos yeux, certaines choses sont suggérées mais elles se passent toutes dans un futur auquel le lecteur n'a pas accès !

J'ai beaucoup apprécié le principe d'une femme différente pour chaque situation. Toutes sont le prétexte d'une histoire différente et aucune n'aurait pu être possible avec une autre femme. D'ailleurs j'ai cru voir certaines références à d'autres textes de l'auteur : la saga Ubu en tête (avec l'étrange présence de la mère Ubu) mais aussi d'autres textes que je n'ai pas encore découverts...



J'ai encore une fois trouvé l'écriture d'Alfred Jarry très agréable, très pointue et j'ai apprécié le mélange des genres qu'il y fait (récit et théâtre). Par contre, plus je le découvre et plus il me fait l'effet d'un sacré coquin ! Assez étrangement, je ne saurais dire si j'ai vraiment aimé L'amour en visites : les textes sont agréables, mais l'histoire ne m'a pas transportée ni ses idées qu'elle défend...

Une lecture intéressante.
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Ubu roi

Je me suis toujours demandée et je me le demande toujours pourquoi ma prof de français en classe de première nous a fait lire ce livre. D'accord, il est rapide et facile à lire, mais il est aussi très ennuyant. Vous l'aurez compris, c'est un autre livre que je n'ai pas aimé.

Souvent au lycée, il nous oblige à lire des livres assez ennuyants et absurdes !!! WHYYY ? Il y a de nombreux livres intéressant, attirants et dont on peut analyser sans s'ennuyer ou qui nous donnent envie de poursuivre sa lecture, donc bien l'étudier.

Le seul livre (Les hommes et les souris -John Steinbeck) que la prof nous a CONSEILLE de lire ( à la fin de l'année, pour notre culture générale). Ce fut le meilleur des livres qu'elle nous a dit de lire, et il n'était pas présent sur la liste de BAC. On dirait que cela est fait exprès pour dégoutter les lycéens de la lecture.
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L'Autre Alceste

Je ne sais pas pourquoi j'ai voulu lire ce texte. Je suis plutôt quelqu'un de rationnel : je n'avais donc aucune chance de m'y retrouver dans les cinq témoignages que propose Alfred Jarry pour faire avancer son récit mythologico-fantasmagorique. Même en jouant le jeu et en me laissant porter par la prose onirique, je ne suis allé nulle part, même pas en Absurdie.

Écris à la fin du 19ème siècle (1896), le texte a certainement bénéficié de l'action de la "fée verte" sur les neurones pataphysiciens du poète.

L'absinthe, un des piliers de la vie de l'auteur _avec la bicyclette_, fut interdite à la vente dans les années qui suivirent sa mort. Elle est certes de retour chez les cavistes, depuis le debut des années 2000, mais dans une version affadie et rendue inoffensive.

Aurait-on à jamais perdu la clé de lecture de L'Autre Alceste ?
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Ubu roi

Je ne me sens pas vraiment le coeur à faire une nouvelle critique sur l'oeuvre d'Alfred Jarry; compte tenu du fait qu'il y en a déjà des dizaines, et qui disent beaucoup de chose.

J'ai personnellement aimé le théâtre de Jarry, parc qu'on s'y amuse, et que c'est sérieusement "culotté", pour son époque, voire encore aujourd'hui. Vérifiez donc le nombre de metteurs en scène qui s'attaquent à ce travail de potache, ou qui le produisent pour la télévision (Il y en a eu, mais ça reste pour le moins limité)



Pour compléter votre info si vous le souhaitez, je vous conseille de consulter parmi les plus récentes, les critiques de "Colimasson", d'abord parce qu'elle a (re)lu tout Ubu, et qu'en plus elle a super bossé ses textes.

Je ne vais pas lutter.
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Ubu : Ubu roi - Ubu cocu - Ubu enchaîné - Ubu..

Outre les quatre pièces du cycle Ubu, l'édition proposée par Folio inclut des documents intéressants qui métamorphosent la vision du lien unissant l'auteur et sa création. De manière synthétique, on associe souvent Alfred Jarry au cycle Ubu. En revanche, on évoque moins la longue genèse des pièces -en particulier d'Ubu Roi-, longtemps appelée "Les Polonais", et rédigée par une génération de lycéens avant qu'Alfred Jarry ne mette le grapin dessus pour la figer dans sa forme définitive et lui associer son nom. La préface de Noël Arnaud redonne à chacun sa véritable place dans le processus de création :





"Pourquoi Jarry s'est-il approprié Ubu qui n'était pas de lui, qui n'était pas lui ? Observer [...] que Jarry y a instillé une dose de sexualité absente des élucubrations originelles, qu'il a haussé le texte du scatologique à l'érotique, trouver preuve de cet infléchissement dans la transformation de certains mots (ainsi des Salopins aux Palotins), c'est bien [...] ; il demeure que les situations ubiques et l'attirail de tortures du Père Ubu existaient, tels quels, dans les premiers écrits de Rennes; l'action personnelle de Jarry sur quelques mots du texte initial n'a fait que rendre plus évidentes des pulsions enfantines et puis adolescentes décelables avant même ce travail de réécriture."





Cela n'enlève aucun mérite à Alfred Jarry. Sans lui, Ubu Roi n'aurait sans doute pas traversé le 20e siècle. Sans lui, l'absurde et le surréalisme n'auraient sans doute pas le même visage -et c'est sans parler des influences moins directes qu'a pu avoir son théâtre. Dans les autres documents présents dans cette édition, on découvre un essai théorique de Jarry sur "L'inutilité du théâtre au théâtre". Si ce texte ouvre la porte au symbolisme théâtral et permet à Lugné-Poe, fondateur du théâtre de l'Oeuvre, de s'enthousiasmer -ce que nous découvrirons dans un échange de lettres inclus dans le dossier de l'édition-, on finit par se demander s'il ne sert pas aussi de justification. En effet, en parcourant les autres documents annexes -le programme d'Ubu Roi, "La bataille d'Ubu Roi" de Georges Rémond, les lettres d'Alfred Jarry à Henry Bauer ou les points de vue de Charles et Henri Morin à propos de l'oeuvre de Jarry-, l'image d'un homme dépassé par sa propre création se précise. Il semblerait qu'Ubu Roi ait moins plu à Jarry pour son contenu intrinsèque que pour les remous que sa représentation devait susciter -et suscita longtemps. Georges Rémond écrit:





"La première d'Ubu roi était proche [...]. "Le scandale, disait Jarry, devait dépasser celui de Phèdre ou d'Hernani. Il fallait que la pièce ne put aller jusqu'au bout et que le théâtre éclatât."

Nous devions donc provoquer le tumulte en poussant des cris de fureur, si l'on applaudissait, ce qui, après tout, n'était pas exclu; des hurlements d'admiration et d'extase si l'on sifflait. Nous devions également, si possible, nous colleter avec nos voisins et faire pleuvoir des projectiles sur les fauteuils d'orchestre."





La biographie d'Alfred Jarry confirme ces soupçons : la plupart des évènements semblent vouloir uniquement remouer la foule et dévier le théâtre de ses voies ordinaires. Qu'aurais-je pensé d'Alfred Jarry s'il avait été mon contemporain ? Si Ubu Roi avait été représenté pour la première fois et avec scandale hier, n'aurais-je pas été d'emblée fatiguée par l'énième tentative d'éclat d'un homme excité par l'extravagant ? Les Inrockuptibles en auraient-ils été friands ? Henri Morin concluait : "Il était libertaire dilettante et surtout parce que c'était la mode". La mode est passée et nous à aider à oublier les fastes d'Alfred Jarry. Et puis alors, de toute façon, son oeuvre ne se résume pas à Ubu. Mais tout de même...





"L'oeuvre non ubique de Jarry est peut-être l'effort désespéré d'égaler autrement la perfection inégalable d'Ubu."





Il est bon d'approcher la bibliographie de Jarry en connaissance de cause. Les annexes de diverses sources regroupées dans cette édition permettront de démêler l'officiel de l'officieux et donneront plus de poids à cette petite Bible lycéenne que fut Ubu.




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Ubu roi

Voilà qui est tout simple et fort pensé et désopilant

Lire de tels visionnages ménage de bons moments pour s'y absorber avec délectation

On apprend, réapprend à considérer sous des angles de vues autres

Le sérieux traité avec légèreté tout en fluidité

Relève bien d'un génie inventif précoce et mature
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Ubu roi

Voilà une pièce de théâtre très drôle et rapide à lire! Les actions s'enchaînent, plus loufoques les unes que les autres, et en même temps très violentes ("Pouah! En voilà un qui a le crâne fendu"). Le Père Ubu est un imbécile, un homme vulgaire incapable de s'exprimer sans jurer (à grand renfort de "Merdre!" et autres expressions roturières) et qui ne pense qu'à se goinfrer. C'est clairement la Mère Ubu qui tire les ficelles de "ce gros pantin".



Après le coup d'Etat, le Père Ubu fait montre d'une "basse férocité", n'ayant aucun scrupule à se débarrasser de ceux qui n'adhèrent pas à son point de vue ("A la trappe!" les Nobles, les Magistrats et autres Financiers). Le personnage, qui se comporte en véritable tyran, commence à devenir inquiétant ("Tu massacres tout le monde"). Cependant ses réformes sont si absurdes que cela ne dure pas. Sur le champ de bataille, il se montre si froussard et faignant qu'on se demande même comment il a pu faire carrière!



Heureusement tout finit en chanson et l'on aura passé un sympathique moment avec ce mélange parodique de genres dramatiques (tragique, comique, épique et historique) qui dépoussière les lectures scolaires.
Lien : https://www.takalirsa.fr/ubu..
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